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La variation linguistique

3. Les types de la variation :

Comme nous l’avons déjà mentionné plus haut, la langue varie en fonction de plusieurs facteurs selon lesquels les sociolinguistes proposent plusieurs classements pour présenter la variation. « Dans la littérature francophone, on a pris l’habitude de classer, suivant Coseriu (1969) les variations en fonction de différentes dimensions : selon le temps (diachronique), l’espace (diatopique), les caractéristiques sociales des locuteurs (diastratique) et les activités qu’ils pratiquent (diaphasique). On ajoute parfois une dimension en fonction du chenal – oral ou écrit – employé (diamésique). Ce classement prend comme principe de classement le locuteur : il regroupe la variation interpersonnelle d’une part (dépendant des individus eux-mêmes, selon des angles différents, dans le temps, selon le lieu, et suivant la position sociale), et la variation intrapersonnelle (selon l’usage et le répertoire d’un même locuteur dans différentes activités : situation et chenal) »74.

Marie Louise Moreau (1997) propose quatre types de variation, à savoir : diachronique, diatopique, diastratique et diaphasique. Françoise Gadet (2003) leur ajoute un cinquième type qu’elle nomme « variation diamésique ».

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SIMONIN Jacky, WHARTON Sylvie, 2013, Sociolinguistique du contact. Dictionnaire des termes

et concepts, Lyon, ENS Éd., coll. Langages, P. 399. 74

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Pour présenter les différents types de la variation, F. Gadet propose le tableau suivant75 :

Variation selon l’usager

temps changement diachronie

espace géographique, régional, local, spatial diatopie société,

communauté Social diastratie

Variation selon l’usage style, niveau, registre situationnel, stylistique, fonctionnel diaphasie

chenal oral/écrit diamésie

3.1. La variation diachronique :

Ce type correspond à la variation liée au temps, elle est également appelée « variation historique ». Toute langue est en réalité en perpétuelle mutation, autrement dit, toutes les langues parlées subissent inévitablement des changements au fil du temps. Les chercheurs qui s’intéressent aux différents stades d’évolution d’une langue donnée (changements) devraient obligatoirement passer par la méthode diachronique. Étant donné que les seuls témoignages des stades antérieurs d’une langue ne peuvent être que des documents écrits, la tâche du chercheur dans ce domaine demeure relativement difficile compte tenu de l’absence de plusieurs éléments importants à l’étude, que les documents ne peuvent jamais transmettre. Il faut toutefois mentionner qu’à l’heure actuelle, et avec les moyens technologiques

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dont disposent les chercheurs, les études en diachronie deviennent de plus en plus faciles et précises.

3.2. La variation diatopique :

Ce type de variation renvoie aux différents usages d’une langue selon les régions dans lesquelles elle est pratiquée. Dans une communauté linguistique, on peut facilement distinguer divers usages d’un pays à l’autre, d’une région à l’autre et même souvent d’une ville à l’autre. C’est dans ce type de variation que nous pouvons étudier les différents dialectes régionaux d’une langue. F. Gadet donne à ce type de variation le nom de « diversité dans l’espace » et explique que :

« Quand une langue est parlée sur une certaine étendue

géographique (ce qui est toujours le cas, même si le territoire est restreint), elle tend à se morceler en usages d’une région ou d’une zone (dialectes, patois) […] La diversité diatopique est le premier type de variation pris en compte dans l’histoire des sciences du langage, et c’est là que la variation a été la plus ample. Mais il est maintenant souvent difficile de localiser un locuteur à l’écoute, des facteurs sociaux comme la mobilité, l’éducation et les médias ayant eu des effets à la fois homogénéisants (entre variétés proches) et hybridisants (entre idiomes). Les particularismes locaux se maintiennent quand les contacts sont limités : dans les campagnes, chez les plus

âgés, et les moins éduqués. »76

3.3. La variation diastratique :

Au sein d’une même société et à une même époque, des personnes appartenant à des groupes sociaux différents s’expriment de façons diverses. Les groupes sociaux dont nous parlons sont formés de divers paramètres tels que le sexe, l’âge, le degré de scolarité, le niveau socio-économique, etc.

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Lorsqu’un individu appartient à l’une des classes sociales, il se trouverait tenu à utiliser la variété linguistique appropriée (celle utilisée par son groupe), cette dernière représente ce qu’on appelle communément « sociolecte ». « Les classes sociales qui résulteront de ces regroupements seront agencées hiérarchiquement (ou stratifiées), en partant de la haute et moyenne bourgeoisies, et en se rendant à la classe ouvrière et au sous-prolétariat, tout en passant par la petite bourgeoisie. Il en sera de même pour les formes linguistiques correspondantes, auxquelles seront habituellement rattachés le même prestige et le même mépris dans la société que ceux caractérisant leurs utilisateurs »77.

Cette variation sociolectale renvoie également aux différents registres d’une langue ou d’un dialecte qui se divisent en plusieurs niveaux.

3.4. La variation diaphasique :

Ce type de variation est étroitement lié à la situation de communication ainsi qu’au degré d’attention que le locuteur porte à son discours. En effet, chaque locuteur modifie sa façon de parler selon plusieurs facteurs tels que : les circonstances de déroulement de l’interaction, les objectifs de l’échange, la nature des relations entre les interlocuteurs, etc. Par exemple, on ne parle pas de la même manière selon qu’on s’adresse à son responsable hiérarchique au bureau ou à son ami avec lequel on prend son déjeuner au restaurant.

La variation diaphasique renvoie à la notion de « registres de langue », ceux-ci diffèrent selon le degré de formalité qui caractérise la situation de communication. De ce fait, plus la situation est formelle, plus le locuteur aura tendance à utiliser une langue appartenant aux registres valorisés (soutenu et courant). Pour souligner les phénomènes de choix du style de parole par un individu, J. Auger souligne :

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TOUSIGNANT Claude, 1987, La Variation Sociolinguistique: Modèle Québécois et Méthode D'Analyse, Québéc, Presse de l’Université du Québec, p. 31.

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« Au niveau de l'individu, il n'est guère surprenant que la

variation reflète l'appartenance au groupe. Ce qui l'est plus,

c'est l'existence, chez l'individu, d'une dimension

variationnelle surajoutée à la stratification sociale: en effet, le taux de production individuelle des diverses variantes varie en fonction des caractéristiques sociales de la situation d'interaction; c'est ce qu'on appelle la variation stylistique, le style étant défini comme le degré d'attention qu'un locuteur

porte à sa propre production linguistique. »78

À travers le choix d’un style plutôt qu’un autre, le locuteur révèle une quantité importante d’informations sur lui-même, sur la situation de communication, sur ses intentions et objectifs, etc.

3.5. La variation diamésique :

Elle correspond aux variations qui peuvent être liées au chenal, c’est-à-dire, aux différences entre l’oral et l’écrit. Par exemple : la prononciation de « chais pas » au lieu de « je ne sais pas » relève de ce type de variation.

Jacky Simonin et Sylvie Wharton dans leur ouvrage intitulé « Sociolinguistique du contact » rendent compte de « la variation inhérente » qu’ils décrivent comme :

« On appelle variation inhérente, les variantes présentes dans

le discours d’un même locuteur dans une situation inchangée, elles sont non explicables par les catégorisations précédentes et semblent non liées à des caractéristiques extra-linguistiques »79.