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Le fait du prince

Dans le document Droit administratif I L action administrative (Page 191-198)

Le contrat administratif

C. Le fait du prince

Il s’agit d’une construction jurisprudentielle destinée à tenir compte du fait que l’administration cocontractante conserve, en toutes circonstances, la possibilité d’utiliser ses pouvoirs d’autorité administrative. Or ceux-ci peuvent la conduire à prendre des décisions susceptibles d’avoir une incidence sur l’exécution du contrat. Il convient donc, à la fois de rappeler l’existence des pouvoirs administratifs de l’autorité qui contracte et, en même temps, le droit du cocontractant de n’en pas supporter les conséquences, de façon à ce que l’adminis-tration n’ait pas la tentation d’user de ses pouvoirs pour alléger le poids de ses obligations.

Si la décision est une décision individuelle ou particulière qui touche directement le contrat, la situation est parfaitement claire : l’interdiction d’importer un produit pour des raisons de sécurité publique, alors que le produit doit être utilisé par le cocontractant ou bien la modification des règles de circulation qui allonge sensiblement l’itinéraire que doivent parcourir les véhicules du cocontractant constituent ces mesures prises par l’autorité administrative en tant que telle et qui ont une inci-dence directe sur l’exécution du contrat.

En revanche, la situation est plus délicate s’il s’agit de mesures générales qui, en principe, touchent tout le monde, et pas seule-ment le cocontractant : l’augseule-mentation d’un droit de douane sur un produit, le blocage de certains prix, la modification de la législation sociale ; dans ces cas la théorie ne joue pas, en principe, car ces mesures sont d’application générale et consti-tuent des charges que tout le monde doit supporter ; il ne peut en aller autrement que si ces mesures ont une incidence directe sur l’objet essentiel du contrat.

Dans tous les cas où le fait du prince est reconnu, le cocon-tractant a droit à une indemnisation intégrale du préjudice occasionné par la mesure constitutive de fait du prince, (CE 29 décembre 1905, Bardy, R. 1014) à propos d’une taxe portant sur l’objet du contrat, 28 avril 1948, ville d’Ajaccio, (RDP 1948.

603) (opérations matérielles augmentant le coût de réalisation de l’objet du contrat).

D. L’imprévision

Il s’agit d’une théorie imaginée par le Conseil d’État pendant la première guerre mondiale pour faire face au bouleverse-ment de certaines concessions du fait de l’extrême renchérissement des matières premières, conséquence de l’état de guerre et des difficultés d’approvisionnement du pays, notamment par voie maritime.

La décision de principe est l’arrêt du 30 mars 1916, Compagnie générale d’éclairage de Bordeaux (GAJA. 188).

L’événement constitutif de la situation d’imprévision doit présenter certains caractères qui le différencient de tous ceux que nous avons envisagés jusqu’alors.

Il doit naturellement être imprévu et imprévisible ; il doit être indépendant de la volonté des parties, ce qui le différencie du fait du prince ; il doit enfin être anormal et entraîner un véri-table bouleversement du contrat et pas seulement un manque à gagner pour le cocontractant ; ainsi, ce que l’on appelle l’aléa économique peut entraîner le déséquilibre complet du contrat mais ne dispense pas le cocontractant de son obligation d’exé-cuter ; il ouvre seulement à ce dernier le droit d’obtenir une compensation pécuniaire qui ne sera cependant pas intégrale ; le juge estime en effet que les conséquences de l’état d’impré-vision doivent être partagées entre les parties au contrat, toutes deux également victimes de l’imprévision. Naturellement, les parties devront réexaminer leurs relations pour que le contrat retrouve un équilibre financier ; si cela s’avère impossible, le contrat pourra être résilié : l’imprévision se sera transformée en cas de force majeure (CE Ass. 9 décembre 1932 Compagnie des tramways de Cherbourg, R. 1050).

Aujourd’hui, bien qu’elle soit encore utilisée, la théorie a perdu une grande partie de son intérêt car, en principe, les contrats qui s’exécutent sur une longue durée comportent tous des

clauses de révision ou d’ajustement de prix qui jouent auto-matiquement.

§ 4 – LE RÈGLEMENT DES LITIGES

En cas de difficulté entre le cocontractant et l’administration, il faut aller devant le juge du contrat. Cependant, pour éviter l’engagement de procédures contentieuses inutiles, des comi-tés consultatifs de règlement amiable des litiges ont été créés dans les différents ministères ; ils peuvent être saisis dans certaines conditions soit par l’autorité administrative concer-née, soit par le titulaire du marché ; il y a là un mécanisme de prévention du contentieux tout à fait utile mais peu utilisé.

C’est en principe le juge du contrat qui peut seul être saisi dans le cadre d’un recours de plein contentieux puisque le recours pour excès de pouvoir est traditionnellement exclu à l’encontre du marché. Il n’en va autrement que si l’on a affaire à un acte détachable du contrat (CE 4 août 1905, Martin, GAJA. 92) ou bien s’il s’agit d’un contrat déféré au juge administratif par le préfet en application des lois de décentralisation ; le Conseil d’État estime en effet que le déféré s’analyse en un recours en annulation pour excès de pouvoir (CE 26 juillet 1991, Commune de Sainte-Marie de la Réunion, R. 302).

Il en est de même à l’encontre d’une clause réglementaire insé-rée dans le contrat (CE 10 juillet 1996, Cayzeele, R. 274).

En dehors de ces trois cas, le recours pour excès de pouvoir est donc exclu en matière contractuelle ce que le Conseil d’État a confirmé dans l’affaire du synchrotron (Ass. 8 janvier 1988, ministre chargé du plan et de l’aménagement du territoire c/Communauté urbaine de Strasbourg, R. 3).

Il faut enfin indiquer que le Conseil d’État admet dans certaines conditions, que le juge du contrat puisse annuler une décision d’une des parties au contrat qui méconnaîtrait les clauses de ce dernier ; c’est ce qu’il décide par exemple dans le cas d’un contrat passé entre deux personnes publiques et dont l’objet est l’organisation d’un service public (CE 13 mai 1992, Commune d’Ivry-sur-Seine, R. 197).

Par ailleurs, rompant avec sa jurisprudence traditionnelle qui le faisait décliner sa compétence à l’égard des actes parlemen-taires, le Conseil d’État accepte désormais de contrôler la régularité des marchés passés par l’Assemblée nationale (CE.

Ass. 5 mai 1999, président de l’Assemblée nationale, GAJA.

797). Il faut enfin rappeler que le recours à l’arbitrage pour régler les litiges contractuels est aujourd’hui encore exclu du fait d’une interdiction générale de compromettre qui, pour être fort ancienne, est toujours en vigueur malgré ses inconvénients (CE. 13 décembre 1957, Sté. nationale de vente de surplus, R. 678). Le législateur n’a accepté de lui apporter que quelques exceptions concernant certains établissements publics indus-triels et commerciaux.

La possibilité de recourir à l’arbitrage reste ouverte aux collec-tivités publiques uniquement pour obtenir la liquidation de leurs dépenses de travaux et de fournitures selon les formes prévues par le code de procédure civile (livreIV), à la condition s’agissant de l’État, qu’il y soit autorisé par décret.

§ 5 – CONTRÔLE ET SUIVI DES MARCHÉS

Les marchés sont soumis à divers contrôles qui résultent de ce qu’ils mettent œuvre une procédure de dépense publique et que leur passation doit respecter les règles de la comptabilité publique.

Mais il existe des contrôles spécifiques destinés à s’assurer de la bonne application de la réglementation des marchés.

On sait que la Mission d’enquête sur les marchés publics et les délégations de service public est chargée d’effectuer ces contrôles et de rédiger un rapport annuel mettant en évidence les difficultés et irrégularités les plus fréquentes, ce qui devrait permettre aux administrations d’y remédier.

Les ministres peuvent en outre déterminer les contrôles qu’ils souhaitent mettre en œuvre pour les marchés passés par les services placés sous leur autorité. Par ailleurs il existe des orga-nismes consultatifs : des commissions spécialisées des marchés

assistent les ministres et les personnes responsables des marchés dans la préparation et la passation des marchés.

Un comité technique des marchés créé auprès du ministre chargé de l’économie, examine et approuve les prescriptions techniques applicables aux marchés publics.

Des groupes permanents d’étude des marchés peuvent être créés conjointement par le ministre chargé de l’économie et un ministre déterminé, pour étudier les problèmes techniques relatifs à certaines catégories de marchés. Enfin un contrôle du coût de revient des marchés publics de l’État est organisé.

A

Abrogation, 50, 161, 162, 163, 164

Acompte, 190

Acte administratif, 135, 140, 143 Actes d’autorité-actes de

Cahier des charges, 104, 130, 131, 161, 173

Circonstances exceptionnelles, 69-73, 116, 145, 159, 164 Circulaire, 54, 174

Clause exorbitante, 173, 174 Compétence, 144-148, 177 Concession, 104, 127-131, 161, 170, 187

Consultation, 50, 151, 152, 181 Contrat, 123, 128, 130, 136, 137, 141, 167-175, 177, 179, 181, 183-195, 197

Contrat de partenariat, 126, 179 D

Décision exécutoire, 143 Décision implicite, 148

Délai, 148, 150, 154, 155, 157, 162-164, 190

Délégation de pouvoir, 147 Délégation de service public, 128, 134, 174, 179, 187

Délégation de signature, 147 Directive, 47, 156

Directive communautaire, 42, 115, 165, 179

Droit de la défense, 56, 97 Droits acquis, 56, 161

E

Économie mixte (société), 14, 129, 134, 171, 190

I NDEX

Égalité, 55-57, 117, 118, 137, 173,

Fait du prince, 131, 191, 193, 194 Fonctionnaire de fait, 145 Force majeure, 191, 192, 194 Formalités substantielles, 152 Forme, 50, 66, 148-150, 152, 175

G

Gestion d’affaires publiques, 9-12

Gestion privée-gestion publique, 27, 106, 112, 122, 168 Grève, 71, 116, 117, 192

I

Imprévision, 131, 191, 194 J

Jurisprudence, 29, 30, 51-55, 63

L Légalité, 37, 99 Loi, 42, 43

M

Marché, 12, 170, 175-192, 195 Marché négocié, 180, 181, 185 Médiateur, 83, 84

Motif, 42, 131, 150, 163, 164 Motivation, 150, 151 Officier de police judiciaire, 90 Opportunité, 64

Ordonnances, 44, 60, 62, 148 Ordre public, 11, 48, 65, 66, 70, 71, 78, 81, 85, 87-89, 91, 92, 95, Police administrative, 11, 66, 86-93, 95-97, 99, 108

Police judiciaire, 88-90

Pouvoir discrétionnaire, 63-67, 99

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