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TITRE II : De l’analyse des réformes curriculaires à l’observation des pratiques

Chapitre 3 Vers l’inscription théorique de la recherche

Au terme de cette revue de questions sur les réformes curriculaires et l’APC, il ressort une unanimité au niveau la reconnaissance d’un certain nombre de controverses relatives à cette approche. Plusieurs auteurs l’ont montré et explicité (Jonnaert, 2002, 2004 ; Hirtt, 2009 ; Dolz et Ollagnier, 2000 ; Perrenoud, 1997, Boutin et Julien, 2000).

Dans le titre I de cette partie nous avons montré la mise en œuvre des programmes d’études en EPS et en SVT au Bénin n’a pas été sans rencontrer de multiples difficultés (Agbodjogbé, 2007 ; Agbotouedo, 2008 ; Oguéboulé, 2009 ; Gbekpon, Ogoutola, 2004 ; Ayihadji, 2008 ; etc..). Ces difficultés sont surtout liées au contexte d’avènement de la réforme, à la mise en œuvre des programmes qui ont été conçus, mais surtout à l’opérationnalisation de la démarche de « construction de nouveaux savoirs » telle que valorisée par ces préconisations officielles (Sassou, et Bamigboche, 2004).

Les problèmes inhérents à l’implémentation des NPE au Bénin témoignent de l’existence d’un malaise profond qui ne saurait laisser indifférent les spécialistes des sciences de l’éducation. Même si c’est essentiellement dans les périodes politiques critiques que la nécessité de transformer le système éducatif se fait sentir avec force (Cherkaoui, 2010). Le changement dans laquelle la plupart des pays africains se sont engagés ces deux dernières décennies, appelle à mettre en débat ces « nouveaux programmes d’études », à partir non plus d’une discussion sur leurs fondements théoriques, ou leurs enjeux idéologiques mais en s’intéressant aux pratiques des acteurs. Ce choix nous amène à convoquer un cadre didactique, comme nous le développons ci-après.

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1. Une nécessaire problématisation didactique pour étudier l’implémentation

des NPE.

Le débat sur ce que l’école doit enseigner est devenu vif depuis quelques années et divise chercheurs et experts (Harlé, 2010). Il est encore plus vif avec l’avènement de l’APC. Partagée entre le déni du savoir et la valorisation de la compétence, elle ne cesse d’opposer les défenseurs d’un éventuel nouveau paradigme qui se réclament d’une vision moderniste et les prudents promoteurs d’une vision plus réaliste et scientifique de l’approche (Hirtt, 2009). En plagiant Dolz et Ollagnier (2000, p.17), l’APC, dans les réformes curriculaires, serait-elle une vogue ou bien une nécessité ?

1.1. Rappel des controverses

Nous avons montré en introduction que les controverses relevaient de différents plans : sociopolitique, épistémologique, pédagogique et didactique.

1.1.1. Au plan sociopolitique.

«Les savoirs scolaires ne sont pas la transcription mécanique d’une demande globale, mais transitent par une chaine de médiations où interviennent différentes catégories d’acteurs économiques, politiques, agents de l’institution éducatives….» (Harlé, 2010, p.32). Parmi ces acteurs, trois instances interviennent plus spécifiquement dans l’élaboration d’un contenu d’enseignement : le politique, le noosphère et les praticiens (Gauthier et Le Gouvello, 2009). Mais la question qui se pose est le fonctionnement de cette structure composée de ces différentes catégories d’acteurs dont les intérêts à un moment donné ne convergent plus. Les études menées par ces deux auteurs ont montré que les conflits générés par les phénomènes de lobbying, de marginalisation et d’instrumentalisation qui caractérisent le fonctionnement des commissions d’élaboration des contenus d’enseignement se traduisent à un moment donné par l’incapacité du pouvoir politique à régler certaines questions mais aussi et surtout des injonctions relevant d’une instrumentation politique et économique de l’école. L’approche par compétences est apparue à un moment de crise économique et

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politique dans la plupart des pays africains9 mais aussi relève aussi d’une forme de néolibéralisme qui la présente comme une solution adaptée à cette crise (Bruno et al, 2010). Par ailleurs, sa mise en application a très tôt commencé par générer des remous au niveau de la société civile au point que certaines organisations syndicales en ont fait une arme de combat politique contraignant certains Etats à organiser des forums sur leur système éducatif (Rapport du forum sur le système éducatif au Bénin, 2007).

1.1.2. Au plan épistémologique

Selon la revue de littérature, la façon dont l’APC se réclame du constructivisme et du socio- constructivisme, s’appuie sur des fondements épistémologiques qualifiés d’ambigus et sur un cadre théorique considéré comme faible (Jonnaert et al, 2004). Cela s’est traduit parfois par une écriture des programmes s’inscrivant dans une perspective à la fois comportementaliste et cognitiviste. Ce dérapage conceptuel qualifié d’amalgame (Boutin et Julien, 2000) remet en débat l’idée même d’un nouveau paradigme épistémologique auquel appartiendrait l’APC. Le concept de compétence n’est une propriété exclusive d’aucun paradigme épistémologique en particulier rappelle Jonnaert et al. (2004).

L’autre aspect aussi important, c’est l’inconsistance du concept de compétence, dont la définition et l’opérationnalisation restent approximatives. Même s’il apparait des éléments récurrents dans l’analyse de la littérature quant à sa définition (D’Hainaut, 1998 ; Raynal et Rieunier, 1997 ; Gillet, 1991 ; Jonnaert, Lauwaers et Pesenti, 1990 ; Perrenoud, 1997), des confusions demeurent et s’étendent aux autres concepts qui lui sont proches : capacités, habiletés, objectif terminal d’intégration etc.…

1.1.3. Aux plans pédagogique et didactique

Aux plans pédagogique et didactique, l’APC s’inscrit dans une orientation visant le passage d’une logique d’enseignement à une logique de construction de connaissance. Le rapport entre L’enseignement et l’apprentissage est théoriquement transformé. Avec l’approche par les compétences, on passe d’une « pédagogie par objectifs « à « une pédagogie

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situationnelle « (Jonnaert, 2002 ; Jonnaert et al, 2005 ; 2006). Autrement dit, d’une « pédagogie de décomposition en savoirs et savoir-faire observables « à une « pédagogie de l’intégration « (De Ketèle, 1980 et 2000 ; Roegiers, 2000 ; De Ketèle et Gérard, 2005). Selon ces mêmes auteurs, enseigner ce n’est plus faire apprendre des savoirs et savoir-faire de base, mais plutôt créer un cadre complexe qui nécessite la mobilisation d’un ensemble de ressources au rang desquelles les savoirs sont considérés comme des ressources internes10. Si déjà les savoirs et savoirs faire sont des ressources au développement de la compétence, c’est déclaré leur importance voire « leur puissance d’agir » (Sensevy, 2007). Ainsi, nous avons vu l’incohérence qu’il y a à opposer savoirs et compétences (Le Boterf, 2004 ; Perrenoud, 1997, 1999 ; Pastré, 2004, etc.).

Par ailleurs, au-delà des enjeux de ces controverses, il importe d’appréhender le devenir des NPE implantés au Bénin bientôt plus d’une décennie. Un même curriculum peut être perçu selon des niveaux d’interprétation différents. Ce qui importe c’est de poser des choix dépourvus d’ambiguïté à chaque niveau. Selon De Ketele (2008), le curriculum officiel (intended curriculum) est différent du curriculum réellement « implanté « dans les classes (implemented curriculum) et par voie de conséquence des parties du curriculum officiels à partir desquelles les élève construisent leurs connaissances : le « curriculum maitrisé « (achieved curriculum). Ces trois ordres de curriculum entretiennent des écarts les uns entre les autres. C’est eu égard à celui existant entre le curriculum officiel et le curriculum «implanté » que notre étude en EPS et en SVT trouve toute sa pertinence.

Les NPE en implémentation au Bénin depuis plus d’une décennie proposent des contenus d’enseignement qui semblent des difficultés aux acteurs les plus impliquées dans la réforme (enseignants et élèves). Parmi ces difficultés, les plus prégnantes sont relatives à la construction des objets de savoir et aux compétences envisagées par les situations d’apprentissage. Notre questionnement porte non seulement sur comment ces contenus sont enseignés, mais aussi et surtout sur l’épaisseur épistémique des contenus d’où l’intérêt d’un abord didactique.

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Nous avons vu que la définition des savoirs dans cette approche est différente de celle donnée par les didacticiens.

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1.2. Contraintes de la mise en œuvre de la réforme : l’intérêt d’un abord didactique

L’une des finalités du système éducatif béninois est, rappelons-le, de former des citoyens compétents et autonomes capables de se prendre en charge et de « s’auto employer » (Cf. cadre général). Les contenus de formation proposés par les différentes disciplines ont cette visée comme point de mire. En quoi ces nouvelles « matrices disciplinaires » que constituent les NPE-EPS et les NPE-SVT mettent-elles en cohérence les connaissances (déclaratives, procédurales et stratégiques), les objets et les phénomènes supports de l’apprentissage ainsi que l’ensemble de tâches et activités à proposer aux élèves (Develay, 1992). Une matrice disciplinaire selon cet auteur est la configuration épistémologique spécifique où s’applique le principe de l’intelligibilité d’une discipline ou d’une matière donnée. C’est un cadre général de référence à partir duquel se constitue un point de vue original et qui permet à la matière de prendre forme, de se structurer et de s’organiser. Ce fil conducteur est traduit par les membres de la noosphère dans les documents programmes, les guides de l’enseignant et manuels de l’élève. Quel est-il ? S’interroger sur l’implémentation des nouveaux programmes invite dans un premier temps à s’intéresser à ce qui structure leur « matrice disciplinaire ». Par ailleurs, les enseignants Béninois chargés de l’application des NPE ont construit des usages professionnels fortement ancrés dans l’approche comportementaliste, qui caractérisent les programmes antérieurs. Est-ce que ces usages ont été transformés par les NPE ? Avec quel rendement sur les acquisitions des élèves ?

Selon Masciotra et Medzo (2009), mais aussi Le Boterf (2004) et Perrenoud (1999) les savoirs sont des ressources au service des compétences. Seulement, entre l’enseignement des savoirs et le développement des compétences, il y a un pas à franchir. Et ce pas c’est celui de la fonctionnalité et de l’intelligibilité des savoirs dans l’APC. Les savoirs ne prennent sens que lorsqu’ils sont en situation. Dans le cadre de l’apprentissage scolaire, les situations sont construites par deux interactants qui, même s’ils n’ont pas les mêmes visées dans cette relation, interagissent pour construire une référence. Pour décrire, expliquer et comprendre cette dynamique entre les acteurs lors de la construction de savoirs nous avons convoqué la théorie de l’action conjointe comme cadre d’analyse.

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2. Inscription théorique de la recherche : la théorie de l’action conjointe de la

didactique (TACD).

L’utilisation de la théorie de l’action conjointe en didactique apparait comme un outil pertinent pour approcher la question de la mise en œuvre des contenus d’enseignement de ces nouveaux programmes d’études parce qu’elle rend possible une analyse de l’activité du professeur et des élèves conjointement engagés dans des interactions d’enseignement et d’apprentissage relativement à ces contenus. L’objet d’étude est le fonctionnement du système didactique que Brousseau (1988), Schubauer-Leoni (1986) et Amade-Escot (2007) qualifient de relation ternaire. L’activité du professeur et de l’élève doit être analysée conjointement parce que ces deux interactants entretiennent entre eux des liens de synergie relativement à l’enjeu didactique au point où l’action de l’un ne peut se comprendre sans celle de l’autre. Notre préoccupation est de rendre compte, dans le cadre de ces NPE, du processus d’enseignement et d’apprentissage en EPS et en SVT à partir d’observations in

situ. .

Brousseau est considéré comme le fondateur de la didactique des disciplines d’orientation Française. Cet auteur défend l’idée que la recherche sur l’enseignement doit s’intéresser au fonctionnement du système didactique : « les objets des études en didactique relèvent de la description et de l’explication des activités liées à la communication des savoirs et des transformations des protagonistes de cette communication, ainsi que des transformations du savoir lui-même» (Brousseau, 1986).

2.1. Analyse curriculaire et théorie de la transposition didactique

La capacité d’adaptation d’un curriculum tient de sa flexibilité en vertu des mutations que vivent les sociétés à travers leur évolution (Jonnaert et al, 2009). Les vastes mouvements de refondation curriculaire auxquels la plupart des systèmes éducatifs sont confrontés de nos jours participent à cette adaptation. Parmi les changements induits par ces réformes, nous retenons de la liste établie pat Jonnaert et al. (2009) les deux points ci-après sur lesquels nous concentrerons nos analyses :

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- Le type de contenus pour les apprentissages : des domaines d’apprentissage, des savoirs, de compétences, des attitudes, des valeurs, des savoir-faire, etc.

- Les orientations à donner au contenu et à la forme des ensembles didactiques : manuels scolaires, guides pédagogiques, cahiers d’activités, matériels didactiques etc. . .

D’une manière générale, les contenus des curriculums sont déclinés en termes de finalités et d’objectifs à atteindre, ainsi que de compétences à développer ou de savoirs à transmettre selon les cadres organisateurs curriculaires qui orientent la conception des programmes. Selon la tradition curriculaire, ces contenus des programmes sont le plus souvent élaborés par un groupe de personnes impliquant divers acteurs du système éducatif (Inspecteurs, Universitaires, Expert, etc .). C’est à ce groupe qu’est confiée la responsabilité de rédiger les textes des programmes. Cette écriture suppose des choix, car en effet elle impose nécessairement d’organiser des apprentissages selon une séquentialité qui ait une légitimité convaincante aux yeux de la société, des enseignants, des parents d’élèves mais aussi vis-à- vis des caractéristiques des élèves. Ces choix relèvent en didactique de ce que, depuis Verret (1975), on appelle la transposition didactique.

2.1.1. Théorie de la transposition didactique

Cette théorie met à la fois l’accent sur le savoir et sur l’activité de l’élève en réhabilitant l’idée de transmission de savoir, tout en insistant sur la nécessaire implication de l’élève dans un processus de découverte

2.1.1.1. Origine du concept.

Inventé par Verret (1975) dans le cadre de la réflexion sur le fonctionnement de l’Université qui est en voie de massification, le concept de transposition didactique a été repris par Chevallard (1985). Il a ensuite connu plusieurs évolutions .Pour l’auteur, le savoir ne peut pas être enseigné tel qu’il est produit au sein des communautés savantes car«toute pratique d’enseignement d’un objet présuppose en effet la transformation préalable de son objet en objet d’enseignement « (Verret, 1975, p. 40). Cette transformation constitue aussi une sélection car la transformation privilégie la réussite, la continuité et la synthèse. De cette

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analyse découle selon Verret (cité par Dollo, 2004) les trois éléments essentiels qui définissent la transposition didactique :

- La division de la pratique théorique en champs de savoirs délimités donnant lieu à des pratiques d’apprentissage spécialisés, c’est-à- dire la dépersonnalisation du savoir ;

- La séparation du savoir et de la personne en chacune de ces pratiques c’est-à-dire la dépersonnalisation du savoir ;

- La programmation des apprentissages et des contrôles suivant des séquences raisonnés permettant une acquisition des progressive des expertises c’est –à- dire la programmabilité de l’acquisition du savoir.

Chevallard (1985) reprend le terme de transposition didactique, et développe les principaux concepts de Verret (dépersonnalisation, désyncrétisation, programmabilité publicité et contrôle) en s’appuyant sur les travaux conduits en didactique des Mathématiques. Dans son ouvrage, Chevallard reprécise le sens du concept, insiste sur l’importance du savoir. Il indique que : « le ‘travail’ qui, d’un objet de savoir à enseigner, fait un objet d’enseignement est appelé la transposition didactique » (Chevallard, 1985, p.39). Le passage de l’objet de savoir à un objet à enseigner est réalisé par les membres de la noosphère, c'est-à-dire appartenant à des institutions décisionnelles du système éducatif. Pour accomplir ce travail, ces différents acteurs sont contraints d’opérer des choix parmi la floraison de références jugées pertinentes, de concevoir des activités pédagogiques, et de rédiger des documents pour les enseignants et/ou les élèves etc. A ce temps de la transposition didactique externe, succède celui de la transposition interne où les acteurs de l’action didactique se retrouvent dans un face à face pédagogique. C’est dans cette perspective que Chevallard introduit à la suite de Brousseau, le concept de système didactique pour désigner les relations entre l’enseignant, le savoir et l’enseigné.

2.1.1.2. Notion de pratique sociale de référence

La théorie de la transposition didactique a connu d’important développement dans le champ des didactiques disciplinaires et a subi de nombreuses évolutions suivant les champs disciplinaires de référence Dans la même période Martinand (1986) revisite cette théorie à

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partir d’une critique de la notion de « savoir savant » en lui substituant celle de pratiques sociales de référence (PSR).

Le concept de pratique sociale de référence a été introduit par Martinand (1989) dans le but d’élargir le concept de savoir savant utilisé par Chevallard dans la définition de la théorie de la transposition didactique. Pour Martinand, certaines activités de production ou d’ingénieries, voire des activités domestiques, pourraient aussi bien servir de référence à des activités scolaires. Ces pratiques sociales de référence s’éloignent d’autant plus des savoirs savants que ce sont essentiellement des savoirs expérientiels, des connaissances en action qui sont dans la plupart des cas difficiles à formaliser. Le problème soulevé par Martinand est important parce qu’il existe des disciplines scolaires (la technologie, certains enseignements technologiques et professionnels, les langues pour n’en citer que quelques- uns) où les références à l’enseignement ne s’identifient pas au savoir savant. Elles sont constituées par des pratiques (Terrisse, 2001). C’est aussi le cas de l’éducation physique et sportive et d’autres disciplines scientifiques comme les SVT. Selon Astolfi et Develay (1989), l’idée de pratique sociale de référence permet de penser aux diverses caractéristiques d’une transposition didactique raisonnée.

2.1.1.3. Transposition didactique externe et interne.

Comme nous l’avons précédemment évoqué, la transposition didactique au sens large correspond au processus qui part d’un objet de savoir à un objet d’enseignement en passant par un objet à enseigner. Chevallard (1985) introduit les notions de transposition didactique externe et de transposition didactique interne pour rendre compte de deux moments transpositifs. Elle est dite externe lorsqu’on passe d’un objet de savoir à un objet à enseigner, c’est le travail des concepteurs de programmes. Alors qu’elle est dite interne lors du passage de l’objet à enseigner à l’objet d’enseignement, c’est ce qui se joue dans la classe lors de la mise en œuvre du programme.

Autrement dit, la transposition didactique externe, émane de la noosphère (par exemple les concepteurs des programmes en EPS et en SVT) qui légitime au sein de chaque institution didactique certains savoirs et les désignent comme devant être enseignés.

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Quant à la transposition didactique interne, elle relève de la manière dont « les objets de savoirs mis à l’étude et enchâssés in situ dans des dispositifs ou des tâches d’apprentissage sont reconfigurés et co-construits par les partenaires de la relation didactique à travers leurs interactions » (Amade-Escot, 2007, p. 16). La transposition didactique constitue le premier phénomène décrit par les didacticiens. Elle permet de retracer, depuis son élaboration et sa formalisation au niveau des pratiques sociales, le trajet suivi par le savoir jusqu'à la façon dont les acteurs du système didactique construisent conjointement la référence en situation. Les développements théoriques les plus récents, en didactique comparée, invitent à situer l’investigation des phénomènes transpositifs dans l’action conjointe pour « considérer ce travail de coproduction des connaissances à la lumière des pratiques culturelles qui la légitiment « (Schubauer-Leoni, et Leutenegger, 2005, p. 408). On voit bien là un mouvement d’étude vers le modèle de l’action conjointe qui semble privilégier une logique d’analyse des pratiques effectives (Venturini, Amade-Escot, Terrisse, 2002). D’ailleurs, dans le mouvement esquissé par les travaux sur le modèle de l’action conjointe, c’est la logique ascendante qui est privilégiée pour traiter des phénomènes transpositionnels (Schubauer-Leoni et Leutenegger, 2005).

En EPS et en SVT, les processus transpositifs ont fait l’objet de nombreuses recherches. La transposition didactique soulève la question de l’écart entre les savoirs de référence et ceux désignés pour être enseignés. Ce concept permet de comprendre en EPS quelles sont les contraintes transpositives en APSA. Pour Amade-Escot (2007), tout projet d’enseignement des savoirs s’accompagne de leur découpage en éléments et leur mise en scène dans des dispositifs permettant leurs études. Ce processus s’accompagne d’inévitables transformations (en termes de réduction ou de décontextualisation) susceptibles d’expliquer les difficultés de transmission. Les découpages et la désyncrétisation chronologique auxquels est le plus souvent astreint l’objet culturel que constitue l’APS, parce que l’on pense que la sommation permettra de reconstituer la globalité (Marsenach, 1991), relèvent de phénomènes transpositifs. Au final, des difficultés de transmission apparaissent mettant en question la légitimité des savoirs enseignés. Les nombreux travaux de recherche ont montré la nécessité d’un travail de formalisation des APSA en amont dans l’élaboration des programmes, si l’on veut maintenir le sens culturel de l’activité.

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En SVT, le savoir à enseigner ne fait pas toujours référence à des expériences précises ou des