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CHAPITRE I : FONDEMENTS CONCEPTUELS DE LA RECHERCHE

Section 5. La performance des fusions-acquisitions

4. Performance boursière

La performance financière d’une F&A est étudiée par les chercheurs en finance d’entreprise. Cette école préconise la mesure de la performance d’une F&A au travers de l’impact d’une F&A sur l’évolution du cours boursier des actions des entreprises impliquées, c’est-à-dire, les acquéreurs ou les cibles. Cette approche se fonde sur la théorie de l’efficience des marchés.

Selon cette théorie, un marché financier est efficient si, et seulement si, compte tenu des informations disponibles, les cours réels représentent, à tout moment, une très bonne estimation des valeurs intrinsèques des actifs coté sur ce marchés (Fama, 1965). Dans cette école, on suppose que le marché anticipe immédiatement les effets d’une F&A dès l’annonce de l’opération et incorpore dans le prix des actions les effets attendus en termes de création de valeur pour l’actionnaire.

Les recherches analysant la performance financière se basent sur la méthode des études d’événements pour étudier les gains et les pertes associées aux fusions-acquisitions. Cette méthode permet de définir la performance d’une entreprise en termes de variations de sa valeur boursière (Hubler et Meschi, 2000). Cette variation peut être analysée à court terme ou à long terme selon l’objectif du chercheur.

Pour l’analyse à court terme (ex-ante), la méthode repose sur le calcul du taux de rentabilité anormal, définit comme la différence entre un taux de rentabilité observé au moment de l’annonce d’une F&A et un taux de rentabilité théorique, estimé toute chose égale par ailleurs (c’est-à-dire le taux qui aurait été attendu si l’opération n’avait pas été annoncée).

Pour une analyse à long terme, (ex-post) une comparaison est faite entre le taux de rentabilité composé observé avec un taux moyen calculé sur un échantillon témoin, caractérisé par des entreprises de secteurs identiques de tailles comparables et de book-to-market ratio 36 similaires (Fama et French, 1992). Selon la majorité des recherches faites dans les contextes américains et anglais, les actionnaires des entreprises-cibles bénéficient généralement de gains

36 Rapport entre la valeur comptable d’une entreprise et sa valeur de marché. Un ratio faible signifie que la valeur

substantiels. L’impact sur les entreprises acquéreuses n’est pas généralisable dans la mesure où des effets positifs, négatifs voire non significatifs sont observés dans différentes études.

Sur le plan empirique, les auteurs (Shah et Arora, 2014) observent une réaction immédiate des marchés financiers aux opérations de F&A. De même, Cornett and Tehranian (1992) observent une corrélation positive entre la période d’annonce d’une F&A et la rentabilité anormale d’une action. Andrade et al. (2001), dans leurs travaux qui portent sur 4300 opérations de F&A pendant 26 ans, montrent que le taux moyen de rentabilité anormale combiné (pour les cibles et les acquéreurs) est de 1.8% sur une période de 3 jours «three days event window» [-1, +1], c’est-à-dire un jour avant et un jour après l’annonce d’une F&A. Ce taux de rentabilité revient à 1.9% quand on considère la période de vingt jours avant le jour de l’annonce [-20, close], ce qui laisse à penser que globalement les F&A permettent aux entreprises impliquées de créer de la valeur aux actionnaires.

Toutefois, en faisant une décomposition de ces résultats (cf. tableau 7), on constate que les actionnaires des entreprises cibles profitent plus des F&A que leurs collègues acquéreurs. Leurs taux moyens de rentabilité anormaux sont respectivement, 1.6% pour les cibles contre - 0.7% [-1, +1] et 2.3% contre -3.9 [-20, close]. Ainsi, sur la base de la moyenne de la valeur marché des entreprises cibles en 1998 estimée à 230 US $, le taux de 1.6% correspondrait aux gains de 37 millions de dollars américains ($) dans les 3 jours au bénéfice des actionnaires des entreprises cibles (Andrade et al., 2001).

Tableau 7. Taux de rentabilité anormaux moyen aux USA 1973-1998

1973-1979 1980-1989 1990-1998 1973-1998 Combiné [Cible + Acquéreur]

[-1, +1] 1.5% 2.6% 1.4% 1.8% [-20, Close] 0.1% 3.2% 1.6% 1.9% Cible [-1, +1] 1.6% 1.6% 1.59% 1.6% [-20, Close] 2.4% 2.3% 2.3% 2.3% Acquéreur [-1, +1] -0.3% -0.4% -1.0% -0.7% [-20, Close] -4.5% -3.1% -3.1% -3.9% No Obs 5.98 1.226 1.864 8.688

Scholtens et de Wit (2004), après avoir analysé la réaction des marchés financiers européens et nord-américains dans le secteur bancaire, montrent que les F&A permettent de réaliser de faibles rentabilités anormales cumulées (cummlative abnormal returns) et que les banques cibles réalisent de meilleures rentabilités par rapport aux banques acquéreuses. Une comparaison des marchés faite par ces auteurs montre que les marchés financiers américains réagissent mieux que ceux de l’Europe. Cependant, Sudarsanam and Mahate (2003) montrent que ces deux marchés réagissent négativement aux F&A.

Sur le marché asiatique, les auteurs Ma et al. (2009) montrent que les marchés, en moyenne, réagissent positivement à l’annonce des opérations de F&A. Ils observent une augmentation progressive des taux de rentabilité anormaux qui vont de 0.15% [-2], à 0.32% [- 1] pour atteindre 0.43% le jour de l’annonce. Ils observent également des résultats hétérogènes entre les pays au niveau des rentabilités réalisées. Ainsi, durant l’année 2000 en Chine, les F&A ont permis aux entreprises impliquées de réaliser des taux de rentabilités anormaux cumulés positifs, alors que durant la même année, les taux de rentabilité sont négatifs dans les pays comme la Thaïlande (-0.95), Taiwan (-0.88), la Corée du Sud (-0.44), Hong Kong (-1.12) et les Philippines (-0.13).

Agrawal et al. (1992) dans leurs travaux empiriques réalisés sur un échantillon tiré de

NYSE et NYSE/AMEX (1955-1987), montrent que les actionnaires de l’acquéreur perdent

environ 10% de la valeur des actions cinq ans après l’opération de F&A. Selon Alexandridis et al. (2007) les entreprises acquéreuses réalisent des rentabilités négatives même trois ans après l’annonce de l’opération de F&A.

Dans le transport maritime de marchandises (liner shipping), les auteurs (Panayides and Gong, 2002) montrent que l’annonce d’une F&A influence positivement les cours des actions des entreprises impliquées. Samitas and Kenourgios (2007) observent les mêmes résultats dans le domaine similaire (Tramp shipping). Ces auteurs soulignent que les F&A permettent aux entreprises impliquées de renforcer leurs capacités financières pour faire face aux défis du secteur.

L’une des grandes limites des études d’évènements dans le cadre des fusions- acquisitions est le fait que les variations des cours des actions dans la période entourant l’annonce d’une F&A peuvent être dues aux synergies et gains d’efficience attendus de cette

F&A mais aussi à d’autres facteurs difficiles à isoler avec une telle méthode. Par conséquent, pour mieux apprécier les effets à long terme d’une F&A, une approche corrélationnelle est plus efficace.