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II. RECENSION DES ÉCRITS

2. Antibiotiques et antibiorésistance

2.2 Résistance aux antibiotiques

2.2.3 Éléments génétiques mobiles

2.2.3.2 Transposons

Contrairement au plasmide, le transposon ne peut se répliquer de façon autonome, il doit donc se retrouver dans un plasmide ou un chromosome bactérien. Cet élément est composé d’une courte séquence d’ADN qui peut se déplacer entre des plasmides, entre un plasmide et le chromosome bactérien ou entre un plasmide et un virus bactérien (bactériophage). La présence des antibiotiques peut permettre l’expression des gènes de résistance présents sur le transposon et augmenter le taux de transfert de ces gènes [288]. Il y a également les transposons conjugatifs (TC) qui peuvent s’exciser et se transférer par eux-mêmes du chromosome donneur au chromosome receveur ou à un plasmide. Ces types de transposon sont autant responsables du transfert des gènes de résistance que les plasmides chez les bactéries à Gram-positif. Ces transposons auraient également un plus grand spectre d’hôte que les plasmides. C’est-à-dire, le transfert peut se faire autant entre les espèces faisant partie des bactéries à Gram-positif que celles faisant partie des bactéries à Gram-négatif, mais également un transfert allant de bactéries à Gram-positif vers celles à Gram-négatif [288]. Ces transposons ont été classés comme des éléments d’intégration conjugatif (ICE). Les TC ont été associés à de la résistance aux tétracyclines et aux MLSB, et

également à la résistance à la vancomycine de type vanB2. Les membres de la famille Tn916/Tn1545 comprennent les transposons conjugatifs classiques ayant un large éventail d’hôtes et portant des déterminants de résistance d’importance clinique retrouvés chez une grande diversité de genres bactériens [331]. De plus, les TC sont capables de co-transférer d’autres plasmides et transposons, et également de faciliter le transfert de longs fragments chromosomiques [333]. Il y a également les transposons composites. Ces derniers doivent leur mobilité intracellulaire à la présence de copies de séquences d’insertion de la même famille les entourant et agissant ensemble afin de mobiliser l’ADN entre eux, les formant ainsi tels qu’ils sont. Ils sont majoritairement associés à la résistance élevée envers la gentamicine ou à la résistance aux glycopeptides de type vanB1.

Figure 9. Strutures des transposons de chacun des trois groupes transférant des gènes de résistance aux antibiotiques chez les entérocoques (modifié selon [29]).

Légende : aac6’-aph2’’, aminoglycoside-6’-N-acétyltransférase-2’’-O-

phosphoryltransférase; tnpA, transposase; tnpR, résolvase; vanA/vanB2 cluster, opérons

vanA/vanB2 conférant la résistance à la vancomycine; région tra, région contenant les

gènes de transfert; oriT, origine de transfert; xis, excisionase; int, intégrase.

Le tableau XI ci-bas démontre la grande diversité des transposons qui ont été retrouvés chez les entérocoques jusqu’à présent.

Tableau XI : Transposons détectés chez les entérocoques (modifié selon [29]). Famille transposons Tn3

Désignation (s) Tn Taille (kb) Résistance (gènes) Tn917 (Tn551) Tn5371 5,3 5,1 Macrolides, Lincosamides et Streptogramine B (erm(B))

Tn1546 et variants 11 Glycopeptides (vanA)

Transposons composites

Désignation (s) Tn Taille (kb) Résistance (gènes) Tn5381 (Tn4001), Tn3706 et leurs variants 4,7 Aminoglycosides (aac(6’)-Ie-aph(2’’)-Ia) Tn924 27 Aminoglycosides (aac(6’)-Ie-aph(2’’)-Ia) Tn1547 64 Vancomycine (vanB1) Tn5384 26 Aminoglycosides (aac(6’)-Ie-aph(2’’)-Ia),

Érythromycine (erm(B)), mercure (mer)

Tn5385 Ca. 65 Aminoglycosides (aac(6’)-Ie-aph(2’’)-Ia),

Érythromycine (erm(B)), Mercure (mer), Streptomycine (aadE), Tétracycline- Minocycline (tet(M)), Pénicilline (blaZ) Tn5405 et variants 12 Aminoglycosides (aph(3’)-IIIa, aadE),

Streptothricine (similaire à sat(4))

Tn5482 26-30 Glycopeptides (vanA)

Tn5506 39 Glycopeptides (vanA)

Transposons conjugatifs (ICEs)

Désignation (s) Tn Taille (kb) Résistance/virulence (gènes) Tn916, Tn918, Tn919, Tn920,

Tn925, Tn3702, Tn5031, Tn5032, Tn5033, Tn5381, Tn5383

15-23 Tétracycline-Minocycline (tet(M))

Tn1545 et variants Ca. 25 Tétracycline-Minocycline (tet(M)), Macrolides, Lincosamides et

Streptogramine B (erm(B)), Kanamycine (aph(3’)-IIIa)

Tn6009 18 Tétracycline-Minocycline (tet(M)),

Mercure (mer)

Tn5382, Tn1549 et leurs variants 27-34 Vancomycine (vanB2)

Tn5386 29 Lantibiotiques (spa), protéine de surface

putative d’adhésion au collagène Homologue du transposon

conjugatif OG1RF

Ca. 49 Protéines putatives d’adhésion

Tn6000/EfcTn1 33 Tétracycline (tet(S))

CW459TetM/Tn5801 (Tn6104) Ca. 25 Tétracycline-Minocycline (tet(M)) Élément de V583 contenant vanB1 55 Vancomycine (vanB1)

Tn5397 et variants Ca. 21 Tétracycline-Minocycline (tet(M))

2.2.3.3 Intégrons

L’intégron est un élément génétique susceptible d’acquérir ou de perdre des gènes de résistance aux antibiotiques. Les intégrons peuvent contenir des éléments mobiles, nommés cassettes, possédant la plupart du temps des gènes de résistance aux antibiotiques. Les cassettes sont intégrées ou excisées par un système de recombinaison spécifique à l’aide d’une intégrase. On retrouve principalement les intégrons au niveau des bactéries à Gram-négatif, mais parfois également chez celles à Gram-positif. On retrouve les intégrons tant au niveau des plasmides, des transposons que du chromosome bactérien [357].

Les intégrons contiennent deux régions 5’ et 3’ conservées, entre lesquelles peuvent s’intégrer dans la région variable une ou plusieurs cassettes de gènes. Les cassettes n’ont pas de gènes codant pour un enzyme catalysant leur mouvement contrairement aux transposons. L’intégron possède trois éléments essentiels : le gène intégrase (intI), un site primaire de recombinaison (attI) et un promoteur de haute expression. C’est la région 5’ immobile qui contient un gène intI codant pour l’intégrase IntI. L’intégrase reconnaît un site de recombinaison spécifique sur la cassette, attC. Selon le type d’intégrase, trois classes d’intégron ont été identifiées, les classes 1, 2 et 3 portant le nom des intégrases correspondantes [357]. L’intégron contient également un ou plusieurs cadres de lecture ouvert (ORF) codant pour des protéines/enzymes métaboliques. Les produits de ces gènes sont des enzymes qui peuvent dégrader les molécules d’antibiotiques ou les modifier pour les rendre inactives. Son contenu lui permet ainsi d’intégrer et de supprimer des cassettes de gènes par un système impliquant la capture, la mobilisation et l’expression de ces cassettes conférant la résistance à différents antibiotiques [358].

Il existe trois classes d’intégron à multiple résistance aux antibiotiques retrouvées dans les plasmides et les transposons, et une quatrième, le superintégron retrouvé dans le chromosome de Vibrio cholerae. Les intégrons sont classés selon l’homologie du gène intégrase et du site attI [359]. On retrouve la plupart du temps les intégrons de classe 1, contenant le gène intI1 codant pour l’intégrase du même nom, dans les transposons de la famille Tn21. Les intégrons de classe 2 se retrouvent sur le transposon Tn7 et ses dérivés. Ils possèdent le gène intI2 codant pour l’intégrase du même nom. Un seul

intégron de classe 3 a été identifié et son intégrase a 61% d’homologie avec celle des intégrons de classe 1 [358]. Il faut dire que la région 3’ de chacune des trois classes est bien différente. Celle des intégrons de classe 1 contient trois ORF (figure 10). Le premier cadre porte le gène qacE1, qui est un dérivé tronqué du gène qacE codant pour une protéine de résistance aux ammoniums quaternaires. Le second, nommé sul1, code pour une protéine de résistance aux sulfamides et finalement, le dernier code pour une protéine n’ayant aucune fonction connue et se nomme ORF5 [357]. Pour ce qui est de l’intégron de classe 2, sa région 3’ code pour des gènes tns nécessaires à la transposition de Tn7. La région 3’ de l’intégron de classe 3 n’a pas encore été caractérisée. Les intégrons sont, en résumé, un système original de capture des gènes capables de promouvoir efficacement la dissémination des gènes de résistance aux antibiotiques au sein du monde bactérien [360].

Figure 10. Structure générale de l’intégron de classe 1. Les flèches indiquent la direction de la transcription. La région GTTRRRY représente la séquence d’intégration des cassettes et se nomme ‘core’, tandis que la région RYYYAAC se nomme ‘core inverse’.

Les intégrons ont toujours été décrits dans les bactéries à Gram-négatif jusqu’à la découverte de leur présence chez les bactéries à Gram-positif en 1990. En 1998, seulement deux cas avaient été rapportés. Un de ces cas a été décrit chez E. faecalis. Ces

intégrons semblaient être de classe I et contenaient seulement des résistances associées aux aminoglycosides (streptomycine et spectinomycine). Le transfert de l’intégron, contenant le gène aadA, a été démontré vers la souche réceptrice E. faecalis JH2-2 à un faible taux. Il a semblé que le gène aadA était le seul gène de résistance inséré dans l’intégron puisque le produit PCR n’était pas assez grand pour contenir d’autres cassettes [361].

Dû au fait que les bactéries à Gram-négatif de la famille des Enterobacteriaceae sont d’importantes causes d’intoxications alimentaires, une très forte attention a toujours été portée sur les gènes de résistance aux antibiotiques de ce groupe de bactéries intestinales. Les intégrons de classes 1 et 2 ont été le plus souvent retrouvés chez les bactéries colonisant le tractus gastrointestinal des animaux de consommation [357]. Plus récemment, Xu et ses collègues [362] ont observé pour la première fois, la présence d’intégrons de classe I chez l’espèce E. faecium, mais également la présence d’un intégron de classe II chez E. faecalis d’origine clinique isolé de l’humain. La cassette de ces intégrons codaient principalement pour de la résistance aux aminoglycosides et au triméthoprime.