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4.4. Neurobiologie de la comorbidité entre l’addiction aux drogues et le TSPT

4.4.3. Autres

Les perturbations des systèmes de récompense et du stress ne suffisent pas à elles seules à expliquer la comorbidité entre l’addiction aux drogues et le TSPT. Plusieurs autres neuromédiateurs sont incriminés dans la relation entre ces deux conditions. Le rôle des récepteurs GABAergiques dans la comorbidité entre le TSPT et l’addiction aux drogues n’est pas très bien connu. Un comportement de recherche de cocaïne induit par le stress est associé à une perturbation de la transmission synaptique

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GABAergique dans l’ATV (Blacktop et al., 2016 ; Graziane et al., 2013). Le rôle du glutamate dans la comorbidité entre le TSPT et l’addiction aux drogues est tout aussi certain que celui des autres substances décrites ci-haut. Comme expliqué plus haut, la corticolibérine agit, entre autres, sur l’ATV en augmentant la libération du glutamate (Blacktop et al., 2016). Les effets du glutamate sur l’addiction aux drogues ont déjà été plusieurs fois soulignés. Le rôle du système sérotoninergique est tout aussi important dans la comorbidité entre le TSPT et l’addiction aux drogues. Son rôle est surtout mis en évidence par son influence dans le traitement thérapeutique du TSPT. Les études animales montrent que les ISRS, les agonistes sérotoninergiques et certains antagonistes sérotoninergiques réduisent l’acquisition et la reprise d’un comportement d’auto-administration de l’éthanol induit par le stress (Logrip et al., 2012). Toutefois, leur action pourrait ne se porter que sur le TSPT ou la dépression associée au TSPT. Le système adrénergique est aussi impliqué dans les relations entre le TSPT et l’addiction aux drogues. Les récepteurs adrénergiques α1, activés par un évènement stressant, entraînent la libération de dopamine par l’ATV (Stelly et al., 2016). L’utilisation des agonistes des récepteurs adrénergiques α2 empêche la réinstallation, par le stress, d’un comportement d’auto-administration de l’alcool, de la cocaïne, de l’héroïne et de la nicotine (Logrip et al., 2012). À l’inverse, l’utilisation de la yohimbine, un antagoniste des récepteurs α2 ayant des propriétés anxiogènes, induit la réinitialisation d’un comportement de recherche de l’éthanol, des psychostimulants et des opiacés (Logrip et al., 2012).

De nombreux autres systèmes et substances jouent un rôle dans la comorbidité entre le TSPT et l’addiction aux drogues (Ferland et al., 2016). Il s’agit entre autres des récepteurs aux opioïdes, de l’ocytocine, de la vasopressine, de l’orexine, du neuropeptide Y, et de tant d’autres molécules. Les rares études sur ces substances indiquent qu’ils modulent au moins l’une des conditions de la comorbidité entre le TSPT et l’addiction aux drogues (Logrip et al., 2012). Néanmoins, le présent travail ne s’appesantira pas sur ces diverses substances dont le rôle ne fait pas encore l’objet d’une abondante littérature.

4.5. Conclusion

Les relations entre le TSPT et l’addiction aux drogues font l’objet de nombreuses recherches. La grande majorité des travaux porte sur le stress aigu et non pas sur le TSPT. Cependant, les résultats des études qui utilisent des modèles animaux du TSPT se démarquent nettement de ceux utilisant une

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procédure de stress aigu. Malheureusement, les données des études précliniques des relations réciproques entre le TSPT et l’addiction sont encore rares, parcellaires et essentiellement basées sur l’utilisation de stress aigu. Ces études ne permettent donc pas de dégager des tendances sur les relations entre le TSPT et l’addiction aux drogues. Ceci est particulièrement vrai pour l’influence de l’addiction sur le TSPT. C’est un nouveau champ d’investigation à défricher. Il y a donc une vraie nécessité des études dans ce domaine afin de caractériser les relations entre le TSPT et l’addiction aux drogues mais aussi pour en comprendre la neurobiologie. Ce n’est qu’à ce prix que des thérapeutiques efficaces pourront être mises au point afin de prendre en charge les personnes qui souffrent de cette comorbidité.

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Partie expérimentale

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Chapitre 5

Synthèse et objectifs de la recherche

Ce chapitre, intermédiaire entre les parties théorique et empirique, retrace les points abordés lors des précédents chapitres et dessine le contour des chapitres à venir. Il trace le fil conducteur expliquant la succession des différents chapitres. La base théorique sous-tendant la présente thèse a été décrite dans les quatre premiers chapitres. Le premier chapitre a décrit la problématique de la comorbidité entre le TSPT et l’addiction aux drogues chez l’homme. Les deuxième et troisième chapitres ont disséqué chacune de ces deux problématiques chez l’animal. Le quatrième chapitre, sur base des deux chapitres précédents, a décrit les problématiques de la comorbidité entre le TSPT et l’addiction aux drogues chez l’animal. Le sixième chapitre décrira la méthodologie exploitée dans les études des chapitres septième à neuvième. Le chapitre dixième clôturera le présent travail par une discussion générale et des perspectives pour le futur.

Le chapitre 1 a présenté une revue de littérature de la comorbidité entre l’addiction aux drogues et le TSPT. Ce chapitre définissait brièvement ces deux concepts et décrivait les aspects épidémiologiques, théoriques et physiopathologiques de la comorbidité entre le TSPT et l’addiction aux drogues. Au-delà des considérations étiologiques, ce chapitre exposait les préoccupations actuelles sur l’influence réciproque de ces deux conditions, d’une part l’influence du TSPT sur l’addiction aux drogues, et d’autre part la spécificité de l’addiction aux substances d’abus sur l’expression des symptômes du TSPT. Les limites méthodologiques et éthiques des études de la comorbidité entre le TSPT et l’addiction aux drogues justifient la nécessité de l’utilisation des modèles précliniques, particulièrement les études animales.

Le chapitre 2 s’est focalisé sur les modèles animaux de l’addiction aux drogues. Il présentait les principales théories classiques de l’addiction aux drogues. Ces théories ne permettent pas une pleine compréhension d’un phénomène aussi complexe que l’addiction aux drogues. La théorie de la sensibilisation motivationn elle est l’une des théories récentes conçues pour permettre une meilleure compréhension de l’addiction aux drogues. Cette théorie décrit l’addiction aux drogues comme une

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pathologie de la motivation à consommer des substances d’abus. C’est le socle sur lequel repose le modèle animal de la sensibilisation locomotrice aux effets stimulants des drogues. Ce modèle, décrit avec les principaux modèles animaux d’addiction aux drogues, est celui qui a été choisi comme modèle animal d’addiction pour la présente thèse.

Le chapitre 3 s’est consacré aux modèles animaux du TSPT. Il s’employait à décrire la théorie du conditionnement à la peur, théorie prévalente du TSPT, ainsi que les mécanismes neurobiologiques sous-jacents à ce phénomène. Le TSPT étant une affection essentiellement subjective, reposant sur le récit des personnes qui en souffrent, les modèles animaux posent l’épineuse question de leur validité.

Une bonne partie de ce chapitre a donc été consacrée à la problématique de la validité des modèles animaux du TSPT. Parmi les modèles présentés, le présent travail a utilisé un protocole avec un choc électrique comme stresseur. Ce protocole présente une des meilleures validités apparentes sans pour autant perdre sur les autres validités comparativement aux autres modèles animaux du TSPT. Le présent travail s’intéressant à l’influence de l’addiction aux drogues sur les symptômes du TSPT, il était primordial de choisir un modèle permettant de couvrir tous les symptômes du TSPT.

Le chapitre 4 s’est focalisé sur les données des études animales de la comorbidité entre le TSPT et l’addiction aux drogues. L’absence de modèle animal valide de la comorbidité entre le TSPT et l’addiction aux drogues a rendu nécessaire une transition décrivant ces deux problématiques. En effet, les études animales de cette comorbidité se basent sur une succession de protocoles de ces deux problématiques. La revue de la littérature montre que la grande majorité de ces études analyse les effets du stress aigu sur l’auto-administration de drogues. Les études sur l’influence d’un modèle valide de TSPT sur la sensibilisation aux effets stimulants de drogues sont rares. Sont encore plus rares, les études de l’influence de l’addiction aux drogues sur les symptômes du TSPT.

Le chapitre 6 exposera la méthodologie générale de la présente recherche. Il s’emploiera à décrire les animaux, le matériel et les tests utilisés. Il décrira dans les détails les motivations des choix des modèles utilisés. En effet, l’innovation de ce travail ne réside pas dans l’élaboration d’un protocole original. Mais plutôt dans l’originalité du choix des modèles animaux préalablement validés. En effet, aucune étude antérieure à celle-ci n’a utilisé un protocole animal de TSPT présentant une aussi grande validité apparente sans perdre sur les autres validités comparativement aux autres modèles animaux du TSPT. D’autre part, très peu d’études ont utilisé la sensibilisation locomotrice pour analyser la

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comorbidité entre le TSPT et l’addiction aux drogues. De plus, rares sont les études qui ont essayé d’analyser l’influence de la sensibilisation aux effets stimulants des drogues sur l’expression des comportements induits par le TSPT. Au final, le protocole utilisé dans cette recherche peut s’avérer utile pour élaborer un modèle animal de la comorbidité entre le TSPT et l’addiction aux drogues.

Les chapitres 7 à 9 présenteront les résultats obtenus en utilisant la méthodologie décrite dans le chapitre 6. Le chapitre 7 s’attellera à répondre à deux questions. La première se rapporte à l’influence du TSPT sur la sensibilisation locomotrice à l’éthanol. Il s’agira de vérifier un possible mécanisme par lequel le TSPT induirait une vulnérabilité à la sensibilisation locomotrice des effets stimulants de l’éthanol. Les données de la littérature laissent supposer que le TSPT induit une vulnérabilité à la sensibilisation locomotrice des effets stimulants de l’éthanol. En effet, le stress induit une activation du système de récompense, principalement via l’activation de l’axe HHS mais aussi par l’activation du système dopaminergique. Il est donc plausible que l’acquisition et ou l’expression de la sensibilisation locomotrice à l’éthanol nécessite une dose moindre d’éthanol chez les souris stressées comparativement à des souris d’un groupe contrôle. C’est la première hypothèse qui sera testée dans cette étude. D’autre part, l’addiction aux drogues modifie l’expression des symptômes du TSPT.

Néanmoins, les études chez l’homme ne permettent pas d’isoler l’effet spécifique d’une seule drogue.

La deuxième hypothèse testée dans ce chapitre consistera à évaluer l’effet d’une sensibilisation aux effets stimulant de l’éthanol sur l’expression des symptômes du TSPT. Il s’agit de vérifier l’hypothèse exploratoire plus générale selon laquelle l’addiction à l’éthanol modifierait l’expression des symptômes du TPST.

Le chapitre 8 sera consacré aux relations entre le TSPT et la sensibilisation aux effets stimulants de la cocaïne. D’une part, il s’intéressera à l’influence d’un TSPT sur la sensibilisation aux effets stimulants de la cocaïne. La première hypothèse de cette étude sera de vérifier que le TSPT renforcerait la sensibilisation locomotrice à la cocaïne. La précédente étude sur l’éthanol ayant montré un probable effet préventif des manipulations préalables des animaux, cette étude testera un éventuel effet préventif contre la sensibilisation locomotrice à la cocaïne que conférerait une fréquente manipulation des animaux. D’autre part, dans la recherche de la compréhension de l’effet spécifique de drogues sur le TSPT, le présent chapitre cherchera à évaluer l’influence de la sensibilisation locomotrice à la cocaïne sur les symptômes du TPST. La troisième hypothèse de cette étude vérifiera si la

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sensibilisation locomotrice à la cocaïne modifierait l’expression des symptômes du TSPT en fonction des doses de cocaïne.

Le chapitre 9 présentera la dernière série d’expériences menées dans le cadre de la présente thèse. Il sera bâti à la suite des résultats observés dans le chapitre 7. En effet les résultats décrits dans le chapitre 7 ont permis d’observer un effet de la sensibilisation locomotrice aux effets stimulants de l’éthanol sur l’expression de l’hyperréactivité du TSPT. Cette hyperréactivité majorée par la sensibilisation locomotrice à l’éthanol a été observée 36 jours après la dernière exposition à l’éthanol. D’une part, l’observation de pareil effet après un aussi long délai a posé question. En effet, il existe dans la littérature une controverse sur la durée de la sensibilisation locomotrice à l’éthanol. Sa durée est évaluée entre 14 jours et 63 jours selon les études. D’autre part, utilisant une longue procédure dans un modèle animal de TSPT, la dynamique d’évolution de l’effet de la sensibilisation locomotrice à l’éthanol sur le TSPT n’est pas connue. Le chapitre 9 a donc cherché à confirmer l’influence de la sensibilisation locomotrice à l’éthanol sur l’expression des symptômes du TSPT en l’analysant au cours du temps. L’observation de l’effet de la sensibilisation sur le TSPT 36 jours après la dernière exposition à l’éthanol a soulevé un autre problème. Écologiquement, les personnes souffrant de TSPT consomment souvent de l’éthanol pendant la période d’incubation du TSPT, c’est à dire entre la survenue de l’évènement traumatique et l’expression des symptômes du TSPT. Une expérience a donc été conduite en intercalant une procédure de sensibilisation locomotrice à l’éthanol entre l’évènement traumatique et l’expression de symptômes du TSPT. L’objectif était d’évaluer les modifications dose-dépendantes de l’expression du TPST induite par une sensibilisation locomotrice à l’éthanol durant la période d’incubation du TPST. Enfin, profitant de la procédure de sensibilisation locomotrice à l’éthanol lancée à proximité de l’évènement traumatique, le présent chapitre a voulu évaluer l’effet de l’évènement traumatique sur la sensibilisation locomotrice durant la période d’incubation du TSPT.

Notamment en vérifiant si l’évènement traumatique pouvait réduire la dose nécessaire pour l’acquisition de la sensibilisation locomotrice à l’éthanol.

Enfin le chapitre 10 présente une discussion transversale des résultats observés dans les 3 précédents chapitres. Il discute aussi des résultats obtenus dans le présent travail avec ceux présentés dans la littérature. Sont aussi exposées des propositions pour d’éventuelles études ultérieures et pour améliorer le protocole utilisé.

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Chapitre 6

Méthodologie générale

Ce chapitre décrit en détail la méthodologie qui a guidé la réalisation de toutes les expériences. Sauf autrement explicité, les expériences ont été conduites telles qu’elles seront expliquées dans les lignes suivantes.