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ÉTUDE LINGUISTIQUE

I- Phonétique et graphies

3. Traitement des consonnes non implosives (initiales, explosives intérieures, intervocaliques et géminées)

¤ Concurrence des consonnes simples et doubles, étymologiques ou non, qui ne sont plus que de simples variantes graphiques puisque les géminées sont simplifieés depuis le VIIe siècle (à l’exception de rr, traitée plus loin) :

- bb : reprise de la géminée étymologique dans abbaïe/abbaÿe (< abbatia) 8/62,

20/16, 23/53, etc., soit 16 occ., abbé 113/8, 9, 162/17, etc. Mais bb est analogique dans gibbiers (< *gabaiti) 81/4, obbeÿ (dérivé de oboedire) 300/7 (mais obeïr 2/27, 3/49, 37/16, etc., soit 8 occ.), regibboit (dérivé de gib-) 447/2 (mais regiboit 327/12).

- cc : reprise de la géminée étymologique dans accept- (< acceptare) 4/33, 91/14, accointance (dérivé de accognitus) 132/7, etc. Mais celle-ci est concurrencée par la consonne simple dans accorder (< accordare) 14/27, 28/24, 30/59, etc., soit 18 occ., vs acorder 31/27, 217/3, 414/6, etc., soit 13 occ., accord/accort 112/42, 149/16, 154/18, etc., soit 12 occ., vs acord/acort 19/14, 30/60, 157/36, etc. soit 10 occ., accuser 16/7, 27/70, 45/6, etc., soit 27 occ. (< accusare) vs

acuser 197/13, 362/19, 388/28, 428/24, accusation 362/31 vs acusation 362/29,

accueillir (< *accolligere) 84/5, 253/5, 298/13, etc., soit 6 occ., vs acueillir 14/48, 27/59, 117/14, etc., soit 5 occ., etc. Mais cc est analogique ou le fruit d’une assimilation (ad + mot commençant par c) dans accompaigné 19/36 (mais

acompaign- 3/36, 10/16, 11/2, etc., soit 59 occ.), accoler 133/2 vs acol(l)er 4 occ., accompliray 30/57 (mais acomplir 60 occ.), accroissance 90/17, acculé 119/5 vs acula 36/10, etc.

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- ff : reprise de la géminée étymologique dans affection (< affectio) 3/60, 18/2,

27/44, etc., soit 18 occ. / affectionnez 143/7, diffameux 5/38, 6/6 / diffamé (dérivé de diffamare) 147/8, effe(c)t/effait (< effectus) 14/40, 17/17, 38/13, etc.,

effeminé (dérivé de effeminare) 18/13, offrir (< offerre) 21/11, 27/49, 86/8, etc., soit 6 occ. / offre 329/19, effusion (< effusio) 22/24, 340/11, differer (< differre)

48/6, 165/11, offenser/offencé 73/30, 43, 502/7, etc., soit 6 occ., office (< officum) 78/7, 301/19, 310/7, etc., officier 78/21, 310/7, 316/3,

(tres)affectueusement 373/8, 403/3, 428/3 / affectueux 354/2, affule (<*affibulat) 230/13, bauffreurs (dérivé de *baff-) 279/22, affinité (dérivé de affinis) 288/1, 525/5, suffisamment (dérivé de sufficere) 331/2, 332/2, 381/15 / suffisance 386/3 / suffisantes 331/9, efficace (< efficacia) 423/16, differens (< differens) 448/15. Mais les consonnes simple et double se concurrencent pour noter le résultat d’une géminée étymologique dans seufre (< sufferit) 18/25 vs souffrir 6/13, 3/58, 8/23, etc. / seuffre 276/8, soufler (< sufflare) 39/23, ofence (< offensa) 157/22 vs offense/offence 18/25, 19/10, 30/7, etc. Cependant, certains mots ne connaissent pas ces échanges et ne se présentent qu’avec leur f étymologique :

refuge (< refugium) 15/50, 73/19, 132/10, etc., soit 7 occ. , testifier (< testificari) 263/17, afuy 384/10.

En revanche, ff est analogique ou le produit d’une assimilation dans affin (dérivé de finis) 1/4, 8/84, 18/14, etc. (seule forme), pro(u)ffi(s)t (< profectus) 1/5, 21/8, 45/14, etc. / prouffitable 93/1, 226/6, 399/36, etc., soit 6 occ. /

pro(u)ffiter 45/15, 224/64, 346/16, deffendre (< defendere) 2/37, 56, 8/47, etc., soit 59 occ., deffence/deffense/deffance (< defensa) 17/13, 27/20, 41/5, 69/4, etc., soit 29 occ. (mais defence 153/10, 243/4), affaire (composé de a et de faire) 3/42, 8/25, 45/13, etc., soit 40 occ. (mais afaire 104/11, 157/6, 417/26) / a ffaire 95/6, deffault (n.) 3/59, 23/6 / deffaulte 8/33, 38, 119/37, 192/6 (mais defaulte 463/4) / deffault (v. ; à partir de de + faillir) 254/2 (mais defaillir 424/6,

defailloit 483/9), reffuser (< *refusare) 5/31, 321/2, 329/19, etc., soit 6 occ. (mais refus- 2/36, 46, 30/36, etc., soit 13 occ.) / reffus 509/21 (mais refus 479/23), truffer (dérivé de tuber) 5/40, 50, 31/17, etc., soit 12 occ., deffigurez (dérivé de figura) 5/49, 6/10, def(f)ortune (dérivé de fortuna) 7/5, 8/41, 338/12, etc., soit 8 occ., reffrener (dérivé de frenum) 8/4, 18/28, effort (dérivé de fortia)

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14/42, 52, 16/11, etc., soit 18 occ. (mais esfort 428/2), ol(l)ifflan 19/8, 19/13 (mais ol(l)iflan 15/11, 22, 25, etc., soit 8 occ. / oriflan 10/18), affadir (dérivé de

fatuus), 23/8, affiquet (dérivé de *figicare) 24/7, affamé (adj.) 27/28, 170/9,

deffier 27/41, VIII/R, 100/10, etc., soit 10 occ. / affamer (dérivé de fames) 279/7, 328/21, 399/28, deffiement VIII/R, deffiance 31/16, 100/9, eschauff- 38/13, 90/26, 105/17, etc., soit 6 occ. / chauffé (dérivé de calefacere) 112/18 (mais

eschauf- 95/17, 235/6), afforce (composé de a et de force) 39/21, 175/13,

effondr- (dérivé de fondus) 81/34, 281/13, 319/8, meffaire (dérivé de facere) 97/19, 224/7, 401/4, 433/5 / deffaire (à partir de de + faire) 453/7, 514/2, coeffe (< cofia) 107/7, au(l)treffois (composé de autre et de fois) 112/11, 179/3, 347/9, etc., soit 8 occ. (mais au(l)tre(s)fois 33/3, 65/24, etc., soit 17 occ.), olliffant (< elephas) 181/17, affaibly/affoibli (dérivé de flebilis) 201/11, 366/6, coffre (< cophinus) 229/7, 390/21, affermer (dérivé de ferm-) 263/6, 506/2, 22,

deffermerent 324/19, affailly (dérivé de fallere), 328/22, reffreschir (dérivé de

frisk-) 397/17 (mais refresch- 13/22, 161/2, 251/16, etc., soit 6 occ. / rafreschir 162/16, 279/5 / refrechissement 21/11), affondrer (dérivé de fundus) 405/12, 409/5, fortiffiront (dérivé de fortificare) 458/9 (mais fortifi- 11/4, 402/9, 355/34),

aucuneffois (composé d’aucune et de fois) 458/12, difformé (dérivé de deformis) 477/30.

Enfin, le digraphe ff note le produit de l’assimilation de [s] par [f] subséquent dans touteffois/touteffoiz/touteffoys 3/52, 15/46, 36/13, etc., soit 55 occ. (mais toutesfois/toutesfoiz 50/19, 249/14, 384/12, etc., soit 7 occ), effray 27/74 / effrayé/effraiee (dérivé de exfridare) 42/3, 95/27, 393/18 / effroy 152/10 /

effrayeux 179/19, satiffaire (< satisfacere) 157/23, 43, treffort 213/7, 217/4, 514/8 (mais tresfort(e) 8/71, 14/33, VI/R, etc., soit 20 occ.), pluffort 280/12 (mais plusfort 244/8 (x2), 383/27, 458/9), deffroy (< desfrai) 290/7.

- ll : reprise de la géminée étymologique dans, par exemple, (i)cellui (< *cĭllui)

P/28, 2/29, 24/8, etc. (mais celui/y 15/32, 64/5, 90/35, etc.), villany/villainie 41/13, 192/12, estoille (< stella) 224/35, cella 362/16, 454/9 (mais cela 8/29, 14/55, 15/14, etc., soit 93 occ.), acoller 372/9, 423/11 (mais accoler 114/10, 133/2), palle (< pallidus) 514/2. Mais l est employé à la place de la géminée

150

étymologique dans cheval(i)er/chevaliés/Chevalier (< caballarius) P/14, 15, 22, etc., soit 450 occ. (contre chevallier 1/9, 22, 32, etc., soit 192 occ.), chevalerie 15/27, 41, 15/49, etc., soit 23 occ. (contre chevallerie 388/41), (tres)chevale(u)reux P/13, 15/10, 88/9, etc., soit 7 occ. (contre chevalle(u)reux 90/8, 235/2), chastelain (dérivé de castellum) 3/33, 51, 68, etc. (contre

chastellain 3/64, 9/10, 11/3, etc., soit 12 occ.), ap(p)e(r)ler (< appellare) 20/6, 339/1 (contre ap(p)eller P/19, 2/33, 3/11, 14/23, etc., soit 57 occ.), colee (dérivé de collum) 107/6, 125/14, etc. (contre collee 18/31), avaler (dérivé de vallis) 234/10, 428/17, 475/6 (contre avaller 38/19, 65/19, 66/29, etc., soit 23 occ.),

vilaine (< villana) 329/24 (contre villain 4/19, 23/17, 43/7, etc., soit 5 occ.),

vilainement 41/10, 168/9, 357/21, etc., soit 5 occ. (contre villainement 5/49, 41/10, 103/18), alumer (< alluminare) 466/10, 11, 515/16 (contre allumer 114/5, 158/14, 282/8, 316/12). À l’inverse, ll est l’équivalent de l dans utillité 1/5,

consille 13/17, Ollif(f)lan 15/11, 26, 28, etc. vs oliflan 15/23, 19/8, concille XII/R, 469/2, exillé (dérivé de exiliare) 96/10, 321/2, 465/17, habille 154/10, 229/6, 309/7, 383/28, habillement 327/15, malleur 267/4, pillon 191/16, pillier 224/41, pille 281/2, voille 311/12, 374/3, 21, stillé 505/10.

Dans chambellan 157/58, 277/13, 302/4, etc., soit 5 occ. (contre chambelan 167/7), la géminée est le produit de l’assimilation de r à l, qui est un trait picard144. La forme mella (< misculare) 513/12 provient sans doute d’une assimilation de s à l.

- mm : la géminée est analogique dans comme (< quomodo) P/11, 18, 27, etc. soit

406 occ. (mais come 3/43, 47, 5/23, etc., soit 53 occ.). À l’inverse, la consonne simple est utilisée dans des mots contenant étymologiquement la géminée mm, dans comun (< communis) 169/4 (mais commun 103/15, 220/8, 229/12),

rommant (< romanice) 461/10, 468/16, 469/26, etc., soit 5 occ.

- nn : la géminée étymologique est réduite à une consonne simple dans, par

exemple, aneau/anel (< annellus) 135/4, 263/17, 268/5, etc., ou bien consonne simple et double alternent, comme dans baniere 12/17, 19/17, 30/6, etc., soit 10

151

occ., vs banniere 15/50, 91/5, 181/3, don- 151/21, 330/2, 471/12 vs donner 1/6, 30, 35, etc., hanir 227/3, 5 vs hannist 221/2, hennissoit 445/10 / hennissant 446/15, etc. Notons l’emploi d’un m non étymologique dans Damnoys (< danisk) 371/7.

Pour ces nasales, le doublement de la consonne est d’abord destiné à signifier que la consonne antécédente est nasale.

- pp : la géminée étymologique est concurrencée par sa forme réduite dans,

par exemple, apel(l)er (< appellare) P/19, 3/8, 362/22, etc., soit 6 occ., vs

(r)appel(l)er 2/33, 14/23, 37, etc., soit 54 occ., apartient/apartenoi(en)t (< adpertinere, puis [dp] > [pp] par assimilation) 2/9, 4/14, 5/24, etc., soit 5 occ.,

vs appartient/appartenoit/appartiendroit/appartienne 8/31, 23/11, 78/25, etc., soit 10 occ., apro(u)cher (< appropiare) 14/53, 18/29, 103/6, etc., soit 14 occ. vs

appro(u)cher 24/19, 27/31, 30/60, etc., soit 14 occ. / appro(u)che 68/1, 116/4, 166/3, aprochement 21/2, raporter (dérivé d’apportare) 52/1, 130/9, 168/3, etc., soit 12 occ., vs rapport- 386/2, 3, couppe (n.f. < cuppa) 56/4 vs coulpe 268/9,

apareiller (<* appariculare) 95/3, 139/5, 157/56, etc., soit 8 occ., vs appareiller 3/11, 8/76, 15/7, etc., soit 11 occ., apareil 261/6, 355/34 vs appareil 32/3, 355/35, 41, etc., soit 5 occ., aparoistre (< *apparescere) 395/1 vs apparoistre 14/19, 103/19, 115/1, soit 9 occ., etc.

Mais pp n’est pas étymologique dans cappitaine (< capitaneus) 10/3, 4, 6, etc., soit 5 occ. (mais capitaine 12/14, 15/8, 151/11, etc., soit 4 occ.), decoupp- 16/42, 195/10 (mais decouper 128/6), coupper (dérivé de *coup, avec suffixe -er) 27/24, 37/3, 18, etc. soit 28 occ. (mais couper 95/14, 138/13, 153/12, etc., soit 8 occ.), appoin(c)tement (dérivé de punctum, avec préfixe a) 30/5, 120/9, 165/20, etc., soit 16 occ. (mais apoin(c)tement 3/24, 157/31, 170/14, etc., soit 7 occ.),

appoin(c)ter 47/2, 49/13, 419/21 (mais apoin(c)ter 208/13, 214/32, 310/1),

apprester (dérivé de *appraestare) 51/1, 432/10, 434/2 (mais aprester 10/21, 49/10, 91/5, etc., soit 12 occ.), chappelle (< *capella) 224/21 (mais chapelle 367/13, 502/2, C/6), chappeau (< capellus) 297/10 (mais chapeau/chapel 107/7, 138/21, 242/2), esquippez (dérivé de skipa) 372/6, etc. Le digraphe pp est

peut-152

être le résultat de l’assimilation de s à p dans souppiroit 243/8 (contre souspirer 224/12).

- tt : la géminée étymologique est concurrencée par sa forme réduite dans ataindre (< attingere) 39/12, 108/13, 111/11, etc., soit 5 occ., vs attaindre 3/65,

28/6, 98/9, etc., soit 16 occ., atendre (< attendere) 91/3, 108/28, 111/7, etc., soit 12 occ., vs attendre 5/20, 12/16, 16/27, etc., soit 28 occ.

Mais la géminée tt n’est pas étymologique dans acusasttes 428/24, cuyttes 135/23, etc. Elle est issue de l’assimilation de [kt] dans getter 1/14, 16, 3/66, etc., soit 93 occ. / degetter 224/30, 373/4, 453/3, 455/11 (mais gecter 469/23, 472/7, 475/3, etc., soit 5 occ.), retraitte (dérivé de retracta) 27/39, 342/20, 410/2 (mais retraite 299/15), ottroyer (< *auctoricare) 30/21, 31/35, 59/21, etc., soit occ., esploitté/exploitté 123/15, 184/8 (mais exploicter 19/59, 138/5, 251/7, etc., soit 9 occ.), maulditte 191/13 (mais mauldicte(s) 10/9, 14/24, 133/18, etc., soit 23 occ.), estroittement 395/22 (mais estroictement 40/7, 96/12, 377/7, etc., soit 5 occ.), traitté 504/16 (mais traicter 13/1, 95/29, 289/9, etc., soit 10 occ.).

Cette séquence tt peut aussi noter le produit de [st] dans attach(i)er 192/6, XXXVI/R, 284/11, etc., soit 6 occ. (mais atacher 224/40, 235/10 (x2), etc., soit 15 occ), attache (dérivé de *stakka) 328/3 (mais atache 331/21, 336/23, 495/24, etc., soit 4 occ.), gitte (dérivé de l’ancien p.p. subst. de gesir) 446/14 (mais giste 119/27, 157/57).

Tous ces échanges entre consonnes géminées et simples prouvent qu’elles ont la même prononciation.

¤ [b] et [d] dans un groupe consonantique

Disparition de la labiale dans le groupe bl, à la suite de sa vocalisation dans affule 230/13. Il s’agit d’un trait du Nord, en particulier picard, d’après J. Chaurand145.

145 Cf. p. 87. Voir aussi Ch. Th. GOSSEN, § 53 ; R. LORIOT, p. 620, 630, 633. Voir enfin G. ROUSSINEAU,

153

¤ Échanges entre consonnes sourdes et sonores : confanons (< gundfano) 12/17, 19/17, retoubtot 38/23 (mais redoubter 38/25 (x2), 168/17, (tres)redoubté 5/26, 27/13, 37/22, etc.), badard 90/25 (mais bastard/bastart 81/33, XIV/R) et segretaire 309/19, 310/4 (mais secretaire 338/36), segretement 416/8 (mais secretement 25/15, 102/8, 114/3, etc., soit 15 occ.). Ce trait est courant « en picard et les dialectes du Nord »146

mais dans le Nord-Est et l’Est147. ¤ Notation de [k]

Emploi, à l’initiale, de la graphie étymologique qu dans quar (< quare) 19/14 (contre

car, forme majoritaire), quartier 38/20, 65/20, 143/5, etc., soit 15 occ. (contre cartier 8/35), 110/14, quoy (< quietus) 333/20.

¤ [r] / [l] dans un groupe consonantique  r

- Apparition d’un r inorganique derrière d, t148 dans plastreau 5/45, arbalestre (< arcuballista) 65/22, 333/6 (mais il peut s’agir aussi du produit analogique

d’arbalestrier 471/20)149. Il résulte sans doute d’un phénomène d’assimilation dans

prestre (adj. « prête ») 23/25, tristre 158/1 (mais triste 52/10, 53/2, 84/3, etc., soit 15 occ.), jardrin 286/5, prestrer 454/15. Un r inorganique apparaît après v dans pouvrront 387/8 : peut-être est-ce là le produit de la fusion de pourront et pouvront.

- À l’inverse, apocope de r derrière une consonne explosive dans les groupes dr, tr, vr dans destier 25/30, 139/10, taÿson 34/1, liver 67/9 (AP), faulte(s) 203/9, 11, este 353/13, esclande 392/4 (AP) (mais esclandre 163/25, 278/10, 361/24, etc., soit 5 occ.),

ouvir 430/5, aultes 436/25, congnoiste 481/36, Chartes 501/2. Cette absence est sans doute due à un phénomène de dissimilation dans entrerenconterent 36/2, trayte 40/7, 11 (contre trai(s)tre/traytre 2/25, 29, 15/44, etc., soit 38 occ.), chartier (dérivé de carcer) 400/5, 12 (mais chartrier 113/16, 324/22, 354/19, 22). Ce trait se rencontre en wallon,

146 N. HENRARD et M. TYSSENS, p. 15, § 6.

147 Cf. M.-Cl. de CRÉCY, Ponthus, p. CXIX, § 5.

148 Sur cette propagation du r, voir R. MANTOU, p. 237.

149D’après M.-Cl. de CRÉCY, les deux formes, avec et sans r, « coexistent en AF, sans doute dues au double étymon ballista et ballistra (lat. tardif, P. Fouché, Phonétique hist. …, III, p. 757) » (Ponthus,

154

d’après M. Wilmotte150. Selon Ch. Marchello-Nizia, c’est une « tendance en moyen français » qui est particulièrement répandue en picard où r après consonne explosive « s’articule faiblement »151.

L’affaiblissement de r dans les groupes consonantiques a pour conséquence morphologique la confusion entre les formes d’imparfait et de conditionnel : perdoient = perdroient 458/2 (corrigé).

- Quelques cas de métathèse (trait caractéristique du picard et du normand)152 :

esprevier/esprivier 23/60, 31/29, 81/12, etc., soit 7 occ. (mais espervier 81/2),

carneau(l)x 120/17, 155/15, haubrejon 65/17, Granier 378/1, pourporcionné 382/8,

souldras 399/22, 501/11 (forme attestée ni dans DMF ni dans FEW ni chez God.),

garnier 478/19, attrempance 506/15.

 l

- Emploi d’un l pour noter le produit d’un [r] étymologique dans temples (< tempus,

temporis) 59/12.

- Absence du l dans besserent 510/10, résultant sans doute d’une coquille (corrigé).  rr / r

- La géminée [rr] semble réduite à [r] au vu des alternances graphiques suivantes :

Sarasins/Sarazins 21/7, 412/12 vs Sarrasins/Sarrazin/Sarrasine 1/14, 27, 2/23, etc., soit 87 occ., arester 75/6, 228/32 vs arrester 15/43, 16/28, 27/42, etc., soit 36 occ. / arrest 7/17, 65/11, 68/13, etc., soit 7 occ. / arrestement 286/1, fourer 108/11, 447/6 vs fourrer 15/22, 27/27, 113/16, etc., soit 6 occ., guere 112/39 vs guerre 1/18, 20, 50, etc., soit 63 occ., Thiery 168/15 vs T(h)ierry/Thyerry 12/8, 15/30, 44/12, 69/6, etc., soit 23 occ.,

ariva 470/12 vs arriver 2/5, 40, 3/2, etc., soit 165 occ. / arrivee 27/27. Pour certains mots, la géminée est systématiquement simplifiée : charier 126/14, 167/8, 220/15,

chariotz 92/4, coroux 90/42. De telles réductions ont été observées dès le XIIe siècle

150 P. 67, n° 39 ; voir aussi ; M.-Cl. de CRÉCY, Hélène, p. CXXVI, § 3.

151 Langue, p. 106, 2.

155

dans le Nord153, avant de gagner « toute la zone d’oïl en moyen français »154 ; ce n’est qu’au XVIe siècle que « la simplification paraît être générale en province »155.

- Cette réduction est en outre signalée par l’emploi de la graphie inverse rr dans

barronnie 76/16 (mais baronnie/baronnye 3/8, 42, 47, etc., soit 22 occ. / baronnerie 78/16, 137/1, 138/25, etc., soit 7 occ.), barrons 172/1 (contre baron P/13, 1/32, 34, etc., soit 48 occ.), perre 78/19 (contre pere 1/15, 3/12, 57, etc., 207 occ.). Dans sourrire

337/23 et sourriant 3/66, 37/5, rr résulte peut-être de l’assimilation de b à r (cf. soubzrire 23/54, soub(z)riant 31/1, 31, 70/38).

- Notons enfin l’absence d’assimilation de in- en ir- dans inrevocable 223/8156.

La réduction de la géminée rr a pour conséquence morphologique la présence de formes réduites au futur et au conditionnel : pour- 8/44, 322/6, 458/19 vs pourr- 30/48, 31/26, 34/7, etc., soit 107 occ. Pour les verbes du premier groupe, une telle réduction peut entraîner une confusion avec une forme de présent : enquerons 377/21 vs enquerrez 383/17, et sans doute endurez 361/27, résultant de la syncope de e prétonique et de la réduction de rr à r (endurerez JP).

- Rhotacisme r pour l dans Hierusarem 356/4 (phénomène d’assimilation) et oriflan 10/18 vs Ol(l)if(f)lan 15/11, 22, 25, etc. (peut-être un phénomène de dissimilation). Ce trait s’observe surtout dans les scriptae lorraines et picardes.157

- Rhotacisme r pour s dans doulourer 155/12, à moins que cette forme ne résulte d’un croisement du verbe doulouser et du nom douleur/doulour.

153 Cf. G. ZINK, Phonétique, p. 156.

154 G. ZINK, Le Moyen français, p. 14, 4.

155 P. FOUCHÉ, Phonétique, III, p. 862, 3.

156 D’après G. HASENOHR, p. 449, la graphie in dans inrevocable est une graphie inverse pour i. C’est un

trait commun aux textes wallons du MF qu’elle énonce dans son article.

157 Cf. J. CHAURAND, p. 94, R, a ; Ch. Th. GOSSEN § 55 ; R. LORIOT, « L’alternance r/l en picard moderne », Les dialectes belgo-romans, VII, 5 et sq. ; E. SCHWAN-BEHRENS, p. 116, § 174, rem. Voir aussi A. BRASSEUR, p. 79, § 9.

156 ¤ [s] / [z]

- À l’intervocalique, confusions entre [s] et [z] :

 Transcription s au lieu de ss dans puisant 2/43 (mais puissant 2/21, 4/26, 28, etc., soit 67 occ.), deservir 18/30, 100/7, 130/12, etc., soit 13 occ. (mais

desservira 395/18), asaillie 19/18, aseree 25/32, resembl- 80/5, 371/15 (mais

ressembler 90/13, 230/16, 484/20), espase 33/4 (mais espace 2/17, 79/9, 120/8, etc, soit 14 occ.), hause 120/25 (mais hauls-/hauss- 18/22, 23/46, 65/31, etc., soit 14 occ.), baiserent 366/16, 405/2 (mais baysserent 427/18), asambleront 413/8 (mais assembler 3/42, 8/37, III/R, etc., soit 99 occ. / assemblement 249/3, 354/46, 372/1 / assemblee/assemblé 287/11, 335/20, 348/11, etc., soit 8 occ.),

assemblasent 383/9, maudisoient 161/15, Ro(u)sillon 172/2, 245/12, 316/4, etc., soit 18 occ. (mais Ro(u)ssillon 203/11, 270/9, 472/4, etc., soit 8 occ.), Soysons 182/9 (mais Soyssons 107/9), asaysonnez 449/1, ausi 449/17, laise 518/13.  Transcription ss / c au lieu de s dans baissa 9/8 (mais baiser 1/46, 59, 13/12,

etc., soit 41 occ.), chosse 20/17, 19 (mais chose P/10 (x2), 24, etc., soit 249 occ.), dissant 377/13, jasseran(t) (< gaza’iri) 33/3, 5, 36/10, etc., soit 6 occ., joyeussement 18/30 (mais joyeusement 31/30, 35/4, 49/12, etc., soit 12 occ.),

merveilleusse 428/11 (mais merveilleuse 6/10, 7/1, 16/10, etc., soit 28 occ.),

promisse 356/29. Pour bucines (< bucina ; AF buisine) 340/2, 6, 13, on a la reprise de la consonne étymologique.

Cette confusion de sourdes et de sonores, fréquente en MF, se rencontre « surtout dans les textes du Nord » mais aussi « dans quelques textes du Centre. »158

- Équivalences graphiques  Transcriptions de [s] :

. s / c / ç- / sç- à l’initiale : sa (= « ça ») 7/9, 82/16, 112/30, etc., soit 7 occ.,

ceptre 12/21, 43/8, 520/15 vs sceptre 502/6, saindre 33/16, 98/8, 148/3, etc., soit 5 occ. / sain(c)ture 108/16, 112/35, 179/21 vs sçaincture 39/7,

serimonies 72/14, 173/19, sies (= « scies ») 128/5, servelle 151/24, parçoy 158/5 (= « par soi »), çavoir 271/1 vs sçavoir (influence du latin scire)

158 Ch. MARCHELLO-NIZIA, Langue, p. 113-114. Voir aussi Ch. Th. GOSSEN, § 46 ; N. HENRARD et M. TYSSENS, p. 16, § 7 ; M. OTT, Enfances, p. 66, § 46 ; A. BRASSEUR, p. 81, § 103.

157

2/42, 8/67, 9/11, etc., soit 322 occ., sce- 78/18 (x2), 139/4, etc., soit 9 occ.

/ sceu(l)- 1/60, 3/14, 35, etc., soit 67 occ. / sceu (p.p.) 24/5, 55/10, 73/25, etc., soit 12 occ. / sceu (n.) 25/16, 46/9, 75/5 vs seut 446/10 vs ceut IV/R,

sçauver 392/14 vs sau(l)ver 19/34, 54, 23/55, etc., soit 47 occ., cerviteurs 411/13.

. ss / c / sc à l’intervocalique : menasser 2/56, 131/4, 154/4, 324/2,

pascience 5/16, 90/33, soussiez 335/12, 394/5 vs soucier 160/6, 242/13, 274/6, etc., soit 9 occ., piessez 39/16 vs piece 6/7, 27/24, 35/17, etc., 38 occ., soussi/soussy 59/37, 62/20 vs soucy 55/22, 163/8, 386/15, etc., soit 5 occ., pasciamment 88/4 vs paciemment 23/7, innoscente 137/15, 138/26 vs

innocent 4/13, 7/2, 8/16, etc., soit 13 occ., complisses 224/26, prouesce 168/17 vs pro(u)esse 1/11, 23, 23/21, etc., soit 28 occ., Pruce 264/3,

drecer 286/5, 420/8, 475/20 vs dresser 15/21, 66/37 (x2), etc., soit 5 occ.,

descelé 324/16, descervira 392/15, lices 402/6 vs lisses 366/15, paticier 478/23, embracé 489/8 vs embrasser 114/19, 135/13, 225/35, etc., soit 15 occ.

. c / t à l’intervocalique : mencion 1/11 vs mention 1/7, 12/10, 173/4,

intencion 3/56, 4/15, 34, etc., soit 22 occ., vs intention 30/33, 69, 31/36, etc., soit 22 occ., lamentacions 11/11, 351/19 vs lamentation 3/67, 84/11,

exultacion 11/16, diminucion 22/23, peticions 23/12, reparacion 23/23 vs

reparation 6/3, 8/31, 46/12, etc., soit 5 occ., salutacions 24/10, 90/5 vs

salutation 413/23, 515/20, 521/8, consolacion 24/13, 66/43, 236/10, etc., soit 5 occ., vs consolation 29/12, 91/6, 198/16, etc., soit 8 occ.,

deliberacion 27/68, 171/7, 214/7, 215/15 vs deliberation 12/20, devocion 389/26 vs devotion 226/16, nacion 35/3, 124/9, indignacion 124/5 vs

indignation 3/69, 93/10, 105/12, exposicion 168/10, magitien 211/11,

obstinacion 217/10, revisitacion 162/10, composicion 213/14 vs

composition 3/16, 356/13, generacion 286/7 vs generation 378/6, 520/5,

conversacion 369/4, pourporcionné 382/8, (tres)gracieux 1/53, 31/38, 314/4, etc., soit 6 occ., vs gratieux 392/13 (infuence de l’étymon gratia),

exaltacion 394/20, 525/8 vs exaltation 441/25, expedicion 371/24 vs

158

102/7, etc., soit 6 occ., resolucion 437/22, disposicion 449/6, visitacion, 476/6 vs visitations 310/4, confiscacion 473/2 vs confiscation 173/10, 177/3, pugnicion 487/16 vs pugnition 380/8, augmentacion 509/18 vs

augmentation 442/13, porcion 509/24, ymaginacion 521/19 vs imagination 251/1, fondacions 525/9. S’ajoutent les noms propres Clarite 358/1 (et 387/16 P) pour Clarice 259/2, 261/8, 262/8, etc., Gaudite 461/4 (AP) pour

Gaudice 455/8, 13, 460/10, 13, 461/7.

. s / c / ç / ss / cc en position intérieure forte : exaulser 1/13, 373/3, 449/12, pencerent 2/14 vs penser 3/4, 4/1, 27, etc., soit 122 occ., vs

penssant 513/5, responce 3/9, 5/3, 37, etc., soit 16 occ., consille 13/17 vs

concille XII/R, 469/2, of(f)ence 18/25, 19/10, 30/7, etc., soit 8 occ., vs

offense 469/12, offencé 73/30, 43 vs offenser 504/5, 513/18, 516/15,

princces 19/10 vs prince(sse) P/9, 13, 22, etc., soit 109 occ., exaulcer 23/12, 168/17, 202/12, 517/21 vs exaulser 1/13, 373/3, deffance/deffence 17/13, 27/20, 41/5, etc., soit 27 occ., vs deffense 192/16, faulcer 56/4, 119/8, 188/5 vs faulser 70/24, 184/4, 292/9, etc., soit 4 occ., faulceté 366/21, 428/28 vs faulseté 4/1, 102/15, 331/22, faulce (adj. f.) 42/12, 59/3, 5, etc., soit 6 occ., vs faulse 117/12, 232/7, 344/9, etc., soit 8 occ.,

noirsi/noirsy 112/19, 339/5 vs noircy 313/13 / noirci- 313/11, 319/6,

dancer 221/3 / dances 526/16 vs danser 451/5, 486/11, ainssi 413/15 vs

ainsi P/27, 1/6, 2/6, etc., soit 534 occ., Perce 175/4 vs Perse 69/7, 323/13,

ranson 175/16, 208/15 vs rançon/rençon 245/13, 303/4, 339/19 etc., soit 10 occ., enssemble 382/12 vs ensemble/emsemble 2/41, 3/15, 11/6, etc., soit 103 occ., conceil 390/15 vs conseil 2/18, 3/17, 46, etc., soit 54 occ.,

courcier 422/6, 8, 9, etc., soit 5 occ., vs coursier 15/31, 112/17, 179/18, etc., soit 18 occ., concentement 458/21 vs consentement 8/70, 132/14, 170/16, etc., soit 12 occ., tronçons 488/17 vs tronson 157/58.

Or, ces échanges peuvent entraîner des confusions dans l’identification des mots :

- ce = « se », conj. de sub. 82/12, 116/13, 288/11, 309/4, 458/18, 505/4 ; - c’/ce = s’/se pron. réfléchi 15/16, 41, 27/69, 29/2, 42/11, etc ;

- se = ce, dét. démonstr. 254/15, 255/13, 360/10, 434/1, 441/17, 471/9 ;

159

- ces = « ses » 2/21, 3/15, 78/7, 12 (x2), 93/12, 97/27, 107/2, 157/49, 179/17,

224/33, 254/4 (2e occ.), 266/5, 321/2, 329/6, 336/4, 394/8, 403/6, 413/1, 422/4, LII/R, 475/27, 514/6 ; et peut-être 214/27, 423/16 ;

- ses = ces 485/1, 496/10.

 Transcriptions de [z] : z concurrence s à l’intervocalique dans

sarrazin/Sar(r)azins / T/3, 1/14, 27, etc., soit 85 occ., vs Sar(r)asins/Sarrasins/

Sarrasine 13/2, 4, 19/14, etc., soit 23 occ., sarrazinois 57/5 vs sarrasinoys 23/61, Sarrazinesme 197/14, 328/29, 331/22, etc., soit 6 occ., vs Sarrasinesme 235/4, 418/11, doulouzer 147/5 vs doulousoient 441/9, Yzoré 173/17, 174/6, 175/4 vs Ysoré/Isoré 187/4, 228/4, 229/7, etc., soit 37 occ., ozé 204/11, 370/12

vs osé 59/3, 108/37, 113/17, etc., soit 16 occ., sollennizer 245/6 vs solenniser 431/17, aromatizant 255/10, scandalizé 342/7, tizon 466/9, 472/5, 525/14, etc., soit 4 occ., vs tison 434/19, 474/5, 9, etc., soit 4 occ., jalouzie 484/26 vs jalousie 391/26.

- Un cas d’assibilation de [r] intervocalique à [z] dans Hiesusalem 437/13159. 4. Palatalisation

¤ [g] / [ž]

- Transcriptions de [ž] :

 Échanges g / j devant e et i : ma(i)gesté P/23, 28, 502/7 vs majesté 73/43, 248/6, 352/3, 502/9, get(t)er 1/14, 16, 3/66, etc., soit 94 occ., vs jeter 22/19, 98/5, 6, etc., soit 5 occ., subge(c)t 3/4, 4/31, 31/3, etc., soit 9 occ., vs subje(c)t 2/27, 18/26, 278/3, etc., soit 6 occ., ge 38/8, 39/18 vs je/j’ P/1, 1/47, 49, etc., soit

2312 occ., g(i)eu 110/7, 371/3 vs jeu 28/12, 38/10, 81/19, etc., soit 8 occ.,

degetter 224/30, 373/4, 453/3, 455/11.

 Équivalence g / ge / j devant a et o : vengance 6/18, 8/4, 125/18, etc., soit 4 occ., vs vengeance 23/23, 184/15, 188/13, etc., soit 5 occ., plega 62/11 vs

159 Cf. P. FOUCHÉ, Phonétique, III, p. 603 : « Ce phénomène fait son apparition au XVe siècle dans le

parler vulgaire de la capitale. » Voir aussi L.-F. FLUTRE, Le Moyen français, p. 494, §183 ;

160

plegeoit 401/7, bourgois/bourgoys 86/5 (x2), 288/3, etc., soit 15 occ., vs

bourgeois 279/18, 19, interroga 90/9, 179/12, 271/5, etc., soit 4 occ. /

interrogast 315/16, Digon 95/2, 4, 362/5 vs Digeon 361/3 / Dijon 95/31,

avantaiga 196/5, menga 157/45, 449/3 / mengassent 170/10 vs mengeay 157/7, 279/25 / mengeast 193/17 / mengeastes 157/46, descharga 65/19, 238/7, 267/5 /

encharga 165/11, 167/7 / charga 241/11, 245/17 / encherga 377/8 / enchargant 247/7 vs enchargea 129/19, naga 261/10, 443/1 / nagoient 312/2 vs nagea 338/42, 349/9 / nageant 440/25, logons 279/22 vs logea 418/10, nagoient 312/2,

bougast 388/9, bougoient 154/5, dangoreux 392/16, dommagast 407/25 vs

dommageable 458/13, forga 407/26 / forgast 325/4, songa 446/17 vs songea 25/34, 26/2.

- Transcriptions de [g]

 Équivalence g / gu devant a : Guarin 105/2, 6, 15, 107/14, etc., soit 10 occ., vs

Garin 112/31, 33, 120/15, guary 240/2 vs garir 230/11, 231/16, 232/1, etc., soit 11 occ., briguantin 311/16, naguaires 317/12, 355/27, 44 vs nagaires/gaires 84/6, 88/30, 91/11, etc., navigant 355/11, guaignees 455/3 vs gaigner 22/13, 23/13, 34/6, etc., soit 63 occ. ;

 Équivalence g / gu devant i ou e : naviger 256/9, 175/1, 311/6, etc., soit 8 occ.,

vs naviguerent 356/27, 455/14, navigué 175/1, 381/16, 438/15 ; gerdez 508/17,

alongir 516/10.

En raison de ces échanges, certaines formes restent équivoques : alonguer 347/8 vs

alonger 121/6, 155/20, prolonguement 223/15. Pour ces mots composés à partir de l’adjectif féminin issu de longa où [g] + [a] en position forte > [ž], la graphie gu note-t-elle [g] ou [ž] ?

La forme inter(r)oguer (< interrogare) 7/5, 95/19, 129/2, 363/8 est calquée sur le latin

-rogare160.

161 ¤ [k] / [š] / [s]

- Produits de [k] + [a] à l’initiale et en position forte : en face de la graphie commune

ch, nous ne trouvons que deux occurrences de la graphie c : coses (< causa) 403/3 (contre chose(s) P/10x2, 24) et escappé 42/1 (contre eschapper 8/83, 14/22, 15/52, etc., soit 43 occ.). Ce trait est d’origine picarde et normande161. Toutefois, selon M.-Cl. de Crécy, c peut n’être « qu’une graphie, que présentent fréquemment les chartes du XIIIe

siècle, en Flandre, Hainaut, dans une partie de l’Artois et à Saint-Quentin »162. - Produits de [k] + [e / i] en position forte

. En face des graphies communes c (et ses variantes s, ss), nous relevons ch, d’origne picarde et normande, dans archon (< *arcio) 39/23 (mais arçon 231/15),

chancheler (< cancellare) 105/7, tronchon (< trinceus) 158/15, 195/10 (contre tronçons 488/17, tronson 157/58)163.

. Pour les mots d’origine germanique, pour lesquels l’assibilation en [t] s’est faite en chuintante [tš], la graphie commune ch est concurrencée par c164 dans decirees (frq. *dis-skîran) 243/9. C’est un trait propre au normand et au picard165.

. Les graphies ch et c se concurrencent pour les produits du mot d’origine germanique skirmjan (dont la finale reste mal expliquée pour les linguistes) :

escarmou(s)che 18/33, 68/4, 117/18, etc., soit 13 occ., vs escharmou(s)che 326/5),

escarmoucher 327/20, 420/8 vs escharmouchez 175/9.

. En face des formes communes cercher (< *cĭrcare) 66/12, 75/1, 156/12, etc.,

soit 10 occ. et sercher 481/19, 484/12, nous rencontrons chercher 3/60, 102/26, 104/12, etc. soit 24 occ. D’après P. Fouché, « le v. fr. cerchier, cercher est devenu chercher vers la fin du Moyen Âge par la suite de l’assimilation de [s] initial (< [ts]) avec le [š] (< [tš]) de la seconde syllabe. »166

161 Cf. Ch. Th. GOSSEN, p. 95, § 41 ; Ch. MARCHELLO-NIZIA, Langue, p. 112 ; L. REMACLE, Ancien

wallon, § 31, p. 70-71 ; G. ZINK, Phonétique, p. 233-234.

162 Hélène, p. CXXVII, § 5.

163 Cf. G. ZINK, Phonétique, p. 232 ; Ch. Th. GOSSEN, § 38.

164 Voir. G. ZINK, Phonétique, p. 231, Palatalisations tardives, pour l’évolution régulière.

165 Ch. Th. GOSSEN, p. 96-98.

166 Phonétique, vol. III, p. 552, rem. III. Voir aussi E. SCHWAN-BEHRENS, p. 75, § 103, 2 : « Rarement

une consonne s’assimile à une autre, qui en est séparée par des sons intermédiaires. C’est ainsi qu’on explique, entre autres, le mot récent du français littéraire cherchier au lieu de cerchier (cerkare) ».

162

. Nous trouvons en outre mercha 27/37 au lieu de merchia ou mercia : l’absence du i place la consonne précédente au contact de a, ce qui aurait favorisé la palatalisation de [k], à moins qu’il ne s’agisse d’une coquille.

- Produits de [k] + [o] : en face de la graphie commune c, on relève une seule fois ch, dans choucha 447/9.

- Graphie c pour noter le produit d’un [k] étymologique dans arcevesque 72/4, 162/13, 19, etc., soit 22 occ. (mais archevesque 94/8, 119/9, 136/12, etc., soit 35 occ.). - Graphie ch là où l’on attendrait ss dans glicha 66/32 vs glissa 37/2, 38/4, 65/26, 138/9 (verbe issu du croisement de l’afr gliier, issu du frq. glidan, et de glacier, d’après le TLFi).

- Graphie ch pour noter le produit de [dž] dans descharcha 201/1. P. Fouché explique que chargier a pu passer à charchier à la suite de l’ « assourdissement du groupe dž par assimilation avec le groupe tš initial »167.

¤ Graphies de [l] mouillé

- À l’intervocalique, [l] mouillé est noté le plus souvent ill, comme dans orgu(e)illeux 5/10, 6/18, 7/20, etc., soit 9 occ., bailler 15/48, 66/19, 105/6, etc., soit 21 occ.,

esmerveiller 23/43, 26/9, 39/20, etc., soit 28 occ., detailla 39/5, 138/6, 488/17, maille (cotte) 39/16, 65/17, 195/2, 228/10, 239/12, 274/13, maille (monnaie) 245/13, 280/18, 288/8, 375/26, despo(u)iller 114/20, 157/20, 224/40, etc. soit 9 occ., envieillie 486/9,

mailleure 499/18, orailles/oreille 8/6, 37/3, 148/3, etc., soit 11 occ., etc., ou ll après i, comme dans fille 1/27, 3/55, 64, etc., soit 69 occ., (h)abiller 1/44, 23/29, 25/28, etc., soit 23 occ., perilleux 19/18, 34, 87/32, etc., soit 7 occ., pavillon 30/14, 25, 31/43, etc., soit 34 occ., pillé XXXVI/R / pillant 376/3, billes 484/22, ou encore illi, dans conseillier 49/3, exillié 97/13, travaillié 113/13 (mais travaillé 77/11, 163/5, 254/10, 488/23),

esmerveillié 181/4, 445/3, baillié 263/18 / baillier 322/6. Mais il peut aussi suffire :

merveileux 43/2 (contre merveilleus(s)e 6/10, 7/1, 16/10, etc., soit 39 occ.), vailans

163

240/14, failiz 244/7 (contre failli/failly 14/39, 36/4, 105/13, etc., soit 8 occ.), chaile 362/21 (contre chaille 28/10, 13, 53/15, etc., soit 11 occ.), bataile 370/4, de même que l après i Papilon 448/6 (mais Papillon 446/15, 447/9, 453/19, etc., soit 62 occ.).

- À la finale, [l] mouillé est régulièrement noté il, comme dans ap(p)areil 32/3, 261/6, 355/34, etc., soit 7 occ., camail 24/5, conseil/conceil. 2/18, 3/17, 46, etc., soit 51 occ., etc., ou l après i : peril 5/35, 7/15, 16/26, etc., soit 18 occ., perilz 441/13.

- Mais le texte offre aussi des graphies ambiguës : à l’intervocalique, avec l dans

orguileux 6/18, artilerie 35/16 (contre artillé 158/4), reculit 91/2 (< cŏlligit) (contre recueillir 22/18, 23/30, 49/22, etc., soit 38 occ.), desvarroulye 385/18, ou ll dans feullee 178/7, desverrouller 334/30, agenoulla 446/3 / agenoullant 446/15 / agenoullerent 476/7 (contre agenouiller 220/5, 368/10, 445/9), mais aussi à la finale, avec l dans

oyeul 39/9, 337/14, 496/17 (contre oeil 8/36, 12/19, 33/11, etc., soit 8 occ. / oyeil 386/17), viel(les) 475/6, 485/1, 514/12 / Viel 287/2 (x2), 289/8, etc., soit 20 occ. (contre

Vieil 331/9, 16, 481/25 / vieillesse 483/21, 486/8, 10, etc., soit 4 occ. / envieillie 486/9),

Nantuel 374/1, 417/28, 440/6 (contre Nentueil/Nantueil 1/24, 203/10, 242/15, etc., soit 10 occ. / Nantuil 371/21). Deux possibilités sont alors envisageables : ou bien il s’agit d’une dépalatalisation de [l] mouillé, qui s’observe dans le Nord (Picardie, Nord, Nord-Est), l’Est et l’Ouest168, ou bien, et cela s’appliquerait surtout aux cas de [l] mouillé à la finale, l et ll pourraient suffire à noter [l] mouillé.

- Nous relevons, par ailleurs, la graphie inverse ill là où l’on attendrait ll : meillieu 27/28 / meilleu 39/6, 82/1 (contre mellieu 504/5 / millieu 10/7, 116/15 / mylieu 183/15),

faillut 146/7 / failloit 17/12, 55/21, 74/7, etc., soit 7 occ. (mais falloit 139/6, 349/7, 490/12), vaillable 157/19, 349/9, 393/17 (mais vailable 3/22). Or, cette graphie est ambiguë : ill note-t-il un [l] simple, ou un [l] mouillé ? 169

168 Cf. G. ZINK, Phonétique, p. 228 ; J. CHAURAND, p. 93 ; Ch. MARCHELLO-NIZIA, Langue, p. 112 ; L. REMACLE, Ancien wallon, § 75, § 59 ; A. BRASSEUR, p. 77, § 90.

169 Cf. M.-Cl. de CRÉCY, Hélène, p. CXXIX : à propos de la forme vaillurent, l’auteur parle d’« extension

164

- Emploi de la forme refaite avec [l] mouillé dans dueil170 3/67, 68, 11/18, etc., soit 33 occ. (mais duel 454/14 / deul 22/9, 43/2, 473/7).

¤ Graphies de [n] mouillé

- À l’intervocalique, [n] mouillé est noté à l’aide des graphies usuelles : gn dans

craignez 10/19, 259/15, d(a)igner 55/12, 202/3, 217/15, etc., soit 9 occ., craignoient 399/10 ; ign comme seigneurie/seignourie 2/45, 47, 5/18, etc., soit 71 occ. (contre

segnourie 520/12), besoigne 3/42, 47/3, 354/17, etc., soit 10 occ. / besoigner 14/11, 27, 15/5, etc., soit 29 occ., enseigne V/R, 15/42, 16/5, etc., soit 28 occ., vergoigneux 133/12, 300/1 / vergoigne 407/15, Couloigne 361/3, Bourgoigne 465/19 ; ngn dans

faingn- 41/5, 385/19 (contre faign- 30/12, 179/2, 309/16, etc., soit 6 occ.,), craingnez 70/15, craingnoit 81/38, besongne 91/7, 136/3, 141/6, etc., soit 11 occ. / besongner 3/52, 4/15, 22/22, etc., soit 52 occ., saingnit 98/8, 227/2, 453/23, Gascongne 101/6,

Coulongne 175/8, 176/5, 177/9, vergongne 202/17 / vergongneux 11/11, 168/2,

oingnement/oyngnement 233/2, 7, 8, etc., soit 12 occ. (contre oignement/oygnement 229/7, 8 (x2), etc., soit 12 occ.), oingn- 255/6, 8, 271/28, complaingnoit 324/8,

Bourgongne 361/3, 362/6, entreprengne 433/17, plaingnoit 469/30 (contre plaignoit 161/14, 174/16, 441/28) ; et ngni dans songnier 324/17.

Mais certaines graphies restent équivoques :