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CHAPITRE 2. CADRE THÉORIQUE

2.1.2. Vers une approche socioconstructiviste de l’apprentissage

Dans le domaine de la pédagogie universitaire, le choix d’une stratégie d’enseignement repose sur un certain nombre d'éléments, notamment le niveau des objectifs pédagogiques poursuivis, la convergence ou la divergence des représentations des deux acteurs (Étudiant et Enseignant). Toutefois, l’apprentissage demeure toujours est un

processus constructif dans lequel l’apprenant doit être actif. En effet, Galand et Bourgeois précise que « l’apprentissage est un véritable travail et, comme tel, exige la mobilisation de ressources personnelles – cognitives, affectives, comportementales – importantes, forte implication du sujet dans son apprentissage » (2006, p. 14).

Dans le domaine cognitif, il est important de bien situer les différents types de stratégies d’enseignement utilisées, à savoir l’exposé magistral, le questionnement, la discussion, le travail individuel et le travail de groupe, en fonction des trois niveaux d'apprentissage, notamment la rétention, la compréhension et la réflexion (Daele & Berthiaume, 2010). De manière générale, selon les mêmes auteurs, l’exposé magistral est une stratégie qui contribue bien efficacement à l’atteinte des objectifs de niveau rétention. Il permet de transmettre de nombreuses informations à un grand groupe en peu de temps sous forme structurée. Toutefois, dans le cadre d'une telle stratégie, il semble difficile de capter toujours longuement l’attention de tous les étudiants et de procéder à une évaluation convenable de leur compréhension (Daele, 2009b; Théorêt, 2007).

Pour maîtriser des objectifs de niveau compréhension, les enseignants peuvent recourir à des méthodes pédagogiques centrées davantage sur la discussion ou le questionnement en classe. Le questionnement permet aussi bien d’évaluer la compréhension des étudiants que de les inciter dans des réflexions métacognitives (Viola, 2007). Cependant, cette stratégie n'arrive pas à faire participer assez facilement tous les étudiants.

Enfin, il est possible, au moyen des travaux de groupe ou individuels, d'envisager l'atteinte du plus haut niveau des objectifs d’apprentissage, notamment la réflexion. Dans le cadre d'un projet de groupe, il est possible de développer des compétences de collaboration et l'enseignement réciproque chez les étudiants, et d’approfondir davantage certains thèmes du cours (Raby, 2007a). Les difficultés rencontrées relèvent souvent de la détermination des contributions individuelles. S'agissant des travaux individuels, ils permettent de développer chez les étudiants une expertise individuelle sur un sujet d'intérêt personnel et d'enseignement réciproque. Toutefois, il peut advenir chez certains apprenants l’installation d’un sentiment d'isolement face au travail à réaliser individuellement.

En définitive, il est possible de considérer que l’exposé magistral, le questionnement et la discussion sont des stratégies d’enseignement centrées davantage sur l’action de l’enseignant, alors que le travail individuel et le travail de groupe se centrent plutôt sur l’activité des étudiants. Dans le second cas, l’enseignant exerce moins de contrôle sur les activités d'apprentissage. La figure 6 ci-dessous illustre le continuum des stratégies d’enseignement selon le niveau d’apprentissage, avec une situation centrée sur l’enseignant à l’extrémité gauche et celle centrée vers l’étudiant à la deuxième extrémité.

Figure 6 : Continuum des stratégies d’enseignement centrées sur l’enseignant ou l’étudiant en fonction du niveau d’apprentissage (adapté de Daele & Berthiaume, 2010)

L'enseignant

L'étudiant

Exposé

magistral Q

uestionnement Discussion Projet de groupe

S Sttrraattééggiieedd''eennsseeiiggnneemmeennttcceennttrrééee s suurr

- - -

Projet individuel Niveau Rétention Niveau Compréhension Niveau Réflexion

+ + +

En effet, il est possible de situer ces différentes stratégies d’enseignement sur ce continuum, ceci en relation avec le niveau d’apprentissage. Il se trouve que la première stratégie correspond mieux au niveau rétention et davantage concentrée sur l’action de l’enseignant ; quant à la deuxième catégorie, dédiée au niveau compréhension, elle fait appel autant à l’implication de l’apprenant que de l’enseignant. Enfin, la dernière catégorie est plutôt centrée sur l’activité des étudiants. Dans le second cas, l’enseignant aura moins de contrôle sur ce qui se passe dans la situation pédagogique.

Dans le contexte universitaire du Niger, au niveau du premier cycle (Licence), l’organisation des enseignements de mathématiques se déroulent souvent sous forme d’exposé magistral, de questionnement et de discussion. Ce n’est qu’au niveau des activités du second cycle (Master) et troisième cycle (Doctorat) qu’on voit apparaître une intégration progressive des travaux de groupe ou des travaux individuels, afin de viser l'atteinte d’objectifs d’apprentissage du plus haut niveau, notamment la réflexion pour aboutir à la production personnelle de mémoire de fin d’études. Pour cela, il est indispensable d’envisager le processus comme le définit Bruner (cité par Wertz, 2005) « Learning is an active process in which learners construct new ideas or concepts based upon their current/past knowledge. The learner selects and transforms information, constructs hypotheses, and makes decisions, relying on a cognitive structure to do so».

Dans une étude diagnostique pour appuyer le passage au système LMD dans les universités des pays de l’Afrique de l’ouest, l’Association des Universités Africaines (2008) stigmatisait le fait que l’enseignement traditionnel est souvent conçu comme l’acquisition d’une collection de concepts abstraits et de compétences isolés à maîtriser, exposée magistralement pour installer chez l’apprenant une démarche déductive. Par exemple, l’enseignement des mathématiques semble être conduit selon la même démarche utilisée au niveau des classes du secondaire ; en effet, on retrouve souvent des activités pédagogiques sous forme d’exercices liés à chaque partie d’un enseignement magistral, consistant pour la plupart à la recherche d’une formule ou d’une réponse unique. Quand il s’agit d’un exercice long, dénommé « problème », ce n’est ni plus ni moins, une juxtaposition de « petits exercices ». On semble exiger toujours à l’apprenant de déployer

des recettes déjà mémorisées, le confinant dans une situation où il existe très peu de place à l’esprit critique ou au développement d’attitudes d’autonomie.

Aussi, le processus d’enseignement-apprentissage se retrouve bien éloigné de la posture où l’objectif ultime assigné est que « l'étudiant puisse utiliser avec profit les ressources de son environnement, exprimer ses besoins et devenir autonome dans son approche des savoirs » (COMPETICE, 2011, Pédagogie du projet). Pour cela, il est indispensable de recourir à la mathématisation de situations concrètes dans le cadre de la compréhension des phénomènes naturels présents dans l’environnement socioculturel de l’apprenant. Cette démarche exige davantage une compréhension générale et une interprétation des résultats obtenus qu’une recherche mécanique de réponses numériques. En fait, il s’agit, comme le soulignent De Corte et Verschaffel (2005), les activités d’apprentissage en mathématiques doivent se présenter comme « une série d’activités de création, de cohérence et de résolution de problèmes basés sur une modélisation mathématique de la réalité » (p. 26).

Ce changement important dans l’approche de l’enseignement des mathématiques induit nécessairement une transformation de l’acte « apprentissage » par l’étudiant. Evoluant d’une position, où l’apprentissage des mathématiques rime, selon De Corte et Verschaffel, (2005, p. 26) avec « une absorption passive et décontextualisée des connaissances et des compétences institutionnalisées par l’œuvre des générations précédentes », il est exigé davantage à l’apprenant un rôle plus actif dans le processus de construction de ses connaissances, et ce, dans le cadre d’une interaction continue avec les autres et son environnement. Ainsi, il appert que nous sommes dans une vision socioconstructiviste de l’apprentissage, telle que mentionnée par Charron et Raby (2007), comme étant « une théorie de l’apprentissage qui postule que l’apprenant construit activement ses savoirs et développe ses compétences en s’appuyant sur ses connaissances antérieures et en résolvant des conflits sociocognitifs, et ce, en interaction avec les autres et son environnement » (p. 121).

Relativement à cette perspective sociocontructiviste de l’apprentissage des mathématiques, un certain nombre d’auteurs (Macedo-Rouet et al., 2006; NCTM, 2000; Ungerleider & Burns, 2002 ; COMPETICE, 2011, Pédagogie du projet) ont estimé que les

TIC permettent de fournir des modèles, de calculer, de simuler, de travailler sur des données, tout en assurant des partages au moyen d’une communication dans un cadre synchrone et asynchrone pour les échanges.

Cette évolution des pratiques pédagogiques se retrouve au niveau des progrès enregistrés dans le domaine des applications pédagogiques des technologies. C’est sur cet aspect que nous allons nous étendre dans la partie suivante.