• Aucun résultat trouvé

2. La réparation de l’ADN et les ADN polymérases adaptatives

2.3 La tolérance du dommage

La RH est un mécanisme majeur intervenant lorsque des fourches sont bloquées ou cassées. Elle utilise la copie homologue de la séquence endommagée, présente sur la chromatide sœur, comme matrice pour la réparation, ce qui en fait un processus conser- vatif et fidèle dans la grande majorité des cas. De ce fait, elle intervient tardivement dans le cycle cellulaire, en fin de phase S et en phase G2. La RH permet le contourne- ment dans la lésion.

Lorque la lésion n’est pas contournée, la synthèse translésionnelle (TLS, “Trans- Lesion Synthesis”) permet de franchir la lésion. D’autres ADN polymérases, appelées adaptatives, spécialisées, mutagènes, ont été découvertes pour la plupart d’entre elles il y a une dizaine d’années. L’ADN polymérase β a été la première découverte dans les années 1970, et depuis 1999, une dizaine d’autres ont été découvertes : pol η, ι, κ, λ, µ, σ, ν, θ, ζ, TdT et Rev1, essentiellement par recherche d’homologues suite au séquençage du génome humain. Quatre familles d’ADN polymérases humaines ont ainsi été définies : A, B, X et Y. La famille A est homologue à pol I d’Escherichia coli et contient pol γ, pol θ et pol ν [278]. La famille B est représentée par pol II d’Escherichia coli et contient les polymérases réplicatives, ainsi que pol ζ. Pol β, pol λ, pol µ, pol σ et TdT (Terminal déoxynucléotidyl Transférase) forment la famille X et sont caractérisées par une main gauche, alors que les autres ADN polymérases apparaissent comme une main droite. Cette analogie avec la main repose sur les différents domaines qui composent les ADN polymérases : la paume représente le site catalytique, le pouce favorise l’interaction de l’enzyme avec l’ADN double brin et la positionne dans le petit sillon de la double hélice d’ADN [279] et les doigts jouent un rôle dans la stabilisation du dNTP à incorporer. Enfin, la famille Y regroupe les polymérases κ, η, ι et Rev1.

Il a été montré que la plupart des ADN polymérases adaptatives sont capables in vitro d’effectuer de la synthèse translésionnelle, c’est-à-dire de synthétiser de l’ADN au travers d’une lésion. En effet, leur site catalytique plus large et plus souple leur permet de s’adapter à une déformation de la double hélice d’ADN.

Cependant, chacune de ces ADN polymérases spécialisées semble spécifique d’un type de lésion. L’efficacité de chacune varie avec le type de lésion. Ainsi, Rev1 incorpore un dCMP en face de sites abasiques qui proviennent de la perte spontanée d’une gua- nine. Pol η semble quant à elle capable de synthétiser de l’ADN au travers de dimères de pyrimidines souvent engendrés par les UV. La plupart des données concernant ces ADN polymérases adaptatives est issue d’expériences in vitro, qui ne peuvent refléter que partiellement la réalité biologique et fait que le rôle biologique de chacune de ces

enzymes n’est pas encore parfaitement connu, excepté celui de pol η.

Le modèle de la TLS communément admis se déroule en trois étapes après le blocage de la fourche (cf Fig. n◦27). Dans ce modèle, l’ADN polymérase réplicative blo-

quée par la lésion quitte l’ADN et est remplacée par une ADN polymérase adaptative. Celle-ci permet l’insertion d’un nucléotide face à la lésion et éventuellement l’élongation de l’ADN néo-synthétisé sur quelques nucléotides. L’ADN polymérase réplicative peut ensuite poursuivre normalement la réplication de l’ADN.

Les techniques de double hybride, de chromatographie d’affinité et d’immuno- précipitation permettent de mettre en évidence des interactions au sein de la cellule. Les interactions de PCNA et Rev1 avec plusieurs partenaires de la TLS indiquent un rôle possible de plateforme d’ancrage pour les différentes ADN polymérases qui peuvent intervenir sur la fourche de réplication. Les diverses modifications post-traductionnelles de PCNA lui permettent d’interagir avec des protéines de la réplication, de la répara- tion, du remodelage de la chromatine [280]. Par exemple, l’état d’acétylation de PCNA varie au cours du cycle cellulaire de totalement désacétylé à hyperacétylé en passant par modérément acétylé, les formes les plus acétylées favorisant l’interaction avec pol β et pol δ et étant associées à la phase de transition G1/S. Par ailleurs, l’ubiquitination de PCNA résulterait des dommages à l’ADN. La multi-ubiquitination oriente vers une voie fidèle de réparation, alors que la mono-ubiquitination, observée dans les cellules humaines, conduit à une voie infidèle [281]. Les irradiations UV conduisent à une mono- ubiquitination de PCNA qui favorise l’interaction avec pol η et défavorise l’interaction avec pol δ [282,283]. Ainsi, le blocage de la fourche au niveau d’une lésion provoquerait un changement des modifications post-traductionnelles de PCNA lié à pol δ. Les modi- fications de type SUMOylation ou acétylation laisseraient la place à une ubiquitination, ce qui permettrait de déplacer l’ADN polymérase réplicative et autoriserait l’interac- tion avec une polymérase adaptative. Sa rotation autour de l’ADN pourrait permettre à différentes ADN polymérases fixées à l’ADN d’accéder à la fourche en fonction des besoins [284].

L’anneau trimérique PCNA n’autorise la liaison que de trois molécules d’ubi- quitine. La question du grand nombre d’ADN polymérases qui peuvent être présentes à la fourche demeure. Plusieurs molécules PCNA pourraient être présentes à la fourche. Un modèle plus récent propose que le trimère Rad9-Rad1-Hus1, appelé complexe 9-1-1, ait le rôle de plateforme de distribution plus spécialisée pour le recrutement des ADN polymérases adaptatives à la fourche [285].

Fig. 27 –Modèle associé à la synthèse translésionnelle [285].

Une autre molécule PCNA non-ubiquitinée pourrait ensuite être recrutée à la fourche pour rétablir la liaison à pol δ, ou alors de nouvelles modifications post- traductionnelles pourraient assurer ce rôle, afin que la réplication de l’ADN puisse re- prendre son cours normalement.