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Trajectoire 2 « maintien de la diversification et augmentation en dents de scie du troupeau laitier » (8 exploitations)

Title: Diversity and sustainability of dairy farms in Vietnam

4. CHAPITRE 4 - Les trajectoires des exploitations laitières du district de Ba Vi

4.1. Les quatre trajectoires des exploitations laitières du district de Ba Vi

4.1.2. Trajectoire 2 « maintien de la diversification et augmentation en dents de scie du troupeau laitier » (8 exploitations)

Ce type regroupe les exploitations 1, 3, 5, 11, 12, 13, 16 et 20. Elles se caractérisent par les points communs suivants.

En premier point, elles se caractérisent par le maintien de la polyculture-élevage tout au long de leur trajectoire même si l’élevage laitier prend une place de plus en plus importante dans le revenu de la famille. Ces exploitations ont une plus grande diversité de cultures (riz, thé, manioc) que la trajectoire de type 1 du fait de la disponibilité de terre agricole (tableau 23).

Deuxième point commun, ce type se caractérise par la difficulté pour augmenter le nombre de bovins laitiers. En effet, le nombre de bovins n’a globalement pas augmenté sur la durée de la trajectoire, mais il a fluctué à certains moments. Concrètement, quatre exploitations (5, 11, 13, 20) ont eu un cheptel qui a beaucoup augmenté par le passé, mais celui-ci a beaucoup diminué en raison de problèmes sanitaires sur le troupeau. Dans trois exploitations (1, 11, 16), le nombre de bovins a diminué en raison du manque de main-d’œuvre. En effet, les filles ont quitté la famille pour vivre chez leur mari, ou travailler en ville. L’exploitation (3) a été marquée par un arrêt de la production laitière pendant deux ans suite à la crise de mélamine à la fin de l’année 2007.

Troisième point commun, les exploitations ont emprunté de l’argent pour investir dans la production laitière. Cet emprunt est inférieur à 100 millions de VND (5000 $) depuis le démarrage de production laitière. Cette somme a été utilisée pour acheter des bovins, des équipements ou réparer les étables.

Quatrième point commun, la plupart des exploitations ont maintenu l’activité non agricole hors de l’exploitation tout au long de la trajectoire. En effet, 6 exploitations sur 8 ont maintenu l’activité non agricole en raison de l’augmentation difficile du nombre de bovins laitiers ou parce que les activités non agricoles prennent une place importance. Par exemple, le chef de l’exploitation 5 est membre du comité de commune de Tan Linh. Il a décidé de diminuer le nombre de bovins laitiers en 2010 en raison de départ de ses filles après leur mariage. L’exploitation 12 n’a jamais eu d’activité à l’extérieur tout au long de sa trajectoire. Dans l’exploitation 11, l’activité à l’extérieur a été arrêtée à cause du manque de main-d’œuvre quand leurs enfants ont quitté la famille pour suivre leurs études à l’université à Hanoi.

Cinquième point, la plupart des exploitations ont eu une surface agricole stable tout au long de la trajectoire. Concrètement, 6 exploitations sur 8 n’ont pas loué de terres pour la production laitière du fait de difficultés pour augmenter le cheptel. Deux exploitations (5, 11) ont eu une surface agricole qui a augmenté un peu.

Ces exploitations ont eu des évolutions différentes quant à l’évolution de la main-d’œuvre. En effet, 3 exploitations sur 8 (1, 11, 20), la main-d’œuvre familiale a diminué suite au départ des enfants après leur mariage ou pour travailler en ville, tandis que 3 exploitations (3, 5, 12) ont connu une augmentation du nombre de travailleurs familiaux sur l’exploitation au cours du temps en raison de retour de leurs enfants. Par contre pour les deux autres exploitations (13, 16) la main-d’œuvre familiale est stable tout au long de la trajectoire. Pour les investissements dans les étables et les équipements, trois exploitations sur 8 (3, 13, 5) n’ont pas acheté d’équipements (machine à traire, générateur) en raison de la disponibilité importante en main-d’œuvre, alors que les autres exploitations (1, 11, 12, 16, 20) ont acheté des équipements en raison du manque de main-d’œuvre familiale.

Facteurs clés

La sensibilité de l’atelier laitier à des facteurs internes (main-d’œuvre, maladies des vaches) et externes (crise de la filière) ont influencé les évolutions de ces exploitations.

Tout d’abord, deux facteurs internes ont impacté la dynamique des exploitations dans ce type de trajectoire (main-d’œuvre, maladies des vaches). Il faut souligner que la stratégie de ces exploitants est de développer l’élevage laitier. En effet, les exploitations (3, 5, 12, 16) disposent de terre et de main-d’œuvre familiale. Leur stratégie est d’accroître la production laitière afin d’améliorer leurs revenus et créer des emplois pour leurs enfants. Les trois autres exploitations (20, 1, 11) ont des capacités d’accès au crédit grâce à leurs relations avec les associations de crédit locales. Par exemple, l’éleveur de l’exploitation 1 est le chef du comité de la commune, tandis que les éleveurs des exploitations 11 et 20 sont les chefs de l’association de l’élevage laitier de la commune et de l’association des femmes de la commune.

Toutefois, le développement de l’élevage laitier dans ces exploitations a connu des difficultés liées à des causes différentes. Les exploitations (3, 12, 5, 20, 13) ont perdu des bovins ou ont rencontré des problèmes de reproduction de leurs vaches suite à différents problèmes sanitaires. D’après les éleveurs, de 2000-2010 à Ba Vi, ils devaient faire face à trois principales maladies principales : la stérilité des vaches, les boiteries et la fièvre aphteuse. Ces maladies ont contribué à la réduction du cheptel dans ces fermes. Par exemple, dans l’exploitation 20, 5 vaches laitières sont mortes en 2009 : l’éleveur a perdu tout son cheptel, et n’a plus voulu courir de risque après. En plus, il n’y a aucune politique d’assurance pour les animaux au Vietnam. Les éleveurs ne reçoivent aucun soutien de l’État suite à la perte de leurs vaches pour des raisons sanitaires.

Les autres exploitations (1, 11, 20) ont connu des problèmes avec la main-d’œuvre. En effet, la main-d’œuvre familiale a diminué suite au départ des enfants après leur mariage ou pour travailler en ville, tandis que les chefs des exploitations ont des activités extérieures importantes, comme par exemple être membre du comité de la commune (le cas d’exploitation 1). En ayant moins de travailleurs familiaux, les éleveurs ont diminué la taille du cheptel laitier.

L’instabilité de la filière du district de Ba Vi a beaucoup impacté la dynamique des exploitations dans cette trajectoire. Concrètement, la stabilité du prix de lait de 2005 à 2007 puis la forte augmentation de 2008 à 2014 a eu des impacts positifs sur les décisions des éleveurs pour augmenter le nombre de bovins. Toutefois, la crise de la filière laitière en 2004 quand l’entreprise Nestlé a arrêté la collecte de lait auprès des éleveurs, ainsi que la crise de mélamine à la fin de l’année 2007, ont eu pour conséquence la diminution du nombre de bovins du fait des difficultés à vendre la production par les éleveurs. L’exploitation 3 a même arrêté la production laitière pendant deux ans après la crise de mélamine à la fin de l’année 2007.

Quel avenir ?

Il faut tout d’abord rappeler que les exploitations dans ce type de trajectoire n’ont pas toujours eu des cheptels laitiers de petite taille comme les exploitations de la trajectoire 1. En effet, ces exploitations ont eu à certaines périodes des cheptels de grande taille (10 ou plus bovins

comme les exploitations (5, 11, etc.). Toutefois, ces exploitations ont aujourd’hui de petits troupeaux laitiers en raison des facteurs internes et externes présentés précédemment. Ces exploitations ont la capacité pour devenir de plus grandes fermes laitières dans un contexte où les politiques publiques viseraient à aider les éleveurs à résoudre la pénurie de main-d'œuvre, par exemple avec la mise en place de coopératives pour louer des équipements (comme la coopérative de CUMA en France), ou des politiques d'assurance pour les animaux pour limiter les risques pour les éleveurs.