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Typologie et traitement de la polysémie

III- 2.1. Le verbe passer

III-2.1.1. Etude de la distance entre les entrées du verbe passer dans LVF

Passer est le verbe qui présente le plus grand nombre d’entrées (61) dans LVF (cf. Annexe 14 – Le verbe passer dans LVF »). L’étude de sa polysémie est donc complexe. La multiplication des entrées dans LVF tient d’abord à la volonté des auteurs de proposer un inventaire exhaustif et une description très fine des emplois de chaque verbe. Les principes méthodologiques de classification visent, quant à eux, à rassembler des emplois communs à plusieurs verbes. Ce double objectif a pour effet une représentation éclatée du lexique. Que deux emplois présentent des variations syntaxiques et sémantiques majeures ou des nuances sémantiques mineures ils sont potentiellement susceptibles d’être distingués de la même manière par des changements d’opérateurs et / ou de classes génériques.

Outre le grand nombre d’entrées dans LVF, les difficultés inhérentes au verbe passer

viennent du fait que ses différents emplois ne se distinguent pas obligatoirement par des constructions morpho-syntaxiques différentes. Ainsi, la structure nue N1 V convient aussi bien à des exemples du type : la voiture passe (qqp), le joueur passe (son tour) et le temps passe. Il est donc indispensable de prendre en compte la catégorie sémantique des actants, les rôles sémantiques et les équivalences fonctionnelles entre des actants de nature différentes pour pouvoir distinguer ses différentes constructionsGDC.

Sur le plan méthodologique, l’objectif étant de situer l’emploi transitif direct locatif du type « déplacement » via lieu de passage, il est nécessaire de faire des choix visant à simplifier l’étude synchronique. Pour répondre à ce besoin de simplification, nous avons décidé de prendre les données lexicographiques du TLFi comme point de départ de l’analyse synchronique (cette démarche s’inscrit dans la lignée de celle proposée par E. Pauly pour l’analyse de la polysémie des verbes aller, partir et tirer, cf. Pauly : 2010, p.157). L’objectif est d’utiliser les informations lexicographiques pour faire émerger de grands types d’emplois associés au verbe passer et les mettre directement en relation avec les entrées du verbe dans

LVF. Le calcul de proximité sera effectué sur la base de ce croisement.

Dans LVF, les entrées de passer relèvent majoritairement de la classe M (« verbes de mouvement ») en association avec l’opérateur générique « f.mvt » (« faire un mouvement ») :

02 : Les cigognes passent dans le ciel. 15 : Le facteur n'est pas encore passé.

03 : L'eau passe dans le tuyau. 16 : La lumière passe à travers ce tissu. Le café passe.

04 : On passe à côté de la mairie, devant la boulangerie. 17 : Les pommes de terre passent très bien.

05 : La balle passe au-dessus / près / loindenous. 19 : Le courant passe dans le fil et la lampe s'allume.

06 : Un sourire passe sur ses lèvres. 30 : On est passé par une grande école.

08 : La voiture passe au vert. 31 par : On passe par P pour obtenir cette faveur.

11 : Le jupon passe dessous la robe. 35 : Les semaines passent vite. Les vacances se passent bien.

12 : On passe par la Provence. La Seine passe par / à Paris. 42 : On passe le bras par la portière.

13 : Une seule droite passe par deux points. 53(ê) : Cette époque est passée.

14 : On ne fait que passer. On est passé hier au bureau. 56(s) : Les choses se passent très bien.

Quinze entrées sont associées à la classe E (« verbes de mouvement d’entrée et de sortie »), parmi lesquelles l’entrées 38 qui correspond à l’emploi transitif direct locatif du type déplacement via un lieu de passage. Les entrées de la classe E présentent, pour la plupart (12 sur 15), l’opérateur générique « ire » (« aller qp ») :

01 : On passe dans la salle pour aller dans la cuisine. 23 : On passe à l’opposition. On passe à l’ennemi.

07 : On passe P dans la côte. 24 : On passe à un vote à mains levées / à une chose sérieuse.

09 : La loi passe au Parlement. 27 : Le domaine passe au fils.

18 : L’air passe dans la pièce par les fissures. 38 : On passe la porte d’entrée.

21 : On passe de la salle à manger à un petit salon. 39 : On a passé l’heure. Le dollar passe la barre des 6 francs.

22 : On passe en classe supérieure, à l’échelon des prof. 43 : On passe ses vacances au bord de la mer.

L’entrée 41 est associée à l’opérateur générique « f.ire » (« faire aller qqp ») : Passer41 : On passe les marchandises, des étrangers en fraude.

Les entrées 25 et 26 impliquent l’opérateur complexe « ex D état » (« sortir d’un état ») : Passer25 : On passe d’une idée à l’autre.

Passer26 : La température est passée de 20 à 5 degrés.

Six entrées appartiennent à la classe L (« verbes locatifs ») :

« lc » = « être, mettre à telle place » « lc.qp » = « être ou mettre en tel lieu » 34 : Les dépenses personnelles passent en frais généraux. 20 : On passe à la télévision.

45 : On passe un manteau sur ses épaules. 54(s) : La scène se passe au Moyen Age.

49 : On passe la cire sur les meubles. 55(s) : Ce qui se passe aujourd’hui est étrange.

Cinq entrées relèvent de la classe H (« verbes d’état physique ou de comportement »), en association avec les opérateurs « ag » (« agir d’une certaine manière »), « ê.e.état » (« être dans un certain état »), « f.éclat » (« produire de la lumière ») et « av.som » (« avoir tel état du corps ») :

10 : L’erreur / çapasse pour cette fois. « ê.e.état » 37 : Les couleurs passent. Le soleil passe les couleurs. « f.éclat »

29 : On passe par des moments difficiles. « ag » 60 : Le vieux a passé dans la nuit. « av.som »

44 : On a passé le bac avec mention. « ag »

Quatre entrées sont associées à la classe D (« verbe de don ») et mettent en scène les opérateurs « dat » (« donner qc / qn à ») ou « abda » (« enlever à / obtenir de », ici sens « subir ») :

50 : On passe un livre à un ami. « dat » 59 : Le joueur passe le ballon à son coéquipier. « dat »

51 : On passe son rhume à P. « dat » 32 : On passe à la visite médicale. On passe la visite, l’examen. « abda » Trois entrées appartiennent à la classe X (« verbes à statut grammatical »). Deux mettent

en scène l’opérateur « aux état » (« auxiliaire d’état ») et une l’opérateur « fin » (« résultatif ») :

Passer28 : On passe chef de service. « aux état »

Passer33 pour : On passe pour fous. Ce plan passe pour être intelligent. « aux état » Passer 36 : La douleur va passer. Cela passe avec l’âge. « fin »

Les huit dernières entrées de passer se répartissent entre les classes C, F, N, P, R et U : - Classse C (« verbes de communication »), opérateur « dic » (« communiquer qqch ») : Passer61 : Qu’est-ce qu’on a passé à P. On passe un savon à P.

- Classe F « verbes de type frapper ou toucher », « ict » (« frapper ») et « tact » (« toucher ») : Passer40 : On a passé tous les obstacles facilement. « ict »

Passer52 : On passe les meubles à la cire. On se passe les lèvres à la crème. « tact » - Classe N (« verbe de type munir / démunir »), op. « dmu » (« démunir ») :

Passer57(s) : On se passe très bien de le voir, de télévision.

Passer58(s) : On se passe de révision, de revoir le texte.

- Classe P (« verbes psychologiques »), opérateur « ger.mens » (« diriger son esprit / avoir telle pensée ») :

Passer46 : L’acteur a passé une réplique.

- Classe R (« verbes de réalisation »), opérateur « fab représentation » (« faire une représentation ») :

Passer47 : On passe des disques à cette soirée. On passe ce film au cinéma.

- Classe U (« union, réunion, mise en relation »), op « dli » (« délier, libérer, filtrer ») : Passer48 : On passe les légumes, le café dans cet appareil.

Le verbe passer fait l’objet de trois articles dans le TLFi (cf. « Annexe 15 – Passer TLFi

version simplifiée »). Le premier regroupe la plupart des emplois du verbe et se divise en deux sections, respectivement associées au domaine spatial (1ère section) et au domaine temporel (2ème section). Le deuxième article (Passer 2) est consacré aux emplois de passer

relevant spécifiquement du domaine du droit, de l’économie, de la politique et de l’administration. Le troisième article s’attache à l’utilisation de passer en tant que verbe à statut grammatical (verbe copule ou attributif).

Pour mettre en perspective les informations lexicographiques et les entrées de LVF, nous avons résumé les trois articles sous forme de tableaux et avons associé chaque définition aux entrées de LVF correspondantes. Le résultat présenté ci-après ne fait pas apparaître les définitions non illustrées dans LVF (cf. « Annexe 16 – Passer croisement TLFi / LVF » pour la version complète des tableaux). Les entrées 12, 33, et 39 sont associées à deux définitions différentes et apparaissent donc deux fois.