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ÉTUDE LINGUISTIQUE

I- Phonétique et graphies

4. Futur et conditionnel a) Désinences

¤ À la p2, emploi majoritaire de la désinence ancienne sans -s : dy 19/57, 72/9, 112/14, etc., soit 8 occ., fay 36/18, 351/25 (mais fais 379/10), descend 98/4, vien 276/3, croy 296/14, mect 425/7, reçoy 502/13.

¤ À la p4, emploi de la finale amputée -on dans laisson 47/1 (mais laissons 111/21, 142/5, 163/28, etc., soit 9 occ.). Cela est courant dans les scriptae de l’Ouest, de l’anglo-normand et d’une partie de la Picardie228.

b) Radicaux

¤ Pour le verbe vouloir, comme pour le subjonctif présent, seules les formes analogiques à radical fort sont utilisées : vueillés/vueillez 30/22, 197/1, 218/11.

¤ Pour le verbe seoir, emploi de la forme refaite sur le modèle de veoir229: soyez 287/16.

4. Futur et conditionnel a) Désinences

 Futur

¤ À la p1, en face de la terminaison majoritaire -ai/-ay, nous rencontrons -é dans

actendré 198/4, perdré 517/17, seré 483/17 (voir aussi infra « Passé simple »). Cette désinence, apparue dès le XIIIe siècle230, se rencontre encore en MF231.

228 Cf. G. ZINK, Morphologie, p. 156 : « À l’Ouest et en anglo-normand, les copistes amputent couramment -ons de sa consonne finale > -on +s qui donnait l’impression d’un cumul de désinences, dont la seconde apparaissait, de surcroît, comme disconvenante, puisqu’elle caractérise la personne 2 »

191  Conditionnel présent

¤ À la p1, emploi quasi exclusif de la désinence -oie/-oye232: avroie/avroye 30/51, 34/4, 54/13, etc., soit 7 occ., changeroye 496/19, consentiroye 215/11, 232/12, 303/3,

croyroye 292/14, conseilleroie 526/10, daigneroie/daigneroye 230/17, 385/12, devroie 302/16, deffendroye 482/7, demourroie 90/43, 330/30, combatroye 30/31, depriroye 426/10, desireroye 525/7, destruyroie 116/14, etc. Nous relevons la finale -oy dans

diroy 214/30.

¤ À la p2, une seule attestation de la terminaison -ois : ferois/feroys 44/6 (x2) ; ailleurs, emploi de -oies.

¤ À la p3, une seule attestation de la finale -ait dans yrait 156/14 ; ailleurs -oit / oyt. ¤ À la p4, emploi exclusif de -ions : arions 20/24, besoignerions 25/13, ferions 30/51, etc.

¤ À la p5, emploi majoritaire de -iez (seriez 8/74, moindririez 31/35, vouldriez 38/15, etc.) face à -iés (sçariés 386/11, pourriés 387/15).

¤ À la p6, emploi exclusif de -oient/-oyent : savroient 28/15, avroyent 41/11,

souffreroyent 149/4, etc.

b) Radicaux

¤ Développement d’un e svarabhaktique dans congnoisterez 38/13 (mais congnoistra 196/2, 271/35, 366/20, congnoistrés/congnoistrez 90/46, 135/7, 268/1, 328/24,

congnoistroit 114/16, 120/22) et esmouveront P/26. Ce trait, surtout caractéristique de

230 Cf. G. ZINK, Morphologie, p. 182.

231 Cf. Ch. MARCHELLO-NIZIA, Langue, p. 76.

232 Cf. G. ZINK, Morphologie, p. 187 : « L’adoption de -ois pour les personnes 1 et 2 se fait sur le tard et non sans réticences ». Pourtant, souligne Ch. MARCHELLO-NIZIA, « dès le XIVe siècle, dans certains textes, nous trouvons la désinence -ois » (Langue, p. 260, 1.4).

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l’anglo-normand, du picard et du wallon, et qui s’est aussi développé à l’Ouest, au Nord et au Nord-Est, s’est répandu partout en MF233.

¤ Pour le verbe demeurer, emploi de la base forte dans demeurera 8/40, mais de la base faible dans demouroit 51/6.

Pour le verbe aimer, emploi exclusif des formes refaites234 : aymeroit 14/41, 56/9, 407/16, aymeroie 30/24, aymeroie 157/26, aymerons 381/5, aymerez 495/25.

¤ Au futur du verbe envoyer, le texte n’offre que les anciennes formes à radical

envoi-/envoy-235 : envoieray 287/16, renvoyeray 475/2, envoiray 129/18, envoyera 226/4, 293/11, 14, envoyra 351/22, envoyeroit 343/12. Absence de la forme analogique, avec le radical dérivé de verrai, pourtant apparue au XIVe siècle236 et usuelle en MF.

¤ Effacement du e prétonique dans des verbes du premier groupe : demourriez 124/5 (mais demoureriez 482/3), depriroye 426/10 (mais deprieray 35/9), emploiray 8/25,

emploiroyent 168/14, envoiray 129/18 (mais (r)envoieray 287/16, 475/2), envoyra 351/22 (mais envoyera 226/4, 293/11, 14), mariray 17/5, prirons 376/19 (mais prierons 1/3), remedira 200/13, sainctifira 368/20. En revanche, nous ne relevons qu’un seul cas de chute de e entre n et r : donray 401/2 (contre 47 occ. de donner-). À cette syncope s’ajoute la réduction de rr à r dans demouroit 51/6 (vs demourera 8/39) et desiroit 387/14, ce qui conduit à une homographie avec l’imparfait, et peut-être aussi dans

endurez 361/27 (voir note), ce qui en ferait une forme homographe du présent de l’indicatif.

A contrario, présence d’un e adventice dans pourvoieray 383/14.

Syncope supposée de -er dans recouvroient 14/29 (AJP), qui rend cette forme homographe de l’imparfait. Il est possible aussi d’analyser cette forme comme de l’imparfait (« s’ils mouraient, ils accédaient à la vie éternelle »).

233 Cf. J. CHAURAND, p. 122-123 ; A. DEES, Atlas chartes, p. 250 et Textes littéraires, p. 256 et 371 ; P. FOUCHÉ, Le verbe, p. 401, § 210 ; Ch. Th. GOSSEN, p. 103, § 44 et p. 131, § 74 ; M. K. POPE, p. 367,

§ 972 ; Ch. MARCHELLO-NIZIA, Langue, p. 278, 2.3 ; G. ZINK, Morphologie, p. 184.

234 Cf. G. ZINK, Morphologie, p. 178, explique que la réfection sur les formes fortes des présents conjugués progresse « très lentement » ; ce qui est en parfaite contradiction avec nos occurrences.

235 Cf. P. FOUCHÉ, Le verbe, p. 409-410, § 217 : envoiera se « trouve encore au XVIIe siècle ».

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¤ Pour le verbe souffrir, les formes anciennes souffreroyent 70/34, souffrera 267/7 sont concurrencées par les formes analogiques refaites sur l’infinitif237 souffrirez 334/1,

souffriroie 362/21.

¤ Pour les verbes saillir et assaillir, l’ancien radical en sauldr- n’est utilisé qu’une fois face à celui refait sur l’infinitif, « à partir du XIIIe ou du XIVe siècle »238 : sauldroit 14/12 vs saillira 146/25, 358/12, sailliroit 191/2, sailliroient 103/17, 458/21, 24, (as)saillirons 23/18, 395/7, 458/8. En revanche, seule la forme ancienne est utilisée pour le verbe faillir239: fauldray 8/28, fauldra 38/9, 156/3, 164/10, etc., soit 7 occ.,

fauldront 443/17 (x2), fauldrés 356/3, fauldroit 25/12, 53/3, 279/14, etc., soit 4 occ.

¤ Pour les verbes avoir et s(ç)avoir, les formes communes en s(ç)avr et avr- sont majoritaires. Mais on relève quelques occurrences des formes brèves, propres au picard et au wallon240 : aroye 143/2, arions 20/25, sçaroit 232/13, sçariés/sçariez 386/11, 387/5. Notons également la présence de sçauvroit 112/8.

A. Brasseur évoque ainsi les explications possibles des formes réduites : « Sont-elles le résultat de haberat < *awerat aboutissant à aura dans un emploi proclitique, selon l’opinion de Fouché241, ou peut-on les considérer comme provenant de la réduction de la diphtongue au de l’ancien picard sur le modèle de pavre < pauvre, suivant les observations de Flutre242 ? Il est bien vrai que ce phénomène se produit surtout dans le nord du domaine picard. »243. C’est encore un trait fréquent des scriptae du MF244.

237 Cf. P. FOUCHÉ, Le verbe, p. 402, § 211 et p. 407, § 214d.

238 Id., ibid., p. 407, § 214d). Voir aussi Ch. MARCHELLO-NIZIA, Langue, p. 280 : « Palsgrave donne encore la forme assaudray à côté de assailleray, sailleray et sailliray. »

239 Cf. Ch. MARCHELLO-NIZIA, Langue, p. 280 : « Pour faillir, failliray n’est attesté qu’en 1556, et Palsgrave ne donne que faudray ; les autres grammairiens, La Noue, Maupas, signalent les deux formes en -illiray et -audray ; Oudin enfin, s’il note l’existence de faudray, donne failliray comme forme normale. »

240 Cf. G. ZINK, Morphologie, p. 184 ; voir aussi A. GOOSSE, § 112, e.

241 Le verbe, p. 395-396, § 205b. C’est l’avis que partage G. ZINK, Morphologie, p. 184 : « Arai a chance

de découler d’un emploi proclitique (de *aw(e)ráyyo) ; sarai pourrait être un calque (avoir, arai : savoir

> sarai) ».

242 Moyen picard, p. 386, § 6.

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¤ Réduction de la géminée rr à r dans poura 8/44, 458/19, pourions 322/6 (mais

pourront 458/19, pourrions 34/7, 163/26), enquerons 377/21, enqueroit 362/23,

requeroye 214/3 (mais enquerrez 383/17).

¤ Pour le verbe venir et ses composés, adoption du radical fort avec épenthèse :

deviendray 446/7, deviendra 11/8 (mais vendra 412/22).

¤ La forme faray 369/12 est analogique de l’infinitif latin vulgaire *fare, mais sans la fermeture de a en e sous l’influence de f initial qui a donné la forme moderne feray245, utilisée dans JP. Elle pourrait aussi avoir subi l’influence de l’infinitif picard fare, et/ ou encore de la forme réduite d’avoir, aray.

¤ pouvrront 387/8 : amalgame du radical de l’infinitif pouv- et de la forme de futur

pourront. God. (s.v. 1poeir, X, 363a) recense la forme puurrai, imprimée puvrrai (Livre

des Psaumes, ms. Cambridge, XVII, 39).

5. Imparfait de l’indicatif