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CHAPITRE I: ÉLEMENTS BIBLIOGRAPHIQUES

C. L E LIN : UNE PLANTE LOCALE A HAUTE VALEUR AJOUTEE

C.4. Structure fractale de la tige à la microfibrille

Parmi les fibres naturelles, le lin est considéré comme l'une des plus résistantes[103]. Par rapport aux autres fibres naturelles, les fibres de lin sont relativement solides. Ainsi Bos et coll. en 2002 ont déterminé que la résistance en traction des fibres élémentaires doit être de l'ordre de 1500 MPa dans le cas des fibres techniques[104]. Ceci est dû en grande partie à sa constitution biochimique et à la structure de la fibre unitaire. La tige de lin contient plusieurs dizaines de faisceaux de fibres libériennes qui renferment plusieurs dizaines de fibres unitaires constituées de lamelles concentriques contenant des microfibres de cellulose liées par des pectines et une interface d’hémicelluloses (Figure 15).

Figure 15: Représentation schématique de la tige à la microfibrille[105,106].

C.4.1. La tige

La tige de lin mesure de 80 cm à 1 m de long et 2 mm de diamètre[106–108]. Elle est constituée d’une structure concentrique selon la coupe transversale (Figure 16). De l’extérieur vers le centre, la tige est composée de l’épiderme, du parenchyme cortical (épiderme + parenchyme = écorce) dans lequel sont contenues les faisceaux de fibres. La tige comprend de 10 à 50 faisceaux de fibres selon la variété et le développement de la plante[63,109]. Plus à l’interieur, nous pouvons distinguer phloème secondaire (conduction sève) et le xylème secondaire appelé bois et chez le lin correspond aux anas. Le bois permet la conduction de la sève brute[110]. Le phloème et le xylème constituent les anas ou bois du lin. Enfin, la tige de lin comporte une lacune en son centre.

Figure 16 : Image et représentation de la coupe transversale d'une tige de lin. Adapté de Baley et coll. 2018.

Chaque partie de la tige joue un rôle particulier. Notamment, les faisceaux de fibres distribués uniformément en périphérie de la tige participent au soutient la plante et ainsi permettent de réduire les micro-flambements au niveau de ces zones de compression[107]. De ce fait, les faisceaux de fibres jouent principalement un rôle de support mécanique[111].

C.4.2. Le faisceau de fibres

Les faisceaux de fibres sont de forme ovoïde (Figure 17 a et b), mesurent de 0,1 à 0,5 mm de diamètre[105] et sont constitués de 10 à 40 fibres unitaires[63]. Les fibres se chevauchent sur une longueur de l’ordre de plusieurs dizaines de centimètres (Figure 17 a). Elles sont liées entre elles par une interphase appelée lamelle mitoyenne (ML) de 200 à 800 nm d’épaisseur[112,113] (Figure 17 c). Ce liant est constitué de polysaccharides amorphes. Ces derniers sont principalement des pectines[107] et de la lignine[61]. De plus, la cohésion des fibres entre elles et du faisceau aux tissus voisins est effectuée par des ponts de pectate de calcium dans les tissus pectiques[114,115]. Les fibres n'ont pas de section uniforme dans le sens longitudinal du faisceau et ne sont pas parallèles. En effet, elles se chevauchent pour remplir au mieux le faisceau et ainsi améliorer sa cohésion (Figure 17 a).

Figure 17 : a) Schéma de la disposition longitudinale d’un faisceau de fibres[116]. b) Image et schéma de la coupe transversale d’un faisceau de fibre de lin[117]. c) Micrographies TEM de coupes transversales de faisceaux de lin : observation des lamelles mitoyennes[113].

C.4.3. La fibre élémentaire

Les fibres élémentaires (Figure 18 a et b) ont des longueurs comprises entre 1,6 à 90 mm[84] et des diamètres compris entre 5 et 35 µm[63,105]. Leur section n’est pas circulaire mais polyédrique (Figure 18 b) avec généralement 5 à 7 angles permettant d’améliorer le remplissage du faisceau[118]. Les fibres sont principalement agencées en micro et macrofibrilles de cellulose, lequelles sont disposées dans une matrice amorphe composée de polysaccharides non-cellulosiques (pectines et hémicelluloses) et d’un polymère phénolique (lignine)[119].

Figure 18 : a) Observation microscopique des fibres élémentaires de lin dans le sens longitudinale[107]. b) Observation TEM d’une coupe transversale d’une fibre de lin de section polygonale[85].

La fibre cellulaire se constitue de plusieurs structures concentriques (Figure 19). La paroi cellulaire primaire (PCW) la plus à l’extérieur est relativement mince soit environ 0,2 µm[65]. Elle est constituée de pectines telles que l’homogalacturonane (HGA) et le rhamnogalacturonane (RGI)[57,107,120], d’un peu de lignine, et d’hémicelluloses (xylane : Xn) et de xyloglucane (XG) en très faibles proportions[112,119] ainsi que de microfibrilles de cellulose disposées de manière erratique et multidirectionnelles[62]. C’est une structure poreuse continue et flexible qui est très fortement liée à la lamelle mitoyennes. Cette dernière est la zone commune aux diferentes fibres et la structure de contact entre les faisceaux fibreux et le parenchyme qui l’entour. À la différence de la paroi primaire et secondaire, la lamelle mitoyenne ne contient pas de cellulose.

Vers l’intérieur se trouve la paroi cellulaire secondaire (SCW) qui constitue la majeure partie du diamètre des fibres (Figure 19) dont l’épaisseur est de l’ordre de 5 à 15 µm et qui se compose principalement de celluloses, d'hémicelluloses et de pectines[63]. Les cristallites de cellulose dans la SCW sont déposées dans des microfibrilles orientées et hautement cristallines qui sont collées ensemble par une phase d'hémicelluloses amorphes (mélange de différents polysaccharides ramifiés de plus bas poids moléculaire tels que le xylose, ou l’acide galacturonique)[63,121]. Les hémicelluloses sont directement liées aux microfibrilles de cellulose et reliées aux pectines. Ainsi, la paroi secondaire est subdivisée en 3 couches qui possèdent une constitution et un arrangement distinct (Figure 19). De l’extérieur vers l’intérieur :

- La couche S1 : fine couche (e = 0,1–2 µm)[66,122] principalement constituée de microfibrilles de cellulose, d’une faible proportion de pectines (HGA[119]), d’hémicelluloses (telles que le XG ou le glucomannane (GM))[122]. Généralement, dans la paroi cellulaire de type xylane, la cellulose est composée de microfibrilles disposées en spirales [122].

- La couche S2 ou G constitue la couche mature de paroi cellulaire et est de type gélatineuse, avec un fort taux de microfibrilles de cellulose hautement cristallines (65-80 %[66,85]) en interaction latérale avec le galactane[123]. C’est la couche la plus épaisse de la fibre (e = 5–10 µm)[66] puisqu’elle représente 70 à 80 % de la SCW[66,85]. Du fait de son épaisseur, de l’organisation de ses microfibrilles

et de leurs liaisons fortes au galactane ramifié, la couche S2 est celle qui apporte les propriétés mécaniques de la fibre.

- La couche S3 ou Gn est la plus proche de la membrane plasmique (du lumen à maturité de la fibre). Elle est relativement fine en regard de S2 (e = 0,5–1 µm)[66]. Sa composition diffère de celle de la couche S2 par un degré de cristallinité de la cellulose plus faible, la longueur des chaînes de galactane[62] où la majeure partie du galactane n'est pas encore étroitement liée aux microfibrilles de cellulose[123].

- Les microfibrilles apportent les propriétés mécaniques à la fibre. Elles sont espacées de 10 à 100 nm[72] pour un diamètre de 1 à 30 nm selon la littérature[68,72,124] et sont constituées d’un ensemble de fibrilles élémentaires appelées micelles. Chaque microfibrille est constituée d’une vingtaine de micelles espacées d'environ 1 nm chacune représentant un assemblage de 30 à 100 molécules de cellulose[54,56]. Les microfibrilles ont une structure majoritairement cristalline ce qui leur procure leur caractère hydrophobe même si en milieu naturel, la paroi cellulaire est gonflée et les espaces entre les micelles et les microfibrilles sont remplis d'eau.

Figure 19 : Modèle multicouche des parois cellulaires des fibres de lin. HGA = Homogalacturonane, RGI = Rhamnogalacturonane, RGI-Gal = RGI ramifié avec chaîne latérale Gal, L-Gall-RGI= RGI avec chaîne longue de galactane, XG = xyloglucane, Xn = xylane, GM = glucomannane[119].