6.1. Introduction
« Les TEMPS sont les formes du verbe, qui expriment les différents rapports d’existence aux diverses époques que
l’on peut envisager dans la durée ». (N. Beauzée, Temps)
Après avoir introduit les sujets indispensables pour la description d’une forme verbale, i.e. du
conditionnel et du potentiel dans notre travail, qui nous ont dévoilé des données précieuses et des pistes à suivre sur ce chemin de recherche comparative, nous visons à faire la comparaison du système des temps verbaux en français et en serbe. Cependant, notre objectif n’est pas d’effectuer une présentation de manière exhaustive, mais de pointer les similitudes et les différences fondamentales entre les temps verbaux dans ces langues. Nous allons essayer aussi de déterminer s’il est des temps verbaux en français qui ne possèdent pas leurs équivalents en
serbe, et vice versa. Pour la description d’un temps verbal, nous allons nous appuyer sur le
travail de Reichenbach (1947) et le retravail de Reichenbach proposé par Bres et Azzopardi (2016), mais aussi sur le travail d’Ašić et Stanojević (2006), qui s’inspirent eux-mêmes de H. Reichenbach, pour la présentation des temps verbaux en serbe.
6.2. Le système des temps verbaux en français
La langue française dispose d’une morphologie verbale remarquablement riche et complexe, ce
qui rend la maîtrise du système des temps verbaux français très difficile pour les apprenants
serbes. La sémantique des temps verbaux de l’indicatif a fait l’objet de nombreux travaux, et
nous nous sommes limitée à les présenter dans le cadre d’une approche récente, mais en même temps ancienne. Comme nous l’avons annoncé, il s’agit du travail de Bres et Azzopardi (2016), basé sur la théorie de Reichenbach (1947). Plus précisément, les auteurs ont développé leur description des temps de l’indicatif français en modifiant la version reichenbachienne.
Rappelons que la théorie de H. Reichenbach est très sollicitée dans le traitement de la temporalité linguistique pour sa simplicité : tout temps verbal peut être présenté par une combinaison des
22Ce type d’aspect a été exprimé en serbe par l’opposition imparfait / aoriste. Cependant, l’imparfait esttombé en désuétude.
trois points23temporels S, E et R, sur l’axe du temps ; la relation entre R et S définit l’instruction
temporelle, alors que la relation entre R et E marque l’instruction aspectuelle d’un temps verbal.
Cependant, malgré les nombreux avantages de la description des temps de l’indicatif proposée
par H. Reichenbach, sa théorie s’est finalement avérée limitée (cf. Vet 1980 ; 2007, Comrie
1983, Vetters 1996 ; 2002, et al.).
Pourtant, Bres et Azzopardi (2016) envisagent leur présentation des temps verbaux français à partir des trois éléments reichenbachiens, E, S et R, et leurs relations, mais seulement avec des modifications. Nous avons déjà introduit le travail de Bres et Azzopardi (2016), pertinent pour la
représentation aspectuelle du conditionnel. Avant d’aborder la description de chaque temps
verbal de l’indicatif français, nous allons, d’abord, résumer leur travail :
(i) le point E est analysé comme un intervalle borné (Ei-Et), correspondant au procès (sa représentation en langue) et non à l’événement du monde.
(ii) l’intervalle-procès E peut être divisé en trois phases :
1. phase processuelle (Ei-Et)
2. phase pré-processuelle (Eprepi-Eprept) 3. phase post-processuelle (Epostpi-Epostpt)
(iii) les auxiliaires disposent d’un intervalle Ɛi-Ɛt auquel est attribué le point de référence ρ. L’instruction aspectuelle de l’auxiliaire procède de la relation entre ρ et Ɛi-Ɛt.
(iv) le participe passé et l’infinitif possèdent aussi les instructions aspectuelles mais aucune
instruction temporelle. Le participe passé donne l’instruction aspectuelle R = Et ce qui signifie la coïncidence entre R et la borne terminale de l’intervalle du procès Ei-Et tandis que l’infinitif
saisit le procès globalement ou cursivement selon le co(n)texte - R ك Ei-Et, i.e. R coïncide ou est
inclus dans l’intervalle du procès E.
(v) il existe un dédoublement du point S dans le cas du conditionnel24, qui pose en ultériorité un
point de référence R du procès, non pas à partir de l’énonciation de l’énonciateur, mais à partir d’une énonciation rapportée S’, qui est antérieure à S.
(vi) la représentation aspectuelle i.e. la relation entre E et R peut être : antériorité (–), coïncidence (=), inclusion (ؿ), neutralité (ك) et antériorité proche (<).
Passons maintenant à la présentation dans le tableau infra et puis, à la description des temps
verbaux de l’indicatif, qui sous-entend leurs instructions temporelle et aspectuelle, révélées par les relations entre E, R et S. Au point de vue de la forme, les temps verbaux sont simples,
composés ou surcomposés. Nous n’allons pas prendre en considération les formes surcomposées
car peu pertinentes pour notre travail. Cela vaut également pour les formes périphrastiques, une « pierre d’achoppement » que les auteurs ont réussi à intégrer dans la description de leur système (surtout celles issues de la grammaticalisation en auxiliaires des verbes aller et venir (de) +
infinitif entrant en concurrence avec telle ou telle forme simple ou composée).
En français, les temps verbaux de l’indicatif simples sont : présent, futur, passé simple, imparfait et conditionnel :
23S = le moment de la parole, E = le moment de l’événement et R = le point référentiel, par rapport auquel se situe
le moment de l’événement.
Temps Instruction temporelle (relation entre R et S)
Instruction aspectuelle (relation entre R et E) 1. présent présent (R = S) sous-déterminée (R ك Ei-Et) 2. futur ultérieur du présent (S – R) sous-déterminée (R ك Ei-Et)
3. passé simple passé (R–S) globale (R = E)
4. imparfait passé (R–S) cursive (R Ì Ei-Et) 5. conditionnel présent ultérieur du passé (S’– R; S’– S) sous-déterminée (R ك Ei-Et)
Il faut mentionner que les temps verbaux simples évoqués supra marquent le procès dans sa
phase processuelle Ei-Et.
S’agissant du présent, cette marque du procès est située dans le présent, globalement ou cursivement selon le co(n)texte.
Le futur a la même instruction aspectuelle que le présent, i.e. il peut saisir le procès globalement
ou cursivement selon le co(n)texte, mais cette saisie est située dans l’époque future.
Le passé simple situe le procès dans le passé et représente le procès globalement.
Par rapport au passé simple, l’imparfait saisit le procès cursivement, mais son instruction temporelle est identique à celle du passé simple : la saisie du procès est située dans le passé. L’instruction aspectuelle du conditionnel est sous-déterminée, comme dans le cas du futur – l’une de ses composantes, ce qui signifie qu’en fonction du co(n)texte le procès peut être saisi soit globalement soit cursivement. Selon son instruction temporelle, le conditionnel situe le
procès dans l’ultériorité du passé, i.e. dans l’ultériorité d’une énonciation secondaire S’, qui est
antérieure à l’énonciation principale S.
Il faut mentionner que dans le cas du conditionnel (présent, passé et rétrospectif), la relation entre R et S n’est pas contrainte du fait que S’–R et S’ – S. Cela signifie que le procès peut être
situé dans l’époque passée (R – S), présente (S = R) ou future (S – R) (Bres et Azzopardi 2016 :
8) :
(118) Marie avait dit que Guillaume partirait / serait parti / viendrait de partir en vacances hier /
maintenant / demain.
Nous allons maintenant présenter dans le tableau infra et décrire le fonctionnement des formes
composées des temps verbaux français : passé composé, futur antérieur, plus-que-parfait, passé antérieur et conditionnel passé :
Temps Instruction temporelle (relation entre R et S)
Instruction aspectuelle (relation entre R et E)
V. au participe passé Æ R = Et
aux. au présent présent (ρ = S) sous-déterminée (ρ ك Ɛi-Ɛt) → 1. passé composé présent (ρ = S) ρ ك Epostpi-Epostpt
V. au participe passé Æ R = Et
→ 2. futur antérieur ultérieur du présent (S – ρ) ρ ك Epostpi-Epostpt
V. au participe passé Æ R = Et
aux. à l’imparfait passé (ρ – S) cursive (ρ ؿ Ɛi-Ɛt) → 3. plus-que-parfait passé (ρ – S) cursive (ρ ؿ Epostpi-Epostpt)
V. au participe passé Æ R = Et
aux. au passé simple passé (ρ – S) globale (ρ = Ɛ) → 4. passé antérieur passé (ρ – S) globale (ρ = Epostp)
V. au participe passé Æ25 R = Et
aux. au conditionnel ultérieur du passé (S’– S; S’– ρ) sous-déterminée (ρ ك Ɛi-Ɛt) → 5. conditionnel passé ultérieur du passé (S’– ρ; S’–S) sous-déterminée
(ρ ك Epostpi-Epostp t) Soulignons d’abord que les temps verbaux composés saisissent le procès dans sa phase post-processuelle Epostpi-Epostpt.
La représentation aspectuelle du passé composé est sous-déterminée signifiant qu’il marque le
procès globalement ou cursivement selon le co(n)texte et le situe dans l’époque présente (le point
de référence ρ coïncide avec l’énonciation principale S).
Comme dans le cas du passé composé, l’instruction aspectuelle du futur antérieur est aussi
sous-déterminée (présentation du procès globalement ou cursivement), mais il le situe dans l’époque
future.
Le plus-que-parfait saisit le procès dans le cours de la phase post-processuelle et cette saisie est située dans le passé.
Le passé antérieur situe également le procès dans le passé, mais à la différence du plus-que-parfait, il présente la phase post-processuelle dans sa globalité. Il faut mentionner ici que la modélisation proposée par Bres et Azzopardi (2016) parvient à souligner la distinction aspectuelle entre le passé antérieur et le plus-que-parfait.
Selon la représentation tabulaire supra, les deux conditionnels, présent et passé, possèdent, à
première vue, les mêmes instructions. Cependant, la différence existe : le conditionnel passé
place le procès dans l’ultériorité d’une énonciation secondaire S’, antérieure à l’énonciation
principale S, globalement ou cursivement selon le co(n)texte, comme le conditionnel présent, mais comme une forme composée, il saisit le procès dans sa phase post-processuelle ; aussi, la présentation et la localisation du procès moyennant le conditionnel passé se font à partir du point de référence ρ attribué à l’auxiliaire.
6.3. Le système des temps verbaux en serbe
Dans la langue serbe, la signification des temps verbaux est fondée traditionnellement sur le
principe de Belić (1928), celui de la catégorisation syntaxique des temps verbaux. Selon ce
principe, on fait une distinction entre la catégorie de l’usage indicatif (absolu), lorsque l’action
25En tant que formes nominales, le participe passé et l’infinitif sont atemporels ; ils ne donnent pas d’instruction
est déterminée dans le temps par rapport au moment de la parole, et l’usage relatif, lorsque l’action est déterminée par rapport à n’importe quel autre moment. Le point de départ de l’analyse des emplois des temps verbaux serbes représente le paramètre marqué par l’opposition détermination temporelle absolue ou indicative. Il faut mentionner qu’en serbe, tous les temps
verbaux peuvent avoir un emploi relatif, alors que seulement certains d’entre eux peuvent avoir
un emploi absolu.
Ces dernières années, dans la description du fonctionnement du système verbal serbe est
introduit le deuxième paramètre sous-entendant le rapport du moment d’effectuer une action en
fonction du soi-disant moment de référence, qui est présenté par l’opposition actionréférentielle
ou non-référentielle :
Dans la description de la syntaxe des formes verbales, il est nécessaire de prendre en compte l’opposition
référentialité / non- référentialité d’une action verbale [...] Lorsque une action présente, passée ou future, est liée à
un intervalle temporel, elle est représentée comme référentielle. Cependant, une action n’est pas exprimée par une
forme verbale seulement de cette façon, dans un intervalle de temps ; elle peut s’effectuer dans une série de ces
intervalles. Dans ce cas, il s’agit d’une action non-référentielle. (Piper et al. 2005: 347-48)
En prenant en considération ces deux paramètres et en s’appuyant sur la théorie de Reichenbach
(1947), les auteurs Ašić et Stanojević (2006) proposent leur description du système des temps
verbaux en serbe, que nous adoptons dans ce travail. Plus précisément, nous allons présenter les temps verbaux serbes en prenant en compte leurs instructions temporelle et aspectuelle, qui résultent de leurs sémantismes présentés moyennant les trois points reichenbachiens (parce que cette présentation se rapproche de celle des temps verbaux en français, ce qui nous permettra de remarquer plus facilement les traits des deux systèmes verbaux) et de leurs combinaisons possibles avec les verbes perfectifs et imperfectifs.
Dans la langue serbe, on distingue 7 temps verbaux, dont les formes simples sont : présent, futur I, aoriste et imparfait, et les formes composées : parfait, futur II et plus-que-parfait.
Avant d’aborder la présentation et la description de ces temps, il faut accorder une attention à
quelques remarques importantes. Rappelons qu’en serbe, l’aspect est exprimé
morphologiquement, i.e. par la distinction des paires aspectuelles des verbes imperfectifs et
perfectifs (čitati ’lire’ / pročitati ’avoir lu’). L’aspect grammatical, marqué par l’opposition
aoriste/imparfait, était pertinent en serbe, mais l’aspect morphologique a pris la prépondérance. Ainsi, l’imparfait est devenu superflu dans le système verbal serbe ; c’est le parfait des verbes
imperfectifs qui a hérité de ces fonctions. On ne peut rencontrer l’imparfait que dans la langue
littéraire et dans certains énoncés figés comme : Gde to beše? ’Où était-ce ?’.
Aussi, l’aoriste et le plus-que-parfait sont tombés partiellement en désuétude dans la langue serbe contemporaine.
S’agissant de la combinaison des temps verbaux avec les verbes perfectifs et imperfectifs, il est à
noter que tous les temps mentionnés supra peuvent entrer en combinaison avec les verbes des
deux types d’aspect, sauf l’aoriste, l’imparfait et le plus-que-parfait, dont la représentation aspectuelle suit infra.
Nous aimerions introduire brièvement la morphologie des temps verbaux serbes et leurs équivalents français, ce qui pourrait nous dévoiler les premières similitudes et différences entre les systèmes verbaux dans les deux langues. Consultons le tableau suivant où nous avons proposé le résumé de toutes les données en question concernant les temps simples :
Temps verbaux simples exemple et formation du temps traduction 1. présent pevam peva- radical du présent chante
-m -mo -š -te -/ -ju/-u/-e 2. futur I26 pevaću ou ću pevati
peva- radical de l’infinitif chanterai
+ terminaisons : -ću -ćemo -ćeš -ćete -će -će ću ćemo ćeš ćete će će + infinitif
3. aoriste ot27pevah otpeva- radical de l’inf. chantai
+ terminaisons : -h -smo -/ -ste -/ -še
4. imparfait pevah peva- radical de l’inf. chantais
+ terminaisons : -ah -asmo -aše -aste -aše -ahu
Suit le tableau dans lequel on peut s’informer sur la formation des temps composés serbes et de leurs équivalents en français :
Temps verbaux composés exemple et formation du temps traduction
V. au participe passé pevao chanté
26 Le futur se forme généralement à partir du radical du verbe, auquel on ajoute la forme brève du verbe hteti
’vouloir’ au présent : Pevaćeš. ’Tu chanteras.’ Mais en présence du pronom personnel sujet, ainsi qu’à la forme négative, l’auxiliaire est détaché du verbe, qui prend dans cette situation la forme de l’infinitif : Ti ćeš pevati. ’Toi, tu chanteras.’, Nećeš pevati. ’Tu ne chanteras pas.’
aux. être28 au présent sam suis
→ 1. parfait sam pevao ai chanté
V. au participe passé pevao chanté
aux. être au présent budem29 suis
→ 2. futur II30 budem pevao aurai chanté
(chanterai, chante,
que je chante, chanterais)31
V. au participe passé pevao chanté
aux. être au passé composé / aux. être à l’imparfait sam bio / bejah suis été / étais → 3. plus-que-parfait sam bio pevao
/
bejah pevao32
avais chanté
28 Le verbe français êtrea deux correspondants en serbe : ‘jesam’ et ‘biti’. L’auxiliaire du passé composé est
toujours le présent du verbe jesam. L’auxiliaire jesama une forme longue et courte (enclitique) et ne se trouve qu’au
présent de l’indicatif :
1. jesam et sam 1. jesmo et smo
2. jesi si 2. jeste ste
3. jeste je 3. jesu su
29Il s’agit du présent de l’autre équivalent serbe du verbe français être.
30 Dans la littérature serbo-croate, on trouve les traits suivants concernant ce temps verbal (qui a été considéré
comme l’un des modes aussi) :
- il ne peut pas être employé seul dans la phrase simple, comme un équivalent au futur I
- ayant la signification temporelle, il n’est employé que dans certains types de propositions subordonnées (le
trait systématique)
M. Kovačević (2008) a démontré que même dans les phrases simples existe la concurrence entre le futur I, le futur II
et le présent perfectif. Le contexte nécessaire pour l’alternancede ces formes est la présence de l’adverbe možda
(‘peut-être’) :
Možda ćete uspeti (možda uspete/možda budete uspjeli).
Peut-être vous réussirez (peut-être vous réussissez / peut-être vous aurez réussi).
31Le futur antérieur représente l’équivalent français du futur II, mais les formes citées peuvent être employées aussi
dans certains contextes. Avec le futur II, toutes les relations temporelles sont possibles : antériorité (1), postériorité (2) et simultanéité (3) :
1. Kad budem završio rad, izaći ću.
Quand j’aurai terminé mon travail, je sortirai. 2. Pre nego što budem zaspala, popiću lek.
Avant que je me sois endormie, je prendrai le médecin.
3. Dok se deca budu igrala, popićemo kafu.
Pendant que les enfants joueront, nous prendrons le café.
Les deux tableaux nous font remarquer qu’une équivalence existe entre les systèmes des temps verbaux en serbe et en français, du fait que les temps verbaux serbes trouvent sans problèmes leurs équivalents en français. Cependant, la mise en comparaison, sous-entendant la présentation et l’explication du sémantisme des temps verbaux, leurs instructions temporelle et aspectuelle, nous dévoilera plus de détails concernant la (non) équivalence entre les systèmes des temps verbaux en serbe et en français. Nous présentons ces données dans les tableaux suivants, dont la discussion suit infra.
Temps simples
Sémantisme des temps simples selon Reichenbach
Instruction temporelle
(relation entre R et S) Instruction aspectuelle (relation entre R et E) 1. présent R, S, E présent (R = S) neutre (R ك E)
2. futur I S – R, E futur (S – R) neutre (R ك E)
3. aoriste E – R, S passé récent (R = S) globale (R= E) 4. imparfait E, R – S passé (R – S) cursive (R ؿ) S’agissant du présent, il faut, d’abord, souligner qu’il entre en combinaison avec les verbes imperfectifs et perfectifs. Ainsi, on distingue le présent imperfectif, le temps central dans le système verbal serbe, qui situe le procès au moment de la parole (son emploi actuel-référentiel)
ou dans l’époque présente plus large (son emploi non-référentiel)33. Par rapport au présent
imperfectif, le présent perfectif ne peut pas marquer un procès situé au moment de la parole :
(119) *Sada napišem poglavlje o aspektu. (pisati-napisati : ’écrire’-’écrire jusqu’au bout’)
Maintenant j’écris jusqu’au bout le chapitre sur l’aspect.
Pour cette raison, Ašić et Stanojević (2006 : 176) supposent la définition du sémantisme référant
au présent perfectif comme S≠R, alors que la position du point E est inférée du co(n)texte. Cette combinaison des points permet au présent perfectif de situer les procès dans le passé et c’est pourquoi il a pratiquement remplacé complètement l’aoriste à l’oral.
S’agissant de l’instruction aspectuelle du présent, nous l’avons marquée comme neutre, signifiant que ce temps donne à voir un procès en accomplissement ou accompli (cursivement ou
globalement), du fait que ce temps se combine avec les verbes des deux types d’aspect
(imperfectif et perfectif).
Le sémantisme du futur I dicte que ce temps situe le procès après le moment de la parole ou après un moment donné dans le co(n)texte (dans les deux usages, à savoir indicatif et relatif). Il convient de mentionner ici qu’en serbe le phénomène de la concordance des temps n’existe pas, i.e.on ne peut pas marquer l’opposition : futur par rapport à S - futur par rapport à un moment différent de S. On peut remarquer que le futur I est neutre à l’égard de son instruction aspectuelle
(présentation du procès cursivement ou globalement selon l’instruction aspectuelle des verbes –
imperfectif ou perfectif).
33Les deux emplois représentent l’usage indicatif du présent. Dans ses usages relatifs, le présent peut situer un
L’aoriste marque un procès situé dans le passé, mais aussi il peut désigner un procès situé juste
avant le moment de la parole, ce que l’on infère de son sémantisme S=R (signifiant qu’un procès
est observé toujours à partir du moment de la parole) :
(120) Sad ode kući.
maintenant partit à maison
Il vient de partir chez lui.
Nous avons déjà mentionné que ce temps est très rarement employé dans la langue parlée et est substitué par le présent perfectif. Cependant, ce n’est pas tout à fait vrai, parce que le présent perfectif ne s’utilise pas justement dans les cas où il faut marquer un procès lié au moment de la
parole (ce qui est empêché par son sémantisme S≠R).
S’agissant de l’instruction aspectuelle, l’aoriste se forme à l’aide des verbes perfectifs et présente le procès globalement.
Comme nous avons déjà expliqué, l’imparfait est un temps presque disparu de la langue parlée
mais aussi, dans une large mesure, de la langue écrite. C’est pourquoi les auteurs déjà
mentionnés n’accordent pas une attention particulière à ce temps. Cependant, nous avons décidé
de le présenter en vue de sa comparaison avec l’imparfait français. L’imparfait situe une action
dans le passé, qui se déroulait parallèlement avec une autre action marquée par un autre temps du passé (parfait, aoriste, présent narratif). C’est un temps qui entre en combinaison uniquement avec les verbes imperfectifs et il présente toujours les procès dans leur cours.
Temps composés Sémantisme des temps composés selon
Reichenbach
Instruction temporelle
(relation entre R et S) Instruction aspectuelle (relation entre R et E) → 1. parfait E – R, S et E, R – S présent (R = S et R – S) neutre (R ك E) → 2. futur II S – R, E futur (S – R) neutre (R ك E) → 3. plus-que-parfait E – R – S passé (R – S) globale (R – E) Traditionnellement, le parfait situe un procès antérieurement au moment de la parole (son emploi