• Aucun résultat trouvé

La place de la victime dans le procès pénal 215 est en mutation concernant le droit de se constituer partie civile et celui d‟obtenir réparation ainsi que dans l‟exécution des peines.

Section1 Des paradigmes concurrencés

B. Le rôle accru de la victime dans le procès pénal

39. La place de la victime dans le procès pénal 215 est en mutation concernant le droit de se constituer partie civile et celui d‟obtenir réparation ainsi que dans l‟exécution des peines.

La partie civile est une notion plus étroite que la notion de victime mais la première a le mérite de lui faire reconnaître des droits spécifiques en lui permettant de devenir une partie au procès pénal. L‟action s‟exerce devant la juridiction pénale contre l‟auteur présumé des faits. La lettre de l‟article préliminaire du code de procédure pénale place en priorité les droits des victimes et non de la partie civile, puis la présomption d‟innocence, ce qui équivaudrait au statut supérieur à la parole de la victime sur celle de l‟auteur présumé. Une consécration des droits de la victime et non de la partie civile soulève des questionnements dans une matière pénale qui juge un homme pour l‟illégalité de son acte. « Si le code lui-même mentionne la victime dès la phase préparatoire du procès, la

présomption d’innocence est morte. Victime n’est pas l’antonyme de mis en cause mais de celui de coupable »216. Nonobstant la reconnaissance grandissante de la victime au détriment de la notion de partie civile, cette dernière dispose encore des armes juridiques pour renverser la présomption d‟innocence. Elle fait ainsi une distinction avec la constitution de partie civile qui donne le droit à la victime ayant subi un préjudice actuel et certain, direct et personnel, d‟obtenir « une réparation du dommage causé par un

214

J.Y. Chevalier, la victime et la peine : le point de vue du juriste, Rep. de Dr. pén., 2004, 815, in C.Michaud et M. TINEL, « L‟emprise de la victime sur l‟application de la peine privative de liberté », Rev.de dr. pén., n°1, 2011, p 9.

215

R. Cario, « Victimes d‟infraction », Rép.pén.Dalloz, sept.2007.

216

A.Coche, « Le comité de réflexion sur la justice pénale ou les droits perdus du justiciable ? » D 2009, p2769.

51

crime, un délit ou une contravention »217. La victime obtient une réparation civile (dommages et intérêt, restitution, remise en état) soit en se joignant au procès pénal218 soit en se joignant directement devant le juge civil qui sursoit à statuer tant que le jugement pénal n‟est pas rendu, le criminel tenant le civil en l‟état219

. La victime est la personne physique ou morale qui a personnellement souffert220 d‟avoir subi le préjudice221. Les membres de la famille de la victime décédée sont aussi concernés222. La constitution de partie civile223 diffère en ce qu‟elle constitue une action civile en réparation du dommage directement causé par l‟infraction (crime, délit ou contravention). La partie civile est forcément une victime mais la victime n‟est pas forcément une partie civile qui réclame justice224. L‟arsenal juridique des victimes est régulièrement renforcé225 et s‟harmonise dans l‟Union Européenne226 pour garantir des normes minimales de protection, d‟information, d‟accès aux services publics d‟aide et de soutien sans oublier leur participation dans la procédure pénale. Dans le procès pénal le principe d‟égalité des armes entre les parties était le plus préjudiciable pour la victime. La constitution de partie civile ne leur conférait pas suffisamment de droits ou du moins ils étaient épars jusqu‟à la loi du 15 juin 2000 sur la présomption d‟innocence et les droits des victimes. L‟article préliminaire du code de procédure pénale consacre le principe du procès équitable et met en avant le droit des victimes227. « L’autorité judiciaire veille à l’information et la

garantie des droits des victimes au cours de toute procédure pénale »228. Le droit au procès équitable devient le fil conducteur des nouveaux droits des victimes. L‟autorité judiciaire a l‟obligation d‟informer les victimes et de leur garantir les droits attribués aux parties civiles, durant toute la phase du procès pénal, dès le début de l‟enquête (dépôt de plainte), pendant l‟instruction, le procès pénal et jusqu‟à l‟exécution de la peine. L‟information porte sur les associations d‟aide et de défense des victimes, l‟aide juridictionnelle229, les conditions de la constitution de partie civile, les droits de recours. L‟obligation d‟information s‟effectue dès le dépôt de plainte qui ne peut être refusée, soit devant le procureur soit dans un service de police judiciaire qui met à leur disposition des brochures explicatives. Ce droit à l‟information s‟inscrit dans l‟objectif de facilitation des démarches des victimes à travers le « guichet unique »230. Ces principes sont renforcés par la loi du 15 août 2014 qui garantit ces droits aux victimes. Depuis la loi du 5 mars

217

Art 2 du CPP.

218

Art 3 du CPP : Constitution de partie civile lors du dépôt de plainte, soit du procureur de la république ou devant le juge d‟instruction à condition qu‟il existe une plainte préalable (art. 85 du CP)

219

Art 4 du CPP.

220

C.Michaud et M. TINEL, « L‟emprise de la victime sur l‟application de la peine privative de liberté »,

Rev.de dr. pén., n°1, 2011, p 11.

221

G. Cornu, Vocabulaire juridique, PUF, 2011.

222

Art2 du CPP. Les proches de la victime sont « recevables à rapporter la preuve d‟un dommage dont ils ont directement souffert et qui découle directement des faits objet de la poursuite » Crim 3 nov 2009, bull. crim. n°182. 223 Art 2 du CPP. 224 Voir infra. 225

Loi n°2008-644 du 1er juillet 2008 créant de nouveaux droits pour les victimes et améliorant l‟exécution des peines.

226

Directive n°2012/29/UE du 25 oct.2012 établissant des normes minimales concernant les droits, le soutien et la protection des victimes de la criminalité. C.Fleuriot « Droits relatifs à l‟information, accès aux services d‟aide et participation à la procédure », D.2012, p2665 ; T.Cassuto, « le nouveau dispositif législatif de l‟Union européenne en faveur des victimes de la criminalité », AJ pénal 2013, 534.

227

Loi n°2000-516 du 15 juin 2000 sur la présomption d‟innocence et droits des victimes, et consacré aussi à l‟Art 6 § 1 de la CESDH, article préliminaire al. 2 CPP.

228

Art. Préliminaire du CPP.

229

Loi n°91-647 du 10 juil. 1991 relative à l‟aide juridique.

230

52 2007 la constitution de partie civile doit être précédée d‟une plainte qu‟elle soit par voie d‟action231

devant la police, le procureur ou le juge d‟instruction ou par voie d‟intervention dans un procès déjà en cours déclenché par d‟autres victimes ou par le ministère public. Cette loi encadre la procédure pénale avec la création d‟une consignation232 mais aussi avec une plainte préalable devant le procureur de la République233 afin de contourner les plaintes avec constitutions de partie civile abusives ou qui auraient pour but de ralentir le déroulement du procès commercial ou prudhommal tenu par le pénal. Dès la mise en mouvement de l‟action publique la partie civile peut passer outre l‟inertie du parquet en exerçant un recours devant le procureur général234

ou se constituer directement partie civile devant le juge d‟instruction235. Elle a la faculté de citer directement l‟auteur présumé devant la juridiction de jugement en cas de non-lieu pour une contravention ou un délit236 même nommément désignée dans le réquisitoire du procureur ou dans une plainte avec constitution de partie civile237. Cette action n‟est pas envisageable en cas de crime puisque l‟instruction est obligatoire238

ou si la personne soupçonnée a été mise en examen239. Elle peut demander au juge d‟instruction l‟ouverture d‟une information judiciaire par le parquet en vue d‟une instruction préparatoire (crime et délit). Pendant la phase d‟instruction, la partie civile est informée de la prise d‟ordonnance par le juge d‟instruction240, et qu‟elle a le droit de faire des requêtes telles

qu‟une demande d‟expertise médicale241, une demande d‟interrogatoire ou de

confrontation242. Elle peut faire appel de certaines ordonnances243. Pour aller encore plus loin dans les droits des victimes, une nouvelle forme de participation de la victime avait été envisagée sans succès devant la Cour d‟assises par le comité de réflexion sur la justice pénale244. Il s‟agissait de donner aux victimes le même droit que l‟accusé de récuser les jurés d‟assises ? Cependant, cette mesure n‟a pas été adoptée245

.