• Aucun résultat trouvé

Origine et définitions de l’expérience de consommation

Introduction chapitre I

Section 1 : L’expérience de consommation

1 Expérience de consommation

1.1 Origine et définitions de l’expérience de consommation

1 Expérience de consommation

1.1 Origine et définitions de l’expérience de consommation

Peu de concepts issus de l’analyse du comportement du consommateur ont suscité un engouement comparable à celui que connait l’expérience de consommation. Deux productions ont contribué de manière décisive à la popularité de ce concept : l’article d’Holbrook et Hirschman (Holbrook & Hirschman , 1982) et le livre de Pine et Gilmore (Pine & Gilmore, 1999) qui mettent en exergue les enjeux de cette notion pour la pratique du marketing par les entreprises. Les recherches mettent en avant le passage d’une vision d’un consommateur logique et rationnel vers une approche émotionnelle et affective de la consommation. Cet avancement se justifie par le fait que les chercheurs portaient essentiellement leurs regard sur le processus de prise de décision négligeant ainsi les dimensions situationnelle et sociales de la consommation (Benmoussa, 2013). Mais au-delà de cette évolution, c’est par-dessus tout, la vision du chercheur qui a progressé (Cova & Cova , 2009; Mari (Le petit Robert, 2020)on , 2003b).

Le courant expérientiel1 n’est pas le produit de l’évolution du consommateur qui devient de plus en plus hédoniste, mais plutôt du prolongement d’une réflexion qui met en lumière l’égarement de la recherche vis-à-vis de la dimension ludique de la consommation jaillie à travers l’expérience de consommation (Hirschman & Holbrook , 1982; Chaney, Lunardo, & Mencarelli, 2018). La notion de l’expérience de consommation demeure vaste à expliquer, difficile à appréhender, mais ouverte à différentes lectures.

1.1.1 Origine du concept de l’expérience de consommation

D’un point de vu étymologique, l’expérience est définie comme « un évènement vécu ou pratique

prolongée, apportant un enseignement » (Le petit Robert, 2020), la « pratique de quelque chose, l’épreuve, de quelque chose, dont découlent un savoir, une connaissance, une habitude2 » (Larousse, 2020).

Il résulte de ces définitions que l’expérience de consommation est étroitement liée à une dimension individuelle. Elle révèle aussi une dimension évolutive. La notion d’expérience a été associée à la

1Qualifié parfois de courant émotionnel ou affectif.

17

consommation dès les années 40, lorsque les chercheurs ont cessé de s’intéresser à l’objet mais plutôt au vécu autour de ce dernier « L’accent est mis sur les services qui accompagnent les biens

et non sur les biens…les besoins de doivent ne pas être considérés comme des désirs de bien mais plutôt comme des évènements que leurs possession rend possible3 » (Norris, 1941, p.136, cité par Holbrook, 2000, p.3). Norris (1941) mets en vue la particularité de l’instant procuré par le produit, estimé comme supérieur au produit lui-même, à ses attributs tangibles ou ses performances. Dans la même veine, Abbott (1955) avance que « ce que les personnes désirent réellement, ce n’est

pas des produits ou services mais plutôt des expériences. Ces dernières sont accessibles par le biais d’activités. Afin de réaliser ces activités, des objets physiques ou des services humains sont nécessaires » (Abbott, 1955, pp.39-40, cité par Holbrook, 2000, p.3). Partant de ce constat,

l’expérience est vue comme un besoin pour les consommateurs plutôt que comme une initiative de la part des entreprises. Cela nous amène à déduire que le focus sur l’expérience a l’air d’être apparu bien avant l’émergence du courant expérientiel.

Pour finir, (Alderson , 1957)avance que la valeur retiré d’un produit ou service ne découle pas de l’aspect matériel de ces derniers, mais plutôt de leur utilisation. D’où l’apparition de la notion de l’« Hédonisme4 ».

1.1.2 Définition de la notion de l’expérience de consommation

En partant des travaux précités, Holbrook et Hirschman (1982) définissent la notion de l’expérience de consommation comme « un état de conscience essentiellement subjectif, accompagné d’une

diversité de significations symboliques, de réponses hédoniques et de critères esthétiques 5»la reconnaissance de ces importants aspects de la consommation est renforcée par le contraste entre le traitement de l’information et les vues expérientielles (Hirschman & Holbrook, 1982, p 132). Cette définition se concentre sur le caractère hédonique de l’expérience fondée sur trois axes (3F) : Fantasies, Feelings, Fun. Holbrook (2000) a évolué cette vision en ajoutant la valeur à cette approche qui devient 4 axes (4 E) : Experience, Entertainment, Exihibitionism, Evangelizing.

3“The emphasis…is upon the services of goods, not upon the goods themselves. Wants should be thought of not as desires for goods-but rather for the events witch the possession of them makes possible...”(Holbrook , 2000, p. 3)

4Doctrine dont l’élément fondamental la recherche du plaisir. www.internaute.fr

5“…subjectif state of consciousness with a variety of symbolic meanings, hedonic responses, and esthetic criteria.”(Holbrook & Hirschman , 1982)

18

Ces variables permettent de comprendre le comportement d’un consommateur lorsque la valeur attribuée par l’expérience qu’il vit est supérieure à l’objet physique consommé (Bourgeon et Filser, 1995).

Cette définition considère le consommateur au centre de l’expérience et met nettement en lumière le caractère subjectif autour duquel se construit le moment de consommation. Elle est estimée, à notre opinion, comme une des plus entières de la littérature.

Ces deux auteurs ont été inspirées avant tout par des activités de loisirs, des experiences à fort caractère ludique et définissent la consommation hédonique comme «les facettes du comportement

du consommateur qui se rapportent aux aspects multisensoriels, imaginaires et émotionnels de son expérience avec le produit6» (Hirschman & Holbrook, 1982, p. 92).

A l’instar de Hirschman et Holbrook (1982), Carù et Cova (2002, p. 18) définissent l’expérience de consommation comme étant « un vécu personnel -souvent chargé émotionnellement- fondé sur

l’interaction avec des stimuli que sont les produits ou les services rendus disponibles par le système de consommation ». Cette définition dépasse la vision d’une expérience proposée par l’entreprise

et met en avant la subjectivité du vécu ainsi que la présence de l’individu dans l’espace de vente comme condition sine qua non dans le but de produire une expérience7.

D’autres définitions ont suivi, basées sur des visions parfois distinctes, parfois complémentaires. Filser (2002, p. 14) a défini l’expérience comme l’« Ensemble des conséquences positives et

négatives que le consommateur retire de l’usage d’un bien ou d’un service ». Cette définition

présente une limite au vu des chercheurs car l’auteur se focalise sur les conséquences et oublie les instants vécus par le consommateur desquels émane l’expérience elle-même.

Arnould, Price et Zinkhan (2002) ont considéré la vision d’une experience qui s’étend dans le temps. Elle ne se définit pas ici sur une période précise mais se déroule avant même l’interaction du consommateur avec l’objet de consommation et s’étend après cette interaction.

6“…Those facets of consumer behavior that relate to the multisensory, fantasy and emotive aspects of one’s experience with product.” (Hirschman & Holbrook , 1982, p. 92)

7Certaines approches distinguent entre deux types d’expériences : une expérience vécue par le consommateur et une autre orchestrée par l’entreprise (Caru et Cova, 2002). Il est à souligner que les entreprises ne produisent pas des experiences mais fournissent une plateforme expérientiels dans lesquelles se construisent ces dernières (Roederer, 2008).

19

De ce point sur les définitions, nous pouvons avancer que l’expérience de consommation est le vécu propre à chaque consommateur, sa perception rationnelle et émotionnelle, construites progressivement tout au long de son parcours de consommation. Trois principaux éléments sont à retenir :

1. L’expérience de consommation prend en compte la totalité du vécu d’un client et ses interactions avec une marque sur l’ensemble de son cycle de vie (avant-pendant et après). 2. L’expérience de consommation est subjective pour chaque client. Deux personnes

différentes ne vivent pas de la même façon une même séquence d’interaction. 3. L’expérience de consommation se construit avec le temps.

Le Tableau 1.1.1 Présente une liste non exhaustive des différentes définitions de la notion de l’expérience que nous retrouvons dans le champ du marketing.

20

Tableau 1.1.1 principales définitions de l’expérience de consommation

Auteurs Définitions

Holbrook et Hirschman (1982, p 132)

Expérience de consommation

« Phénomène dirigé vers la recherche de fantaisies, de sentiments et

de plaisir » (fantasies, feelings et fun).

Arnould et Price (1993, p 25)

Expérience extraordinaire

Elle est « déclenchée par des événements inhabituels et caractérisée

par des hauts niveaux d'intensité émotionnelle et d'expérience [...] un important déclencheur de cet état expérientiel est une interaction interpersonnelle ».

Schmitt (1999, p 60)

Customer expérience

« Elle implique tout l’être vivant. Elle résulte souvent de l’observation directe et/ou de la participation à un événement – qu’il soit réel, onirique ou virtuel ».

Filser (2002, p 14)

Expérience de consommation

« Ensemble des conséquences positives et négatives que le

consommateur retire de l’usage d’un bien ou d’un service ».

Shaw et Ivens (2002, p 6)

Customer expérience

« Interaction entre une organisation et un client. Elle est un mélange

des performances physiques de l'organisation, des sens stimulés et des émotions évoquées ».

Carù et Cova (2002, p 18)

Expérience de consommation

« Vécu personnel – souvent chargé émotionnellement – fondé sur

l’interaction avec des stimuli que sont les produits ou les services rendus disponibles par le système de consommation […] ce vécu peut amener à une transformation de l’individu dans le cas des expériences dites extraordinaires ».

Bénavent et Evrard (2002, p 7)

Expérience de consommation

« Totalité du vécu (ou de « l’épreuve ») de la consommation ;

l’interaction entre le sujet (le consommateur) et l’objet (le produit ou service) qui peut influer sur les consommations futures et met également en jeu des dimensions cognitives, utilitaires et sociales ».

Bouchet (2004, p 54)

Expérience de magasinage

« Construction sociale subjective et objective, produit d’une

interaction entre un individu (ou plusieurs), un lieu (le point de vente) et une pratique de consommation (le magasinage) ».

Gentile, Spiller et Noci (2007, p 397)

Customer experience

« Elle provient d’un ensemble d’interactions entre le consommateur et

un produit, et une entreprise qui provoque une réaction. Cette expérience est strictement personnelle et implique le consommateur à différents niveaux (rationnel, émotionnel, sensoriel, physique et spirituel) ».

Jain et Bagdare (2009, p 34)

Customer experience

« Somme totale des sentiments, perceptions et attitudes formées tout

21

impliquant des séries intégrées d’interactions avec les personnes, les objets, les processus et l’environnement ».

Ismail et al. (2011, p 208)

Expérience de consommation

« Emotions provoquées, sensations ressenties, connaissance obtenue

et compétences acquises à travers une implication active (du consommateur) avec l’entreprise avant, pendant et après la consommation ».

Source : Flacandji (2015, p. 23)

Dans son dernier article,(Holbrook, 2019)met en lumière que la notion de l’expérience s’est étendue à de nombreux domaines du marketing. Désormais, Il existe des expériences de consommation (Arnould et Price, 1993 ; Holbrook et Hirschman, 1982), des expériences produit (Kwortnik et Ross, 2007), des expériences de magasinage (Kerin, Jain et Howard, 1992), les expériences client (Verhoef et al. 2009 ; Kumar et al. 2014 ;) ou bien encore des expériences de marque (Brakus, Schmitt et Zarantonello, 2009).

L’expérience de consommation est l’expression qui désigne les expériences que nous vivons quotidiennement. Ainsi, partir au théâtre (Bourgeon et Filser, 1995), aller en vacances (Ladwein, 2002), visiter un point de vente (Michaud-Trévinal, 2013), assister à un festival (Kozinets, 2002) ne représentent que des modèles d’expériences de consommation spécifiques.

Dans cette recherche doctorale, nous nous intéressons uniquement à un type d’expérience soit :

l’expérience de magasinage que nous allons développer dans la dernière partie de cette section.