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7. Validation des molécules conçues

7.4 Tests des inhibiteurs sur modèle cellulaire

7.4.1 Essais sur le modèle cellulaire MEF

Plusieurs modèles cellulaires permettent de tester l’activité in cellulo des deux molécules les plus intéressantes in vitro. Le premier que nous avions choisi était un modèle murin de fibroblastes, les MEF. Les lignées contrôle MEF β -/- permettent de comparer l’effet de la molécule à l’absence d’expression de pol β. Lorsque ces cel- lules sont traitées au cisplatine à des concentrations comprises entre 0 et 25 µM, alors que les MEF normales sont sensibles au cisplatine, les MEF β -/- résistent au traite- ment. Ce résultat est à l’opposé de celui observé sur des lignées cancéreuses comme les 2008/C13 [468], les HeLa et les SKOV-3 [301], où la surexpression de pol β favo- rise une résistance au cisplatine. L’observation faite sur les MEF β -/- n’est pas encore comprise, mais certaines hypothèses peuvent être émises. Il est possible qu’en l’absence totale de pol β, d’autres mécanismes de réparation de l’ADN puissent intervenir, comme la recombinaison homologue, sur les dommages causés pour le cisplatine, et soient plus efficaces que le BER.

Pour tester cette hypothèse, j’ai réalisé des tests de survie cellulaire sur les MEF et les MEF β -/- dans différentes conditions : après traitement au cisplatine, au MMS et à la mitomycine C. Le traitement par le cisplatine permet de tester la capacité de synthèse translésionnelle des cellules, le traitement par le MMS permet de tester la capacité de réparation par excision de base dans laquelle pol β intervient et enfin, la

mytomycine C permet de tester l’activité de recombinaison homologue dans les cellules. Le traitement par le cisplatine ne m’a pas permis de retrouver les résultats précé- demment obtenus dans l’équipe “Instabilité génétique et cancer”. Je n’ai pas pu observer d’effet sur la survie des cellules, MEF et MEF β -/-, même en présence de 20 µM de cisplatine. Ces expériences sont à renouveler avec un échantillon neuf de cisplatine.

Avec le traitement MMS, bien que l’effet soit peu marqué, on observe que les cellules β -/- sont plus sensibles que les cellules exprimant pol β. En effet, les lésions dues au MMS étant majoritairement réparées par excision de base, l’absence de pol β sensibilise les cellules au traitement. Il est donc attendu que la présence de molécules inhibant pol β sensibilise les MEF au traitement par le MMS.

La mitomycine C a révélé une sensibilité plus forte, d’un facteur 10 environ à 10 µM de mitomycine C, des cellules n’exprimant pas pol β, ce qui semble indiquer que la recombinaison homologue n’intervient pas davantage lorsque pol β n’est pas exprimée. L’hypothèse selon laquelle l’absence de pol β provoquerait la prise en charge des lésions dues au cisplatine par la recombinaison homologue n’a donc pas pu être confirmée. Toutes ces expériences sont à reproduire pour confirmer les résultats obtenus.

7.4.2 D’autres modèles cellulaires pour la validation des molécules

Le modèle SKOV-3 pourrait également être utilisé. Ces cellules surexpriment pol β et résistent au traitement par le cisplatine [301, 396]. Pour cela, les cellules SKOV-3 sont traitées au cisplatine en l’absence ou en présence de l’inhibiteur. La survie cellulaire en présence d’inhibiteur doit alors être comparée à la survie cellulaire des SKOV-3 traitées après transfection d’un vecteur contenant un siRNA dirigé contre l’expression de pol β. A chaque essai cellulaire, l’extinction de l’expression de pol β par le siRNA doit être contrôlée sur Western blot et être stable le temps que durent les tests de clonogénie, en moyenne une semaine.

A partir d’une ampoule de cellules SKOV-3 congelées (fournie par Dr P. Calsou, IPBS), j’ai obtenu suffisamment de cellules pour stocker 4 ampoules contenant environ 1 million de cellules chacune. Ces ampoules ont été congelées et pourront être utilisées pour des tests de clonogénie après traitement au cisplatine en l’absence et en présence des inhibiteurs de pol β conçus.

Récemment, dans l’équipe “Instabilité génétique et cancer”, la transfection d’un vecteur shRNA, permettant l’extinction stable de l’expression de pol β dans des cellules HeLa, a permis d’obtenir un modèle cellulaire intéressant pour tester les molécules conçues. Le traitement des cellules HeLa et des cellules HeLa shRNA pol β par des concentrations de 0 à 16 µM de cisplatine révèle que les cellules normales sont plus résistantes au traitement que les mêmes cellules n’exprimant plus pol β, d’environ 10

fois à une concentration de 16 µM (cf Fig. n◦56).

Fig. 56 –Traitement des cellules HeLa shRNA pol β par le cisplatine. Les cellules transfectées avec le vecteur shRNA dirigé contre pol β sont plus sensibles au traitement par le cisplatine que les cellules exprimant pol β.

Traiter les cellules HeLa en présence des molécules conçues ou non est un moyen de valider in vivo leur intérêt pharmacologique. Si, comme les cellules n’exprimant pas pol β, une sensibilisation au traitement par le cisplatine est observée, cela indiquera que les molécules peuvent être des adjuvants thérapeutiques du cisplatine dans le cadre d’une surexpression de pol β. Les tests de survie des cellules HeLa en présence de l’acide pamoique et en présence de la molécule acide pamoique-L2-F1 après traitement

1.

Une stratégie qui fonctionne

Les molécules présentant une haute affinité pour une protéine ou ciblant des interactions protéine-protéine peuvent être utiles aussi bien à un niveau fondamental qu’à un niveau appliqué. Obtenir des molécules de haute affinité n’est pas une chose facile, surtout lorsque des contraintes supplémentaires sont imposées. Celles-ci peuvent concerner les propriétés physico-chimiques de la molécule si l’on souhaite obtenir une activité sur l’organisme humain ou animal pour des applications pharmaceutiques. Bien que les contraintes soient moins fortes pour une utilisation comme outil de recherche fondamentale, la capacité de traverser la membrane de cellules requiert également des propriétés physico-chimiques particulières.

Mes travaux de thèse ont porté sur la conception de molécules à visée théra- peutique présentant une haute affinité pour l’ADN polymérase β. Pour cela, nous avons choisi de mettre en place au laboratoire une stratégie validée depuis une dizaine d’années environ, le “SAR by NMR”. Cette stratégie est une approche par fragment, qui permet une meilleure exploration de l’espace chimique que l’approche HTS. Bien que le prin- cipe soit simple, la mise en œuvre présente plusieurs difficultés. Les résultats obtenus confirment que la stratégie fonctionne. En effet, bien que l’activité ne soit pas encore optimale, celle-ci a été significativement améliorée par rapport à la molécule de départ. La stratégie nous a donc permis de concevoir des molécules originales et dont l’effica- cité a été améliorée. Théoriquement, l’affinité maximale des molécules conçues qui peut être atteinte est égale au produit des affinités des fragments utilisés pour la conception de la molécule. En pratique, nous n’avons pas encore atteint ce degré d’efficacité, d’où l’intérêt de chercher à améliorer ces molécules, qui peuvent être de bonnes touches dans le pipeline pharmaceutique, mais qui nécessite encore des phases d’optimisation pour devenir des têtes de série.