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La victime en droit de la responsabilité civile extra-contractuelle des personnes publiques

Section 1 : Présentation de l'objet d'étude

II. La victime en droit de la responsabilité civile extra-contractuelle des personnes publiques

60. En droit de la responsabilité civile extra-contractuelle, la victime est une personne qui subit un dommage constitutif de préjudice.

61. Précisément, la qualité de victime est dans un premier temps pressentie lorsque le juge déclare recevable l’action en responsabilité.

Pour former un recours en responsabilité, un requérant doit avoir un droit d’agir en justice, lequel est constitué par l'intérêt à agir et par la qualité pour agir123. Au titre de l’intérêt à agir, le requérant doit alléguer l'existence d'un dommage constitutif de préjudice causé par le fait de la

123 En droit administratif, v. par ex. C. BROYELLE, Contentieux administratif, L.G.D.J., coll. « Manuel », 7è éd., 2019, p. 78, pt. 90 ; M. GUYOMAR et B. SEILLER, Contentieux administratif, Dalloz, coll. « Hypercours », 5è éd., 2019, p. 304 - 324.

Pour une présentation approfondie, v. infra nos développements au pt. 1261.

En droit civil, v. par ex. S. GUINCHARD, F. FERRAND, C. CHAINAIS et L. MAYER, Procédure civile, Dalloz, coll. « HyperCours », 6è éd., 2018, p. 50 - 63 ; N. CAYROL, Procédure civile, Dalloz, coll. « Cours Dalloz », 2è éd., 2019, p. 71 - 114.

personne attraite en justice, sans en apporter la preuve124. En droit administratif, une personne qui se prétend victime d'un fait d'une personne publique doit également invoquer l'existence d'un différend avec la personne publique en cause125. Il est de principe que le juge administratif n'est pas saisi d'une prétention. Il est saisi d'une décision126. Avant d'agir devant le juge, il importe à la personne d'exercer un recours préalable contre la personne publique afin de demander la réparation du préjudice subi. Une décision de refus de celle-ci atteste l'existence d'un différend qui n'a pas été réglé.

La recevabilité d’une action en responsabilité signifie donc que le requérant a éventuellement subi un dommage lequel est constitutif de préjudice, c’est-à-dire qu’une atteinte a peut-être été portée à un intérêt légitime juridiquement protégé.

62. La qualité de victime est dans un second temps confirmée. Après avoir déclaré recevable l’action en responsabilité, le juge est amené à considérer si le requérant est effectivement victime d’un dommage constitutif de préjudice. En effet, au stade de l’examen au fond, le juge recherche si la personne publique défenderesse a bien été l’auteur d’un fait générateur cause du dommage constitutif de préjudice de la victime. Dans l’affirmative, la responsabilité du défendeur est reconnue et le requérant est effectivement victime d’un dommage constitutif de préjudice. Il dispose d’un droit à réparation. En revanche, si la responsabilité du défendeur n’est pas consacrée, le requérant n'est pas juridiquement une victime d’un dommage constitutif de préjudice. Il ne dispose pas de droit à réparation dans la mesure où il n'a pas subi de dommage ou de préjudice ou parce que son préjudice n'est pas réparable.

63. Aussi, la victime est déterminée, en droit, par rapport à un dommage constitutif de préjudice, lequel ouvre un droit à réparation.

64. Dans le cadre de notre recherche, nous nous réfèrerons toutefois à la notion de « victime »

124 En droit administratif, v. par ex. C. BROYELLE, Contentieux administratif, op. cit., p. 78, pt. 90 écrit que : « Par

exemple, une personne a toujours intérêt à obtenir la réparation du préjudice qu'elle prétend avoir subi. Le droit invoqué (droit à réparation) inclut l'intérêt ; celui-ci ne donne lieu à aucun examen de la part du juge ».

En droit civil, v. par ex. S. GUINCHARD, F. FERRAND, C. CHAINAIS et L. MAYER, Procédure civile, op. cit., p. 51 ; N. CAYROL, Procédure civile, op. cit., p. 71 - 72. Sur le débat relatif à l'exigence d'un intérêt légitime juridiquement protégé, v. infra nos développements aux pt. 1348 - 1353 et pt. 1569 - 1575 et 1624 - 1637.

125 Par ex., v. C. BROYELLE, Contentieux administratif, op. cit., p. 91, pt. 103 ; M. GUYOMAR et B. SEILLER,

Contentieux administratif, op. cit., p. 315, pt. 646 - 647.

126 B. PACTEAU, Manuel de contentieux administratif, P.U.F., coll. « Droit fondamental », 3è éd., 2014, p. 111, pt. 101 : « (o)n ne saisit pas le juge administratif directement d'une prétention ; par principe, on ne peut que lui déférer une

décision ».

Depuis sa modification par le décret du 2 novembre 2016, l'article R. 421-1 du code de justice administrative énonce que : « Lorsque la requête tend au paiement d'une somme d'argent, elle n'est recevable qu'après l'intervention de la

par rapport au dommage sans égard pour le préjudice. Lorsqu'il est amené à s'interroger sur l'existence d'une contribution de la victime à la production de son dommage, le juge ne peut pas déterminer à ce stade que le requérant est effectivement une victime d'un point de vue juridique. Le requérant ne peut être que pressenti victime. Le juge n'apprécie pas si le dommage est constitutif d'un préjudice qui ouvre droit à réparation. Une personne ne peut participer à la survenance de sa souffrance qu'en contribuant à la production du dommage. La contribution de la victime est, en tant que cause étrangère, reconnue en droit positif s'il existe un lien de causalité entre ledit fait et le dommage127. La reconnaissance d'un préjudice réparable permet d'ouvrir un droit à réparation et d'évaluer le montant de celui-ci. La détermination du préjudice et du montant du droit à réparation est une étape successive à la reconnaissance du dommage et du lien de causalité128.

Notre démarche permet ainsi de ne pas passer sous silence des hypothèses de personnes qui subissent un dommage même en l'absence de préjudice, d'une part, et des cas de figure de contribution de la victime à la production de son dommage, d'autre part.

65. Il faut également considérer que toute personne qui subit un dommage constitutif de préjudice par ricochet du dommage souffert par la victime directe est une victime. Cette qualification de victime indirecte ou par ricochet a été consacrée dans les droits civil et administratif de la responsabilité129. Les ayants droit de la victime immédiate sont ainsi victimes dès lors que, en qualité de « proches » de la victime initiale, ils agissent en responsabilité au nom de leur préjudice personnel. La qualité de victime n'est en revanche pas reconnue lorsqu'ils agissent en qualité d'héritiers de la victime directe.

66. Pour conclure, en droit de la responsabilité civile extra-contractuelle des personnes

publiques, la victime est une personne physique ou morale, privée ou publique, qui a subi un dommage constitutif de préjudice causé directement par le fait de la personne publique défenderesse. La victime s'entend également comme la personne qui subit un dommage par ricochet constitutif de préjudice du dommage souffert par la victime directe. Ainsi, les ayants droit de cette dernière sont victimes dès lors qu'ils agissent en leur nom propre contre la personne publique auteur du fait ayant généré le dommage de la victime immédiate. Enfin, la victime n'est pas seulement une personne « innocente », « passive » ou « pure ».

Elle peut également contribuer à la production de son dommage de sorte que son droit à

127 Sur la définition de la contribution de la victime à la production de son dommage et sur l'acception de la cause étrangère, v. infra nos développements aux pt. 67 - 79.

128 Sur le raisonnement du juge administratif, v. infra nos développements aux pt. 320 - 322, 985 - 992.

129 Pour les réf., v. supra pt. 46. Pour une présentation approfondie de cette reconnaissance, v. infra nos développements aux pt. 1140 - 1208.

réparation est totalement ou partiellement remis en cause. À ce titre, nous verrons que la victime peut être l'auteur d'un fait générateur. Il nous appartient ainsi de définir la contribution de la victime à la production de son dommage (§ 3).

§ 3 : La contribution de la victime à la production de son dommage

67. En droit de la responsabilité civile extra-contractuelle des personnes publiques, la contribution de la victime à la production de son dommage revêt des manifestations diverses. En premier lieu, la victime peut participer à la survenance de son dommage de différentes manières, si bien qu'il est possible d'établir une typologie. En second lieu, nous identifierons, d'une part, plusieurs incidences de la participation de la victime à la survenance de son dommage sur la responsabilité de la personne publique défenderesse et, d'autre part, diverses qualifications juridiques et présentations.

68. L'étude de la contribution de la victime à la production de son dommage en-dehors du droit administratif de la responsabilité civile extra-contractuelle nous offrira un support nécessaire pour la comprendre et pour la définir précisément en ce domaine. Nous avons vu qu'elle est consacrée en droits civil, pénal et international public, de même que dans les régimes d'indemnisation.

À ce titre, avec le droit civil, nous appréhenderons la notion de cause étrangère, laquelle est souvent distinguée de la cause d'exonération. Les droits pénal, administratif de la responsabilité civile contractuelle des personnes publiques et international public nous donneront l'occasion de s'intéresser à l'idée d'exclusion de la responsabilité par l'intermédiaire des faits justificatifs et des causes d'irresponsabilité et des circonstances excluant l'illicéité.

69. Pour appréhender précisément la contribution de la victime à la production de son dommage en droit de la responsabilité civile extra-contractuelle des personnes publiques, il est nécessaire de présenter, en premier lieu, ce que signifie « contribuer à la production de son dommage » (I) avant de définir la participation de la victime à la survenance de son dommage comme une cause étrangère qui a pour incidence de libérer en tout ou partie la personne publique défenderesse de sa responsabilité (II).

I. – Signification de « contribuer à la production de son dommage »

70. Contribuer à la production du dommage signifie « aider, participer (avec d'autres) à la

réalisation »130 du dommage. C'est également « avoir une part, plus ou moins importante, dans la

réalisation »131 de celui-ci. À ce titre, lorsqu'elle contribue à la production de son dommage la victime participe, concourt à la réalisation de celui-ci. Plus précisément, la victime a une part dans la survenance du dommage par la commission, par action ou par omission, d'un fait matériel (tel qu'un comportement) ou d'un fait juridique (comme la prise ou non d'un acte juridique). La victime contribue à la production de son dommage en étant l'auteur d'un fait. Il est du reste intéressant de souligner que le terme « contribution » n'est que très peu utilisé en droit positif132. Nous n'avons trouvé aucune référence en doctrine. Tandis que le droit positif fait mention de la faute de la victime133, les auteurs ont tendance à se référer soit au fait de la victime134, soit à la seule faute de la

130 V. « Contribuer », in C.N.R.T.L.. 131 Id.

132 V. C.D.I., « Projet d'articles sur la responsabilité de l'État pour fait internationalement illicite et commentaires y relatifs », op. cit., art. 39 : « Pour déterminer la réparation, il est tenu compte de la contribution au préjudice due à

l'action ou à l'omission, intentionnelle ou par négligence, de l'État lésé ou de toute personne ou entité au titre de laquelle réparation est demandée ». Nous soulignons ; et « Projet d'articles sur la responsabilité des organisations

internationales et commentaires y relatifs », op. cit., art. 39 : « Pour déterminer la réparation, il est tenu compte de

la contribution au préjudice due à l’action ou à l’omission, intentionnelle ou par négligence, de l’État ou de l’organisation internationale lésés ou de toute personne ou entité au titre de laquelle réparation est demandée ».

Nous soulignons.

133 Pour les textes juridiques, v. les ex. précités Code civil, art. 1245-12 ; Code des assurances, art. L. 126-1 et Code de

procédure pénale, art. 706-3.

Pour la jurisprudence, v. par ex. C.E., 26 février 2016, S.C.I. Jenapy 01, n°389258 : « qu'il [le maître d'ouvrage public] ne peut dégager sa responsabilité que s'il établit que ces dommages, qui doivent revêtir un caractère

anormal et spécial pour ouvrir droit à réparation, résultent de la faute de la victime ou d'un cas de force majeure ».

Nous soulignons ; C.E., 10 février 2014, Mme. A., n°361280 ; J.C.P. A., nov. 2014, n°45, 2317, comm. H. PAULIAT : « Considérant que le maître d'ouvrage est responsable, même en l'absence de faute, des dommages que les ouvrages

publics dont il a la garde peuvent causer aux tiers tant en raison de leur existence que de leur fonctionnement ; qu'il ne peut dégager sa responsabilité que s'il établit que ces dommages résultent de la faute de la victime ou d'un cas de force majeure ». Nous soulignons ; C.E., 4 septembre 1995, É.D.F., n°85324 : « Considérant qu'Électricité de France est en principe responsable, même en l'absence de faute relevée à sa charge, des dommages causés aux tiers par le fait des ouvrages publics dont il est concessionnaire, à moins que ces dommages soient imputables à une faute de la victime ou à la force majeure ». Nous soulignons ; C.E., 10 mai 1989, Commune de Saint-Amand Montrond, n°38611 : « Considérant, enfin, que le maître d'ouvrage est responsable, même en l'absence de faute, des dommages que les ouvrages publics dont il a la garde peuvent causer aux tiers tant en raison de leur existence que de leur fonctionnement ; qu'il ne peut dégager sa responsabilité à l'égard des victimes que s'il établit que ces dommages résultent de la faute de la victime ou d'un cas de force majeure ». Nous soulignons. Pour un ex. de réf. au

« fait » de la victime, v. not. C.E., 16 juillet 2014, n°361570 : « l'administration peut invoquer le fait du

contribuable ou, s'il n'est pas le contribuable, du demandeur d'indemnité comme cause d'atténuation ou d'exonération de sa responsabilité ». Nous soulignons ; C.E., 21 mars 2011, Krupa, n°306225 : « qu'enfin l'administration peut invoquer le fait du contribuable ou, s'il n'est pas le contribuable, du demandeur d'indemnité comme cause d'atténuation ou d'exonération de sa responsabilité ». Nous soulignons.

134 Le « fait de la victime » a deux significations en doctrine. Soit il est utilisé de manière générique afin de se référer à la fois à la faute et au fait non fautif. Par ex., v. G. VINEY, P. JOURDAIN et S. CARVAL, Les conditions de la

responsabilité, L.G.D.J., coll. « Traités. Traité de droit civil », 4è éd., 2013, p. 397 - 431 ; M. FORNACCIARI et D. CHAUVAUX, « Exonérations ou atténuations de responsabilité », loc. cit., pt. 118 - 158 ; M. PAILLET, La

responsabilité administrative, op. cit., p. 47 - 49. Soit il équivaut au fait non fautif. Par ex., v. J.-P. PAYRE, « Faute et fait de la victime dans le contentieux de la responsabilité administrative extracontractuelle », loc. cit. , p. 403 - 406 ; B. PUILL, « Les caractères du fait non fautif de la victime », loc. cit., p. 157 - 164 ; C. LAPOYADE-DESCHAMPS, La

victime135.

71. Si la victime a souvent une part plus ou moins importante dans la réalisation de son dommage136, force est toutefois de préciser que toute contribution de la victime à la production de son dommage n'est pas toujours reconnue juridiquement. Le fait par lequel la victime participe à la survenance de son dommage ne peut être admis en droit que s'il est une cause juridique du dommage. En droit de la responsabilité civile, celle-ci s'entend, ou est tenue pour tel, comme un fait, matériel ou juridique, qui explique en tout ou partie le dommage de sorte qu'il a été déterminant dans sa production137. La détermination d'une cause juridique résulte d'une opération intellectuelle qui repose, d'abord, sur une interprétation et sur une appréciation factuelle, puis sur une appréciation et sur une qualification juridiques des faits138. La causalité juridique se détache ainsi parfois de la causalité matérielle.

72. Reconnue comme une cause juridique et, partant, comme un fait générateur, la contribution de la victime à la production de son dommage revêt des manifestations diverses comme le révèle l'étude du droit positif.

En premier lieu, la victime participe à la survenance de son dommage par la commission d'une faute ou d'un fait non fautif. À ce titre, il faut préciser que le fait non fautif présente une double acception. Il s'agit soit d'un fait qui est purement non fautif, au sens où aucun manquement à un devoir juridique préexistant n'est constaté, soit une faute qui est indifférente pour le juge139.

En second lieu, la victime commet un fait, fautif ou non, antérieurement ou postérieurement à son dommage. Soit la victime commet un fait avant de subir un dommage, auquel cas elle concourt à la formation de ce dernier. Soit elle est l'auteur d'un fait après avoir subi un dommage.

responsabilité de la victime, op. cit., p. 374 - 456.

135 Par ex., v. A. DUMÉRY, La faute de la victime en droit de la responsabilité civile, op. cit., p. 47 - 441 ; F. COLIN, « La faute d'imprudence de la victime en droit administratif », loc. cit., p. 443 - 453 ; M. ELIA, C. (de) JACOBETDE

NOMBEL, M. RAYSSAC, J. SOURD, « La faute de la victime dans la responsabilité civile extra-contractuelle », loc. cit., p. 47 - 65 ; J. MOREAU, L’influence de la situation et du comportement de la victime sur la responsabilité

administrative, op. cit., p. 195 - 245.

136 Par ex., v. Par ex., v. S. REIFEGERSTE, Pour une obligation de minimiser le dommage, op. cit., p. 317, pt. 610 ; C. LAPOYADE-DESCHAMPS, La responsabilité de la victime, op. cit., p. 65 ; M. TEISSEIRE, Essai d'une théorie générale

sur le fondement de la responsabilité, op. cit., p. 167.

137 Les auteurs, notamment de droit administratif, se réfèrent principalement à cet adverbe « déterminant », de même qu'aux adjectifs « nécessaire » et « suffisant ».

Pour les réf. et sur la définition approfondie de la cause juridique, v. infra nos développements aux pt. 961 - 993. 138 Par ex., v. not. H.-B. POUILLAUDE, Le lien de causalité dans le droit de la responsabilité administrative, op. cit., p.

40, pt. 73 et p. 113 - 173 ; C. QUÉZEL-AMBRUNAZ, Essai sur la causalité en droit de la responsabilité civile, Dalloz, coll. « Nouvelle Bibliothèque de Thèses », t. 99, 2010, p. 173 - 230, et spéc. p. 173 - 200. V. aussi A. ROUYÈRE, « Variations jurisprudentielles à propos du lien de causalité entre vaccination contre l'hépatite B et sclérose en plaques. Questions de méthode », R.F.D.A., 2008, p. 1011 - 1015 ;. F. CLÉMENTS, « Causalité, régularité et responsabilité juridique », in « Les distorsions du lien de causalité », R.L.D.C., 2007, n°40, supplé., p. 9.

Elle aggrave ainsi son dommage. S'ils l’abordent également selon sa temporalité par rapport au dommage, certains auteurs distinguent la participation de la victime selon qu'elle est concomitante au dommage et dissociée du dommage140. Or, admettre qu'un fait puisse être concomitant au dommage n'est pas cohérent. Un fait est concomitant dès lors qu'il se produit ou qu'il se présente en même temps qu'un autre fait141. Précisément, concomitant est synonyme de simultané142. Or, un dommage n'est jamais concomitant à un fait. Un dommage est par définition un fait causé143, c'est-à-dire qu'il résulte de la commission d'un fait matériel ou juridique. Il est consécutif à ce dernier. Ce fait matériel ou juridique est d'ailleurs, lorsqu'il est reconnu comme une cause juridique, générateur de dommage. Les expressions « fait générateur de dommage » et « fait dommageable » portent en elles la dissociation temporelle. À l'inverse, les auteurs qui n'évoquent le sujet qu'à titre très résiduel ne font qu’énumérer les différents faits que la victime a pu commettre en jurisprudence144.

73. Bien plus qu'une cause juridique du dommage, la contribution de la victime à la production de son dommage est qualifiée juridiquement comme une cause étrangère qui a pour incidence de libérer, totalement ou partiellement, la personne publique défenderesse de sa responsabilité (II).

II. – Une cause étrangère qui libère la personne publique défenderesse de sa