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Syst`eme voisin : d´emouillage d’un liquide sur un liquide

Martin et al. [68] ont d´ecrit le d´emouillage de films d’huile silicone d´epos´es sur des bains d’huile fluor´ee tr`es visqueuse. Un tel film est m´etastable s’il est plus mince que l’´epaisseur e0 d’une flaque

(millim´etrique en pratique). Le moteur de l’ouverture d’un trou est alors le param`etre d’´etalement, corrig´e par un facteur d´ependant de l’´epaisseur du film et s’annulant pour e = e0. Martin et al.

[68] mod´elisent la r´esistance `a l’´eclatement par une force du type ηV / ln(L/l), o`u η est la viscosit´e du bain d’huile fluor´ee, l est la longueur du bourrelet de d´emouillage (le bourrelet est aplati par la gravit´e dans cette exp´erience), et L est une longueur de coupure hydrodynamique, donn´ee par la plus petite taille caract´eristique du syst`eme. Dans l’exp´erience de Martin, il s’agit de la profondeur du bain d’huile jouant le rˆole de substrat [41].

Dans notre exp´erience, le bourrelet est approximativement cylindrique. La longueur l correspond donc au rayon r du bourrelet form´e. Pour la longueur externe L, plusieurs candidats existent.

Rayon du trou

Le rayon R du trou ouvert dans le film est une proposition possible [94]. Cette longueur varie au cours de l’exp´erience, ce qui devrait donc faire varier la vitesse d’´eclatement des films. La vitesse d’ouverture du trou s’´ecrit alors :

V ∼ γη lnR

r (4.20)

Pour un film d’´epaisseur 100 µm, on attend alors un doublement de la vitesse d’´eclatement quand le rayon du trou passe de 1 `a 10 mm. De telles variations ne sont pas observ´ees dans nos exp´eriences.

Extension du bain

Nous pourrions penser que L est la taille du bain dans lequel le film trempe. C’est le cas dans les exp´eriences de Martin, car les bains sont tr`es visqueux (0,3 `a 10 Pa.s) et peu profonds (7 mm). La viscosit´e de l’environnement dans notre exp´erience ne d´epasse pas 1 Pa.s et la taille du bain est de l’ordre de quelques centim`etres.

Instationnarit´e

Les effets d’instationnarit´e ne sont pas `a exclure. La r´egion en ´ecoulement autour du bourrelet peut croˆıtre en fonction du temps. Sa taille est faible au d´ebut de l’´eclatement et s’´etend avec le

4.8. CONCLUSION 85

temps comme√νt o`u ν est la viscosit´e cin´ematique du milieu environnant. Le choix de cette longueur conduit `a nouveau `a des variations de la vitesse d’´eclatement plus fortes que celles observ´ees.

Longueur de Stokes

Nous avons propos´e pour longueur L dans notre cas la longueur de Stokes LS = η/ρV , longueur

pour laquelle le nombre de Reynolds vaut 1. C’est sur cette distance que se fait l’essentiel de la dissipation visqueuse. Pour un environnement de viscosit´e 20 mPa.s, la vitesse d’´eclatement d’un film d’eau est de l’ordre de 0,1 m.s−1

. On trouve alors LS = 200 µm, tr`es inf´erieure `a la taille

caract´eristique du syst`eme. Dans une atmosph`ere 1000 fois plus visqueuse que l’eau, cette taille est de l’ordre de la dizaine de centim`etres. Pour les atmosph`eres encore plus visqueuses, le choix (fait par Martin et al.) de la taille du bain comme longueur de coupure s’impose devant celui de la longueur de Stokes.

4.8

Conclusion

Nous avons observ´e l’´eclatement de films fluides plong´es dans des atmosph`eres visqueuses. Les trous s’ouvrant dans les films sont bord´es par un bourrelet collectant le liquide initialement contenu dans le film. Ce bourrelet, bien qu’il pr´esente une l´eg`ere asym´etrie due au raccordement avec le film, est essentiellement cylindrique. Nous verrons au chapitre suivant comment il ´evolue au fur et `a mesure de l’´eclatement. Du fait de l’existence d’un grand nombre de cas, la condition mˆeme d’apparition d’un bourrelet n’est pas compl`etement ´elucid´ee. Elle semble li´ee au caract`ere localis´e de l’´ecoulement : l’existence d’un bourrelet dans les exp´eriences de Martin [68] et dans les nˆotres contraste avec l’absence de sur´epaisseur en bord de trou, observ´ee par Debr´egeas [27] sur des films se r´etractant dans leur ensemble. Nous avons pr´esent´e dans ce chapitre un mod`ele restreint, inspir´e des propositions de Brenner et Gueyffier [11].

La force motrice de l’´eclatement, comme pour tout film liquide, est la tension de surface. Le mouvement est mod´er´e par la dissipation visqueuse dans l’environnement. La r´esistance est bien d´ecrite par la friction visqueuse sur un cylindre (le bourrelet) en translation perpendiculairement `a son axe.

Les films d’eau dans l’huile sont fabriqu´es en pr´esence de tensioactifs. Notre analyse des ex- p´eriences ne tient cependant pas compte de leur pr´esence, leur seul rˆole suppos´e ´etant d’autoriser la fabrication de ces films. Il serait int´eressant d’explorer des syst`emes dans lesquels la dynamique des mol´ecules tensioactives est importante pour le processus d’´eclatement. Une comparaison avec les r´esultats th´eoriques de Joanny et de Gennes [47] serait alors possible.

Chapitre 5

Instabilit´es du bourrelet

Sommaire

5.1 Introduction . . . 87 5.2 Description qualitative de l’instabilit´e . . . 88 5.3 Amorce par Plateau-Rayleigh . . . 90 5.3.1 Caract´eristiques de l’instabilit´e de Plateau-Rayleigh . . . 90 5.3.2 Adaptation aux films en ´eclatement . . . 91 5.3.3 Compromis . . . 93 5.4 La croissance des pointes . . . 93 5.4.1 Frottement de Stokes . . . 93 5.4.2 Aspiration s´elective . . . 94 5.4.3 L’aspiration du bourrelet . . . 94 5.4.4 Croissance des doigts . . . 95 5.5 Conclusion . . . 97

5.1

Introduction

En conduisant des exp´eriences sur des gouttes d’huile immerg´ees dans des m´elanges d’eau et d’alcool, Joseph Plateau a montr´e qu’un objet fluide allong´e (un cylindre, par exemple) est instable. Si la longueur du cylindre est plus grande que sa circonf´erence, il se brise en gouttelettes [81]. Rayleigh s’est plus tard int´eress´e `a la dynamique de cette instabilit´e. Nous pouvons tous observer ce ph´enom`ene en ouvrant un robinet. Il en sort un filet d’eau, d’abord lisse, mais qui tr`es rapidement se casse en petites gouttes.

Quand un film de savon ´eclate, le front de d´emouillage est bord´e d’un bourrelet qui collecte le liquide constituant le film. Id´ealement, cet objet est torique. Il est donc susceptible de se fragmenter, au mˆeme titre qu’un filet d’eau : de l’´eclatement d’une bulle de savon ne r´esultent finalement que

88 CHAPITRE 5. INSTABILIT´ES DU BOURRELET

quelques gouttelettes sph´eriques. Le cas des films de savon tremp´es dans un bain visqueux ne fait pas exception. Le bourrelet qui se forme lors de l’´eclatement ne reste pas lisse. Il pr´esente des modulations d’´epaisseur dont nous allons voir qu’elles prennent des formes originales. Nous tenterons de rapprocher ces formes de ph´enom`enes d´ej`a connus par ailleurs.