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Vieillissement, troubles cognitifs et douleurs

Chez l’animal de laboratoire des déficits cognitifs apparaissent en cas de douleur expérimentale chronique :

L’activation amygdalienne de la douleur expérimentale avec ses conditionnements négatifs, entraine une inhibition du cortex pré-frontal : on peut par des agonistes glutamatergiques restaurer un fonctionnement normal du cortex préfrontal médian et corriger simultanément douleur et déficit cognitif.

La douleur entraîne donc des conséquences cognitives et inver-sement, les modifications de la cognition peuvent moduler la douleur :

• troubles de la mémoire,

• problèmes d’anticipation,

• difficultés de concentration qui se traduit par des difficultés à terminer une tâche, des troubles attentionnels

L’hypothèse endocrinienne-biochimique place le stress engen-dré par la douleur au centre du processus d’altération cognitive.

En effet, tout stress chronique peut entraîner un dysfonction-nement de l’axe hypothalamohypophysaire, avec une augmen-tation d’acides aminés excitateurs, de glucocorticoïdes et de neurotransmetteurs comme la sérotonine, qui entraînent des re-maniements dans la région de l’hippocampe.

La diminution des performances physiques et intellectuelles, l’altération du sommeil et la perte de la mémoire conduisent à un état de mal-être.

Inversement, la cognition peut affecter la douleur :

Chez l’humain, l’attention dirigée vers la douleur augmente la douleur post-opératoire alors que la distraction augmente les seuils de douleur et de tolérance et diminue les réactions comportementales.

Les déficits cognitifs diminuent l’anticipation (processus de représentation mentale d’un évènement avant sa réalisation) et peuvent augmenter les seuils de tolérance à la douleur.

Conclusion

Pour être acteur du bien-être animal, ne soignons pas la douleur comme un symptôme mais plutôt comme un état, comme une maladie à part entière.

Soignons l’animal douloureux avec ses particularités anatomiques, émotionnelles, cognitives et motivationnelles, vivant dans un environnement spécifique.

Soignons l’animal douloureux par une approche individualisée et attentive, au sein du nouveau paradigme de l’Alliance thérapeutique.

Cultivons l’empathie (ressenti de l’intérieur) qui désigne le mécanisme par lequel un individu peut comprendre les senti-ments et les émotions d’un autre être vivant (empathie émotion-nelle) et ses états mentaux comme ses croyances ou ses perspec-tives (empathie cognitive). L’empathie se crée par la résonance émotionnelle qui est un début de partage de l’expérience dou-loureuse entre ceux qui la subissent et ceux qui y assistent.

L’empathie est un puissant moyen de communication interindividuelle et d’intelligence émotionelle car son objet est la compréhension : à ce titre, elle est l’un des éléments clés dans la relation thérapeutique qui devient collaborative.

Dans la prise en charge de la douleur et du bien-être animal, forgeons l’alliance thérapeutique (du latin ad ligare, lier ou unir avec) qui désigne le processus interactionnel et empathique reliant le propriétaire et le vétérinaire autour de l’évaluation de la douleur animale, du déroulement de la thérapie antalgique et de la finalité de l’amélioration de la qualité de vie.

• La douleur est une perception fluctuante émotion-nelle et cognitive d’une sensation nociceptive.

• Les interactions entre douleurs, émotions et cogni-tion sont complexes, interactives et très souvent auto-agravantes.

• La douleur est construite par rapport à un contexte préexistant d’un vécu douloureux et en fonction d’une situation environnementale : la situation, les émotions, les attentes de l’animal, le lien avec le propriétaire, ont une influence, positive comme négative.

• La prise en charge raisonnée et protectrice des douleurs chroniques doit dorénavant s’intéresser à ce triptyque en explorant davantage l’expérience construite de la douleur.

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