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WAI-S Relation

1.6. Étude pilote des relations entre la capacité à décoder les signaux non-verbaux et les performances des psychothérapeutes, réalisée auprès d’un groupe de thérapeutes

1.6.3. Échelles administrées et données recueillies

1.6.4.8. Conclusions sur les hypothèses de départ.

Nous allons considérer seulement les résultats les plus conservateurs, c’est-à-dire non pas les analyses de corrélations exploratoires réalisées au niveau des patients, qui nous l’avons vu sont potentiellement biaisées, mais les résultats de nos dernières analyses entre les scores de changement au traitement ajustés par l’analyse multi-niveau, et les scores des capacités de nos thérapeutes à reconnaître les différents signaux non verbaux.

Dans cette étude, nous avions posé l’hypothèse principale que les habiletés des thérapeutes à décoder les signaux non verbaux puissent être significativement reliées aux résultats de la psychothérapie (H1). Les résultats vont dans le sens de nos hypothèses, en ce qui concerne la reconnaissance des signaux véhiculés par la voix uniquement (en condition RS- Réorganisation aléatoire des segments). L’effet de la joie est ici, tendanciel, et mériterait d’être exploré plus avant dans une nouvelle recherche.

Nos résultats préliminaires ne vont pas dans le sens des hypothèses H2, H3, et H4 puisque nous n’avons pas retrouvé de différence dans les relations entre la reconnaissance des différentes dimensions de signaux non verbaux, que ce soit au niveau des dimensions positives ou négatives de ces signaux, ou au niveau des macro-expressions et des micro-expression, en considérant seulement les données observées au niveau des thérapeutes.

Par contre, notre résultat préliminaire de lien entre la reconnaissance de signaux présents dans la voix (RS) et des résultats au traitement, va, nous le pensons, dans le sens de suggérer qu’il puisse exister un effet supplétif ou modérateur du feedback instrumental de la pratique ROM, aux signaux de feedback naturalistes présents dans les séances de psychothérapie délivrées par les thérapeutes de notre échantillon. En effet, tous les thérapeutes sont en condition de feedback instrumental, dans notre étude, mais l’effet d’une relation entre la reconnaissance des signaux non verbaux et les résultats au traitement est tout de même présent, et semble important (reconnaissance des signaux de la voix-RS). Un effet dû au feedback n’exclut pas que certains thérapeutes conservent une meilleure capacité discriminatoire des signaux non verbaux et encore une fois la corrélation n’est pas un effet causal. Toutefois la capacité de reconnaissance des signaux de la vois (RS) est liée aux résultats en condition feedback, l’effet feedback ne viendrait donc pas simplement annuler ou remplacer les signaux naturels et lisser les différences interindividuelles chez les thérapeutes dans la capacité à décoder les signaux non verbaux (ce qui correspondait à l’hypothèse palliative de l’effet du feedback instrumental ou au modèle GPS), mais viendrait plutôt, nous le postulons, interagir avec les capacités des thérapeutes à détecter la communication non verbale. De surcroît, l’association entre les résultats et la meilleure reconnaissance des signaux de la voix par les thérapeutes n’opèrerait que pour les patients qui sont les moins sévèrement affectés par la détresse psychologique, dans les mêmes conditions de traitement orienté par le feedback.

1.6.5. Discussion

Cette étude n’est bien entendu pas exempte de nombreuses limitations : d’abord les données ont été collectées de manière rétrospective et ce protocole de recherche n’autorise donc pas à tirer de conclusions de nature causale sur les « effets » (au sens statistique du terme) que nous aurions pu observer. Toutefois, nous pouvons noter que dans les recherches concernant les psychothérapies, les effets causaux peuvent assez difficilement être révélés dans les conditions naturelles du terrain, puisqu’ils nécessitent la variation systématique des conditions expérimentales, en toutes choses égales par ailleurs. Nous avons toutefois procédé à l’examen de relations entre des variables dont la mesure est censée être réputée temporairement stable (la reconnaissance des signaux non-verbaux), sans entraînement spécifique.

Ensuite nos échantillons sont de tailles réduites. Et bien que pour nos analyses initiales nous ayons veillé à ce qu’à chaque niveau d’analyse nous obtenions bien plus de dix unités, condition nécessaire à l’utilisation de ces modèles, nos analyses sur les échantillons pour lesquels la sévérité clinique avait été ajustée, ont pu pâtir de la diminution des effectifs pour chaque thérapeute.

Nos différents thérapeutes ont également administré des mesures de résultats différentes. Et bien que notre démarche de standardisation des effets soit statistiquement correcte, il est bien connu que des instruments de changement différents puissent produire des tailles d’effets, dues au même traitement, différentes. Avec des instruments mesurant des symptomatiques plus précises qui produiraient des tailles d’effets plus importantes. A ce sujet également, l’attrition importante entre le nombre de clients initialement disponibles et le nombre final de clients disponibles, dont les données complètes permettaient de calculer une taille de l’effet, ont pu être de nature à affecter nos résultats.

Nonobstant, cette étude est à notre connaissance la première étude visant à investiguer les relations entre les capacités à décoder les messages non-verbaux par les psychothérapeutes

et leurs résultats, pour des thérapeutes engagés dans une pratique ROM. De plus, il s’agissait d’utiliser une tâche de performance spécifiquement créée pour évaluer la capacité des thérapeutes à détecter les micro-expressions émotionnelles à l’aide de la présentation de « véritables micro-expressions » ce qui selon nous est également une démarche originale. Une extension de cette étude avec un design prospectif est d’ores-et-déjà considérée, avec la possibilité de fiabiliser la distribution de la tâche de reconnaissance des micro-expressions, et de la standardiser.