• Aucun résultat trouvé

Agrégation des CAP moyens prédits pour une aide à la décision publique Dans la perspective d’une décision publique, on présente dans cette sous-section une

Traitements économétriques des données

2.6. Agrégation des CAP moyens prédits pour une aide à la décision publique Dans la perspective d’une décision publique, on présente dans cette sous-section une

estimation du consentement total de la population touristique du golfe à financer les nouvelles réserves. Cette valeur a été calculée à l’aide de l’expression :

P A C N

CAPTOTAL = * (Bateman et al., 2002)

76

CAPreprésente les CAP moyens figurés dans le tableau 19 et N, le nombre de touristes visitant le golfe.

Simple en apparence, ce calcul nécessite cependant des informations importantes à l’échelle du golfe comme les flux de touristes correspondant à la saison de l’enquête et les caractéristiques de cette population. De telles données sont difficiles à obtenir, l’Observatoire du tourisme du Morbihan (OMT) n’effectuant pas d’évaluation de la fréquentation touristique intra départementale77. En outre, lorsque ces informations existent, elles ne sont pas du tout cohérentes. Pour preuve, alors que Queffelec et Philippe (2008) avancent le chiffre de 1.2 million de touristes visitant le golfe par an, le SIAGM (2009), lui, évoque celui de 2 millions environ. Mais, on pense toutefois que cette dernière évaluation est un peu excessive, au regard des estimations de la fréquentation touristique du département pour 2009 qui font état de 2.6 millions de personnes78. Aussi, retient-on le premier chiffre comme base de travail.

A propos du flux touristique relatif à la période de l’enquête (juillet/août), l’étude de MORGOAT (2005) ne permet pas non plus de répondre à cette question. Cependant, elle fournit les saisons pendant lesquelles les individus envisagent de revenir dans le golfe d’ici 2 ans. Ainsi, 31.5% des gens comptent le faire en juillet/août79. A supposer que chaque année ce pourcentage corresponde à celui des touristes séjournant dans le golfe en haute saison80, cela évalue à 378000 le nombre de ces derniers concernés par le programme (1.2 millions*31.5%). Par ailleurs, sachant que la taxe ne s’applique qu’à ceux logeant en hébergement marchand et résidence secondaire personnelle, il convient de ramener ce nouveau chiffre à la population réellement impliquée. L’enquête MORGOAT (2005) montre qu’en cœur de saison la part des nuitées non marchandes hors résidence secondaire personnelle représente 25% des nuitées totales. En admettant qu’il en soit de même pour le golfe et sachant que les 378000 touristes réalisent en moyenne 6010200 nuitées81, les 25% en question équivalent donc à 1502550 nuitées (6010200*25%). Si on divise ce chiffre par la durée moyenne de séjour en logement non marchand hors résidence secondaire personnelle, qui est de 11.5 jours selon la source pré-citée, on obtient une évaluation du nombre de touristes non touchés par la taxe, soit 130657

77 Observatoire du tourisme du Morbihan, com.pers.

78 Observatoire du tourisme du Morbihan, com.pers.

79 Ce pourcentage est le même pour tout le département (MORGOAT, 2008)

80

On pense toutefois que ce chiffre sous-estime la population touristique du golfe en cœur de saison car les statistiques de MORGOAT (2005) montrent que 65% des nuitées touristiques dans le Morbihan sont réalisées à cette période.

81 On a multiplié ce chiffre par la durée moyenne de séjour dans le Morbihan, en cœur de saison, qui est de 15.9 jours.

individus. Concrètement, la taxe impliquerait alors une population touristique en haute saison évaluée autour de 247343 éventuels contribuables (378000-130657).

Enfin, on a comparé les échantillons étudiés avec les résultats de MORGOAT (2005) pour vérifier s’ils sont représentatifs ou non de la population touristique. Les critères retenus sont ceux calés sur ladite enquête: fréquence de visite, durée de séjour, accompagnement et revenu. Des facteurs importants comme le mode d’hébergement, l’âge, le sexe et la nationalité n’en font pas partie parce que les informations disponibles sont fournies en pourcentage de nuitées et l’on n’a pas toutes les données nécessaires pour calculer les proportions de touristes correspondantes.

Les statistiques obtenues sont assez proches des résultats de référence à l’exception de certaines variables pour lesquelles on note des différences importantes : 7 - 11 points d’écart. Ainsi, avec la taxe, par rapport à la base de sondage, on note une surreprésentation des primo-touristes (10.3) et une sous-représentation de ceux passant moins de 4 nuits dans le golfe (-7.3) ainsi que des couples (-11.4). Pour le ticket, ces derniers sont aussi minoritaires (-11.4). Pour le revenu, il ne semble pas exister de différences significatives avec l’enquête de la base.

Même si ces constats sont globalement satisfaisants, ils n’autorisent pas à se prononcer clairement sur la représentativité des échantillons étudiés. En effet, l’idéal aurait été de faire ces comparaisons avec les statistiques portant sur le Golfe du Morbihan, statistiques dont malheureusement on ne dispose pas. Aussi convient-il d’insister sur le fait que les estimations fournies dans les tableaux suivants doivent être maniées avec précaution, car conditionnées aux caractéristiques des échantillons analysés.

Le tableau 22 donne une fourchette du bénéfice attendu des nouvelles réserves avec la taxe d’hébergement, du point de vue de la population touristique.

Tableau 22- Agrégation des CAP moyens avec la taxe d’hébergement Scénario : Taxe d’hébergement

CAP conservateur (€) CAP > 0 (€)

ILE CAP 2 980 483,15 3 346 550,79 VILLE CAP 3 969 855,15 4 617 893,81 Moyenne des ILE et VILLE CAP 3 475 169,15 3 982 222,3

Lorsqu’on agrège les CAP moyens conservateurs calculés pour les sous-groupes Ile et Ville sur les 247343 touristes, le bénéfice se situe entre 3 millions et 4 millions d’euros. Avec le CAP élevé (CAP>0), il est relativement plus important : entre 3,35 – 4,62 millions d’euros.

Tableau 23- Agrégation des CAP moyens avec le ticket d’entrée

En ce qui concerne le ticket d’entrée, pour estimer le bénéfice généré par les réserves, il a fallu d’abord évaluer le nombre de touristes susceptibles de les visiter. Pour ce faire, on a utilisé un modèle Logit qui modélise la probabilité de visite. L’estimation a été effectuée sur l’échantillon global, c’est-à-dire toutes zones d’enquête confondues, auquel on a ajouté les six observations représentant les sujets qu’on avait initialement exclus de la base de données pour avoir déclaré ne pas compter visiter les réserves alors qu’ils ont signalé un CAP positif. Au total, 463 enquêtés projettent de visiter au moins l’une des réserves en cas de mise en place du programme et 40 autres (ceux avec un CAP nul et les 6 agents en question) ne se l’imaginent pas. Les résultats du modèle prédisent que 90% des sondés visiteraient les réserves, évaluant à 340200 le nombre de potentiels visiteurs sur la population touristique en cœur de saison (378000*90%). Sur la base de ce chiffre, on a construit le tableau 23 ci-dessus qui présente le CAP total par site d’enquête.

Avec le CAP conservateur, le bénéfice total associé aux nouvelles réserves naturelles se situe entre 4.2 et 4.6 millions d’euros. Il est de 4.7 à 5 millions, si l’on retient le CAP haut.

Scénario : Ticket d’entrée

CAP conservateur (€) CAP > 0 (€)

ILE CAP 4 184 460 4 728 780 VILLE CAP 4 579 092 4 919 292 Moyenne des ILE et VILLE CAP 4 381 776 4 824 036

* *

*

Cette section avait pour objectif de déterminer et de comparer les facteurs explicatifs du CAP des touristes pour les nouvelles réserves. Deux types de modèles économétriques ont été estimés afin de mieux cerner le mécanisme selon lequel les agents annoncent leur CAP : la procédure en deux étapes d’Heckman sous l’idée d’un processus séquentiel de déclaration des préférences, et le Tobit simple sous celle d’un mécanisme simultané. Les résultats ont montré que, dans le cas de cette thèse, il est plus judicieux de privilégier la dernière hypothèse. Alors, on a retenu le modèle Tobit censuré simple.

L’étude des facteurs explicatifs du CAP menée à partir de ce modèle a révélé plusieurs éléments intéressants, éléments qui permettent de déceler une certaine sensibilité des touristes aux modes de paiement. En effet, on a pu démontrer à l’aide du test de ratio de vraisemblance que les coefficients des facteurs explicatifs du CAP avec la taxe et le ticket sont significative-ment différents, quel que soit le site d’enquête considéré. Ce qui met en évidence des logiques différentes sous-jacentes au comportement des touristes face au véhicule de paiement imposé. Cette différence de comportement n’implique pas un biais de support de paiement. Il en aurait été question si les formats de paiement choisis ne convenaient pas aux réserves (ce qui est loin d’être le cas) ou si l’on avait confirmé l’existence du biais de couverture. La réaction des gens ici transcrit plutôt leur perception quant à la relation entre l’offre contingente des réserves na-turelles et la forme de paiement pour celles-ci.

Enfin, l’agrégation des CAP moyens sur la population touristique a révélé un bénéfice collectif plus important avec le ticket. L’explication réside dans le fait que celui-ci s’applique à l’ensemble de la population touristique alors que la taxe d’hébergement ne l’est qu’aux seuls individus logeant en hébergement marchand et résidence secondaire. Cependant, il convient d’insister sur le caractère « volontaire » du ticket dans le sens que le séjour dans le golfe n’est

pas conditionné par son achat. En effet, les individus peuvent continuer à y séjourner sans être contraint de visiter les réserves. Le CAP avec le droit d’entrée n’est prélevé que si le touriste visite ces dernières. Il faut donc garder à l’esprit qu’en situation réelle on puisse observer des déviations quant aux intentions de visite des 90% des sujets. Dans ce contexte, la population touristique réellement concernée par le ticket est peut-être moins importante que celle prévue ici. Ce problème ne se pose pas ou, du moins, se pose à un degré nettement plus faible avec la taxe, celle-ci étant exigible dès lors que les touristes séjournent dans le golfe.

Conclusion

Dans ce chapitre, à l’aide de la MEC, on a montré que les touristes ont bien un CAP pour les réserves naturelles susceptibles d’être créées dans le Golfe du Morbihan. La mise en évidence de cet indicateur est la preuve que, du point de vue de la population touristique, il y a un bénéfice à protéger la nature par l’application de cette mesure réglementaire, même si l’estimation de ce bénéfice varie suivant les formats de paiement retenus.

Cependant, il faut noter que les valeurs moyennes prédites ne sont correctes que sous certaines conditions notamment l’absence d’un problème d’endogénéité d’une ou de plusieurs variables explicatives du CAP. Il est donc nécessaire, lors des estimations économétriques, de vérifier, dans la mesure du possible, l’existence ou non de ce problème. Le chapitre suivant se propose d’aborder cette question.

CHAPITRE III

82

PRISE EN COMPTE D’UN EVENTUEL PROBLEME