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4   Le récepteur cannabinoïque CB1

4.6   Voies de signalisation de CB1

Certains des essais présentés ci-dessus exploitent la voie canonique du couplage des récepteurs CB1 : protéine Gi/o, inhibition de l’adénylate cyclase et de la production d’AMPc. Cette voie était décrite avant même le clonage du récepteur CB1 (Howlett and Fleming, 1984). Après le clonage du récepteur, la possibilité d’exprimer le récepteur CB1 dans des systèmes d’expression hétérologues a permis d’élucider dans le détail les voies de signalisation intracellulaire impliquées

dans l’action du récepteur. La transduction du signal effectuée par le récepteur CB1 peut se décomposer selon plusieurs voies détaillées ci-après (Figure 15).

4.6.1 Régulation de l’adénylate cyclase (AC)

L’inhibition de l’AC est la voie de signalisation de CB1 la mieux caractérisée, présente dans les tissus cérébraux, les cellules neuronales et les modèles d’expression hétérologues. En particulier, cette voie a été mise en évidence dans des cultures de neurones corticaux, proches des cultures neuronales que nous avons utilisées (Jung et al., 1997). Cette inhibition est sensible à la toxine pertussique, indiquant l’implication de protéines Gi/o. Plus précisément, les trois types de sous-unité αi semblent en mesure d’interagir avec CB1, mais les domaines d’interaction sont distincts (Mukhopadhyay and Howlett, 2001). L’inhibition de l’AC provoque une diminution de la production d’AMPc (Howlett, 2004). Cependant, si l’on bloque l’inhibition de l’AC en neutralisant les Gi/o avec la toxine pertussique, une réponse stimulatrice de l’AC par la protéine Gs est détectée (Glass and Felder, 1997; Bonhaus et al., 1998). Les isoformes d’AC impliquées dans ces réponses antagonistes semblent différents, comme l’on montré la mesure de l’AMPc dans des cellules cotransfectées avec les récepteurs CB1 et des isoformes distincts des ACs (Rhee et al., 2000).

4.6.2 Régulation des canaux ioniques

En aval de l’adénylate cyclase, la production d’AMPc régule l’activité de la Protéine Kinase A. Cette dernière régule la phosphorylation des canaux ioniques au potassium, provoquant l’activation de courants potassiques de type A (Childers and Deadwyler, 1996). Le récepteur CB1 peut également activer les canaux potassiques Kir par le biais des protéines Gi/o lorsqu’il est exprimé dans cellules AtT-20 (Mackie et al., 1995) ou dans l’oocyte de xénope (McAllister et al., 1999). Les canaux calciques de type L, N, P et Q sont également régulés par l’activation de CB1. Notamment, les canaux calciques de type N sont inhibés par CB1 dans les cellules neuronales (Mackie and Hille, 1992; Pan et al., 1996).

4.6.3 Régulation du calcium intracellulaire

Dans les neuroblastomes N18TG2, les sous-unités βγ de la protéine G sont couplées à la phospholipase Cβ (PLC-β), amenant la production d’IP3 et provoquant un pic de la concentration de calcium intracellulaire. Cette voie est particulièrement activée par le 2-AG, et moins par les autres agonistes de CB1 (Howlett and Mukhopadhyay, 2000). Des résultats récents indiquent que l’agoniste WIN est susceptible d’induire une augmentation du calcium intracellulaire dans les

cellules HEK-293 transfectées avec le récepteur CB1. Ce phénomène implique l’activation de CB1, des protéines Gq/11 et la voie PLC-β/IP3/calcium (Lauckner et al., 2005).

4.6.4 Régulation des MAP kinases et du céramide

L’activation du récepteur CB1 peut stimuler la phosphorylation de la FAK dans les tranches hippocampales. Cette phosphorylation dépend de Gi/o et de l’activité de la PKA, montrant l’implication de la voie adénylate cyclase (Derkinderen et al., 1996). L’implication de la kinase Fyn associée à FAK+6,7 dans ce processus a également été mise en évidence (Derkinderen et al., 2001). De plus, l’activation du récepteur CB1 par les agonistes endogènes ou le Δ9-THC provoque une activation des voies ERK par le biais des MAP/ERK kinases (MEK, Derkinderen et al., 2003). Cette voie ne dépend pas de la PI3-Kinase mais semble sous le contrôle des variations de l’AMPc. Les MAPK sont également activées en aval de CB1 : p38 (Rueda et al., 2000), p42/p44 dans les cellules CHO exprimant CB1 (Bouaboula et al., 1995b) ou dans les gliomes C6 et les cultures astrocytaires (Sanchez et al., 1998), et ERK2 dans les fibroblastes WU38 (Wartmann et al., 1995).

Dans certains cas la voie d’activation des MAPK est dépendante de la PI3-Kinase (Bouaboula et al., 1995b; Wartmann et al., 1995), et l’on pourrait postuler une voie liant les sous- unités βγ à l’activation de la PI3-Kinase, l’activation de Raf-1 et la phosphorylation des MAPK. En aval des MAPK, on trouve la régulation de l’échangeur Na+/H+ NHE1 (Bouaboula et al., 1999b), et dans les cas des cellules WU38 le circuit phospholipase A2 → largage d’acide arachidonique → synthèse de prostaglandine E (Wartmann et al., 1995). Dans les cellules astrocytaires, la voie Gi/o → PI3-Kinase active la protéine kinase B/Akt (Gomez del Pulgar et al., 2000), ce qui pourrait induire l’inhibition de la glycogène syntase kinase 3 (GSK3) et provoquer l’augmentation du métabolisme du glucose observée (Guzman and Sanchez, 1999). Enfin cette augmentation du métabolisme du glucose, de la synthèse des phospholipides et du glycogène dépend d’une voie passant par la protéine adaptatrice Fan (Factor Associated with Neutral Sphingomyelinase), l’activation de la sphingomyélinase, la production de céramide et activation de la voie Raf1-MAPK. Cette voie a été associée à un effet antiprolifératif et antiapoptotique dans les cellules C6 (Guzman et al., 2001).

4.6.5 Régulation des gènes immédiats précoces et de la synthèse protéique

En aval des MAPK, l’activité de CB1 peut provoquer l’expression de gènes précoces immédiats : krox24 en aval de p42/p44 (Bouaboula et al., 1995a), c-Fos, Zif68 et BDNF en aval de ERK (Derkinderen et al., 2003), et les c-Jun N-terminal kinases JNK1 et JNK2 en aval de p38 (par une voie Gi/o/PI3-Kinase/Ras) (Rueda et al., 2000). L’effet de l’activité de CB1 sur l’expression

protéique a été constaté : diminution d’expression des récepteurs à la prolactine et des récepteurs tyrosine kinase aux neurotrophines Trk par le biais d’une voie qui fait intervenir la PKA et l’activation des MAPK, amenant finalement un effet antiprolifératif dans certains modèles de cancer du sein (De Petrocellis et al., 1998; Melck et al., 1999).

4.6.6 Régulation de la Nitric Oxyde Synthase (NOS)

L’activation de CB1 peut provoquer une inhibition de la synthèse du monoxyde d’azote NO en agissant soit sur l’enzyme neuronale de synthèse du NO (nNOS) dans les cellules granulaires du cervelet (Hillard et al., 1999) ou sur l’enzyme inductible de synthèse du NO (iNOS) dans les microglies (Waksman et al., 1999). Cet effet sur la production du NO pourrait avoir un rôle neuroprotecteur contre l’excitotoxicité, c'est-à-dire la mort neuronale induite par une suractivité neuronale (Kim et al., 2005).

Figure 15 : Signalisation intracellulaire en aval du récepteur CB1

De nombreuses études ont révélé différentes voies de signalisation présentées ci-dessus. On rappelle les voies les mieux connues, confirmées par plusieurs travaux :

- le récepteur CB1 peut activer directement les canaux potassiques et inhiber les canaux calciques (en haut) ;

- le couplage à la protéine Gαi/o régule négativement l’AMPc et la PKA ;