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Voies de synthèse des précurseurs cyclocarbonates dans la littérature

CHAPITRE II: SYNTHESE DE PRECURSEURS DE RESINES BIOSOURCEES

B. S YNTHESE D ’ UN PRECURSEUR POLYURETHANE SANS ISOCYANATE

B.2. Voies de synthèse des précurseurs cyclocarbonates dans la littérature

B.2.1. Réaction du système CO2/dérivés halogénés

Plusieurs conditions réactionnelles sont décrites dans la littérature pour la réaction de carbonatation des époxydes. Ces réactions ont pour point commun l’utilisation d’un halogénure comme catalyseur ou agent de transfert tel le bromure de lithium[7,252] ou le bromure/iodure de tétrabutylammonium (TBAB et TBAI)[178,253]. Le mécanisme de cette réaction passe par la délocalisation de la charge négative de l’halogénure sur l’oxygène du cycle époxy. L’oxygène chargé négativement va pouvoir attaquer le carbone du CO2 par O-alkylation. Ensuite la cyclisation provoque le départ de l’halogène permettant la régénération du catalyseur (Figure 42).

Figure 42 : Cyclocarbonatation de l'époxy par le système halogène/CO2.

L’efficacité de l’action de l’halogénure est dépendante de sa disponibilité, il est nécessaire que l’anion soit éloigné de son contre-ion afin de le rendre plus réactif[254]. En effet, l’augmentation de la réactivité des catalyseurs provient du caractère nucléophile plus fort de l'halogénure car l'interaction électrostatique de l'halogénure et du centre de l'ammonium diminuerait avec l’augmentation du volume du cation[255]. Deux stratégies sont adoptées, la première consiste à insérer dans le milieu un composé, comme la triphénylphosphine (Figure 43), qui va chélater le cation (iodure de sodium, NaI ; Bromure de lithium, LiBr)[181,256]. La seconde se base sur l’encombrement stérique du cation, éloignant l’halogénure de celui-ci et le rendant plus réactif.

En 2014, Büttner et coll. effectuent un travail sur les catalyseurs à base d’ammonium quaternaires. Différents cations sont créés en les couplant avec les trois contre-ions les plus couramment utilisés que sont l’iode, le brome et le chlore. Il en résulte que l’activité catalytique est favorisée dans le cas de l’utilisation de l’ion iodure, puis bromure et chlorure. Le rendement est amélioré avec l’augmentation de la longueur des chaînes liées à l’ammonium. Le TBHAI (Figure 43) s’avère être le catalyseur de transfert de phase le plus actif[255].

Figure 43 : Structure des différents catalyseurs utilisés dans la littérature.

Cependant, la plupart de ces réactions nécessitent l’utilisation d’un solvant organique potentiellement toxique. Par ailleurs, l’impact des produits chimiques sur l’environnement et sur la santé est un sujet de plus en plus controversé. La plupart des solvants traditionnels sont des composés organiques volatiles (COV) qui peuvent se disperser facilement dans l’environnement et sont très souvent inflammables. De ce fait, la conception et le développement de solvants verts comme les solvants eutectiques profonds (DES) connaît un développement considérable.

B.2.2. Réaction du couple CO2/époxys catalysée par un DES

Les DESs sont de nouveaux solvants publiés depuis le début des années 2000 qui possèdent des propriétés physico-chimiques remarquables, semblables aux liquides ioniques, mais moins coûteux et toxiques[257]. Ces composés ont déjà été étudiés dans le cadre de la fixation du CO2 sur les carbonates en tant que catalyseur et la synthèse montre de bons résultats[258]. Les DESs sont obtenus par un simple mélange thermique des composés dans de bonnes proportions qui va induire une diminution du point de fusion du mélange par rapport à celui des composés initiaux. Contrairement aux liquides ioniques qui nécessitent plusieurs étapes de synthèse et de purification. Les DESs de première génération sont obtenus par la complexation d’un sel d’halogénure d’ammonium quaternaire qui agit comme un accepteur de liaison hydrogène (HBA, hydrogen bond acceptor) avec un donneur de liaison hydrogène (HBD, hydrogen bond donor)[259]. Il existe quatre types de solvants eutectiques profonds (Tableau 8) qui peuvent être utilisés dans de nombreuses applications en tant que solvants, réactifs ou catalyseurs[260,261].

Tableau 8 : Types de DES. Inspiré de Abbott et coll. 2007[261] et 2014[260].

Type Formule générale

Type I Sel d'ammonium quaternaire + Chlorure de métal

Type II Sel d'ammonium quaternaire + Chlorure de métal hydraté Type III Sel d'ammonium quaternaire + Donneur de liaison d'hydrogène Type IV Chlorure de métal hydraté + Donneur de liaison d'hydrogène

Les DESs de première génération contiennent la gamme des chlorométalliques (Type I) et ainsi que l’utilisation de métaux hydratés (Type II). Récemment, des DESs sans ammonium quaternaire ont pu être formés à partir de sels métalliques hydratés et d’un simple alcool ou amide[260]. Contrairement aux types I, II et IV, les DESs de type III ne comprennent pas de métaux. Les sels d’ammonium

quaternaire sont liés à des donneurs de liaisons hydrogènes comme les amines ou les acides carboxyliques. Ces DESs sont les plus courants car leur constitution, le plus souvent biosourcée, leur permet d’être liquides à température ambiante et ainsi d’être utilisés comme solvant[257]. Dans ce contexte, l’équipe de Zhu a effectué, en 2007, le couplage de CO2 et d’époxy catalysé par un DES de chlorure de choline (ou cholinium) avec de l’urée en proportion molaire 1:2 (Figure 44 a).

Figure 44 : a) DES de chlorure de choline/urée (1:2) avec interaction des liaisons hydrogènes, b) Mécanisme de réaction de cycloaddition d'époxydes avec du CO2 catalysé par le ClCH/U proposé par Zhu et coll.[258].

Le DES chlorure de choline/urée (ClCH/U) est un DES de type III, il est donc donneur de liaisons hydrogène[257]. Ils ont obtenu des taux de conversion de 99 % en 10 h de réaction à 110 °C avec du CO2 sous pression. La réaction effectuée dans le DES (Figure 44 b) a permis une catalyse des réactions entre époxydes et CO2 pour former des cyclocarbonates avec une conversion et une sélectivité élevée ainsi qu’une séparation simple du catalyseur des cyclocarbonates avec la possibilité de réutiliser le DES.

B.2.3. Cyclocarbonatation de l’isosorbide époxy

Une des voies les plus étudiées pour produire des NiPUs est celle faisant réagir un carbonate cyclique à cinq branches avec une amine[7,177]. La création de ces cyclocarbonates à cinq branches peut être effectuée par différentes voies et notamment celle initiée par la carbonatation catalytique des époxy par inclusion de CO2. Si le couplage du CO2 et des époxys n’est qu’une des voies employées pour former des cyclocarbonates, les conditions de réaction peuvent être variées. En 2013, Besse et son équipe ont effectué une cyclocarbonatation des oligomères de glycidyle éther d’isosorbide avec un catalyseur LiBr solubilisé dans du DMF dans lequel est dissous du CO2 et maintenu sous pression de 6 bars, 80 °C pendant 12 h[165]. Ils ont obtenu une conversion totale des groupements oxiranes en carbonates cycliques. Les matériaux ainsi formés comprenaient une température de transition vitreuse de 8 à 59 °C et une stabilité thermique au-delà de 234 °C, démontrant ainsi la possibilité de fabriquer de manière assez simple des polyhydroxyuréthanes (PHU).

Actuellement, cette étude est la seule consacrée à la transformation des DGEI en carbonates cyclique d’isosorbide (CCI). Cependant, elle nécessite une forte pression et par conséquent cela demande un équipement adapté tant en laboratoire que pour une application industrielle. Ainsi, le but de cette étude est de réaliser la cyclocarbonatation des cycles époxy avec une conversion complète

dans des conditions plus douces en se basant sur les différentes méthodes connues qui n’ont pas encore été appliquées au DGEI. Pour cela, différentes études sont menées. En premier lieu, des tests ont été menés à pression proche de la pression atmosphérique en utilisant les protocoles existants. Ensuite, certains paramètres ont été adaptés (choix du solvant, du catalyseur de transfert de phase ou la température de synthèse…). Enfin, l’utilisation des ultrasons dans la synthèse de précurseurs cyclocarbonates biosourcés, effectuée en collaboration avec l’Université Grenoble-Alpes, est également présentée.