• Aucun résultat trouvé

D. F508del-CFTR et la réponse UPR

III. Le système de contrôle qualité du RE comme cible thérapeutique

Le mécanisme ERQC joue un rôle important dans la surveillance du repliement des protéines et leur trafic soit vers la voie de sécrétion ou de dégradation. Cependant, certaines protéines, même si elles n’acquièrent pas leur conformation native, conservent leur activité physiologique si elles gagnent leur destination finale. La destruction « inutile » de ces protéines est parfois à l’origine de certaines maladies, appelées « maladies conformationnelles », car résultent d’une conformation anormale des protéines. Ces pathologies peuvent être réparties en deux groupes distincts (Meusser et al., 2005) :

 Le premier groupe correspond aux maladies liées à une perte de fonction des acteurs de la voie de dégradation ERAD suite à des mutations. Les protéines mutées ou mal repliées ne sont pas correctement dégradées, elles s’accumulent dans le RE et forment des agrégats qui peuvent être toxiques pour la cellule. On retrouve dans ce groupe la maladie de Parkinson, causée par une mutation dans la Parkine, une ubiquitine ligase impliquée dans la dégradation du récepteur Pael-R. Ce dernier s’accumule dans sa forme mal repliée et forme des agrégats toxiques pour la cellule (Kahle and Haass, 2004).  Le second groupe de pathologies est causées par une dégradation prématurée des

protéines mal repliées dans le RE, suite à des mutations gain de fonction des acteurs d’ERAD, ou bien, des mutations dans les substrats, causant leur mauvais repliement. Les protéines, retenues dans le RE puis envoyées vers la dégradation sont alors incapables de remplir leur fonction, affectant ainsi l’activité biologique normale de la cellule. Dans ce groupe on retrouve la mucoviscidose causée par les mutations de CFTR de la classe II (cf. chapitre II), et une des sarcoglycanopathies, celle causée par la mutation la plus fréquente chez les patients, R77C. Les sarcoglycanopathies sont des pathologies génétiques à transmission autosomique récessive. Elles font partie de la famille des dystrophies de ceintures et sont causées par des mutations d’un des gènes codant un sarcoglycan (Hack et al., 2000).

65 Dans le but de développer des stratégies thérapeutiques pour ces maladies « conformationnelles », de nombreuses études visant à perturber le système ERQC ont été menées. En effet, l’augmentation de l’activité de la voie ERAF pourrait favoriser le repliement des protéines mal repliées/mutées et prévenir leur dégradation inutile par la voie ERAD. De la même manière, l’augmentation de l’activité d’ERAD pourrait réduire la sécrétion des protéines déstabilisées et susceptibles de former des agrégats liés aux pathologies dégénératives (Figure 26).

Figure 26 : Adaptation de la capacité des voies ERAF et ERAD pour corriger les défauts impliqués dans les pathologies conformationnelles.

(Modifié d'après Ryno et al., 2013)

Dans le cas d’un ciblage d’ERQC, les chaperonnes Hsp, jouant un rôle crucial dans la rétention de F508del-CFTR dans le RE. Il a été démontré que la réduction de Hsc70 et l’induction simultanée de l’expression de Hsp70 par le 4-phénylbutyrate de sodium (4-PBA, un dérivé non toxique du sodium butyrate) restaure F508del-CFTR à la membrane cellulaire sous sa forme mature et fonctionnelle (Rubenstein and Zeitlin, 2000; Choo-Kang and Zeitlin, 2001, 2001; Meacham et al., 2001b; Zhang et al., 2001; Singh et al., 2006). En effet, l’interaction avec Hsc70 est considérée comme une étape clé pour cibler un certain nombre de protéines pour la dégradation protéasomale. Par conséquent, le 4- PBA corrigerait l’adressage défectueux de

66 F508del-CFTR en inhibant sa reconnaissance par la voie de dégradation. Cette molécule est un des premiers correcteurs à avoir été testé dans un essai clinique pour les patients homozygotes pour la mutation F508del. Cependant, malgré une amélioration légère de l’activité du CFTR au niveau de l’épithélium nasal, le 4-PBA n’a pas réduit la concentration en ions chlorure de la sueur (Rubenstein and Zeitlin, 1998). Le 4-PBA a aussi été testé avec succès sur d’autres protéines, comme par exemple le récepteur de LDL. Il a été observé en effet, que cette molécule restaure l’expression membranaire du récepteurs LDL mal conformé, séquestré dans le RE en ciblant le manteaux COPII (Ma et al., 2017).

Une restauration de l’expression membranaire de F508del-CFTR a été observée dans des cellules traitées avec la matrine ou l’apoptazole, deux autres inhibiteur de Hsc70. La matrine régule négativement l’expression de Hsc70 entrainant ainsi une diminution de la dégradation de F508del-CFTR (Basile et al., 2012). L’apoptazole quant à elle, semble perturber l’activité ATPase de Hsc70 et en conséquence, diminue l’ubiquitinylation de F508del-CFTR en bloquant l’interaction de Hsc70 avec sa co-chaperonne, l’ubiquitine ligase CHIP (Cho et al., 2011). Grove et ses collaborateurs ont démontré que le ciblage d’une autre co-chaperonne de Hsp70, DNAJB12, entraîne une augmentation significative de l’efficacité de repliement de CFTR et permet la restauration d’une forme mature de F508del-CFTR. La surexpression de cette co-chaperonne augmente l’association de CFTR avec Hsc70 et l’ubiquitine ligase RMA1 (Grove et al., 2011).

D’autre part, il a été démontré que la sous expression de Aha1, la co-chaperonne de Hsp90 restaure l’adressage de F508del-CFTR ainsi que sa fonction de canal chlorure à la membrane cellulaire ; en revanche sa surexpression diminue sa stabilité (Wang et al., 2006a; Koulov et al., 2010). De plus, une inhibition pharmacologique spécifique de Hsp90 par la Geldanamycine, un antibiotique de la famille des ansamycines, perturbe son interaction avec CFTR. Cependant son effet sur l’adressage de F508del-CFTR est controversé. En effet, la Geldanamycine accélère le renouvellement du CFTR en augmentant sa dégradation dans des cellules BHK et CHO (Chinese Hamster Ovary) surexprexprimant stablement la protéine CFTR wt ou F508del (Loo et al., 1998), Toutefois, Fuller et Cuthbert ont constaté sur des lysats de réticulocytes de lapin que ce composé interfère avec la dégradation de F508del-CFTR en perturbant son ubiquitinylation (Fuller and Cuthbert, 2000). Ainsi, d’autres investigations du rôle de Hsp90 dans la restauration de F508del-CFTR à la membrane cellulaire se révèlent nécessaires. A noter, la Geldanamycine a donné des résultats encourageants sur ErbB2, un récepteur tyrosine kinase qui est surexprimé dans 20 à 30% des cancers du sein (Slamon et al., 1987; Barr et al., 2008; Cortese et al., 2013).

67 L’inhibition des deux chaperonnes Hsp70 et Hsp90 semble donc rétablir l’expression membranaire de F508del-CFTR. Il a été observé que la désoxyspergualine, un composé connu pour perturber l’interaction de CFTR avec Hsc70 et Hsp90, restaure une activité canal chlorure dans des cellules homozygotes pour la mutation F508del (Nadler et al., 1992; Nadeau et al., 1994; Jiang et al., 1998; Norez et al., 2008).

Par ailleurs, il a été démontré qu’une protéine calcium-dépendante, la calumenin, agit comme un modulateur de pompe SERCA (sarco/ER Ca2+-ATPase) dans les cellules épithéliales bronchiques. La diminution de son taux d’expression restaure l’activité de CFTR à la membrane cellulaire dans des cellules CF sans modifier la teneur en Ca2+ dans le RE (Philippe et al., 2017). Cette étude suggère que la calumenin agit comme une chaperonne pour le CFTR régulant son trafic et sa maturation indépendamment du contenu du calcium réticulaire.

D’autres études se sont intéressées aux complexes de rétrotranslocation et leurs partenaires impliquées dans la dégradation protéasomale des protéines mal repliées. Par exemple, dans le cas des sarcoglycanopathies, l’inhibition pharmacologique de l’activité de HRD1, une E3 ubiquitine ligase, restaure l’expression membranaire du mutant V247M à la fois dans un modèle cellulaire hétérologue et dans des myotubes de patients portant les mutations L31P/V247M (Bianchini et al., 2014). Cette restauration a aussi été observée pour plusieurs mutants suite à l’inhibition du protéasome (Gastaldello et al., 2008). Ainsi, dans le cas de la mucoviscidose, la surexpression de HspBP1 (inhibiteur de l’activité de CHIP et facteur d’échange de nucléotides qui favorise la libération de substrats de Hsp70) favorise la maturation de CFTR (Alberti et al., 2004) ; au contraire, sa surexpression retient le CFTR dans le RE et facilite son ubiquitinylation et sa dégradation (Meacham et al., 2001a). De même, l’inhibition de l’activité ubiquitine ligase de CHIP par BAG-2 (BCL2 Associated Athanogene 2), co-chaperonne de Hsp70 et qui inhibe la coopération CHIP-E2 favorise aussi la maturation de CFTR (Arndt et al., 2005). De la même manière, il a été suggéré que Bag-1 joue un double rôle sur la stabilisation de F508del-CFTR : d’une part en contribuant à sa libération de la machinerie Hsp70 (Meacham et al., 2001a), et d’autre part, en empêchant sa liaison avec l’ubiquitine en rentrant en compétition avec cette dernière (Mendes et al., 2012). D’autres études sur des cellules humaines ont montré que le siRNA de la protéine Derlin-1 augmente la stabilité de F508del-CFTR, tandis que sa surexpression conduit à la rétention de CFTR dans le RE (Sun et al., 2006; Younger et al., 2006).

68 La calnexine a elle aussi fait l’objet d’études dans la voie de biosynthèse de F508del-CFTR. L’équipe de Kai a démontré que la surexpression de la calnexine augmente à la fois la stabilité de la bande immature et la bande mature du WT-CFTR, suggérant un rôle protecteur vis-à-vis de la dégradation (Okiyoneda et al., 2004). Cette surexpression augmente la rétention de F508del-CFTR et diminue partiellement l’ERAD. Cependant, la même équipe a démontré, mais cette fois-ci dans un système KO, que l’extinction de la calnexin n’affecte pas la rétention de F508del-CFTR dans les cellules fibroblastes embryoniques de souris calnexin-KO, certainement dû à la mise en place par la cellule d’un nouveau contrôle de qualité afin de compenser l’extinction totale de sa calnexine. Ainsi, une inhibition pharmacologique partielle de cette lectine semble être un bon compromis pour corriger F508del-CFTR. Dans notre laboratoire, des études ont montré que l’inhibition de l’entrée de F508del-CFTR dans le cycle calnexine par un iminosucre inhibiteur de l’α-1,2-glucosidase, le Miglustat (NB-DNJ pour N- butyldeoxynojirimicyn) restaure partiellement la protéine à la membrane cellulaire dans des cellules épithéliales mais aussi dans du tissu iléale de souris CF, homozygotes pour la mutation F508del (Norez et al., 2006a; Noel et al., 2008; Norez et al., 2009). Ces résultats ont été confirmés par une autre étude montrant que le miglustat appliqué directement sur l’épithélium respiratoire de souris homozygotes pour la mutation F508del restaure l’activité canal chlorure dépendante de CFTR (Lubamba et al., 2009). Au regard des résultats prometteurs obtenus avec ce composé, le Miglustat a été testé lors d’essai clinique de phase 2 afin d’évaluer ses effets sur la différence du potentiel nasal chez des patients adultes atteints de mucoviscidose et homozygotes pour la mutation F508del (http://www.clinicaltrials.gov). A noter, ce composé est déjà indiqué pour les patients atteints de maladie de Gaucher de type I sous le nom de Zavesca® (Cox et al., 2000; Elstein et al., 2004). Une autre étude réalisée par notre laboratoire a également démontré que la diminution de l’interaction de F508del-CFTR avec la calnexine par des inhibiteurs de la pompe Ca2+-ATPase du RE rétabli l’expression membranaire de F508del-CFTR (Norez et al., 2006b). Ces résultats sont en adéquation avec ceux obtenus précédemment démontrant que le traitement avec la thapsigargine ou curcumin, inhibiteurs de SERCA restaure F508del-CFTR fonctionnel à la membrane des cellules épithéliales et chez les souris CF (Egan et al., 2002, 2004; Berger et al., 2005). Cela a ouvert la porte à l’identification d’autres modulateurs de l’homéostasie protéique comme par exemple la roscovitine (pour revue Meijer et al., 2016), qui est en essais cliniques de phase 2 dans le traitement des cancers, de la polyarthrite rhumatoïde et de la maladie de Cushing. Démontrant de multiples propriétés thérapeutiques sur les cellules CF, cette molécule est en essai clinique de phase 2 afin d’évaluer sa tolérance et son efficacité chez les patients atteints de mucoviscidose, homozygotes pour la

69 mutation F508del et présentant une infection chronique par Pseudomonas aeruginosa (http://www.clinicaltrials.gov). En effet, la roscovitine est capable d’améliorer les propriétés bactéricides des macrophages alvéolaires des patients CF, en abaissant le pH dans les phagolysosomes, qui présentent un pH anormalement élevé dans les macrophages CF (Di et al., 2006; Riazanski et al., 2015). De plus, la roscovitine a un effet anti-inflammatoire probablement par sa capacité à réduire la dégranulation des neutrophiles, de favoriser l’apoptose et la différenciation des cellules auxiliaires CD4+ T helper en anti-inflammatoires (Rossi et al., 2006; Koedel et al., 2009; Meijer et al., 2016). Enfin, la roscovitine est capable de rétablir potentiellement l’expression membranaire de F508del-CFTR dans des cellules CF (Norez et al., 2014). Bien qu’inhibiteur de protéine kinase, l’effet correcteur de la roscovitine sur F508del-CFTR est indépendant de ses effets sur les protéines kinases. En effet, il a été démontré que la roscovitine d’une part empêche l’interaction de F508del-CFTR avec la calnexine en diminuant la concentration du calcium réticulaire, et d’autre part, inhibe directement l’activité du protéasome via un mécanisme d’action indépendant du calcium (Norez et al., 2014). Cette molécule semble corriger l’adressage de F508del-CFTR en modulant à la fois l’ERQC et l’ERAD.

D’autres études ont révélé que l’inhibition par la Kifunensine d’autres enzymes cette fois-ci impliquées dans la voie ERAD, α-mannosidases I, corrige l’adressage défectueux de plusieurs mutants sarcoglycans dans la pathologie des sarcoglycanopathies (Bartoli et al., 2008; Soheili et al., 2012). Il serait donc intéressant de tester cette stratégie thérapeutique sur l’adressage de la protéine F508del-CFTR dans des cellules mucoviscidosiques.

70

Contexte, problématiques et objectifs

Au cours de ces dernières années, divers correcteurs de CFTR ont été identifiés. Certains d’entres eux peuvent cibler une ou plusieurs des nombreuses protéines qui orchestrent et contrôlent son repliement, son adressage et sa stabilité au niveau de la membrane cellulaire (cf. chapitre III). D’autres correcteurs peuvent interagir avec le CFTR lui-même (pour revue : Cai et al., 2011; Farinha and Matos, 2016; Schmidt et al., 2016; Fajac and De Boeck, 2017; Zegarra-Moran and Galietta, 2017), comme par exemple le correcteur pharmacologique VX-809 ou lumacaftor, qui a fait l’objet d’études cliniques. Cette molécule semble agir tôt dans la biogenèse de CFTR en interagissant directement avec MSD1 et éviterait ainsi les défauts de repliement en améliorant les interactions entre les domaines NBD1, MSD1 et MSD2 (Van Goor et al., 2011; He et al., 2013; Loo et al., 2013; Ren et al., 2013; Okiyoneda et al., 2013; Eckford et al., 2014; Hudson et al., 2017). Les résultats des essais cliniques de phase II ont révélé que ce correcteur diminue la concentration d’ions Cl- dans la sueur chez les patients homozygotes pour la mutation F508del mais n’améliore cependant pas les signes cliniques (Clancy et al., 2012). Cependant, sa combinaison avec le potentiateur VX-770 (Ivacaftor) connu pour améliorer l’ouverture du canal muté de classe III, G551D-CFTR a donné de meilleurs résultats cliniques (Boyle et al., 2014; Ratjen et al., 2017; Rowe et al., 2017; Schneider et al., 2017). Cette combinaison appelée Orkambi a été approuvée en 2015 pour les patients homozygotes pour la mutation F508del aux Etats Unis et en France. Une autre combinaison d’Ivacaftor avec un correcteur de seconde génération, le VX-661 (Tezacaftor) est également en essai clinique. L’efficacité clinique de cette combinaison est légèrement améliorée par rapport au VX-809 chez des patients âgés d’au moins 12 ans, homozygotes pour la mutation F508del (Pilewski et al., 2015). Cette combinaison VX-661/Ivacaftor a été à son tour combinée avec VX-152 ou VX-440, deux autres correcteurs de seconde génération. In vitro, l’activité canal chlorure obtenu par ces triples combinaison est d’environ trois fois plus élevée que celle obtenue par la combinaison lumacaftor/ivacaftor dans des cellules HBE. Ces triples combinaison sont en cours d’evaluation chez les patients homozygotes pour la mutation F508del et les patients avec une mutation F508del associé à une seconde mutation qui se traduit par une fonction CFTR minimale (Schmidt et al., 2016).

Bien que les résultats obtenus avec ces correcteurs soient encouragent, la recherche de correcteurs pour la mutation F508del-CFTR reste toujours primordiale.

71 Des études précédemment menées au sein de notre équipe ont révélé que l’inhibition des α-1,2-glucosidases du RE par le Miglustat ou le maintien d’une faible concentration en calcium par des inhibiteurs des pompes SERCA, restaure la protéine F508del-CFTR à la membrane plasmique (Norez et al., 2006b, 2006a) (Figure 27). Ces études ont également montré une perturbation de l’interaction de la protéine F508del-CFTR avec la chaperonne calnexine en concomitance avec cette restauration, amenant à penser que l’inhibition de l’entrée du F508del-CFTR dans le cycle calnexine empêcherait son envoi vers la voie de dégradation ERAD au profit de la membrane cellulaire.

Figure 27 : Représentation schématique des principales étapes de la biosynthèse de F508del-CFTR et les sites d’action du Miglustat et des inhibiteurs de pompes Serca.

Sur la base de ces résultats, nous avons émis l’hypothèse dans ce travail de thèse que l’inhibition de l’interaction de F508del-CFTR avec d’autres partenaires d’ERQC, et notamment ceux jouant un rôle majeur dans la voie de dégradation ERAD, pourraient aussi rétablir l’expression membranaire de F508del-CFTR (Figure 28). Cette étude pourrait contribuer d’une part à une meilleure compréhension du mécanisme ERQC responsable de la rétention réticulaire de

72 F508del-CFTR, et d’autre part, à apporter de nouvelles pistes thérapeutiques pour la recherche pharmacologique dans la mucoviscidose mais aussi pour d’autres maladies humaines associées à un trafic défectueux des glycoprotéines mal repliées et partiellement fonctionnelles.

Figure 28 : Objectifs de notre travail.

Le premier objectif de ce travail de thèse a donc été d’étudier la potentielle implication de la famille des protéines EDEMs dans la rétention réticulaire de F508del-CFTR par une stratégie de siRNA. Ces protéines jouent un rôle majeur dans la voie de dégradation ERAD et leur implication dans la rétention de F508del-CFTR dans les cellules de mammifères n’a à ce jour pas encore été démontré. Notre attention s’est ensuite focalisée sur l’identification d’une stratégie pharmacologique qui permettrait de cibler cette famille de protéines. Tout comme les autres membres de la famille GH47, les trois protéines EDEMs ont un domaine d’homologie de mannosidase (Olivari and Molinari, 2007a; Ninagawa et al., 2014). Le 1-Deoxymannojirimycin (DMJ) étant un inhibiteur non compétitif de l’activité mannosidase des membres de la famille GH47, il a donc été choisi pour notre étude. Une collaboration avec l’équipe du Pr. Philippe Compain de l’Université de Strasbourg a été mise en place afin de

73 synthétiser à partir du DMJ des composés multivalents et de tester leur effet correcteur. En effet, lors d’une collaboration antérieure, les deux équipes avaient démontré qu’il était possible d’améliorer l’efficacité du DNJ (un dérivé du miglustat) par une approche de « click-chemistry », une stratégie qui permet de coupler des composés en une seule molécule (Compain et al., 2013). Il a ainsi été démontré que les dérivés multivalents du DNJ corrigeaient l’activité de F508del-CFTR de manière plus efficace que le DNJ. Le composé trivalent-DNJ, qui correspond à 3 molécules de DNJ associées par un bras chimique, est environ 1000 fois plus efficace que son monovalent-DNJ, correspondant au DNJ associé au bras chimique (Compain et al., 2013).

Toujours dans l’optique d’identifier de nouvelles cibles thérapeutiques, nous nous sommes intéressés par la suite à l’α1,2-mannosidase du RE (ERManI), décrite comme le « minuteur » qui déclenche la première étape de la dégradation ERAD des glycoprotéines mal repliées (Araki and Nagata, 2011; Zhou et al., 2015). En effet, on sait que son inhibition (pharmacologique ou par siRNA) prévient la dégradation des substrats luminaux AAT (α1-antitrypsin) et NHK (null Hong Kong) (Hosokawa et al., 2003; Wu et al., 2003; Avezov et al., 2008; Pan et al., 2013). De même, un traitement avec la Kifunensine, un inhibiteur spécifique de l’α1,2-mannosidase restaure l’expression membranaire de l’α-sarcoglycane R77C in vitro et in vivo (Bartoli et al., 2008; Soheili et al., 2012). Ainsi, notre deuxième objectif dans cette étude a été de déterminer si ERManI était impliquée ou non dans la rétention réticulaire de la protéine mutée F508del-CFTR.

Enfin, lors d’une dernière étude, nous avons tenté de comprendre pourquoi la multivalence augmentait l’efficacité de nos correcteurs. Ce travail toujours en cours (présentée en annexe) a nécessité de générer des composés fluorescents par ajout d’une sonde fluorescente, le BODIPY, abréviation de bore-dipyrométhene (Lepage et al., 2015).

74

Matériels et méthodes