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Problématique d’un modèle animal du TSPT : critères de validités

Le TSPT est une condition reposant entièrement sur la subjectivité des sujets qui en souffrent (Deslauriers et al., 2018 ; Richter-Levin et al., 2019). Cette subjectivité a d’ailleurs joué négativement sur la reconnaissance du TSPT comme entité clinique. Et cette subjectivité rend difficile l’élaboration

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des modèles animaux valides du TSPT (Deslauriers et al., 2018 ; Borghans et Homberg, 2015).

Comme expliqué dans les précédents paragraphes, le TSPT est défini par l’existence de plusieurs critères. Il s’agit donc d’un ensemble complexe de symptômes consécutifs à un ou plusieurs évènements traumatiques (Deslauriers et al., 2018). Les modèles animaux sont bâtis en s’efforçant de reproduire ces différents critères diagnostiques du TSPT (Borghans et Homberg, 2015). La validité de ces modèles nécessite des critères d’évaluation. Il existe de nombreux critères utilisés pour évaluer la pertinence des modèles animaux du TSPT (Schöner et al., 2017 ; Borghans et Homberg, 2015). Parmi ces critères de validité, le présent travail s’intéressera aux validités étiologique, apparente (ou phénoménologique), prédictive, constructive et discriminatoire. Tous les différents modèles animaux du TSPT s’efforcent peu ou prou de rencontrer ces différents critères de validité.

3.3.1. Validité étiologique

La validité étiologique, spécifiquement pour le TSPT, est un critère de validité important. Elle est particulièrement importante parce que la définition du TSPT souligne le rôle central de l’évènement traumatique (Schöner et al., 2017 ; Reznikov et al., 2015). Toutes les manifestations de cette affection ne sont que les conséquences de la survenue de cet évènement. La validité étiologique est aussi importante parce que ce sont les caractéristiques de l’évènement traumatique qui distinguent le TSPT des autres troubles, particulièrement des troubles anxieux. Ainsi, les modèles animaux du TSPT proposent des stresseurs pouvant mimer l’évènement traumatique du TSPT. Ces stresseurs ne doivent pas seulement reproduire les manifestations du TSPT mais les maintenir suffisamment longtemps afin qu’elles ne correspondent pas à un modèle de stress aigu (Schöner et al., 2017).

3.3.2. Validité apparente

La validité apparente évalue la capacité que présente le modèle animal du TSPT à mimer les symptômes du TSPT (Aspesi et Pinna, 2019 ; Schöner et al., 2017 ; Borghans et Homberg, 2015 ; Goswami et al., 2013). Les modèles animaux s’efforcent d’identifier des comportements animaux qui correspondraient aux symptômes du TSPT (Deslauriers et al., 2018). De nombreux tests permettent d’évaluer la validité apparente. Il s’agit notamment des tests d’anxiété du labyrinthe en croix surélevé, de la chambre claire-obscure, de l’open field, du test de sursaut et du conditionnement à la peur

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(Borghans et Homberg, 2015). La validité apparente se trouve confrontée à un problème lié à la définition du TSPT. En effet, le TSPT a une définition purement comportementale. Il n’existe pas de paramètres objectivement mesurables pour sa définition (Aspesi et Pinna, 2019). Dès lors, il se pose un problème translationnel entre un comportement que présenterait un animal et son correspondant humain (Richter-Levin et al., 2019 ; Deslauriers et al., 2018 ; Schöner et al., 2017).

3.3.3. Validité prédictive

La validité prédictive est plus complexe que la validité apparente. Elle est évaluée par la capacité d’un modèle animale à reproduire la réponse thérapeutique dans le traitement du TSPT (Aspesi et Pinna, 2019 ; Richter-Levin et al., 2019 ; Schöner et al., 2017 ; Borghans et Homberg, 2015 ; Goswami et al., 2013). La validité pharmacologique est très intéressante en ce qu’elle offre la possibilité d’évaluer l’efficacité des médicaments utilisés dans l’arsenal des thérapies pour soigner le TSPT. Elle permet aussi de tester des médicaments candidats pour soigner le TSPT. Néanmoins l’inefficacité des traitements contre le TSPT, estimée entre 30 et 60% des cas, réduit la portée de la validité prédictive (Aspesi et Pinna, 2019 ; Richter-Levin et al., 2019 ; Deslauriers et al., 2018 ; Schöner et al., 2017).

3.3.4. Validité constructive

Beaucoup plus complexe est la validité constructive. Elle évalue la capacité du modèle à reproduire les différents troubles neurocognitifs du TSPT. Autrement dit, la validité constructive évalue l’exactitude neurobiologique du modèle animal du TSPT (Richter-Levin et al., 2019 ; Schöner et al., 2017 ; Borghans et Homberg, 2015 ; Goswami et al., 2013). Cette validité est confrontée à une limite.

Le TSPT est une affection dont les mécanismes physiopathologiques sont très peu connus chez l’homme (Richter-Levin et al., 2019 ; Schöner et al., 2017). Il est ainsi difficile d’élaborer un modèle animal qui prenne en compte les mécanismes du TSPT. Une meilleure connaissance du TSPT améliorera donc la validité constructive.

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3.3.5. Validité discriminatoire

Enfin la validité discriminatoire évalue la capacité du modèle à identifier un animal exprimant un TSPT d’un animal n’exprimant pas le TSPT. À ce jour aucun modèle animal du TSPT n’est arrivé à l’atteindre. Toutefois, ces dernières années, des auteurs proposent des critères pour pouvoir distinguer des animaux bons répondeurs des animaux mauvais répondeurs (Schöner et al., 2017).

3.3.6. Autres critères d’évaluation des modèles animaux du TSPT

Plutôt que d’utiliser formellement des critères de validité, certains auteurs proposent des critères alternatifs. Ces critères alternatifs présentent l’intérêt de faciliter le choix de modèles animaux en fonction des objectifs d’étude poursuivis (Deslauriers et al., 20018). Afin de faciliter l’évaluation de la validité des modèles animaux du TSPT, deux chercheurs, Yehuda et Antelman (Borghans et Homberg, 2015 ; Yehuda et Antelman, 1993) ont proposé une liste de 5 critères. Le stresseur doit pouvoir reproduire les caractéristiques comportementales ou biologiques du TSPT. La réponse à l’action doit être positivement corrélée à l’intensité du stresseur. Les modifications biologiques induites par le stresseur doivent perdurer dans le temps ou augmenter au fil du temps. Les altérations biologiques doivent induire des changements comportementaux. Enfin la réponse à l’effet du stresseur doit montrer une variabilité entre individus. Dans le même ordre d’idées, Deslauriers et al. (2018) proposent quatre critères pour un modèle animal de TSPT. Les effets induits par le stresseur doivent perdurer au moins une semaine. Au moins deux registres comportementaux doivent être modifiés à la suite de l’exposition au stresseur. Un bon modèle animal de TSPT doit pouvoir être reproduit par différents laboratoires. Ce modèle doit permettre de modifier la durée d’application ou l’intensité du stresseur.

Outre ces critères de validité, d’autres caractéristiques de ces modèles animaux de TSPT peuvent guider leur choix. Il s’agit entre autres des perturbations de l’axe HHS (Deslauriers et al., 2018). Les modèles animaux du TSPT devraient pouvoir mimer l’augmentation de la sensibilité des récepteurs aux glucocorticoïdes et du feedback négatif de l’axe HHS. Ils devraient aussi pouvoir induire des altérations structurelles comme l’hypotrophie de l’amygdale, du cortex préfrontal et ou de l’hippocampe (Deslauriers et al., 2018). D’autres perturbations variées, telle que les troubles du sommeil et de la socialisation, pourraient aussi être retrouvées (Deslauriers et al., 2018). En plus de

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ces perturbations de l’axe HHS, certaines autres caractéristiques sont tout aussi déterminantes dans le choix d’un bon modèle animal de TSPT. En effet, le stresseur d’un bon modèle animal de TSPT doit être inévitable, imprédictible et incontrôlable par le rongeur (Logrip et al., 2012).