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ANTHROPOLOGIQUE DE LA SOCIETE GUET NDARIENNE

IV- 1-1 Une organisation socio spatiale disparate

Depuis sa création en 1659 et pendant près de deux siècles la ville de Saint-Louis se limite à l’Ile de Ndar où se concentre la population européenne. Ce n’est que vers le 18e siècle que la ville va sortir de ses limites. Il incorpore dans un premier temps le quartier de Ndar- Toute sur la Langue de Barbarie et qui sera relié à l’Ile grâce à un petit pont, puis le quartier de Bouët- Ville sur Sor. Aujourd’hui la commune de Saint-Louis s’étend sur 4579 hectares si on y inclut les plans d’eau, hors eau elle totalise une superficie de 3636 hectares. De manière générale avec une vingtaine de quartiers, Saint-Louis se caractérise par une dégradation de son cadre urbain, avec des disparités notées dans la distribution des équipements structurants des divers secteurs de la ville. L’aménagement étant fortement tributaire de son histoire coloniale, la commune voit l’Ile concentrer la majorité des infrastructures avec un taux de 52% alors que ses extensions comme la Langue de Barbarie, sont faiblement aménagées avec 12%. Seul le grand quartier de Sor semble sortir du lot avec un taux de couverture avoisinant les 35%.

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Fig.10 : Situation des différents quartiers de la commune de Saint-Louis

IV-1-1-1. Le faubourg de Sor

Il constitue la partie continentale de Saint-Louis et son aménagement débute en 1942 avec la corniche au nord, Ndiolofène à l’est et le quartier de la Gare au sud. Son édification tient du fait de l’étroitesse de l’Ile. Il reçoit ainsi différents équipements dont le champ militaire, le dépôt des hydrocarbures, le cimetière, les parcs à bestiaux ou encore les jardins d’essais. Il est constitué du noyau ancien formé par les quartiers de Tendjiguène et de Balacoss et d’un second noyau plus récent édifié entre 1960 et 1970, avec certains quartiers remblayés comme Pikine, Médina, Darou qui occupent des vasières inondables sensible aux crues du fleuve. S’étendant sur près de 1440 ha soit 1/3 de la superficie de la commune, le faubourg de Sor est actuellement la seule zone d’extension de celle-ci avec des possibilités d’aménagement. Néanmoins, bien que des quartiers comme Balacoss, Ndiolofène, Leona, Eaux- claires, ou Darou au sud, aient bénéficié d’un aménagement, le gros quartier de Sor se caractérise encore par des lotissements assez anarchiques et des habitations spontanées qui traduisent le manque de maitrise de l’espace urbain. Le déficit de travaux d’assainissement et de viabilisation

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handicape grandement cette partie la commune alors qu’elle en constitue la principale poche démographique, nourrie par l’exode rural.

IV-1-1-2. L’Ile de Ndar

Elle constitue le principal centre urbain de l’espace communal de Saint-Louis et regroupe l’essentiel des équipements structurants : bâtiments administratifs (gouvernance, mairie, service déconcentrés de l’état), culturels et religieux, ainsi que les infrastructures sanitaires, éducatives et commerciales. L’exigüité de l’Ile a très vite entrainé une sur densification et une taudification des parcelles que cachent difficilement les anciens immeubles coloniaux à R+1 implantés en façade. L’Ile se démarque en tracés orthogonaux et une sur abondance de la voirie qui donne une impression d’aération du tissu urbain. L’absence d’arbres contribue aussi à donner une monotonie à l’ensemble. Du fait de son cachet historique et architectural, l’Ile de Saint Louis dispose d’un important potentiel touristique. L’élaboration d’un Plan de sauvegarde en 2000 a permis son classement en Patrimoine de l’Humanité. Un processus de rénovation du capital urbain est aussi en vue. Le dynamisme économique de l’Ile compte grandement sur les divers et nombreux établissements touristiques dont les capacités d’accueil augmentent avec de nouveaux hôtels et auberges. Cette attractivité a eu un effet entrainant sur l’aspect du cadre bâti et une amélioration de la physionomie de l’Ile.

IV-1-1-3. La Langue de Barbarie

Elle est formée de trois principaux quartiers que sont d’est en ouest : Goxumbacc, Ndar- Toute, et Guet-Ndar.

IV-1-1-3-1. Le quartier de Goxumbacc

Créé vers la fin du 18e siècle, c’est tout d’abord hameau occupé par les maures. Le quartier sera plus tard occupé par des vagues de déguerpis et de ruraux. En 1976, il est doté d’un plan de lotissement. Celui-ci est aménagé afin d’accueillir une partie de la population Guet- Ndarienne qui occupait l’emprise du boulevard fluvial. Aujourd’hui le quartier souffre d’un manque d’équipements et d’infrastructures de base en dépit de sa trame urbaine.

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IV-1-1-3-2. Le quartier de Ndar- Toute

Créé en 1886 et ancienne cité de villégiature de riches négociants de l’Ile, le quartier de Ndar- Toute a su bénéficier d’un plan d’aménagement spatial en vue d’accueillir une partie de la population métropolitaine de l’Ile alors saturée. Il représente le centre commercial de la Langue de Barbarie avec des professionnels de la pêche, des commerces structurés et un secteur informel. Avec une superficie de 41 ha, il constituait un quartier d’extension de l’Ile et est divisé en bas Ndar-Toute et en Haut Ndar-Toute. Il est dans son ensemble insuffisamment équipé, seule l’avenue Dodds présente une voirie goudronnée et pourvue de trottoirs. L’assainissement peu présent, pour ne pas dire absent, pose également problème alors que l’adduction d’eau et l’électrification laissent à désirer. Enserré par Guet-Ndar et Goxumbacc, le quartier peut difficilement s’étendre ce qui en un sens modère sa croissance spatiale.

IV-1-1-3-3. Le quartier de Guet-Ndar

Couvrant une superficie de prés de 17ha, Guet-Ndar se structure autour de trois sous quartiers Lodo au nord, Pondoxolé au centre et Dakk au sud. Spatialement limité, Guet Ndar se caractérise par son exigüité et par la diversité de ses formes. Aussi, bien que le quartier tente d’offrir un aspect urbain, l’habitat se présente sous une forme anarchique voire spontanée, où la nouveauté de ses constructions vient s’imbriquer inextricablement au patrimoine existant. Occupé sur le moindre de ses mètres carrés, le quartier de pêcheurs offre ainsi un désordre spatial qui trouve son explication dans l’importance la croissance démographique mais aussi dans l’occupation du sol. Déjà en 1905, les autorités européennes tentent un aménagement du site qui ne correspond guère aux exigences urbanistiques de la métropole, mais sans grand succès. Le quartier continuera de se développer selon ses propres logiques. Avec une densité approximant les 1200 habitants à l’hectare Guet-Ndar connaît ainsi l’un des plus forts taux au monde. En 2001, on estimait le quartier à prés de 721 concessions et 1500 ménages pour une démographie de quelques 22000 habitants. Sa population active, quant à elle, était de 12597 habitants soit 58% de la population totale. Une croissance démographique, sans cesse en augmentation, qui est synonyme d’entassement et de promiscuité au sein des concessions.

Sur son coté maritime, Guet Ndar est confronté à une forte érosion de sa plage qui est passée de 200m en 1856, à une cinquantaine de mètre au début du 20e siècle49 puis à quelques 20m en 2003. Il connaît très souvent des intrusions marines. Le quartier peut donc difficilement

49 Bonnardel, 1985

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s’agrandir. On assiste à une massification de l’habitat avec une emprise du bâti au sol remarquable, ce qui pousse Wade C.S. (1995) à parler d’un coefficient d’occupation du sol de 0,71m sur 1. Outre cette densification de l’espace, Guet Ndar dispose de peu de voies d’accès. Il est principalement traversé par l’avenue Lamotte et, est ceinturé coté fleuve par une route asphalté « Bou El Mogdad » situé à l’est. Cette route est emprunté aussi bien par les piétons, les véhicules et calèches qui se disputent la circulation. Les petites rues transversales qui sillonnent le quartier présentent un véritable fouillis car servant d’aire de parcage pour le bétail, les épaves et les pirogues.

S’étant littéralement développé sur lui-même, et handicapé par l’absence de services de base comme un réseau d’assainissement, le quartier de Guet Ndar atteint aujourd’hui ses limites. Des tentatives de restructuration et de décongestionnement afin d’offrir un cadre plus sain ont été initiées, mais elles se sont heurtées au refus de la population restée très conservatrice. Ainsi, les zones de l’Hydrobase et de Ngalléle qui avaient été loties afin de recevoir une partie de la population furent un échec. Les familles ayant préféré revendre les terres. Aujourd’hui la spéculation foncière de l’hydrobase exclue tout projet de déplacement des populations de Guet Ndar.

En définitive, site amphibie sujet à de récurrentes inondations, la ville de Saint-Louis voit désormais son front urbain s’étendre vers les villages traditionnels de Dakar- Bango et de Ngalléle sans que de véritables initiatives urbaines ne soit mises en œuvre. En effet, ces derniers servent davantage de pôles d’accueil pour la population croissante que connaît Saint- Louis depuis quelques décennies.