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Dans la section précédente, nous avons vu que le fait mutualiste et l‟assurance ont été reconnus par l‟Etat et codifiés à partir du 17ème et 18ème siècle et qu‟ils rendaient possible une forme de contrôle des risques par l‟Etat. Au cours du 19ème

siècle, le contrôle exercé par l‟Etat s‟est étendu à la mise en œuvre de réglementations visant à traiter les dangers, notamment dans les ateliers et les manufactures, qui devenaient plus fréquents et plus graves avec l‟avènement de l'industrialisation3

. Nous commencerons la section qui suit en présentant les éléments qui ont mené, selon l'expression du sociologue Pierre Lascoumes, à une "formalisation juridique du risque industriel"4.

1 Howard S. Becker, Outsiders. Etudes de sociologie de la déviance, Métailié, Paris, 1985, 247 p. Cet ouvrage a été publié pour la première fois en américain en 1963.

2

Patrick Peretti-Watel, Sociologie du risque, Armand Colin, Paris, 2000, 286 p., p.59.

3

Comme nous l'avons déjà signalé, nous allons concentrer notre analyse sur les formes de risque dit industriel. De la même manière, d'autres analyses pourraient être menées sur les autres formes de risque identifiées et reconnues actuellement, telles que les violences dans les quartiers dits sensibles.

4

Pierre Lascoumes, De l‟atteinte à la prévention des risques industriels. Réglementation des installations classées et développement d‟une "magistrature technique", Conquête de la sécurité, gestion des risques, Christine Dourlens et al. (dir.) L‟Harmattan, Paris, 1991, 300 p., p. 65-86, p.69.

2.1. La formalisation juridique du risque industriel

Dans les ouvrages français portant sur le traitement des dangers et des risques industriels est souvent dressée comme préalable une petite histoire des réglementations relatives à la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs. Les chronologies commencent souvent par présenter les régulations instaurées par l‟Etat qui ont été introduites à partir du début du 19ème

siècle. Ces réglementations sont de deux types : - des régulations des relations de travail ;

- des contraintes pour limiter les dangers industriels.

En général, ces réglementations sont présentées comme réponses à deux sortes de besoins : protéger les employés contre les dangers auxquels ils sont exposés et leur apporter des compensations suite aux accidents et à leurs effets (dédommagements). Ces besoins seraient nés du phénomène de l‟industrialisation et du développement des usines. Nous pouvons faire l‟hypothèse qu‟ils correspondent aussi, plus cyniquement, à une volonté de réduire le nombre de morts par accidents, privant les armées d‟un contingent important de recrues, à une époque où les guerres entre les Nations d‟Europe étaient nombreuses. Donnons d‟abord quelques précisions sur les réglementations imposées par l'Etat dans le domaine des relations de travail, pour lesquelles les chronologies présentent habituellement la genèse du droit du travail, né entre le milieu au 19ème siècle et la

Première Guerre Mondiale1. La première date qui est avancée est souvent celle du 22 mars 1841, inspirée des

travaux de l‟ingénieur social Louis-René Villermé qui instaura les premières mesures pour réguler le travail des femmes et des enfants2. Viennent ensuite les dates du 24 avril 1872 (ouverture d‟une enquête parlementaire sur les conditions de travail en France), celle du 9 avril 1898 (Loi sur les accidents du travail établissant le principe de la responsabilité patronale), celle du 11 juillet 1903 (Loi sur l‟hygiène et la sécurité dans les établissements

industriels), celle du 28 décembre 1910 (Loi instituant le Code du Travail)3. Puis est mentionnée la date de

création de la Sécurité Sociale, en 1945. A cette date, le droit social a été divisé en deux branches distinctes mais complémentaires : le Droit du Travail et le Droit de la Sécurité Sociale4.

Lorsqu‟il est fait mention des contraintes pour limiter les dangers industriels, les textes de lois en général cités sont les suivants :

- décret du 15 octobre 1810 relatif aux manufactures et ateliers insalubres, incommodes ou dangereux ;

- loi du 10 mars 1894 (Loi sur les normes des installations industrielles) ;

- le décret du 10 juillet 1913 qui introduit des mesures visant à prévenir les incendies ;

- loi du 19 décembre 1917 relative aux établissements dangereux, insalubres ou incommodes modifiée

par la loi du 20 avril 1932 ;

- loi du 19 juillet 1976 (Loi relative aux Installations Classées pour la Protection de l‟Environnement ; - loi du 22 janvier 1987 (Loi dite loi Sécurité civile qui introduit des servitudes d‟utilité publique dans la

loi de 1976)5 ;

1

Pour exemple, voir la chronologie sur le site de Vie publique : http://www.vie-publique.fr/politiques-publiques/regulation-relations-travail/chronologie/. Précisons que le portail "vie-publique.fr" est édité par la Documentation française dans le cadre de sa mission générale d‟information et de documentation sur l‟actualité politique, économique, sociale et internationale qui se propose de faciliter l‟accès des internautes aux ressources et données utiles pour appréhender les grands sujets qui animent le débat public.

2 Cette loi marque l‟interdiction du travail des enfants de moins de huit ans, la limite de la journée de travail à huit heures pour les 8-12 ans.

3

Le Code du Travail reprend et regroupe toutes les avancées de la législation sociale auxquelles les syndicats sont de plus en plus associés.

4

Les fonctionnaires ont un régime particulier : le statut de la fonction publique et dépendent du droit administratif.

5

Le droit français distingue différents types de servitudes, c‟est-à-dire de charges qui grèvent une propriété privée au profit d‟une autre propriété. La servitude privée du Code civil français et les servitudes utilité publique se ressemblent quant à leurs effets : elles affectent le droit d'usage d'un bien (interdiction ou limitation des constructions, contrainte de conditions

- loi du 30 juillet 2003 (Loi relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages dite loi Bachelot-Narquin).

Sont souvent mentionnés aussi dans ces présentations quelques uns des graves accidents qui se sont produits dans l‟histoire. Parmi les plus cités, on trouve :

- 10 mars 1906 : catastrophe de la mine de Courrières (1 099 morts)1 ;

- 4 janvier 1966 : catastrophe de Feyzin (18 morts et 80 blessés)2 ;

- 1er juin 1974 : explosion d‟une usine chimique à Flixborough en Grande-Bretagne (28 morts)3 ;

- 10 juillet 1976 : explosion d‟un réacteur chimique à Seveso en Italie4 ;

- 2 décembre 1984 : fuite de produits suite à l‟explosion d‟un réservoir de méthylisocyanate à Bhopal en

Inde (plus de 3000 morts)5 ;

- 26 avril 1986 : explosion et incendie de l‟un des quatre réacteurs de la centrale nucléaire de Tchernobyl

en Ukraine (trente et un morts de manière directe, de nombreuses victimes indirectes).

Cependant, ces accidents, s‟ils peuvent constituer parfois des "accélérateurs" de la législation, ils ne sauraient expliquer à eux seuls la prise en compte des risques par l‟Etat, comme le laissent entendre les tenants de la "pédagogie des catastrophes"6. Ces accidents servent plutôt de symbole. L‟un de ces événements-symbole est bien entendu Seveso. Bien que n‟ayant pas causé de morts directes, cet accident fit naître en Europe un débat important sur les risques provoqués par les dioxines, mais aussi sur la réglementation en matière de prévention des risques technologiques. L‟Union Européenne jugea nécessaire d‟harmoniser toutes les réglementations des pays membres et de promulguer une directive cadre pour la surveillance des sites à risques. C‟est ainsi que fut adopté un premier texte le 24 juin 1982 : la directive sur les Risques d‟Accidents Majeurs liés à certaines activités industrielles dite "Directive Seveso" (Seveso I). La directive 96/82/CE du 9 décembre 1996 dite Seveso II concerne la maîtrise des dangers liés aux accidents majeurs impliquant des substances dangereuses. Le mot Seveso est devenu le symbole de l‟"accident majeur" d‟origine industrielle7

.

d'utilisation, etc.). Les servitudes dites d‟utilité publique sont listées dans le Code de l'Urbanisme (Article L126-1). D'une manière générale elles sont motivées par des motifs d'utilité publique : protection du patrimoine, utilisation de certaines ressources et équipements tels que le passage d‟une ligne électrique, salubrité et sécurité publique (surfaces submersibles, plans de prévention des risques, protection autour des mines et carrières). Elles établissent, à l'initiative de l'administration, pour cause d'utilité publique, des limites au droit de propriété et d'usage du sol.

1

Le 10 mars 1906 eut lieu la plus importante catastrophe minière d'Europe (officiellement 1099 morts), dite catastrophe de Courrières du nom de la Compagnie des mines de Courrières qui exploitait alors le gisement de charbon du Pas-de-Calais aux alentours de Courrières, à côté de Lens. La catastrophe de Courrières donna lieu à un immense mouvement de réactions sociales : grèves, manifestations, scission syndicale, répression et débats parlementaires. Du 9 au 11 octobre 2006 fut organisé au centre historique minier du Nord-Pas-de-Calais à Lewarde un colloque international sur la catastrophe et ses conséquences.

2

Une explosion dans l‟usine pétrochimique de Feyzin (Rhône) provoqua 18 morts. Ce fut la première manifestation du phénomène du "Bleve" (Boiling Liquid Expanding Vapor Explosion - Explosion de gaz liquéfié sous pression).

3

Le 1er juin 1974, 50 tonnes de vapeur de cyclohexane se dégagèrent brutalement à l'atmosphère dans l'usine NYPRO de Flixborough. Le nuage formé s'enflamma et une violente explosion se produisit, suivie de nombreux incendies. Sur le site, 28 personnes furent tuées et 36 autres furent blessées. A l'extérieur du site, on compta 53 blessés graves et des centaines de personnes légèrement atteintes, 1 821 habitations et 167 commerces ou usines plus ou moins gravement endommagés, 3 000 riverains évacués.

4 Le 10 juillet 1976, l‟explosion d‟un réacteur chimique de la société Icmesa, filiale du groupe Givaudan-Hoffmann-Laroche, situé en Lombardie (Italie) près de la ville de Seveso causa un rejet de dioxines dans l‟atmosphère. Poussé vers le sud-est, le nuage contamina une région étendue (1800 habitants). Aussitôt, l‟usine fut fermée et des analyses de sol furent réalisées afin de déterminer leur niveau d‟imprégnation en dioxine. Les habitants les plus proches furent évacués, le cheptel abattu, de nombreux bâtiments rasés. Au total, plus de 37 000 personnes subirent les conséquences de cet accident.

5

Les émanations toxiques de cette usine de fabrication d‟insecticide firent de nombreuses victimes parmi la population : 1 754 à 2 500 morts et 170 000 à 600 000 intoxiqués selon les sources. Une pollution chronique aggravée par les rejets toxiques affecte de longue date la population. Fin 1998, le bilan des victimes s‟est allongé : 16 000 morts sont dénombrés et 15 à 20 individus décèdent chaque mois des suites de l‟accident.

6

Nous exposerons les principales raisons dans la prochaine section : Les institutions contemporaines de production du risque.

7

Jean Rué, La prévention des risques technologiques et naturels, Sécurité civile et industrielle, 1er trimestre 2004. Selon la directive Seveso II, la définition d‟un accident majeur est un événement tel qu‟une émission, un incendie ou une explosion

Notons que, dans ces chronologies, ne sont pas mentionnées, dans la plupart des cas, les particularités des réglementations qui s‟appliquent aux installations militaires françaises. Il existe pourtant une réglementation, spécifique sur certains points, pour les sites dépendant du Ministère de la Défense : la loi du 11 juillet 1938 sur l‟organisation de la nation en temps de guerre, le décret de 1939 sur les installations de guerre et l‟existence de dérogations dans l‟application de la loi de 19761

. Cependant, même si la réglementation qui s’applique aux

sites appartenant au Ministère de la Défense montre certaines spécificités, ils sont globalement soumis aux mêmes contraintes que les sites du monde civil.

2.1.1. Les principes à la base des réglementations sur les risques industriels

De manière à donner quelques éléments de compréhension sur ce que recouvre ces réglementations dans un souci de ne pas se perdre dans les détails des législations, nous avons choisi de faire apparaître les six principaux principes qui les sous-tendent, d‟autant qu‟ils sont toujours en vigueur dans la législation actuelle.

L’intérêt de l’entreprise et l’intérêt de la collectivité environnante

Dans un texte intitulé De l’atteinte à la prévention des risques industriels. Réglementation des installations classées et développement d’une "magistrature technique", Pierre Lascoumes décrit les trois textes de loi qui correspondent aux trois moments significatifs d‟ "un état de la formalisation juridique du risque industriel"2. Ces trois textes concernent le classement et le contrôle des entreprises : décret de loi du 15 octobre 1810, loi du 19 décembre 1917, loi du 19 juillet 1976. Il décrit les deux mouvements essentiels qui se sont produits lors de la formalisation juridique du risque industriel : l‟intérêt de l‟entreprise et ce qu‟il nomme "l‟intérêt de la collectivité environnante"3

. Dans le décret de loi de 1810, poursuit Lascoumes, l‟intérêt de l‟entreprise était dominant par rapport à l‟intérêt de la collectivité environnante puis, progressivement, l‟intérêt de la collectivité environnante prit de plus en plus d‟importance. Ainsi, dans le texte de 1976, la référence à la protection de l‟intérêt du développement industriel était beaucoup moins explicite que dans les textes précédents. Lascoumes explique ce phénomène par deux facteurs, l‟un étant la reconnaissance de la gravité

d‟accidents ayant entraîné la mort de nombreuses personnes (18 morts lors de l‟accident de Feyzin en 1966)4

, l‟autre étant lié à l‟apparition d‟une nouvelle sensibilité écologique et la naissance de mouvements revendicatifs contre l‟implantation de sites industriels5. L‟Etat fit un pas de plus dans la reconnaissance de l‟existence de ces problèmes en instaurant un Ministère de l‟Environnement et de la Qualité de la Vie en février 1971 qui avait

pour mission de faire appliquer les réglementations en matière de protection de l‟environnement6

. Toutefois, la

d‟importance majeure résultant de développements incontrôlés survenus au cours de l‟exploitation d‟un établissement couvert par la présente directive, entraînant pour la santé humaine, à l‟intérieur ou à l‟extérieur de l‟établissement, et/ou pour l‟environnement, un danger grave, immédiat ou différé, et faisant intervenir une ou plusieurs substances dangereuses.

1

Nous reviendrons plus en détails sur les particularités du régime de prévention des risques industriels dans la deuxième partie de ce travail, lorsque nous exposerons les divers éléments qui constituent le contexte des centres d‟essais de la DGA.

2

Pierre Lascoumes, De l‟atteinte à la prévention des risques industriels. Réglementation des installations classées et développement d‟une "magistrature technique", C. Dourlens, J.-P. Galland, J. Theys, P.-A. Vidal-Naquet, Conquête de la sécurité, gestion des risques, L‟Harmattan, Paris, 1991, p. 65-86, p. 69. Dans cet article, Lascoumes donne un cadre général d‟interprétation, et précise que, entre ces trois moments, il y eut bien évidemment des étapes intermédiaires.

3

Lascoumes, ibid.,p.69.

4

De plus, certains de ces accidents se sont produits dans des établissements jusqu‟alors réglementés par une réglementation spécifique : le décret de 1939 sur les installations de guerre, la loi du 11 juillet 1938 sur l‟organisation de la nation en temps de guerre.

5

Nous verrons cela plus en détail dans la troisième section de ce chapitre.

6

Pierre Lascoumes (dir.), Instituer l’environnement. Vingt ans d’administration de l’environnement, L‟Harmattan, Paris, 1999, 233 p.

préservation de l‟intérêt du développement industriel continua, précise Lascoumes, d‟être formulée et, au fur et à mesure, "l‟intérêt de la collectivité environnante […] passe d‟une conception particulariste à une conception plus collective"1 : intérêt privé du voisinage dans le texte de 1810, intérêt collectif dans celui de 1917, intérêt de l‟environnement dans son ensemble dans celui de 1976.

Le principe d’éloignement

Le principe d‟éloignement est décrit comme étant le principe de base de la loi de 1976, se substituant à celle de 1917. D‟abord utilisé pour préserver la salubrité des populations et limiter les incendies, l‟éloignement a ensuite été le moyen de ne pas entraver le développement industriel (texte de loi de 1810 et celui de 1917), avant de devenir moins prégnant, voire facultatif (loi de 1976)2. Dans la loi de 1976, il ne s‟agissait plus tant d‟une obligation à éloigner les nuisances que d‟une contrainte à les réduire. Toutefois, il apparaît que l‟éloignement n‟a pas été supprimé pour autant de la législation. Ainsi, dans les installations qui présentent des risques pour la sécurité publique, l‟éloignement est toujours aujourd'hui systématiquement imposé dans les

arrêtés ministériels (voir par exemple la Loi sur les zones de servitude d‟utilité publique). L’éloignement est

aujourd’hui calculé sur la base des dispositions réglementaires et des résultats de l’étude de danger dont la rédaction est imposée par la loi3, qui détermine un zonage en fonction des conséquences prévisibles d’un accident. L‟exploitant doit ensuite veiller au respect de l‟éloignement prescrit.

Le principe de l’autorisation préalable

Le décret impérial de 1810 a généralisé le principe d‟une autorisation préalable que doit obtenir l‟exploitant. A l‟époque de la promulgation du décret, il s‟agissait de donner une "permission de l‟autorité administrative" à tous les établissements jugés "nocifs pour le voisinage". Le principe de l‟autorisation préalable est encore à l‟œuvre aujourd‟hui. Par exemple, pour pouvoir exploiter des installations jugées dangereuses, l‟autorité administrative, représentée par le préfet – ou l‟Autorité militaire dans le cas des sites du Ministère de la Défense –, étudie le dossier présenté par l‟exploitant, comportant notamment une étude de danger, et donne, ou non une autorisation d‟exploiter.

La classification des établissements selon les inconvénients et les dangers

Un autre principe à la base de la réglementation est le principe de la classification des établissements selon les inconvénients et les dangers, déjà présent en droit français dans le décret de 1810. Dans les deux rapports préalables demandés à la section de chimie de l‟Institut pour l‟élaboration du décret-loi de 18104, les critères de classification des établissements faisaient alors référence à l‟importance de leurs inconvénients et à la gravité de leurs dangers permanents ou exceptionnels5. Il était question de quantifier le degré de nocivité d‟une

1

Pierre Lascoumes, De l‟atteinte à la prévention des risques industriels. Réglementation des installations classées et développement d‟une "magistrature technique", C. Dourlens, J.-P. Galland, J. Theys, P.-A. Vidal-Naquet, Conquête de la sécurité, gestion des risques, L‟Harmattan, Paris, 1991, p. 65-86, p.69.

2

Marianne Moliner, Maîtrise spatiale des nuisances et des risques. Le droit des installations classées, ADEF-Etudes foncières, n°105, septembre-octobre 2003.

3 Une étude de dangers est un document qui doit permettre de déterminer les accidents susceptibles de se produire dans l‟installation, d‟en évaluer les conséquences, pour ensuite proposer des dispositions afin de prévenir ou maîtriser ces accidents potentiels. Les informations qui y sont contenues doivent notamment permettre d‟identifier les sources de risque, les scénarios d‟accident envisageables et leurs effets sur les personnes et l‟environnement.

4

Il s‟agissait du rapport du 17 décembre 1804 sur la salubrité et l‟incendie et celui de 1809 sur la salubrité et la compromission de la salubrité publique.

5

Laure Sauvage, Nuisances industrielles et aménagements des villes depuis le 18ème siècle, L’impact du risque industriel sur l’immobilier. Association des Etudes foncières, La Défense, 1997, 255 p., p.15-49 (Chapitre 1).

installation pour son voisinage. Dans le rapport de 1809, il était écrit : "les établissements compris dans la première classe ne doivent pas rester auprès des habitations, puisque les matières qu‟on y travaille et les produits qu‟on en retire, ou répandent une odeur désagréable qu‟il est difficile de supporter et qui nuit à la salubrité, ou sont susceptibles de compromettre la sûreté publique par des accidents auxquels ils pourraient donner lieu."1. On pouvait lire aussi : "Les ateliers d‟artificiers et les poudrières qui, malgré toutes les précautions que prennent ceux qui les dirigent, sont susceptibles d‟une foule d‟inconvénients dont malheureusement on n‟a que trop d‟exemples"2

. Faisant suite à ces deux rapports, le décret impérial de 1810 établissait trois classes selon l‟importance des inconvénients. Avec les yeux d‟un observateur d'aujourd'hui, il est intéressant de noter que les critères dits olfactifs figuraient au premier article du décret-loi de 1810. La loi de 1917 relative aux établissements dangereux, insalubres ou incommodes complétait le décret de 1810, en ajoutant la notion de pollution à celle de nuisances et en permettant une extension de son champ d‟application. Le système d‟autorisation préalable était assoupli par l‟introduction d‟une procédure de déclaration pour certains établissements. Les deux catégories d'établissements étaient – et sont encore – les suivantes :

- les établissements soumis à autorisation ;

- les établissements soumis à déclaration.

Le système de classification des établissements selon les dangers et les nuisances que présentent leurs activités est encore à l‟œuvre aujourd‟hui, incarné en France par la législation relative aux Installations Classées pour la Protection de l‟Environnement (ICPE), en application de la loi du 19 juillet 1976 et codifiée dans le Code de l‟Environnement (voir infra).

Le régime des Installations Classées pour la Protection de l’Environnement (ICPE) dans le Code de l'Environnement français

Le régime des installations classées est désormais codifié aux articles L.511-1 et suivants du Code de