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WAI-S Relation

1.6. Étude pilote des relations entre la capacité à décoder les signaux non-verbaux et les performances des psychothérapeutes, réalisée auprès d’un groupe de thérapeutes

1.6.3. Échelles administrées et données recueillies

1.6.3.9. Variables contextuelles collectées au niveau des thérapeutes

Nous avons enregistré dans notre enquête les variables âge, sexe, profession, niveau de diplôme, orientation thérapeutique, expérience clinique en années, nombre d’heures de supervision suivie sur les trois derniers mois, et nombre de jours de formation sur l’année précédente.

Nous avons interrogé les thérapeutes sur la quantité de temps dévolue par chacun à la pratique délibérée sur le dernier mois, pour éviter un biais de rétrospection, plutôt que de les interroger sur leur quantité de pratique délibérée réalisée sur l’année précédente ; nous avons également demandé aux thérapeutes - du fait de notre design rétrospectif - et à des fins de contrôle si cet agenda d’entraînement était un agenda représentatif de leur entraînement habituel à la pratique délibérée. La dimension de pratique délibérée interrogée renvoyait à la question spécifique formulée par notre collègue Daryl Chow (Chow et al., 2015) dans son travail princeps sur l’impact de la pratique délibérée sur l’efficacité des psychothérapeutes : « Combien d’heures avez-vous passé seul, fortement engagé dans des activités reliées à l’amélioration des vos capacités de thérapeute ». Nous avons enfin contrôlé si les thérapeutes

avaient suivi des formations à la reconnaissance des émotions sur les trois années précédentes et en particulier des formations à la reconnaissance des micro-expressions. En effet, du fait de notre design rétrospectif, il était également nécessaire de s’assurer qu’aucun entraînement formel n’avait pu impacter la performance des thérapeutes dans la reconnaissance des signaux non-verbaux qui est, en dehors de ces conditions d’entraînement, réputée suffisamment stable.

1.6.3.10. Analyses statistiques

Les traitements statistiques ont été réalisés avec le logiciel SPSS (V25) et le logiciel SAS (9.04) pour l’analyse Multiniveau. Il s’agit d’une une méthodologie qui permet de traiter des données pour lesquelles, le contexte exerce une importance significative. Dans les études cliniques des effets dus aux psychothérapies, il existe souvent une relation de dépendance entre les données recueillies et les contextes de soins. Les patients de l’étude de Anderson et al. (2009) par exemple, ont été traités par vingt-cinq thérapeutes, et à chaque thérapeute était associé un groupe de patient, créant une relation de dépendance entre le thérapeute et les patients (ses données). Intuitivement, les patients qui sont traités par un même thérapeute sont censés partager plus de caractéristiques communes et donc à être plus semblables à leurs homologues traités par le même thérapeute (en termes de réception du traitement et donc de résultats), qu’à ceux traités par un des vingt-quatre autres thérapeutes de l’étude. Ces patients appartiennent donc à un contexte de soins, ou à un niveau supérieur d’abstraction, à un groupe qui est le groupe défini par leur thérapeute particulier. Il est ainsi possible de distinguer un premier niveau inférieur dans les données, le niveau des données du patient, où il est possible de procéder à une étude des différences interindividuelles. Et comme ces patients étaient traités par un des vingt-cinq thérapeutes respectifs, leurs données individuelles de ce premier niveau sont donc « nichées » (de l’anglais « nested ») et reliées au contexte de soins de leur thérapeute, qui représente un deuxième niveau. La relation de dépendance hiérarchique des données récoltées au niveau des patients (niveau 1) en relation à leur thérapeute à un niveau supérieur (niveau 2) implique une plus grande prudence dans l’analyse de la différence des données

obtenues par les patients au niveau 1, comme par exemple leur réussite au traitement ou le changement thérapeutique constaté, puisque les données de chaque patient traité par le même thérapeute ne sont pas de ce fait totalement indépendantes.

L’analyse multiniveau répond à ces enjeux en permettant de partitionner la variance des résultats entre les données qui sont récoltées au niveau des patients et donc attribuables aux patients et les données attribuables aux contextes de soins auxquels appartiennent ces patients (les différents thérapeutes). De manière simplifiée, s’il existe plus de variance des résultats entre les données de chaque patient qu’entre les données de chaque groupe de patients défini par le même thérapeute, le contexte de soins (thérapeute) semble logiquement moins bien expliquer la différence des résultats que les différences dues aux patients considérés séparément ; et le niveau thérapeute n’influence vraisemblablement pas les données : ces données pourraient être analysées classiquement comme si les patients étaient indépendants, c’est-à-dire au niveau des données des patients eux-mêmes sans tenir compte de l’influence des variables reliées aux thérapeute. Dans le cas contraire, le contexte « thérapeute » explique une partie significative des différences de résultats observées au traitement et il s’agira de traiter les données en analysant les variables au niveau des thérapeutes, ce que permet de faire l’analyse multiniveau.

1.6.4. Résultats

Afin d’éprouver nos hypothèses, nous avons réalisé différents traitements statistiques.

Pour mémoire, notre hypothèse H2 postulait que la capacité à reconnaitre des signaux non verbaux par le biais de différents canaux (corps, visage, voix) pouvait être associée aux résultats de la psychothérapie. Notre hypothèse H3 postulait que la capacité à reconnaitre les micros expressions était significativement plus corrélée avec les résultats de la psychothérapie que la capacité à reconnaitre les macro expressions. Notre hypothèse H4 postulait que la capacité à reconnaitre les micro expressions négatives étaient plus spécifiquement associée aux résultats du traitement.

Enfin, notre hypothèse H5, postulait qu’en condition de feedback instrumental, la capacité à décoder les signaux non verbaux était associée à de meilleurs résultats amenant un premier argument à l’hypothèse supplétive du feedback instrumental.

Nous avons réalisé une analyse de corrélation entre les scores obtenus par les thérapeutes aux tâches de reconnaissance des signaux non verbaux dans la voix, le visage et le corps (en macro et en micro) et entre les résultats obtenus au traitement pour tester ces différentes hypothèses. En effet, trouver une corrélation significative entre les résultats au traitement et les capacités des thérapeutes allait dans le sens de l’hypothèse H1, H2 et H5.

Trouver une taille de l’effet plus importante entre la reconnaissance des micro- expressions et les résultats (en comparaison des macro expressions) apportait des éléments de réponse pour l’hypothèse H3.

Nous avons donc analysé ces résultats globaux pour répondre à ces hypothèses particulières.

Nous avons d’abord à des fins exploratoires, et bien que cette analyse soit moins fiable, étudié ces corrélations au niveau des scores des patients (où les mesures des capacités des thérapeutes sont répétées puisque les patients « partagent » pour certains le même thérapeute), puis, au niveau des scores de l’échantillon de thérapeutes, à l’aide de la modélisation multiniveau. Enfin, nous avons corrigé ces analyses en tenant compte des seuils de sévérité, c’est à dire de la détresse psychologique, présentés par les patients traités dans cet échantillon.