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CHAPITRE IV : RESULTATS ET ANALYSE

Section 4. La satisfaction est-elle une variable médiatrice partielle ou totale des effets des

1. Synthèse et discussion des résultats

Le but de cette recherche a été de comprendre l’impact des fusions-acquisitions sur la satisfaction des clients et de comprendre si la satisfaction des clients permettrait de mieux expliquer l’impact des fusions et acquisitions sur la performance de l’entreprise. Pour ce faire, nous nous sommes posé trois questions :

a) Les fusions-acquittions influencent-elles le niveau de satisfaction des clients ?

b) L’influence qu’exerce une F&A sur la performance de l’entreprise s’explique-t-elle, en partie ou totalement, par leurs effets sur la satisfaction des clients ? Autrement dit, existe-t-il un effet médiateur de la satisfaction des clients ?

c) Ces relations évoquées à la premièreet à la deuxième question varient-elles selon les secteurs d’activité et les caractéristiques des entreprises impliquées ?

Nous avons divisé ce travail en deux grandes parties essentielles. Le travail conceptuel nous a conduits à formuler huit hypothèses dont la synthèse est présentée dans le Tableau 27. Pour tester nos hypothèses, nous avons mobilisé plusieurs sources de données. En ce qui concerne le domaine du marketing, nous avons utilisé les scores de satisfaction des clients calculés et publiés par le projet ACSI. En finance, les bases de données financières et/ou boursières (Thomson One Banker, Datastream, Fama-French data library) ont été utilisées pour : (a) télécharger les données relatives aux opérations de fusions-acquisitions et, (b) estimer la valeur de l’entreprise à travers la rentabilité de ses actifs (ROI) et rendement de son l’action (Stock return).

Notre période d’étude couvre 21 ans, c’est-à-dire, du premier janvier 1994 jusqu’au 31 décembre 2014. Les 133 entreprises sélectionnées sont regroupées dans 28 secteurs d’activité différents. Nous avons eu recours aux modèles multi-niveaux lors de l’analyse car ils sont les mieux adaptés à ce genre de données complexes, emboîtées et longitudinales.

L’hypothèse 1 propose que l’impact d’une fusion/acquisition sur le niveau de satisfaction des clients augmente avec le niveau d’expérience accumulée par l’entreprise acquéreuse. Cette hypothèse a été validée par nos résultats. Ainsi, il semble que ce ne soit pas en soi le fait d’avoir fait ou non une fusion et acquisition qui détermine l’évolution du niveau

de la satisfaction des clients. Ce serait plutôt l’expérience accumulée qui compterait. Pourquoi ? Nous pensons que cela s’explique par le fait que l’expérience accumulée en matière de F&A apporte une certaine compétence dans l’intégration des structures nouvellement acquises. L’expérience dans le domaine des F&A permet à l’entreprise acquéreuse d’anticiper des problèmes et de gérer un processus de fusion/acquisition avec beaucoup plus d’efficacité.

Rappelons que la clé dans la réalisation des bénéfices d’une F&A est la rapidité et la qualité d’intégration des unités impliquées dans le processus de la F&A. Cela réduit le sentiment d’inquiétude éprouvé par les employés de la cible évitant ainsi leur résistance aux changements (Derouiche Borgi, 2008) et le laps de temps pendant lesquels les employés sont contraints à faire face aux effets destructeurs de l’incertitude et des rumeurs (Angwin, 2004).

L’expérience agit probablement également au niveau du choix des entreprises à acquérir (Haleblian and Finkelstein, 1999). Par conséquent, il est possible que les gains de productivité promis lors de l’annonce de la F&A se réalisent d’avantage pour les entreprises expérimentées que pour celles qui le sont moins. Si tel est le cas, alors on peut proposer que l’expérience en matière de fusions et acquisitions permette de réaliser des gains de productivité qui, en retour, se traduisent par une amélioration de la valeur client (par exemple, en vendant moins cher) et par conséquent le niveau de satisfaction des clients.

L’hypothèse H2 n’est pas validée dans cette recherche. Il semble, du moins dans nos données, que le degré de concentration ne soit pas un modérateur significatif de l’impact des F&A sur la satisfaction des clients. Il se peut que cela soit lié au fait que les entreprises évoluant dans des secteurs concentrés atteignent leur efficacité opérationnelle en réduisant les coûts grâce à une taille plus importante favorisant les économies d’échelle.

L’analyse corrélationnelle entre le degré de concentration du marché et le nombre cumulé d’opérations de F&A (notre mesure de l’expérience) indique une relation négative (- 0,218, p<0,001). Cela qui signifie que les entreprises dans des marchés concentrés recourent moins aux F&A que celles qui évoluent dans des secteurs peu concentrés (où d’ailleurs il existe probablement plus d’entreprises cibles). Par conséquent, il est presque normal que l’amélioration de l’efficience opérationnelle (synergies, productivité) ne passe pas par les F&A, et que nous n’observions pas d’effet modérateur significatif du degré de concentration du

marché. De même, l’hypothèse H4 qui porte sur le rôle modérateur de l’intensité capitalistique n’est pas validée.

L’analyse corrélationnelle montre que l’intensité capitalistique du secteur est négativement liée au nombre d’opérations de F&A (-0,198, p<0,001). C’est peut-être pour cela que l’intensité capitalistique ne constitue pas ici un modérateur significatif de l’impact des F&A. L’autre argument est que ces deux modérateurs se réfèrent à l’efficience opérationnelle pas forcément à l’amélioration de la qualité des offres.

L’hypothèse H3 qui postule que « l’effet d’une F&A sur le niveau de satisfaction des clients sera plus marqué (positif) à mesure que l’intensité en R&D dans le secteur de l’entreprise acquéreuse augmente » est validée. Rappelons que la R&D peut améliorer le niveau de satisfaction des clients en améliorant la qualité des produits/services existants et/ou en améliorant ou en développant de nouveaux procédés de production. L’efficience opérationnelle obtenue grâce à une F&A (création de synergies en matière de R&D) permet ainsi aux entreprises d’atteindre plus rapidement et à moindres coûts les objectifs assignés à leurs projets de R&D. En combinant les ressources et compétences, la F&A permet à l’entreprise acquéreuse d’atteindre plus rapidement et à moindre coût ses objectifs de R&D, d’améliorer les bénéfices- produit et en réduisant possiblement le prix d’achat.

L’hypothèse H5 est validée en ce sens que nous trouvons un lien significatif entre la satisfaction des clients et les mesures de la performance des entreprises. Tout d’abord, H5a est validée parce que la satisfaction des clients influence positivement le rendement des actions. Ce résultat est conforme aux travaux récents qui montrent que la satisfaction est liée aux mesures boursières (Tulip et Bharadwaj, 2010). Nous rapportons également un lien positif entre la satisfaction et la rentabilité des actifs. En cela, nous sommes en conformité avec Anderson et al (1994 ; 1997) qui ont déjà observé des effets positifs de la satisfaction sur la performance comptable.

Enfin, nos résultats confirment bien que la satisfaction des clients constitue un médiateur de l’impact que les F&A ont sur la performance comptable (H6) et sur la performance boursière (H7). Ces résultats sont importants car ils nous indiquent l’un des mécanismes par lesquels les F&A impactent la performance des entreprises. Ces deux résultats signifient également que

pour espérer améliorer la performance de l’entreprise par une F&A, les dirigeants doivent également s’assurer de son effet positif sur la satisfaction des clients.

Tableau 27. Synthèse de test des hypothèses.

Hypothèses Description Décisions

H1 L’impact d’une fusion/acquisition sur le niveau de satisfaction des clients augmente avec le niveau d’expérience accumulée par l’entreprise acquéreuse.

Validée

H2 L’impact d’une fusion/acquisition sur le niveau de satisfaction des clients augmente avec le degré de concentration du secteur de l’entreprise acquéreuse.

Rejetée

H3 L’effet d’une F&A sur le niveau de satisfaction des clients sera plus marqué (positif) à mesure que l’intensité en R&D dans le secteur de l’entreprise acquéreuse augmente.

Validée

H4 L’effet d’une F&A sur le niveau de satisfaction des clients sera plus marqué (positif) à mesure que l’intensité capitalistique du secteur de l’entreprise acquéreuse augmente.

Rejetée

H5a la satisfaction des clients influence positivement la performance financière d’une entreprise mesurée à travers le « stock return » (rendement des actions).

Validée

H5b la satisfaction des clients influence positivement la performance comptable d’une entreprise mesurée à travers la « Return On Assets » (rendement de ses actifs).

Validée

H6 La satisfaction est un médiateur total de l’influence d’une F&A sur la performance comptable de

l’entreprise.

Validée

H7 La satisfaction est un médiateur partiel de l’influence d’une F&A sur la performance financière de

l’entreprise.