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La survenue du TSPT est expliquée par plusieurs mécanismes qui peuvent être répartis en deux groupes. Pour certains auteurs, le TSPT est la conséquence d’une réponse inappropriée à un stress intense (Grant et al., 2016 ; Edwards et al., 2013). Pour d’autres auteurs par contre, le TSPT est la conséquence d’un déficit des mécanismes d’extinction d’un stress (Luikinga et al., 2019 ; Grant et al., 2016 ; Reznikov et al., 2015 ; Edwards et al., 2013 ; Bernardi et Lattal, 2010). Les premiers auteurs s’appuient sur le conditionnement à la peur pour étayer leur réflexion (Edwards et al., 2013). Les seconds eux s’appuient sur le conditionnement à la sécurité (Kong et al., 2014).

3.1.1. Conditionnement à la peur

Le conditionnement à la peur, est le principal paradigme utilisé dans la compréhension du TSPT (Kida, 2019 ; LeDoux, 2000). C’est un conditionnement pavlovien qui transforme un stimulus neutre en un stimulus aversif conditionné (Kida, 2019 ; Richter-Levin et al., 2019 ; Ganella et Kim, 2014 ; Wood et al., 2007). Il se fait par un apprentissage associant un stimulus neutre à un stimulus aversif. Le stimulus neutre est constitué par un stimulus simple, tel qu’un son, ou par un stimulus complexe, tel

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qu’un contexte. Le stimulus aversif, dit stimulus inconditionnel, est par exemple l’odeur ou la présence d’un prédateur, le contact avec un congénère violent ou un choc électrique. Contrairement au stimulus neutre qui ne produit aucune réponse particulière, le stimulus inconditionnel produit toujours une réponse appelée réponse inconditionnelle. L’association du stimulus inconditionnel avec le stimulus neutre donne à ce dernier la capacité d’induire un comportement de peur. Le stimulus neutre se mue alors en un stimulus conditionné. Et la réponse que suscite le stimulus conditionné est dite réponse conditionnée. Chez les rongeurs les réponses conditionnées les plus étudiées sont le sursaut et l’immobilisation ou le « freezing » (Ganella et Kim, 2014). Le freezing est défini comme l’absence de mouvements autres que respiratoires (Roelofs, 2017 ; Ganella et Kim, 2014 ; Siegmund et Wotjak, 2007a ; Siegmund et Wotjak, 2007b). Plus généralement, toute autre réponse suscitée par le stimulus conditionné est une réponse conditionnée. Elle n’est pas forcement celle qui s’exprime lors de l’exposition au stimulus inconditionnel.

Le conditionnement à la peur est un processus fortement tributaire de l’amygdale, de l’hippocampe et du cortex préfrontal (Chaaya et al., 2018 ; Chang et Liang, 2017 ; Sanders et al., 2003). L’amygdale avec ses nombreux noyaux et ses multiples connexions joue un rôle clé. Il constitue un important modulateur de la peur. Il contrôle les comportements de sursaut, d’immobilisation (freezing) et l’expression faciale de la peur, et il module les modifications du rythme cardiaque liées au système nerveux parasympathique (Roelofs, 2017 ; Yang et al., 2007). L’amygdale constitue le lieu de stockage des évènements traumatiques. Dans des contextes inconnus, la tâche de l’amygdale consistant à identifier les éventuelles menaces est facilitée par une importante plasticité neuronale.

Dans les contextes connus, l’amygdale reçoit de l’hippocampe de précieuses informations sur le contexte. L’hippocampe joue ainsi un rôle primordial dans la peur contextuelle. L’hippocampe module, par ses connexions avec le cortex préfrontal, des réponses de fuite, de combat ou d’immobilisation (freezing).

Le conditionnement à la peur est un paradigme fort intéressant pour modéliser le TSPT. En effet, il permet un contrôle des paramètres expérimentaux et il est facile à instaurer. La réponse conditionnée persiste longtemps, parfois durant plusieurs mois.

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3.1.2. Conditionnement à la sécurité

Le TSPT est, pour de nombreux auteurs, un trouble lié à un déficit de l’extinction de la mémoire traumatique (Luikinga et al., 2019 ; Reznikov et al., 2015 ; Bernardi et Lattal, 2010). Les études montrent que l’anxiété à la suite d’un choc électrique perdure le plus longtemps chez les animaux qui expriment une faible capacité d’extinction (Reznikov et al., 2015). Un faible taux de corticostérone prédit l’expression d’une faible extinction (Reznikov et al., 2015). Les modèles du TSPT comme pathologie de l’extinction de la mémoire traumatique utilisent le conditionnement de la sécurité. Ce conditionnement peut être obtenu soit par une extinction de la peur conditionnée soit par un conditionnement de l’inhibition (Borghans et Homberg, 2015 ; Reznikov et al., 2015). L’extinction à la peur s’obtient par une exposition répétée du stimulus conditionné seul qui in fine aboutit à la suppression de la réponse conditionnée (Kida, 2019 ; Bernardi et Lattal, 2010). Le conditionnement à l’inhibition s’acquiert par la répétition d’un stimulus qui n’est jamais accompagné du stimulus inconditionnel (Kong et al., 2014). Ce stimulus acquiert la capacité de prédire la non-survenue du stimulus inconditionnel et par conséquent entraîne l’inhibition de la réponse conditionnée (Kong et al., 2014). Ces modèles ne seront pas décrits dans ce travail bien qu’ils présentent un intérêt certain dans les études sur les effets de différents traitements proposés pour soigner le TSPT. Le conditionnement à la sécurité suscite souvent la question de la substitution d’une nouvelle trace mnésique au souvenir traumatique. Il y a un net consensus pour dire que le conditionnement à la sécurité, notamment par des techniques de désensibilisation, ne conduit pas à la suppression de la mémoire traumatique. Les données sont en faveur de la mise en place d’une nouvelle trace mnésique qui fera concurrence à la mémoire traumatique (Kida, 2019 ; Fukushima et al., 2014). Contrairement au conditionnement à la peur qui a pour élément clé l’amygdale, le conditionnement à la sécurité a pour élément clé le cortex préfrontal (Kida, 2019). Les physiopathologies des deux conditionnements ne sont donc pas les mêmes. La compétition entre les deux traces mnésiques n’empêche d’ailleurs pas la mémoire traumatique de refaire surface par moments (Kida, 2019). L’extinction du TSPT n’ayant pas été explorée dans le présent travail, elle ne fera plus l’objet d’une attention particulière pour la suite malgré son importance certaine dans la compréhension du TSPT.

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