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La théorie sub-cognitive constitue-t-elle un agraindissement optimal pour rendre compte du statut de

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3.3 La théorie sub-cognitive constitue-t-elle un agraindissement optimal pour rendre compte du statut de

l’erreur dans l’apprentissage ?

Que peut bien signifier l’expression : « donner inconsciemment un sens à sa motricité » ?

Ce paradoxe qui, de notre point de vue, se situe au cœur du problème posé par le statut qu’on doit accorder à l’erreur, est décrit d’une autre façon par D. Davidson 16 :

« Mal lire un signe, c’est le comprendre, bien que l’on n’atteigne pas l’objectif voulu : mal interpréter un ordre c’est encore l’interpréter (et avec l’intention de l’interpréter correctement). »

Nous trouvons avec ce philosophe une conception réaliste de la stratégie de l’interprète.

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Or, une façon de répondre assez radicalement à la question du sens de nos actions est d’adopter la position opposée que développe D. C. Dennett dans sa théorie sub-cognitive. Pour le philosophe, le cerveau n’est qu’un moteur syntaxique qui « simule » le rôle d’un moteur sémantique. Cette thèse est une tentative pour changer d’échelle de modélisation par rapport à celle de « la stratégie de l’interprète » et pour améliorer notre connaissance des processus qui sont à l’origine d’un comportement. L’auteur souhaite aussi, par cette thèse, échapper aux critiques habituellement émises à l’encontre des conceptions computationnelles. L’ « agraindissement » proposé ici est–il celui qui nous permettra de faire la jonction entre les théories computationnelles et la stratégie de l’interprète ?

Le cerveau ne produirait donc pas de sens, il imiterait par son fonctionnement une entité virtuelle capable de produire un comportement signifiant. L’auteur17 affirme ceci à propos du cerveau :

« Il pourrait être construit pour s’approcher de la réalisation de cette tâche impossible (le moteur sémantique) en capitalisant des correspondances étroites (ou suffisamment étroites) entre des régularités structurales- de l’environnement et de ses propres états et opérations internes-et des types d’entités sémantiques. »

Ainsi, D. C. Dennett refuse l’idée d’un contresens inconscient qui produirait l’erreur du garçon de café. L’idée qu’il se fait de la réalité est celle-ci18 :

« Le garçon est en gros au fait de la situation, et il n’est pas un simple robot qui rend la monnaie ; néanmoins nous devons descendre du niveau des croyances et des désirs à un autre niveau de théorie pour décrire son erreur, car aucune explication en termes de ses croyances et de ses désirs n’aura complètement de sens. A un moment quelconque de notre explication, nous devons avoir affaire à la pure absence de signification qui se produit dans toute erreur. »

Nous pensons, pour notre part, que le niveau ou l’auteur souhaite se placer n’expliquera plus rien du tout. Au mieux, il permettra de décrire de façon exhaustive ce qu’on peut observer au moment où l’erreur se produit. Or il est assez peu probable qu’une description neurologique, même exhaustive, parvienne à faire la différence entre ces trois comportements : un comportement sensé et juste, un comportement sensé caractérisé par une erreur et enfin un comportement insensé.

Il apparaît qu’il faut créer un niveau intermédiaire d’explications entre les deux types envisagés par D. C. Dennett (la stratégie de l’interprète et la théorie sub-cognitive). Ce niveau doit mettre à jour les significations de l’acte qui échappent à son auteur comme une œuvre d’art échappe à son créateur parce que son potentiel de significations est bien supérieur à l’ensemble de celles perçues par l’artiste.

Par exemple, à chaque calcul juste permettant de rendre la monnaie correctement correspond une classe d’actes moteurs spécifiques à ce calcul. Mais rendre la monnaie correctement n’est qu’un cas particulier de la classe des actions consistant à rendre la monnaie. Par ailleurs souvent la monnaie est rendue de façon incorrecte sans que personne ne s’en aperçoive. Lorsque D. C. Dennett écrit : « le garçon est en gros au courant de la situation », il devrait pousser le raisonnement jusqu’au bout. Car ensuite la motricité est toujours mise en place « en gros », c’est à dire de façon analogue à une autre qui appartient à la classe de la motricité « rendre la monnaie ». Rendre la monnaie, c’est toujours choisir en

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D. C Dennett, (1990), p. 85

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gros un certain nombre de pièces plutôt petites. Et même lorsqu’on a fait le calcul, on choisit toujours « en gros » les pièces de monnaie qui ressemblent à peu près à celles qui correspondent au calcul qu’on a fait. Même lorsqu’on vérifie, on vérifie « en gros ». Nous estimons donc qu’agir ou penser se font toujours « en gros » c’est à dire par analogie à une autre situation qui a donné « en gros » satisfaction. « L’action correcte » ou « le calcul juste » ne sont que des points de vue d’observateurs. Le fonctionnement neurologique n’est pas soumis à la logique. Nous y reviendrons dans le chapitre consacré à « la Théorie de la Sélection Générale des Neurones (TSGN) ».

Retenons désormais ceci : le sens d’un acte doit être perçu grâce à l’ensemble des

situations où cet acte s’est révélé « en gros » efficace. Le sens de l’acte échappe donc en

grande partie à la conscience de son auteur et provoque parfois ce qu’en tant qu’observateur, nous appelons une erreur parce que nous ne percevons pas que l’acte est souvent d’abord une adaptation inconsciente. Nous allons traiter ce statut de l’erreur plus en détail dans les deux chapitres suivants et dans la dernière partie de la thèse puisque nous allons étudier comment on peut se servir de la compréhension de certains problèmes philosophiques pour élaborer une conception différente des apprentissages moteurs.

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