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Synthèse de la deuxième section

Encadré 1.3.1 Les facteurs situationnels

2 Conséquences de l’expérience d’achat impulsif

2.2 Valeur perçue hédonique

Selon Heilbrunn (2010, p. 15) « la consommation est un ensemble de pratiques par lesquelles les

individus manipulent et échangent de la valeur et du sens ». Elle est donc appréhendée par ces

conséquences, « par les traces qu’elle laisse chez l’individu » en termes de plaisir et de mémorabilité (Roederer , 2008). Evrar et al. (2004), Mencarelli (2008) expliquent que la conséquence de l’experience de consommation se trouve dans sa valeur d’usage.

En vue d’éviter toute nuance, il s’avère judicieux de distinguer la valeur d’échange de la valeur d’usage. La valeur d’échange est « le reflet de l’arbitrage que réalise l’acheteur en comparant ce

que lui coûte le produit, et le bénéfice qu’il sera susceptible d’en retirer » (Zeithaml V. , 1988) cité

par (Hombourgère-Barès, 2014, p. 83). Quant à la valeur d’usage, elle fait référence à la manière dont l’objet est estimé dans une situation donnée. Dans ce contexte, l’objet de consommation est considéré comme « un système socioculturel complexe » et « un système de significations » (Heilbrunn B. , 2010, p. 48). « La valeur d’usage est donc subjective et relative au besoin. Elle

s’intéresse à la valeur de consommation perçue et se situe dans le champ des expériences de consommation » (Filser & Plichon, 2004) cité par (Hombourgère-Barès, 2014, p. 83). Il est

important de souligner que tout au long de ce travail le mot valeur fait référence à la valeur d’usage. Dans ce sens, Holbrook définit la valeur d’usage comme « une préférence relative comparative,

personnelle et situationnelle caractérisant l’expérience d’un sujet en interaction avec un objet »

(Holbrook , 1999).

Faisant appel au concept de valeur perçue, Filser (2007) soumet un modèle intégrateur de la prise de décision du consommateur, considérant l’experience comme une phase du processus et la valeur comme conséquence de l’experience, permettant d’évaluer le moment vécu par l’individu (Figure 1.3.4).

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Figure 1.3.4 : Proposition d'un modèle général de la prise de décision d'achat du consommateur

Source : (Filser, 2007, p. 33)

Un cadre théorique riche sur le concept de la valeur perçue a été développé par Sheth et al. (1991) cité dans Cottet et al. (2005, p. 7) stipulant que le choix du consommateur est tributaire de cinq types de valeurs :

1- Une valeur fonctionnelle reflétant la performance physique et utilitaire du produit, 2- Une valeur sociale qui est liée à l’image véhiculée au sein d’un groupe spécifique,

3- Une valeur émotionnelle reflétant les états affectifs provoqués par l’objet de consommation, 4- Une valeur épistémique liée à la capacité du produit à susciter la curiosité et l’intérêt pour

la nouveauté,

5- Une valeur situationnelle liée à la contingence d’achat et de consommation.

En s’appuyant sur cette typologie Lai (1995) ; Cottet et al. (2005, p. 7) ont proposé trois types de bénéfices associé à la consommation :

1- Bénéfice esthétique correspondant à la beauté et à l’expression personnelle, 2- Bénéfices hédonistes correspondant aux souhaits de plaisir et de divertissement,

3- Bénéfices holistiques qui sont en rapport avec le degré de cohérence entre le produit acheté et l’univers des produits déjà possédés.

Il est important, également, de souligner l’apport de l’approche expérientielle à l’étude du rôle du concept de la valeur dans le processus de consommation. Les expériences d’achat et de consommation sont sources de gratifications hédoniques (Holbrook & Hirschman , 1982). Outre,

Processus de décision Expérience Evaluation Traitement de l’information Valeur perçue Recherche d’expérience Composante fonctionnelle Composante expérientielle

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ces fonctions utilitaires, l’approche expérientielle présente la valeur perçue comme « une

expérience préférentielle, interactive et relative » (Holbrook, 1996)(Holbrook , 1999).

En se référant à cette logique (Holbrook, 1996) identifie trois axes constitutifs de la valeur : 1- La valeur peut être intrinsèque quand l’expérience a une finalité instrumentale, extrinsèque

lorsque l’expérience est perçue comme une fin en elle-même.

2- La valeur peut être orientée vers soi, pour le plaisir personnel, ou vers les autres, pour le plaisir d’autrui.

3- La valeur peut être active, lorsque le sujet agit sur l’objet, ou réactive, « si le produit agit

sur le sujet en déclenchant par exemple de l’admiration » cité dans (Cottet, Lichtlé, &

Plichon, 2005, p. 9).

En croisant ces dimensions, Holbrook (1996), reconnait huit types de valeurs cité dans Cottet (2006, p. 221) : l’efficience, le jeu, l’excellence, l’esthétique, le statut social, l’éthique, l’estime et

la spiritualité. En dépit de la contribution théorique de cette typologie à l’examen de la valeur dans

différents contextes, son application au secteur de la distribution s’est limitée à un petit nombre de recherches Filser (2003).

La difficulté rencontrée au niveau de l’opérationnalisation de ces typologies, dont les nuances sont très difficiles à saisir dans le contexte de magasinage (Badot, 2001), ont conduit les chercheurs à une classification plus simple et plus générale. Etant donné que l’expérience de magasinage génère deux types de bénéfices (tangibles et intangibles)(Zeithaml V. , 1988), « la valeur peut être reliée

aussi bien aux réponses hédonistes qu’aux conséquences fonctionnelles et tangibles » (Aouinti N.

, 2010, p. 5). On identifie donc deux dimensions de la valeur de magasinage : Utilitaire et

Hédonique.

- La valeur utilitaire : cette dimension correspond au côté fonctionnel de l’objet de consommation et qui traduit la performance physique et utilitaire du produit. Elle est en relation directe avec la rationalité et la perception des attributs tangibles du produit et de l’espace de vente. Cependant, une activité de magasinage ne se limite pas seulement à une valeur utilitaire. En effet, il existe un autre type de valeur aussi important qui est la valeur hédonique.

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- La valeur hédonique : selon Bakini Driss ( 2009, p. 178), la valeur hédonique correspond« à

l’aspect subjectif de l’expérience de magasinage. Il s’agit de toutes les procurations plaisantes et agréables que peut offrir cette expérience à un consommateur avide de jouissance et d’enjouement ». A ce niveau, l’acquisition d’un produit est la conséquence

d’une expérience de magasinage. Outre le produit acheté, les caractéristiques relatives à l’espace de vente ainsi que les facteurs d’ambiance contribuent fortement à la perception d’une valeur hédonique. L’exploration du magasin, le contact avec le personnel de vente, la nouveauté et plein d’autres facteurs de l’environnement marchand sont sources considérable de gratification émotionnelle (Cottet, Lichtlé, & Plichon, 2006). A ce titre, le chaland donne de la valeur à la part émotionnelle et ludique de la visite d’un espace de vente.

Etant donné que notre recherche s’inscrit dans une approche expérientielle, nous allons nous intéresser uniquement à la valeur hédonique. Cette dernière est « associé à l’activité même de

magasinage ainsi qu’aux différentes charges émotionnelles qu’elle procure et qui lui sont intrinsèque » (Bakini Driss, Jerbi, & Ben Lallouna Hafsia, 2009, p. 178). Aussi, à notre

connaissance, aucune étude n’a examiné l’effet de la valeur hédonique sur les intentions comportementales futures, soit la recommandation de l’espace de vente et le besoin de réexpérience. C’est à ce niveau que se situe un des apports de notre recherche.

2.3 Souvenir

La représentation de l’expérience sous la forme d’un processus, permet de distinguer ce qui constitue le cœur de l’expérience, autrement dit son contenu, de ce qui résulte de l’expérience, c’est-à-dire ses conséquences. Jusqu’à nos jours, les recherches en marketing se sont surtout concentrées sur l’avant-expérience et sur le cœur de l’expérience, ignorant ainsi ses conséquences. Ces dernières sont été appréhendées selon deux approches : la satisfaction et la valeur. En s’appuyant sur la recherche de Cova et al. (2006), Roederer (2008) considère que seule la satisfaction ne permet pas d’appréhender la phénoménologie de l’expérience et préconise qu’une approche par le souvenir permet de mieux l’expliquer. Aussi, le faible pouvoir prédictif de ces deux approches a amené Flacandji (2015) à suggérer une nouvelle manière à reconsidérer l’expérience et cela par la médiation du souvenir qu’elle engendre.

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Depuis les recherches conduites par Kahneman (2012) en psychologie hédoniste, des travaux mettant en lumière l’aspect décisif du souvenir de l’expérience dans l’explication des comportements futurs commencent à émerger (Pedersen, Friman, & Kristensson, 2011 ; Robinson, 2011). Partant de ces postulats deux interrogations se pointent :

- Qu'est-ce que le souvenir de l'expérience de magasinage ?

- Que retient un consommateur d’une expérience vécue dans un espace de vente ?

Flacandji (2015, p. 145), définit le souvenir d’une expérience comme « les informations stockées

en mémoire de manière consciente ou inconsciente à la suite d’une expérience, et qui sont rappelées par l'individu au cours d'une expérience de souvenir, avec un degré de précision et de certitude plus ou moins fort ». Une grande partie du plaisir et du déplaisir que nous retirons de ce

que nous vivons n’émane pas « de l’expérience directe – qui est la ‘consommation’ – mais de la

contemplation de notre propre passé ou futur ou d’une comparaison du présent par rapport au passé ou au futur » (Elster & Loewenstein, 1992) cité dans (Flacandji M. , 2015)

Kahneman (2012), explique que la personne possède une double identité, le « moi expérimentant», qui fait référence au vécu des situations, au plaisir, et à l'intensité de l'expérience hédonique/affective à un moment donné durant l’expérience et le « moi mémoriel » qui les revit. Se remémorer une expérience implique une reconstruction de l’information, des émotions qui lui sont associées et de revivre l’expérience mentalement. Le consommateur se sert de l' « essence » émotionnelle de ses expériences (Levine, Lench, & Safer, 2009) pour se rappeler l'essentiel de ce qu’il a vécu (Safer, Breslin, Boesch, & Cerqueira, 2007).

D’après Braun (1999) « L’expérience subjective de se souvenir, de devenir conscient dans le

présent d'un sentiment ou d'un événement passé, est elle-même une expérience » cité dans

(Flacandji M. , 2015, p. 131). Autrement dit, il s’agit d’une interaction de type P.O.S. au même titre que l’expérience, d’où notre préférence pour la notion d’expérience de souvenir qui s’inscrit d’ailleurs dans la lignée du découpage de l’expérience proposée par Arnould et al. (2002). Une expérience de souvenir est donc une expérience durant laquelle l’individu va se replonger dans son expérience passée et en récupérer le souvenir qu’il en garde. Dans la même direction Roederer (2008, p.295) affirme que « conceptualiser le souvenir de l’expérience, revient à conceptualiser

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l’expérience ». L’expérience possède un caractère privé qui fait que seul celui qui l’éprouve peut

avoir accès à celle-ci.

Le souvenir de l’expérience se compose de deux facettes : l’une relative à son ‘contenu’, qui reflète les dimensions de l’expérience, et l’autre relative à sa ‘nature’, intrinsèque à tout souvenir, et qui porte sur sa richesse. Comme l’affirme Baumgartner (1992) « Les souvenirs sont susceptibles de

différer sur une série de dimensions incluant la récence de ces souvenirs, leur richesse et la perspective par laquelle ils sont remémorés et revenus à l’esprit » cité par (Flacandji M. , 2015, p.

144). Ces dimensions du souvenir, liées les unes aux autres, peuvent être relatives à des informations sur les produits, le magasin et le personnel. Certaines dimensions de l’expérience et du souvenir de l’expérience sont communes

- Une dimension sensorielle : qui correspond aux stimulations sensorielles perçues par le chaland et à ce qu’il a pu ressentir au cours de sa visite.

- Une dimension émotionnelle : « elle se réfère à l’intensité des émotions vécues aussi bien

au moment de l’encodage qu’au moment de la récupération » (Sutin & Robins, 2007).

- Une dimension partage (sociale) : cette dimension s’intéresse au fait que le souvenir de l’expérience soit partagé ou non avec d’autres personnes telles que le personnel en contact et les autres clients.

- Une dimension valence : elle fait référence au degré auquel l’expérience vécue est perçue comme positive ou négative.

- Une dimension praxéologique : se réfère au souvenir des actions entreprises par le chaland à l’intérieur du magasin.

- Une dimension symbolique : elle traduit l’idée qu’une visite dans un magasin peut constituer un vecteur de signification pour le client.

A l’instar de Flacandji (2015) notre recherche s’intéresse au souvenir comme conséquence de l’expérience et considère qu’il peut, en partie, prédire les comportements futurs des consommateurs, mais surtout constituer un pilier sur lequel les entreprises doivent s’appuyer dans la production d’expérience et cela se référant aux éléments d’ancrage22

22 « Un moment fort vécu par le consommateur et résultant d’un processus partiel ou complet d’appropriation de sa part » (Carù et Cova, 2003).

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