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Chapitre III : L’interface collecteur de courant/matière active :

II. Conditions expérimentales

II.1. Synthèse de nanofibres de carbone à la surface des collecteurs de courant

Tous les collecteurs de courant utilisés sont en aluminium dont la surface a été modifiée par le traitement mis au point précédemment et décrit dans le chapitre 2 [43, 92]. La croissance des nanofibres de carbone nécessite le dépôt d’un catalyseur, qui est ici le cobalt. Le cobalt est un catalyseur couramment utilisé au laboratoire pour la synthèse des nanotubes [124, 125]. Il est déposé à la surface des collecteurs de courant par trempage-retrait dans une solution éthanolique de nitrate de cobalt. Le dépôt de nitrate de cobalt est ensuite oxydé sous air à une température de 120°C, sauf indication contraire.

La synthèse des nanofibres est effectuée par dépôt chimique catalytique en phase vapeur (CCVD pour Catalytic Chemical Vapor Deposition). La CCVD pour la croissance de nanotubes est habituellement effectuée à des températures élevées, typiquement entre 700°C et 1000°C avec des gaz tels que l’acétylène, le méthane, le monoxyde de carbone. Or la température de fusion de l’aluminium est de 660°C. L’utilisation d’un gaz hydrocarboné dont la température de décomposition est plus faible est nécessaire. Nous avons donc travaillé avec de l’éthylène à une température de 630°C en obtenant la croissance de nanofibres de carbone. Le gaz utilisé pour la CCVD est un mélange d’éthylène et d’hydrogène (20:80) dont le débit total est de 15 L.h-1. L’hydrogène permet la réduction de l’oxyde de cobalt en cobalt métallique qui est le catalyseur pour la croissance des nanofibres. De plus, il régule la vitesse

l’éthylène met en jeu de nombreux intermédiaires réactionnels et n’est pas encore connu. Cependant, le bilan de la réaction d’équilibre entre l’éthylène et l’hydrogène est le suivant :

C2H4 + H2 2C + 3H2

L’éthylène se décompose à la surface du catalyseur métallique sur lequel se forme une calotte de carbone. Le processus continue au niveau de la particule métallique ce qui entraîne la formation d’un nanotube de carbone. Selon le nombre de calottes à la surface du catalyseur on obtient des nanotubes monoparois ou multiparois (figure III.1 b et d). Lorsque le dépôt de carbone est rapide, le catalyseur peut se retrouver totalement encapsulé d’une pellicule de carbone et donc désactivé (figure III.1 f)

Figure III. 1 : Mécanisme de croissance des nanotubes de carbone.

La montée en température se fait à la vitesse de 2°C.min-1, la descente à 5°C.min-1. La durée du palier à 630°C a été fixée à 15 minutes, au lieu des 30 minutes utilisées dans les travaux précédents. Les nanofibres obtenues en 15 minutes sont plus courtes et moins enchevêtrées que lorsque le palier est de 30 minutes (figure III.2). Or des fibres plus courtes sont un avantage pour la croissance de nanofibres alignées.

a) b)

Figure III. 2. : Photos MEB-FEG des nanofibres de carbone à la surface des collecteurs de

courant par CCVD pour un palier d’une durée de a) 30 minutes et b) 15 minutes à 630°C. Pour chaque condition expérimentale vérifiée, la synthèse des nanofibres a été effectuée par CCVD sur deux collecteurs de courant en même temps afin d’effectuer les tests électrochimiques. Les échantillons qui ont permis de faire des images en microscopie électronique à balayage à effet de champ (MEB-FEG) ont été traités lors d’une seconde synthèse par CCVD dans les mêmes conditions. Toutes les images MEB-FEG ont été obtenues avec un microscope JEOL JSM 6700-F au service TEMSCAN de l’université Paul Sabatier de Toulouse.

II.2.Tests électrochimiques

Tous les collecteurs de courant ont été testés par cyclage galvanostatique à 50 mA.cm-2. Des cellules de test de 4 cm2 ont été montées d’après la description faite dans le chapitre II (figure II.1). Le charbon actif utilisé est le Picactif de la compagnie PICA. La composition des films de matière active est de 95 % de charbon actif et de 5 % de PTFE. Chaque électrode est composée d’un film de matière active de 15 mg.cm-2 et d’un collecteur de courant dont la surface a été modifiée. Toutes les cellules testées sont symétriques.

La spectroscopie d’impédance électrochimique de 50 KhZ à 100 mHz et le cyclage galvanostatique à 50 mA.cm-2 ont été utilisés afin de caractériser les cellules et tester l’efficacité des traitements effectués sur les collecteurs de courant.

III.

Résultats

Deux stratégies ont été utilisées pour faire croître des nanofibres alignées. Une première a consisté à utiliser une membrane en alumine poreuse comme « template » ; une deuxième à faire varier la composition initiale du catalyseur.

III.1. Méthode « template » : utilisation d’une membrane poreuse

L’utilisation d’une membrane poreuse en alumine est un moyen couramment utilisé pour la synthèse de nanotubes alignés [116, 117, 127, 128]. Cependant, soit la croissance des nanotubes de carbone se fait sur un substrat type silicium, soit directement à l’intérieur de la membrane après dépôt d’un catalyseur [116, 129]. De plus, la membrane en alumine isolante est rarement détruite pour les applications visées. Or, notre objectif est de diminuer la résistance des supercondensateurs ; nous devons donc détruire cette membrane en alumine sans détruire ni les nanotubes de carbone ni les collecteurs de courant en aluminium.

La membrane utilisée est une membrane commerciale : Anodisc de chez Whatman dont la taille des pores est de 200 nm et de 60 µm d’épaisseur (figure III.3). Le collecteur de courant est imprégné de catalyseur. La membrane sert de guide pour la croissance des nanofibres afin qu’elles soient alignées perpendiculairement au collecteur de courant. Ces nanofibres de carbone doivent, en effet, être en contact direct avec le collecteur de courant pour minimiser la résistance de contact.

a) b) c)

a) b) c)

Figure III. 3 : Photos MEB-FEG de la membrane nanoporeuse Anodisc vue de dessus (a) et

vue en tranche (b et c).

La première difficulté a été de mettre en contact intime la membrane et le collecteur de courant sans briser la membrane et en ne bouchant pas la porosité pour permettre le passage de l’éthylène. Si il existe un espace entre le collecteur de courant et la membrane, les nanofibres risquent de croître dans cet espace et non dans les pores de la membrane. Une

grille d’aluminium déployé est placée sur la membrane poreuse afin de la plaquer sur le collecteur de courant. Le déployé ne bloque pas le passage de l’éthylène. Le collecteur de courant étant souple, une plaque d’aluminium plus rigide a été placée sous ce dernier afin d’augmenter la rigidité et d’éviter le bris de la membrane ou une déformation trop importante du collecteur de courant pendant la synthèse. Le tout est maintenu par des pinces en inox comme le montre la figure III.4.

Déployé

Membrane poreuse en alumin e

Collecteur de co urant en aluminiu m traité Plaque en aluminium rigide

Pince en inox Déployé

Membrane poreuse en alumin e

Collecteur de co urant en aluminiu m traité Plaque en aluminium rigide

Pince en inox

Figure III. 4 : Schéma du montage utilisé pour la croissance de nanofibres par voie

« template ».

Une deuxième difficulté a été de retirer la membrane en alumine sans abîmer ni le collecteur de courant ni les nanofibres synthétisées. Deux méthodes ont été employées : soit la membrane est enlevée manuellement, soit la membrane est dissoute chimiquement. Enlever la membrane manuellement entraîne l’arrachement des nanofibres synthétisées à la surface du collecteur de courant. La dissolution chimique de la membrane doit se faire dans un mélange d’acide phosphorique (0,36 M) et d’acide chromique (0,06 M) à 40°C pendant 5 à 6 heures. Ce mélange d’acides est, en effet, le seul qui permette la dissolution de l’alumine sans détruire le collecteur de courant en aluminium.

Figure III. 5 : Photo MEB-FEG de la surface du collecteur de courant après synthèse de nanofibres de carbone et destruction de la membrane par voie chimique.

La figure III.5 montre la surface du collecteur de courant après la destruction de la membrane poreuse en alumine par dissolution chimique. La surface du collecteur de courant n’est pas homogène. On constate qu’il y a bien eu croissance de nanofibres. Elles sont peu nombreuses et non alignées, certaines semblent avoir été arrachées de la surface du collecteur de courant. On observe des faisceaux de fibres qui ont un diamètre inférieur (< 100 nm) à la taille des pores de la membrane. Le diamètre des fibres est donc dicté par le diamètre des particules de cobalt. Les faisceaux, eux, ont un diamètre voisin (~ 180 nm) du diamètre de ces pores. La membrane a donc bien guidé la croissance des nanofibres de carbone.

Des tests en cyclage galvanostatique ont été effectués afin de vérifier les performances de ces collecteurs de courant. La capacité obtenue pour le charbon actif Picactif est d’environ 100 F.g-1, l’utilisation de collecteurs de courant différents n’affecte pas la capacité de la matière active. La figure III.6 montre la variation de la résistance de la cellule sur 10 000 cycles.

0 0,5 1 1,5 2 2,5 0 2000 4000 6000 8000 1 104 R in te rn e ( ΩΩΩΩ .c m 2 ) Nombre de cycles R 0 = 1.67 ΩΩΩΩ.cm 2 + 15%

Figure III. 6 : Evolution de la résistance sur 10 000 cycles d’une cellule dont les collecteurs

de courant ont été traités par voie « template ».

La résistance obtenue est supérieure à 1,5 Ω.cm2. Ces valeurs sont plus de trois fois supérieures aux résistances obtenues par le seul dépôt de particules de noir d’acétylène. Plusieurs raisons peuvent expliquer cette augmentation de la résistance. La surface de ces collecteurs de courant n’est pas homogène, il peut donc y avoir une diminution du contact entre le collecteur de courant et la matière active. Trop peu de nanofibres ont été synthétisées à la surface des collecteurs de courant ou trop de fibres ont été arrachées lors du démontage du dispositif utilisé lors de la synthèse pour permettre une conductivité importante. Et enfin, la destruction de la membrane par voie chimique entraîne une dissolution partielle du collecteur de courant. Cette dissolution partielle par les deux acides utilisés entraîne une perte de contact entre le collecteur de courant et les fibres de carbone synthétisées et donc une détérioration de l’interface collecteur de courant/matière active. L’utilisation d’acides pour la dissolution de la membrane peut également contribuer, malgré un rinçage important, à la présence d’impuretés dans l’électrolyte, comme le montre la variation de la résistance de la cellule qui augmente de plus de 15 % au cours de 10 000 cycles alors qu’une augmentation de 2 à 3 % seulement est constatée pour des cellules dont les collecteurs de courant sont traités par dépôt de noir d’acétylène. Tous ces facteurs contribuent à l’obtention d’une résistance importante des cellules de supercondensateur.

Au vu de ces résultats, l’utilisation d’une membrane poreuse pour la croissance des nanofibres a été abandonnée. Malgré la synthèse de nanofibres regroupées en faisceaux, l’élimination de la membrane poreuse pose un réel problème : soit on arrache les fibres synthétisées, soit la dissolution chimique entraîne une modification de la stabilité des collecteurs de courant. Les performances des collecteurs de courant obtenus par voie « template » sont donc très faibles en terme de résistance. La bibliographie effectuée a montré que certains auteurs ont réussi à aligner des nanotubes de carbone en contrôlant le dépôt du catalyseur [119]. Nous avons donc abandonné l’utilisation d’une membrane poreuse et étudié l’influence de la variation de la composition et des conditions de dépôt du catalyseur sur la croissance des nanofibres.