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VIEILLE MEDECINE

Dans le document JITRENNES PRIX: 1 Pr. 50 (Page 177-181)

Dans le volume intitulé les jardins de l'histoire, l'académicien Emile Gebhard consacre un chapitre à la vieille médecine, lequel constitue une suite inté-ressante aux lignes consacrées au rnome sujet dans une des dernières années des Etrennes :

Au quatorzième siècle, Gerson reprochait déjà aux médecins de Montpellier de rapporter au foie et au M e seul, selon la doctrine d'Arnaud de Villeneuve, toutes les maladies. Au seizième siècle, ce fut le tour de Paracelse de compromettre encore la science par l'abus du symbolisme chimique et des influences sidérales. C'est à cette école que vont les critiques de Rabelais dans son tableau des régions de Quinte-Essence. Les gentilshommes de la reine : « abstrâc-teurs et remueurs de cendres», frappent neuf coups sur le ventre des hydropiques, attachent à la ceinture des fiévreiix, du côté gauche, une queue de renard.

Ils enlèvent la goutte « seulement faisant es goutteux clorre la bouche et ouvrir es yeulx ». Rondibilis dis-serte déjà, devant Pantagruel et Panurge sur les es-prits v i t a u x ; il connaît et dénotice, comme feront les médecins de Molière, les terribles « humeurs pec-cantes » les humeurs « salses, nitreuses, bauracineuscs, acres, mordicantes, lancinantes et chatouillantes amèrement»; à l'entendre dissertant sur «lipothy-mie, syncope, épilepsie, apoplexie et vraye ressem^

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blancé de mort », le Malade imaginaire eut pleuré de joie. Non seulement les plantes douées de vertus sus-pectes, mais ausssi les plantes simplement ridicules, sont au Codex comique de Rabelais, la peau d'hippo-potame à côté de la mandragore. M. Fleurant che-mine toujours dans l'ombre de M. Purgon....

J'ai mis la main, dans mon grenier provincial, sur un manuscrit bien amusant, un livre de recettes médicales, qui porte la date au premier feuillet:

Le prince Léopold premier, de Lorraine, roi de Jéru-salem, mort à Lunéville le 27 mars 1729. Ces deux lignes sont de la même écriture que le reste du cahier.

Nous avons, dans ces pages, une thérapeutique assez complète, d'un luxe effroyable de drogues, de quoi porter le diable en terre.

Ce n'est point un mémento de bonne femme ; mais plutôt un manuel à l'usage des apothicaires, un code familier, où la fabrication des sirops les plus candidement domestiques se glisse entre des mani-pulations très compliquées dont quelques-unes font frémir. Voici, par exemple, tout près de la gelée de pommes et de l'eau de cerises, une opération que je recommande aux lecteurs sensibles.

«Pour préparer le crâne humain, il faut choisir celui d'une personne morte d'une mort violente : on le rompra par morceaux et on les fera sécher au four, afin qu'ils puissent être mis en poudre.

<(I1 est propre pourl'épilepsie, la paralysie, l'apople-xie et les autres maladies du cei'veau ». et plus loin nous voyons que :

« Il sert à la douleur des dents si on les touche avec l'os de la cuisse d'un crapaud,

«Pour le mal de dents des, enfants, prenez un

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vieux coq et lui coupez la crête et du sang qui en sor-tira frottez-lui les gencives et il guérira.

« Pour la colique, prenez (que le lecteur me par-donne, mais nous sommes à la clinique) de la fiente de chat en poudre dans un verre de vin hlanc et couvrez le malade ; il sera bientôt guéri ; ce remède est expérimenté .»

Pour la gravelle aussi, la médication est fort sin-gulière : on fait bouillir dans un pot de terre vernissé et neuf, une hure de brochet; quand elle est bien décharnée, on la sèche et réduit en poudre que l'on boit, mélangée à de la corne de cerf dans une chopine de vin blanc, ou bien on fait macérer, toujours dans le vin blanc, le cœur cru d'une pie coupé en quatre, pendant vingt-quatre heures. Ou bien encore, et ce remède a une mine assez suspecte de sorcellerie, on. met en un verre de vin blanc une drachme de racine de chélidoine, bien pilée, on la fait boire au malade pendant six jours «les trois derniers joûrs'de la lune, et les trois premiers de la lune suivante », et cela durant plusieurs lunes. La pierre diminuera petit à petit et se rompra toute seule. Quant à la racine, c'est de la pleine lune de juin à la nouvelle lune de juillet qu'il convient de la cueillir.

Pour la goutte, 'autre mystère : « Prenez trois ou quatre pattes de taupes et les mettez à votre jar-retière, et les portez toujours, remède assuré. »

Pour l'hémorragie, soufflez dans le nez du patient la: poudre d'une pierre triangulaire que renferme la tête de la carpe, ou bouchez-lui les narines avec du

poil de lièvre.

Pour la hernie, s'il s'agit d'un enfant, la nourrice prend matin et soir les mêmes drogues que le

nourris-son ; les adultes s'appliqueront sur les reins un mor-ceau'de peau de lièyre blanc, du côté opposé à celui de la rupture. Les maladies de l'âme, les vices d'intem-pérance qui ruinent la bourse et la santé sont encore l'objet des plus remarquables conseils.

-Si vous avez un ivrogne dans votre famille, rien n'est plus aisé de le dégoûter pour toujours de son péché ; prenez des œufs de chouettes, aussi nom-breux que possible ; faites-les cuire durs et servez-les à votre homme ; quand il les aura mangés, s'il y consent — pareil au roi de Thulé -~ jamais plus il ne boira une goutte de vin. »

Une formule plus précieuse que l'or est celle du

« sirop d'immortalité ou de longue vie ». Il fait vivre cent ans et plus, après avoir purgé le corps de toutes les humeurs, chaleurs et douleurs dangereuses ou incommodes ; il suffit, pour atteindre l'âge des pa-triarches,d'en prendre chaque matin à jeun, une cuiller à bouche.

Le secret de ce baume fut révélé par un paysan de Calabre qui le tenait d'un amiral de l'empereur en Barbarie : cet amiral l'avait reçu « d'un barbare ou sauvage » âgé de cent trente deux ans, chez qui logeait l'envoyé impérial ; celui-ci connut, parmi les voisins de son hôte, pas mal de centenaires dont la jeunesse

« avait été peu réglée », et qui preriaient leur cueillerée de longue vie depuis plus de « septante ans ». Je ne dénoncerai la composition de ce sirop qu'à des amis d'une discrétion à toute épreuve. La vie deviendrait intolérable en France et même en B^urope si certaines personnes y pouvaient passer les cent vingt.

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Dans le document JITRENNES PRIX: 1 Pr. 50 (Page 177-181)