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Traitements économétriques des données

2.5. Tests de l’existence ou non d’un « effet format de paiement »

L’une des solutions envisageables pour traiter le problème de différence de fréquences de paiement consiste à ramener les CAP annoncés avec la taxe à la même échelle que celle du ticket, notamment en divisant les montants déclarés par les répondants non propriétaires d’une résidence secondaire dans le golfe par le nombre de semaines passé dans cette localité, et ceux exprimés par les hébergés en résidence secondaire personnelle par le nombre de semaines que contient une année. Cependant, si cette procédure paraît pertinente, d’un point de vue arithmé-tique, sur le plan économique, elle est discutable, car supposant implicitement, en particulier pour les individus qui envisagent de visiter les réserves naturelles une fois créées, que l’utilité associée à une visite supplémentaire de l’ensemble de ces espaces protégés au cours du séjour dans le golfe (utilité marginale) est constante. On croit au contraire qu’il est fort probable que l’utilité marginale soit quasi nulle au-delà d’une première visite de toutes les réserves concer-nées durant le même séjour. Si tel est effectivement le cas, alors cela veut dire que, dans le ca-dre de la thèse, la comparaison des CAP enregistrés avec la taxe et le ticket d’entrée n’est pas nécessairement conditionnée par l’homogénéité des échelles de paiement. Autrement dit, dès lors que la liste des montants offerte aux sujets est la même pour les deux formes de paiement, le parallèle peut être effectué, notamment pour les agents ayant déclaré envisager de visiter les

réserves, en tenant compte du nombre de visites possible durant le séjour. L’exercice de com-paraison qui va être réalisé à présent ne concerne donc que les potentiels visiteurs des réserves naturelles. Cela signifie qu’on écarte du processus tous les répondants qui ont accepté de s’ac-quitter de la taxe d’hébergement, et ont ensuite exprimé leur intention de ne pas se rendre aux réserves si elles sont effectivement mises en place.

Selon les résultats de l’enquête MORGOAT(2005) menée auprès de la population tou-ristique du Morbihan, en haute saison (période à laquelle notre enquête contingente a eu lieu), la durée de séjour moyenne dans les hébergements marchands est de 11.3 jours, soit 4 jours de plus que la durée de validité du ticket d’entrée (7jrs). Compte tenu de cette différence relative-ment faible, on peut raisonnablerelative-ment penser que les sujets occupant ce type d’hébergerelative-ment ne visiteront qu’une fois l’ensemble des réserves lors du séjour, qu’ils achètent le ticket ou paient la taxe. Les montants déclarés par ces touristes via les deux formats de paiement peuvent donc être assimilés à un CAP pour une visite de l’ensemble des réserves. Il en est de même pour les hébergés en non marchand hors résidence secondaire personnelle, car, toujours selon la même source, leur durée de séjour moyenne en haute saison est de 11.5 jours. Par contre, pour ce qui est des hébergés en résidence secondaire personnelle, la situation est différente dans la mesure où, à l’inverse des autres, l’acquittement de la taxe leur permet de visiter plusieurs fois les ré-serves durant l’année. Par conséquent, les montants annoncés peuvent correspondre à un CAP pour plusieurs visites. Ce qui veut dire qu’on pense qu’un résident secondaire donne son CAP via la taxe en procédant à un calcul qui intègre l’ensemble des visites projetées durant l’année. Ce raisonnement ne s’applique pas cependant au droit d’entrée puisqu’il est valide une semai-ne pour tout le monde. Par conséquent, on peut logiquement supposer que les résidents secon-daires soumis au questionnaire Ticket indiquent un CAP pour une visite de toutes les réserves dans la durée de validité du droit d’entrée. Sur la base de ces hypothèses, la démarche adoptée pour analyser l’effet des vecteurs de paiement sur le CAP se résume à exclure de l’Echantillon Taxe les personnes séjournant en résidence secondaire personnelle, de manière à disposer uni-quement de touristes avec un CAP pour une seule visite éventuelle de l’ensemble des réserves naturelles. Cette exclusion une fois effectuée, on réestime le CAP pour les deux modalités de paiement à l’aide du modèle Tobit simple.

Les résultats de ces nouvelles estimations sont consignés en annexes 8 et 9, et les CAP moyens prédits à partir des coefficients estimés des facteurs explicatifs sont donnés dans le ta-bleau 20.

Le recours à cette nouvelle procédure de comparaison des formats de paiement produit des résultats différents de ceux figurés dans le tableau 19, en termes de CAP moyens. On peut en effet noter que si, en Ville, les CAP moyens pour la taxe sont toujours plus élevés que ceux obtenus pour le ticket, sur les Iles, les CAP pour le ticket sont désormais en moyenne plus im-portants73. Ce qui suggère que les véhicules de paiement affectent les CAP, qu’il s’agisse d’un CAP conservateur ou non, mais que leur effet varie selon la zone d’enquête considérée74.

Tableau 20- CAP moyens prédits par les nouveaux modèles Tobit simple

Sous-échantillon Ville

N Taxe N Ticket Différence CAP conservateur 342 14.46 (5.10) 306 13.47 (3.07)

CAP>0 312 16.43 (4.03) 294 14.38 (2.59)

0.99*** 2.05***

Sous-échantillon Ile

N Taxe N Ticket Différence CAP conservateur 159 11.25 (4.63) 192 12.31 (4.14)

CAP>0 147 12.16 (3.35) 170 13.39 (3.44)

1.06** 1.23***

Lecture : *** : Significatif au seuil de 1%, ns : Non significatif et (.) : déviation standard

Ces effets significatifs ne permettent pas toutefois, à ce stade, de conclure à une sensi-sibilité des touristes aux formats de paiement proposés puisque, comme on l’a constaté dans la section 1, les Echantillons Taxe et Ticket ne sont pas totalement homogènes. De plus, certains facteurs différenciant ces derniers sont déterminants du CAP (cf. tableaux 17 et 18 ou annexes 8 et 9), suggérant qu’il est possible que les différences significatives notées dans le tableau 20 soient dues à ces éléments, et non aux moyens de paiement. Il faut donc des tests supplémen-taires pour pouvoir conclure à un "effet mode de paiement" sur le CAP.

73 Pour comparer les CAP moyens, on a utilisé le test t pour échantillons indépendants sous SPSS 16. Deux types de résultats sont donnés selon que l’hypothèse d’égalité des variances est acceptée ou non. Dans le cadre de cette thèse, cette hypothèse est rejetée pour le sous-groupe Ville, et acceptée pour le sous-groupe Ile. Les résultats du test t pour égalité de moyennes présentés dans le tableau 20 sont donc ceux basés sur l’hypothèse des variances inégales, dans le cas du sous-groupe Ville, et des variances égales, dans le cas du sous-groupe Ile.

74 Rappelons que dans le tableau 19, les modes de paiement n’avaient aucun effet sur les CAP enregistrés sur les Iles.

Un premier test envisageable consiste à fusionner les observations des groupes Taxe et Ticket, construire une variable binaire définissant les modes de paiement puis l’inclure en tant que facteur explicatif supplémentaire dans le modèle de CAP pour l’échantillon global. C’est, par exemple, le test utilisé par Wiser (2007) pour analyser l’effet des vecteurs de paiement sur le CAP des résidents américains pour l’énergie renouvelable. Mais, à notre avis, ce test est in-suffisant, car il suppose que seul le terme constant du modèle puisse varier de la taxe au ticket d’entrée. On soutient au contraire que ces véhicules de paiement affectent aussi le poids relatif des facteurs explicatifs, ce qui signifie qu’on pense être en présence de deux fonctions distinc-tes de CAP. La démarche appropriée pour distinc-tester cette hypothèse revient à comparer les coeffi-cients estimés des modèles relégués en annexes 8 et 9. Formellement, il convient de tester si :

ILE TICKET ILE TAXE VILLE TICKET VILLE TAXE CAP CAP H CAP CAP H

β

β

β

β

= = : : 4 0 3 0

Les valeurs des paramètres (

β

) associés aux déterminants du CAP sont statistiquement identiques pour les deux vecteurs de paiement, qu’il s’agisse du sous-groupe Ville (H ) ou du 03 sous-groupe Ile (H ). 04

Trois tests sont possibles: tests de Wald, Chow et du Ratio de vraisemblance (Brouwer et Spaninks 1999). Dans le cas de cette thèse, on a choisi le dernier, à l’instar de Whitehead et Blomquist (1995), Loomis et al. (1997), Loureiro et Lotade (2005), van der Heide et al. (2008)75. Il est donné par l’expression :

( )

[

LogLTAXE TICKET LogLTAXE LogLTICKET

]

RV =−2 + − + ~χm2

où LogLTAXE+TICKET désigne la log-vraisemblance du modèle complet (taxe et ticket réunis) et LogLTAXE et LogLTICKET sont les log-vraisemblances des modèles séparés. La statistique RV (Ratio de vraisemblance) suit un χ2 à m degrés de liberté, m étant la somme des coefficients, constante incluse, dans les modèles distincts moins le nombre de coefficients dans le modèle global (Loomis et al. 1997; Ben-Akiva et Lerman, 2000; Veisten et al. 2004; Loureiro et Lotade, 2005). On rejette l’hypothèse d’égalité des coefficients si la valeur du χ2calculé est

75 Il n’y a aucune raison particulière de préférer l’un à l’autre. Aussi pouvait-on appliquer les deux autres. Toutefois, selon les informations dont on dispose, il semblerait que le test du ratio de vraisemblance soit celui le plus utilisé des trois.

supérieure à celle du χ2 théorique selon m degrés de liberté pour un seuil de significativité α. Le tableau suivant synthétise les résultats :

Pour pouvoir comparer les coefficients (β), on retient les mêmes variables explicatives pour les trois modèles (Modèle TAXE + TICKET, Modèle TAXE et Modèle TICKET). Les résultats du test sont présentés dans le tableau 2176.

Tableau 21. Résultats du test du ratio de vraisemblance

Hypothèses nulles Log-vraisemblance Modèle TAXE+TICKET Log-vraisemblance Modèle TAXE Log-vraisemblance Modèle TICKET Valeurs du Khi-deux calculé VILLE TICKET VILLE TAXE CAP CAP H03:β =β - 2095.0066 - 1011.097 - 1057.5262 52.77*** ILE TICKET ILE TAXE CAP CAP H04 :β =β - 1107.0664 - 477.5849 - 619.1006 20.77*

Lecture : *** : Significatif au seuil de 1%

Pour le sous-groupe Ville (H ), les valeurs du03 χ2calculées sont largement supérieures à celles duχ2 théorique selon 13 degrés de liberté pour un seuil de significativité de 1%. Dans le cas du sous-groupe Iles (H ), les valeurs calculées sont moins importantes que celles du04 χ2

théorique selon 12 degrés de liberté, mais sont tout de même significatives pour un seuil de si-gnificativité de 10%. En conclusion, les paramètres des Modèles Taxe et Ticket sont significa-tivement différents, confirmant ainsi une sensibilité des individus aux vecteurs de paiement en présence. Cela confirme aussi qu’un modèle de CAP global, c’est-à-dire regroupant les obser-vations Taxe et Ticket, est inapproprié ici, que les données aient été recueillies en Ville ou sur les Iles.

2.6. Agrégation des CAP moyens prédits pour une aide à la décision publique