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Usage des résultats de l’étude de pratiques innovantes au cours d’ateliers de conception

PARTIE 2 – RESULTATS

4.4. Usage des résultats de l’étude de pratiques innovantes au cours d’ateliers de conception

d’ateliers de conception

Que faire de ce qui a été appris sur les pratiques innovantes d’agriculteurs dans le projet VivLéBio ? Plusieurs voies sont aujourd’hui explorées par les porteuses du projet, et, au cours de notre collaboration, c’est au travers d’un atelier de conception ‘de modalités de gestion des vivaces’, que certains résultats ont été mobilisés. Au cours de l’atelier, ces résultats ont permis à la fois (i) d’enrichir les connaissances mises en partage avec les participants et (ii) de formuler des concepts projecteurs, visant à orienter vers des champs inconnus l’exercice collectif de conception.

177 Concept projecteur Exemples de voie de conception explorée

Exemples de connaissances évoquées en relation avec l’exploration de la voie Exemples de questions de recherche associées Vivre avec chardon sans travail du sol ni luzerne De nouveaux outils pour une conduite des cultures sans travail du sol ni luzerne

Si non travail du sol : besoin d’un couvert du sol permanent pour maitriser le chardon – choix du trèfle blanc (ou lotier ? ou lentille – moins résistante au gel ?...) qui ne concurrence pas trop les cultures en hauteur. Rotation de céréales et oléagineux : Blé / Triticale / maïs / tournesol.

Comment gérer le couvert de trèfle ? En hiver : pâturage par des moutons en faisant appel à un berger itinérant (expérience d’un agriculteur), sinon fauche, broyage… En cours de culture, besoin d’un outil spécial qui soit adaptable aux évolutions du milieu cultivé : proposition d’une ’écimeuse modulable en hauteur’ - avec lames de tondeuse, passant dans des inter-rangs de 25 cm ; capable d’écimer au-dessus des cultures et le trèfle en inter-rangs en cours de culture - un passage tous les mois : Mai, Juin, Juillet, avant récolte (…)

Quels sont les seuils de nuisibilité du chardon ? Comment se répartit le chardon dans l’espace (évolution des ronds) ? (…)

Une gestion autonome du chardon Une gestion du chardon autonome car on ne travaille pas ‘pour lui’ = un système de culture qui gère de manière autonome le chardon

Choix de cultures et de conduites qui, indirectement, permettent de gérer le chardon (ex. ‘quand tu fais un décompactage pour refaire ta structure, tu ne fais pas ça spécifiquement pour le chardon’). Choix d’une succession de cultures où installation d’un couvert végétal quasi-permanent : intérêt du trèfle par rapport à la luzerne - s’il y a un trou dans la culture ‘ça se bouche immédiatement’. Lorsque pas de couvert : choix de cultures ‘étouffantes’ (seigle / lentillon). Le trèfle en féverole ‘ça marche pas’ et risque important de développement de renouées-liseron (…)

Quelles sont les opérations qu’on fait pour autre chose que pour le chardon mais qui contribuent à maitriser le chardon ? Quelles variétés de trèfle sont les mieux adaptées, en couvert, selon les espèces cultivées ? (…) Vivre en harmonie avec les chardons Un chardon avec lequel on est en harmonie, car on peut le valoriser

On peut le valoriser comme : plante médicinale (une plante en plus dans les biocoop ?), désherbant (analogie évoquée par un agriculteur avec la valorisation des feuilles de rumex macérées et utilisées comme désherbant), plante ‘défensive’ (analogie avec les plantes pièges à nématodes par exemple), … Condition : que le chardon s’auto-régule (la présence constante des chardons sur les bords de route – un indice que pas d’autorégulation ?), être attentif à la diversité des populations de chardon, un agriculteur en a identifié trois différentes dans son champ.

Quand le chardon commence-t-il à dépérir s’il est en surpopulation (autorégulation) ? Quelles sont les différentes populations de chardons présents dans nos champs ? Quelles vertus médicinales du chardon ? …

178 Lors du ‘partage de connaissances’, les résultats de la traque ont permis d’enrichir les propositions émergeant de travaux de R&D : à la différence de propositions issues d’expérimentations, elles émergeaient de ‘pratiques’ d’agriculteurs et avaient fait leurs preuves en conditions réelles. Ces propositions complétaient les connaissances issues de travaux de R&D sur plusieurs plans : (i) en rendant compte de pratiques ‘décalées’ vis-à-vis de propositions de la R&D (ex. l’isothérapie, le pâturage des vivaces par l’élevage, le couvert de trèfle pluriannuel, …), (ii) en faisant état de logiques d’action systémiques (ex. les combinaisons d’actions mises en œuvre par l’agriculteur 7), et, (iii) en montrant que des connaissances agronomiques décontextualisées sur les vivaces (ex. modélisation de l’évolution des réserves racinaires, concurrence, extraction…) permettaient de comprendre et d’imaginer des pratiques contextualisées dans une ferme. Cet état des connaissances, proposé par les porteuses du projet, a donné lieu à des échanges entre participants (à quelles conditions cela fonctionne-t-il ? Que sait-on de l’effet de telle pratique sur les ronds de chardons ? …), et a ensuite servi de point d’appui pour engager des discussions autour des expériences des agriculteurs présents : que font-ils chez eux ? Comment ? Quelles questions se posent-ils ? ... Ces échanges ont permis d’enrichir l’état du connu – qui a en partie été formalisé en temps réel sur une modélisation CK - (certains faisaient pâturer le chardon des moutons, d’autres cultivaient du maïs avec du trèfle d’alexandrie pour favoriser la concurrence sur chardon, un autre semait de la luzerne dans les céréales…).

Ensuite, trois concepts projecteurs ont été proposés aux participants à partir des trois voies de conception ouvertes suite à la traque aux pratiques innovantes (Tableau 16). Ces concepts visaient à orienter, dans différentes directions, le travail collectif de conception, dans l’objectif d’enrichir à la fois les échanges au cours des restitutions collectives et ce qui pourrait être valorisé dans le cadre du projet.

Un premier sous-groupe a exploré le concept ‘une gestion du chardon sans travail du sol ni luzerne’, qui, au cours des échanges, a été progressivement orienté vers la conception simultanée d’outils agricoles et de systèmes de culture sans travail du sol ni luzerne. Par exemple, une rotation avec couvert de trèfle permanent a été imaginée, avec, en cohérence différents outils comme ‘une écimeuse modulable en hauteur’, construite avec des lames de tondeuses (interchangeables selon la largeur des inter-rangs) qui, positionnées à la verticale, permettraient à la fois d’écimer le dessus des cultures et de permettre de gérer le développement du trèfle à différentes hauteurs dans des inter-rangs aux largeurs variables.

Un autre sous-groupe s’est penché sur ‘une gestion autonome des chardons/laiterons’. Après des discussions autour de ce que signifie ‘autonome’ (le chardon se gère tout seul, on fait tout pour qu’il ne soit plus là, c’est le système de culture qui le gère ?), deux voies ont été explorées : ‘on fait tout pour qu’il ne soit pas là en lui mettant la pression’ et ‘une gestion du chardon autonome car on ne travaille pas pour lui’. Notamment, cette seconde voie a donné lieu à des propositions de successions de cultures et de conduites qui permettent de gérer le chardon sans chercher à agir directement sur lui (ex.

179 installation d’un couvert végétal quasi-permanent, relayé dans la rotation par des cultures étouffantes, … cf. Tableau 16).

Enfin, un troisième sous-groupe a exploré ce que pouvait être ‘vivre en harmonie avec les chardons’. De premières discussions ont permis de rendre compte d’une diversité d’acceptions de ‘vivre en harmonie’ : pour certains ‘il est impossible de vivre en harmonie avec le chardon’ et cette harmonie n’est pour eux possible que s’il n’est pas visible et ne pénalise pas le rendement ; d’autres ont proposé que ce soit ‘un chardon qui ne pose pas de problème’, ou encore, il a été proposé de considérer qu’être en mesure de valoriser le chardon pourrait permettre de vivre avec lui en harmonie. Sur cette dernière voie, il a été proposé d’explorer les propriétés médicinales du chardon, son potentiel désherbant (par analogie avec l’usage de feuilles de rumex macérées et utilisées comme désherbant – technique connue d’un agriculteur), ou encore, de l’envisager comme plante ‘défensive’ (par analogie aux plantes pièges à nématodes).

Dans chaque groupe, ce travail a mis en évidence des trous de connaissances, perçus par les participants au cours des explorations (ex. Quels sont les seuils de nuisibilité du chardon ? Quelles variétés de trèfle sont les mieux adaptées, en couvert, selon les espèces cultivées ? Quelles vertus médicinales du chardon ?).

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Discussion intermédiaire

Cette discussion s’organise autour de quatre volets : dans un premier (§5.1.) nous discuterons de quelques pistes de recherche qui émergent de ce travail concernant la gestion des adventices vivaces en AB, nous discuterons ensuite (§5.2.) de formes de contributions de l’étude de pratiques innovantes à des dynamiques de conception ; puis, nous identifierons des pistes méthodologiques suggérées par les résultats de ce travail et, enfin, (§5.4.) nous situerons l’étude de pratiques innovantes dans une dynamique partenariale.