REMERCIEMENTS D’AMAËLLE
PROFESSIONNELS DE SANTE
3. RESULTATS DES PROFESSIONNELS DE SANTE
3.7 LE MEDECIN – PATIENT
Lors de l’analyse des données, un concept à part a été mis en évidence, celui du « médecin – patient ».
En effet, les médecins ont eu des difficultés à se mettre dans la peau d’un patient. Ils ont insisté sur le fait qu’être à la fois médecin et patient était une situation peu évidente, voire difficile, par de nombreux aspects, détaillés ci-dessous.
3.7.1 Une position difficile
3.7.1.1 Avoir des connaissances médicales
Le fait d’avoir des connaissances médicales pouvait être une difficulté en étant dans une position de patient. A titre, d’exemple, cela pouvait engendrer des angoisses quant à la connaissance de l’évolution d’une maladie.
M4 : « je serais hyper inquiète. Parce que nous on sait un peu tout. En tant que
médecin »
3.7.1.2 Avoir du mal à se positionner en tant que patient
Tout au long de l’entretien en groupe, les médecins ont eu des difficultés à se mettre dans la peau d’un patient. Ils ont cité de nombreuses expériences professionnelles, et se sont plutôt appuyés sur des exemples concernant leurs patients pour étayer leurs dires.
3.7.1.3 Avoir du mal à remettre en question le système de santé
Les médecins ont avoué avoir des difficultés à remettre en cause le système de santé, dans la mesure où ils en étaient acteurs.
M6 : « en tant que professionnel de santé, on a une espèce de, de vision idyllique du
système de santé »
3.7.1.4 Avoir honte
A plusieurs reprises, les médecins ont avoué avoir honte de faire appel à un confrère pour leur propre santé, raison pour laquelle la plupart ne consultait jamais.
M4 : « si on peut [aller consulter ndlr], mais on a honte un peu quand même »
3.7.1.5 Avoir peur
Les médecins ont aussi expliqué qu’ils n’osaient pas aller consulter un confrère, en grande partie à cause de la peur d’être ridicules.
M4 : « C’est à dire qu’on n’ose pas, on n’ose pas aller voir le médecin ou d’appeler le
15 pour soi-même parce qu’on se dit on est ridicules »
Ils ont également expliqué que s’ils n’osaient pas aller consulter un confrère pour eux- mêmes, c’était aussi par peur d’avoir une pathologie grave et d’être dans ce cas « trop » pris au sérieux.
M2 : « en fait tu as peur de deux choses : soit comme tu disais qu’il te rie au nez, ou
3.7.1.6 Manquer de temps
A plusieurs reprises, les médecins ont signalé manquer de temps pour prendre soin d’eux-mêmes.
M5 : « déjà qu’on n’a pas le temps de se soigner »
Ils ont également évoqué le manque de temps pour faire des activités de loisirs, activités qui permettraient de se sentir en bonne santé.
M5 : « le temps de pouvoir dormir, de pouvoir faire du sport, de pouvoir se
décontracter, de lire, de… Toutes ces activités qui te permettent de te sentir en bonne santé »
3.7.1.7 Ne pas savoir si on est en bonne santé
Certains médecins ont également affirmé qu’ils ne savaient pas s’ils étaient eux- mêmes en bonne santé.
M1 : « je suis en train de me dire depuis tout à l’heure est-ce que je suis vraiment en
bonne santé ? »
3.7.2 Une prise en charge « spécifique »
3.7.2.1 Ne pas pouvoir être pris en charge « comme tout le monde »
A plusieurs reprises, les médecins ont évoqué le fait qu’il leur était impossible de bénéficier de la même prise en charge qu’un patient « tout venant ».
M2 : « Quand tu vas voir le kiné de ton village euh je veux dire […] il peut pas te soigner
Ils ont surtout mis en avant le fait qu’ils connaissaient, dans le cadre professionnel, tous les professionnels de santé de leur région, et qu’il était donc difficile d’avoir affaire à eux dans le cadre privé.
M4 : « mais c’est gênant par exemple pour un suivi gynéco, où on connaît tout le
monde. »
Le fait de devoir se déplacer dans d’autres villes, pour pouvoir consulter un médecin inconnu sur le plan professionnel, était vécu comme une injustice par certains médecins.
M4 : « Faudrait, oui, se déplacer. Ailleurs. Mais, c’est pas juste. Pourquoi, on doit faire
des kilomètres ? »
3.7.2.2 Etre surmédicalisé
Parmi les médecins qui avaient déjà eu des problèmes de santé, certains ont évoqué le côté désagréable de la « surmédicalisation ». En effet, ils ont tous constaté la multiplication des examens complémentaires lorsqu’ils étaient de « l’autre côté de la barrière ».
M5 : « comme j’étais médecin, ils m’ont tout fait faire, mais alors, jusqu’à la
scintigraphie myocardique »
3.7.2.3 Avoir énormément d’attentes
Les médecins ont avoué avoir énormément d’attentes envers les soignants, du fait de leur profession.
M5 : « C’est à la fois qu’ils prennent en compte le fait qu’on n’est pas médecins, et le
fait qu’on est médecins »
M3 : « de l’attention, un bon contact, […] une écoute, et, […] une clarté dans le
Les attentes envers le système de santé étaient moins nombreuses, en partie parce que les médecins se sont plutôt positionnés en tant que soignants pour répondre à cette question.
M5 : « est ce qu’on est obligés d’imposer à tout le monde la même… [prise en charge
ndlr] »
3.7.2.4 Envisager un réseau de soins dédié
Les médecins interrogés ont évoqué l’existence d’un accès spécifique, en tant qu’interne, à des médecins généralistes qui acceptent de recevoir des étudiants en médecine en consultation. Ils y étaient plutôt favorables.
M4 : « un accès à des médecins généralistes qui acceptent de voir des étudiants en
médecine. C’est bien je trouve. »
Ils regrettaient le fait que cet accès spécifique n’existe pas pour les médecins généralistes installés.
M4 : « Mais nous on n’a pas ça. En tant que professionnels de santé. »
Ils ont essayé de trouver des idées pour pallier cette absence de réseau dédié, sans pour autant trouver de solution.
M4 : « Ou alors faut faire venir des gens de l’extérieur. Faire des consultations externes, exprès pour nous, mais… Non, c’est pas faisable. »