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Les titulaires du pouvoir réglementaire

Les sources de la légalité

B. Les titulaires du pouvoir réglementaire

En ce qui concerne l’État, les titulaires du pouvoir réglemen-taire sont désignés par la constitution.

C’est en principe le Premier ministre qui exerce le pouvoir réglementaire aussi bien en ce qui concerne le pouvoir régle-mentaire dérivé qu’en ce qui concerne le pouvoir réglerégle-mentaire autonome.

Toutefois, c’est le président de la République qui signe les décrets délibérés en Conseil des ministres (CE Ass.

10 septembre 1992, Meyet, R. 327). Ces décrets ne peuvent alors être modifiés qu’en suivant les mêmes formes.

Les décrets délibérés en Conseil des ministres sont contresignés par le Premier ministre et les ministres responsables ; les décrets du Premier ministre sont contresignés par les ministres chargés de leur exécution.

Les ministres n’ont pas en principe de pouvoir réglementaire.

Toutefois, ils peuvent en être investis dans deux cas : ils peuvent être habilités à exercer un pouvoir réglementaire soit par la loi, soit par un décret chaque fois que les dispositions des textes qu’ils doivent appliquer ne peuvent l’être qu’une fois précisées les modalités de leur mise en œuvre.

Le deuxième cas est celui qui entre dans les prévisions de l’ar-rêt Jamart : le ministre, comme tout chef de service, peut prendre les mesures nécessaires à l’organisation et au bon fonc-tionnement des services placés sous son autorité.

Une difficulté apparaît fréquemment du fait que les ministres doivent expliciter, pour leurs subordonnés, le sens des mesures législatives et réglementaires qu’ils doivent appliquer ; ils le font généralement par la voie de circulaires ou de directives ; mais ces actes ne peuvent ni modifier, ni contredire les textes applicables, ni leur ajouter des compléments qu’ils n’auraient pas prévus ; c’est la conséquence du fait que le ministre ne dispose pas du pouvoir réglementaire. Le Conseil d’État l’a affirmé dans un arrêt de principe, Notre-Dame du Kreisker du 23 janvier 1954 (R. 64) et l’a renouvelé dans sa décision du 18 décembre 2002, MmeDuvignères (CE. Sect., GAJA. 903) par laquelle il a substitué à la distinction des circulaires régle-mentaires faisant grief, seules susceptibles de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir et des circulaires seulement interprétatives, la distinction des circulaires impératives et des circulaires non impératives, les premières étant désormais considérées comme des actes faisant grief.

Un problème s’est également posé portant sur le point de savoir si le ministre pouvait indiquer dans des directives, les conditions dans lesquelles il entendait exercer les pouvoirs de prendre des décisions individuelles ou particulières qui lui étaient confiés lorsque ceux-ci reposent sur un large pouvoir d’appréciation discrétionnaire ; le Conseil d’État a estimé que, si rien n’interdisait la rédaction de telles directives, cela n’au-torisait nullement l’autorité administrative à se fonder exclusivement sur elles pour prendre les décisions qu’elle

jugeait opportunes (Crédit foncier de France, 11 décembre 1970, GAJA. 593).

La directive n’est en somme qu’une indication relative à la méthode utilisée par l’administration lorsqu’elle aura à prendre une décision sur la base d’un examen particulier de l’affaire qui lui est soumise ; mais à la différence de ce qui découlait de l’arrêt de 1970, l’administration a aujourd’hui l’obligation de publier ces directives qui comportent une interprétation du droit positif en raison de la loi du 17 juillet 1978 relative à l’ac-cès aux documents administratifs.

Les autorités déconcentrées de l’État disposent dans les mêmes conditions, du pouvoir réglementaire autonome au sens de l’arrêt Jamart, ainsi que d’un pouvoir réglementaire qui leur est expressément délégué par les textes qui régissent leurs attri-butions : ainsi en est-il des préfets de département et de région qui sont placés à la tête des services déconcentrés de l’État.

Les autorités locales disposent également d’un pouvoir régle-mentaire pour mettre en œuvre les délibérations des assemblées locales. Mais en outre, dans le cadre de la commune, le maire est autorité de police municipale ; à ce titre, il lui appartient de veiller à ce que l’ordre public ne soit pas menacé ; il peut prendre les mesures nécessaires au maintien ou au rétablissement de l’ordre public dans ses différents aspects : tranquillité, salubrité, sécurité publiques. Le pouvoir réglementaire peut aussi être attribué à certaines autorités administratives spéciales : par exemple, la commission des opérations de bourse préparait des règlements qui, il est vrai, devaient être homologués par arrêtés du ministre des finances ; aujourd’hui (novembre 2003) l’Autorité des Marchés Financiers (AMF) issue de la fusion de la COB et du Conseil des marchés financiers, conserve cette compétence qu’elle peut exercer dans les mêmes conditions ; mais la Commission nationale infor-matique et liberté s’est vue reconnaître un pouvoir réglementaire qu’elle exerce en toute indépendance.

Les ordres professionnels ont parfois reçu de la loi le pouvoir de réglementation (Bouguen, 2 avril 1943, GAJA. 346).

On indiquera enfin que ce pouvoir réglementaire spécial peut aussi être attribué aux organismes privés qui gèrent un service public : tel est le sens de la décision du Tribunal des conflits reconnaissant à la société Air France le pouvoir d’édicter des mesures réglementaires dès lors que celles-ci ont pour objet l’organisation et le fonctionnement du service public ; il s’agit ici d’une extension aux organismes privés de l’arrêt Jamart (Société Air France c/époux Barbier, 15 janvier 1968, GAJA.

585).