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REMERCIEMENTS D’AMAËLLE

PROFESSIONNELS DE SANTE

4. RESULTATS DES PATIENTS

5.3 VALIDITE DE L’ETUDE

5.3.1 Forces

5.3.1.1 Originalité du sujet

A notre connaissance, il s’agissait de la première étude sur le sujet. Dans ce contexte, la méthode par théorisation ancrée s’est avérée particulièrement judicieuse. Elle a permis de générer de nouvelles théories en restituant fidèlement le ressenti et l’expérience des personnes interrogées, sans les faire entrer dans des cases préconçues.

5.3.1.2 Intérêt suscité par le sujet

La thématique de notre thèse a suscité un immense intérêt. Cela explique en grande partie que les personnes sollicitées aient toutes répondues présentes dès notre première demande. Nous n’avons pas eu à les relancer.

« C’est une question extraordinaire »

Les personnes interrogées ont perçu l’entretien comme une sorte de thérapie ; une occasion de clarifier leur ressenti vis-à-vis de leur santé et de dresser une ligne de conduite personnelle. Certains patients nous ont dit être reconnaissants de les avoir interrogés.

« Merci de m’avoir donné à exister »

5.3.1.3 Pluralisme des points de vue étudiés

Interroger à la fois des patients et des professionnels de santé en tant que patient, nous a permis d’accéder à une vue d’ensemble sur le sujet.

5.3.1.4 Validité de l’étude

La grille internationale COREQ a été utilisée comme ligne directrice afin de respecter les critères de qualité d’une étude qualitative (20).

Les caractéristiques des échantillons étaient variées, tant sur le plan des caractéristiques socio-démographiques (âge, sexe, statut marital et enfants à charges), que professionnelles, que médicales (antécédents et recours ou non aux médecines alternatives).

Le canevas d’entretien a été au préalable testé avec quelques patients. Il a été revisité à plusieurs reprises.

Les données ont été générées à l’aide d’un logiciel performant : NVivo for Mac®. Nous avons eu recours au double codage (deux investigateurs) et à la triangulation des chercheurs (deux investigateurs et directeur de thèse).

La saturation des données a été atteinte. Cependant, avec un nombre plus important d’entretiens nous serions peut-être allées plus loin.

5.3.2 Faiblesses

5.3.2.1 Statut des chercheurs

La qualité d’interne en médecine générale des chercheurs a pu influencer la nature des réponses des personnes interrogées.

5.3.2.2 Expérience limitée des chercheurs

Notre manque d’expérience en méthode qualitative était un facteur limitant.

Les entretiens ont probablement manqué d’approfondissement. Nous avons eu des difficultés à nous approprier les techniques de relance et de reformulation, en particulier pour les focus groups.

Il nous a semblé que le patient s’exprimait plus librement lorsque nous étions positionnées à côté de lui.

5.3.2.3 Méthode d’échantillonnage des patients

Les personnes recrutées étaient connues des chercheurs (amis, famille) ou suivies au sein des cabinets médicaux où ils exerçaient. Ces patients ne ressentaient aucune défiance envers le système de soins.

5.3.2.4 Entretiens en groupe

Nous avons été frappées par la difficulté que les professionnels de santé avaient à s’exprimer en tant que patients. Nous nous sommes interrogées sur les facteurs explicatifs. L’expression en présence d’un groupe de confrères pouvait avoir une influence. Il aurait été utile de les réinterroger en entretiens semi-dirigés pour comparer les données.

5.4 PERSPECTIVES

5.4.1 Actualiser la définition de la bonne santé selon l’OMS

Selon le Préambule à la constitution de l’OMS datant de 1946 (2), « la santé est un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie et d'infirmités ». Nous avons confronté cette définition aux points de vue des personnes interrogées.

5.4.1.1 Principaux points communs

Cette définition parle de la santé et non pas uniquement de ce qu’elle n’est pas (absence de maladie, absence d’infirmité).

Elle renvoie au caractère subjectif, c’est-à-dire à l’appréciation de chaque individu, à son propre ressenti.

Elle tend vers un idéal de santé : le bien-être.

Les dimensions physiques, mentales et sociales sont intégrées dans la définition.

5.4.1.2 Divergences

Le terme « état » renvoie à un aspect statique. Cependant, à travers notre étude, la santé relevait plutôt d’un équilibre, dans lequel la contrainte imposée par le suivi des règles d’hygiène de vie, le handicap et les symptômes étaient négligeables comparés au plaisir de vivre.

Les malades et les personnes handicapées sont exclus de la définition de la bonne santé selon l’OMS. Pourtant, certains patients interrogés se sentaient en bonne santé alors qu’ils se savaient malades. Selon eux, la santé reposait principalement sur la capacité qu’ils avaient à accepter et à gérer leurs problèmes de santé.

L’autonomie, la capacité à juger par soi-même et pour soi-même sont apparues comme des valeurs indispensables au ressenti de bonne santé pour les personnes interrogées dans notre étude. Cette notion n’est pas évoquée dans la définition de l’OMS.

Selon les personnes interrogées, l’état de bien-être complet s’apparentait plus à une direction à ne jamais perdre de vue qu’à un réel objectif à atteindre.

5.4.1.3 Synthèse des résultats

Selon les résultats de notre étude, la bonne santé correspondrait à la capacité de gérer ses ressources physiques, intellectuelles, sociales et affectives, en autonomie, de façon à maintenir un équilibre dans lequel la souffrance, le handicap, les contraintes imposées par le suivi des règles d’hygiène de vie, sont négligeables comparés au plaisir de vivre.

5.4.2 S’interroger sur la place accordée à la promotion de la santé dans notre société

Contrairement à ce qui se fait dans de nombreux pays, la promotion de la santé n’a jamais été un axe de nos politiques de santé, et la prévention a été longtemps le parent pauvre de notre système de santé (21).

Selon l’INPES : « La promotion de la santé comprend l’ensemble des actions concourant à la santé de la population, en renforçant notamment les compétences psychosociales des individus et des groupes, contrairement à la prévention qui vise à empêcher la survenue ou l’aggravation de la maladie en réduisant ou supprimant les facteurs de risque, en organisant le dépistage, en évitant ou retardant les complications, ou en favorisant la réinsertion des personnes atteintes » (21).

Aujourd’hui, dans les pays développés, 40 % de la mortalité prématurée (c’est-à-dire survenant avant l’âge de 65 ans) serait imputable aux conduites individuelles, au premier rang desquelles on trouve le tabagisme, la nutrition et le manque d’exercice (22).

L’enjeu que représente la prévention des « conduites à risque » est illustré par une étude selon laquelle les personnes qui font de l’exercice physique, ont une consommation modérée d’alcool, ne fument pas et mangent suffisamment de fruits et légumes peuvent espérer vivre quatorze ans de plus que celles qui n’ont adopté aucune de ces quatre « règles de bonne conduite » (23).

La définition de la bonne santé semblait peu précise voire même sujette à débat. Certains patients nous ont même dit qu’ils préféraient revoir quelques notions sur le sujet avant de débuter l’entretien.

« Vous auriez dû me donner à réviser avant ! »

5.4.3 Prendre conscience du rôle potentiel que l’on a en tant que médecin

Le rôle du médecin, dans l’entretien de la santé, est apparu peu prépondérant. Le champ d’action de ces derniers ne serait pas assez axé sur la prévention.

En effet, selon un sondage IFOP de 2014, l’acteur le plus légitime pour assurer le suivi des bonnes pratiques en matière de prévention n’est pas le médecin, ce sont les parents, dans l’éducation de leurs enfants (24).

Dans le cadre des orientations de la loi sur la Sécurité sociale de 2004, le chapitre 1 de la convention sur le parcours de soins et la coordination précise que la relation de proximité du médecin traitant avec ses patients le situe au cœur du développement de la prévention. En pratique, pour revaloriser ce rôle, il est important de bâtir des démarches et des outils de prévention et d’éducation pour la santé (21).

Dans le but de promouvoir l'association des patients à la qualité et à la sécurité de leur prise en charge, certains sites proposent aux patients l’auto-mesure des différents paramètres de leur santé (25) (26).

Dans cette même optique, nous avons réfléchi à un outil d’évaluation de la santé perçue par le patient, utilisable en consultation.

Outils d’auto-évaluation de la santé perçue

Cet outil pourrait être une introduction à un entretien motivationnel.

Dans un premier temps, le patient auto-évaluerait son état de santé en déplaçant le curseur entre les extrêmes : « je me sens en parfaite santé » et « je me sens en très mauvaise santé ». Dans un second temps, il justifierait son ressenti en expliquant quels sont les facteurs d’influence. Il est important de comprendre le point de vue du patient sur sa situation, ses besoins et les moyens d’y répondre (27).

Il s’agirait, pour le médecin, d’aborder le sujet de l’entretien de la santé sous l’angle d’une auto-évaluation. Il pourrait ainsi l’aider à réadapter volontairement son comportement pour le mener vers la santé.

Cet outil pourrait s’avérer particulièrement intéressant à utiliser avec les patients en défiance ou en refus de soins. Telle l’image d’une clef dans la serrure, il serait prétexte à ouvrir des portes et comprendre potentiellement ce qu’ils attendent de leur médecin.

« Je me sens en parfaite santé » « Je me sens en très mauvaise santé »

6. CONCLUSION

Etre en bonne santé semble être un processus complexe, variable, et une promotion de sa propre santé dépend avant tout de la perception de chacun de la bonne santé.

Pour les professionnels de santé, leur propre bonne santé était vécue comme un équilibre entre deux grands concepts : « accepter de s’intégrer dans le parcours de soins actuel » et « être libre de vivre sa vie ».

Ils ont évoqué l’existence de « facteurs – curseurs », qui permettaient de créer une balance entre ces deux concepts.

Finalement, leur vécu de la bonne santé correspondait à des modèles d’ajustement constant.

Deux concepts indépendants ont aussi été mis en évidence : le « soignant – patient » et le « médecin – patient ».

Adopter le statut de patient, en tant que professionnel de santé, a été évoqué par tous comme étant une situation complexe. Les professionnels de santé paramédicaux (infirmiers et kinésithérapeutes) et les médecins évoquaient certaines raisons communes, mais la modélisation de cette complexité s’est avérée différente entre ces deux groupes.

Pour les patients, être en bonne santé était à la fois « être soi-même », « exister dans la société » et « se soigner ».

Etre soi-même, c’était s'équilibrer entre « des critères de base », « avoir des doutes et des inquiétudes » et « s’écrire une ligne de conduite ».

Pour exister dans la société, il s’agissait de « trouver sa place en tant qu’être humain » et de « maintenir son équilibre en tant que patient ».

Les patients disaient se soigner à la fois « en confiance » et « avec réticences ».

Afin d’atteindre l’état de bonne santé entre tous ces concepts, les patients devaient faire évoluer leur équilibre, pour enfin tendre vers un idéal de bonne santé : « être bien, tout simplement ».

La perception de la bonne santé selon les patients correspondrait donc à la capacité à gérer de façon autonome ses ressources physiques, intellectuelles, sociales et affectives, afin de maintenir un équilibre dans lequel la souffrance, le handicap, les contraintes imposées par le suivi des règles d’hygiène de vie, sont négligeables comparés au plaisir de vivre.

Au terme de cette étude, il semble que selon les patients, le rôle du médecin généraliste n’est pas au centre des facteurs déterminants l’entretien de la santé. Une des perspectives de cette étude est la possibilité de créer un outil d’auto évaluation de la perception de sa propre santé, à destination du patient. Il conforterait le patient dans la sensation qu’il est acteur de sa propre santé, tout en permettant au médecin généraliste de savoir quelle place lui est accordée par le patient, et comment il pourrait l’aider au mieux dans sa quête de la bonne santé.

7. BIBLIOGRAPHIE

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27. Miller WR, Rollnick S. L’entretien motivationnel [Internet]. InterEditions. 2013 [cité 22 juil 2017]. Disponible sur: https://www.afdem.org/entretienmotivationnel/

8. ANNEXES