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La suppression de la terrasse du côté du jardin, à partir de

Jean-Baptiste Lepère commence son intervention du côté est, c’est-à-dire, du côté du jardin de

l’Orangerie où Christine de Suède aurait donné l’ordre d’assassiner son écuyer Monaldeschi37

. Le tableau illustrant cette scène montre en arrière-plan l’état d’origine, peu de temps avant les modifications réalisées entre 1824 et 1830.

Cette façade longue de près de trente mètres présente un aspect régulier et sobre en parement de grès sur deux niveaux d’élévation38

. Sept arcades en anse-de-panier39 séparées par un mur trumeau et un écoinçon rythment le premier niveau orné d’une simple modénature. Elles sont soulignées d’une plate-bande à claveaux. De plus, un mur en moellons, formant appui et glacis pour une grille occupe partiellement l’embrasure des arcades. Les murs bahuts de la troisième, quatrième et sixième arcades sont percés d’une porte qui permet d’accéder aux bas-côtés.

Ceux-ci sont séparés par des murs de refend transversaux formant sept pièces40 couvertes d’une voûte en berceau surbaissée, en moellons et mortier de chaux, et ouvrant sur la nef par un arc en anse-de-panier. Ces parties latérales se divisent en deux catégories : les chapelles et les

annexes. Les premières sont dotées d’un autel41

situé du côté nord, selon le même axe que la nef. Chaque autel se compose d’un tombeau et d’un gradin sur lequel repose un tabernacle. Au- dessus, un lambris est souligné par une corniche architravée en bois. Les secondes correspondent à la troisième, quatrième et sixième pièces et semblent autant d’entrées pour les chapelles. Néanmoins, ces deux ensembles reçoivent le même décor. Le mur bahut d’environ deux mètres de haut est doublé sur toute sa hauteur d’un lambris. Il est surmonté d’une baie vitrée aménagée dans la partie supérieure de l’arcade et protégée par une grille. A l’intérieur, le sol est recouvert d’un parquet et les murs enrichis de lambris. Enfin, du côté de la nef, toutes les chapelles et les annexes semblent clôturées par une porte à balustres inscrite dans l’arc en plein-cintre doublé de lambris formant sous l’imposte un couronnement rehaussé d’un motif sculpté, et sur les côtés d’un encadrement.

La dernière chapelle latérale située au nord, du côté du pavillon des Armes, se distingue de l’ensemble. En effet, le sol est couvert ici d’un parquet en point de Hongrie en frise42. L’autel

repose sur une estrade située du côté nord et il est entouré de lambris. Cependant, il est davantage monumentalisé grâce au tableau qui le surmonte dans un cadre prévu à cet effet,

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Christine, reine de Suède fait assassiner son grand écuyer Monaldeschi, A. M.-L., Grandpierre-Deverzy, s.d., conservé au musée national du palais de Fontainebleau ; annexe VIII

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Service de l’architecture du Palais de Fontainebleau, Carton 14, Dossier 3, Liasse 1, Feuille 4, s.d.

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Ibidem

40

Idem, Carton 14, Dossier 3, Liasse 1, Feuille 3, s.d.

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Service de l’architecture du Palais de Fontainebleau, liasse 1824-1830 chapelle de la Trinité, mémoire de menuiserie, 1824

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couronné par un fronton cintré reposant sur deux consoles. Ainsi, une plus grande attention a été portée à cette chapelle. La description du menuisier correspond à l’élévation de la chapelle du Roi et par conséquent la septième chapelle peut être supposée comme étant l’oratoire privé du

souverain43. Cette distinction évoque par ailleurs les aménagements successifs de cet

emplacement, d’abord comme oratoire du roi puis comme chapelle funéraire pour la reine Anne d’Autriche.

Le second niveau se compose d’une grande terrasse en dalle de pierre sur une couche de ciment, supportée par les murs de refend du rez-de-chaussée. Elle permet d’accéder à la porte du pavillon des Armes surmontée d’un fronton44

. De plus, la terrasse est délimitée par un mur acrotère45 en grès, formé d’une architrave, frise et corniche46 qui couronne la façade. Des contreforts ornés de chapiteaux aux chiffres du roi François Ier épaulent les murs de la nef47 et scandent la façade alternativement avec les baies hautes de la chapelle. L’utilisation timide du vocabulaire antique, notamment les pilastres et les chapiteaux, ainsi que le parement en grès et confirment l’époque de construction de la chapelle, c’est-à-dire vers 155048

. Les pilastres ont été ensuite repris sous le règne d’Henri IV.

En raison de ces inconvénients et de l’état de dégradation de cette partie de la chapelle, des travaux conséquents du côté oriental sont réalisés selon un programme évoqué vers 1822 et défini quelque temps après. Il s’agit alors de supprimer la grande terrasse surplombant le jardin et par conséquent de transformer le premier niveau.

Tout d’abord, l’architecte Lepère envisage plusieurs précautions à prendre et anticipe les travaux de démolition par une série d’ouvrages. En effet, il ordonne l’établissement d’une longue palissade49 d’une dizaine de travées, afin de protéger et de séparer à la fois le chantier et le jardin, aménagé par l’architecte Hurtault deux décennies plus tôt. Cette cloison en sapin, percée d’une porte, permet également de fermer la chapelle et d’éviter les visiteurs les jours fériés50

. A l’intérieur de la chapelle, les ouvertures entre la nef et les bas-côtés sont condamnées dans la même logique de protection.

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Service de l’architecture du Palais de Fontainebleau, Carton 5, Dossier 1, Liasse 1, Feuille 1, s.d.

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CASTELLAN, A.-L., Ancienne terrasse de la chapelle., Album de cinquante dessins du château de Fontainebleau, de la

Forêt, de la ville et des environs, s.d.

45 Ibidem 46

Service de l’architecture du Palais de Fontainebleau, liasse 1824-1830 chapelle de la Trinité, mémoire de maçonnerie, 1824

47

Christine, reine de Suède fait assassiner son grand écuyer Monaldeschi, A. M.-L., Grandpierre- Deverzy, s.d., musée national du palais de Fontainebleau

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BOUDON, F., BLECON, J., op. cit., p. 62

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Service de l’architecture du Palais de Fontainebleau, liasse 1824-1830 chapelle de la Trinité, mémoire de charpente, 1824

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61 Les premières dispositions préalables aux travaux de maçonnerie se poursuivent par l’étaiement des éléments porteurs de la chapelle51

. Ainsi des semelles cintrées soutenues par des chandelles et renforcées par des étrésillons sont posées par le charpentier sous chacune des voussures des arcades. Au second niveau, les pilastres en grès qui servent de contreforts à la voûte de la chapelle sont doublés d’étais en vue de la reprise des murs de refend.

De plus, l’entrepreneur Geoffroy intervient pour déposer les éléments de menuiserie52

des parties latérales. Les huisseries des baies vitrées, les portes à balustres et leurs chambranles, ainsi que les trois portes du jardin sont déposées. De la même manière, le parquet ou les éléments de décor comme les lambris et les ornements de sculpture sont enlevés. Le mobilier subit le même sort, notamment les autels. Enfin, les grilles53 qui protègent les baies sont enlevées. Ainsi, les chapelles sont entièrement et systématiquement démontées « avec précaution » de manière à ce que les éléments de menuiserie puissent être réutilisés54.

La protection du chantier se poursuit en 182555. Il s’agit de préserver l’intérieur de la chapelle des intempéries grâce à des auvents. Les éléments majeurs de la chapelle comme le retable ou les mosaïques de marbre de la nef sont mis à l’abri et protégés par des planches de sapin. Le menuisier procède à nouveau, mais « avec beaucoup de difficulté », à la dépose d’éléments en bois situés en partie haute, notamment le plancher des balcons. Enfin, du côté ouest, les baies sont bouchées. Par la suite, à partir de 1826, les combles des parties latérales sont protégés d’une toile imperméable en attendant les travaux de couverture56.

Le maître-maçon intervient ensuite au cours des six premiers mois de 1824 pour la démolition57 de la partie est. Il débute par la partie haute, puis poursuit méthodiquement son entreprise. Dans un premier temps, il supprime la terrasse et dépose les dalles en pierre de liais. Ces pierres très dures se sont usées sous l’action de la pluie et laissent s’infiltrer l’humidité qui dégrade le bâtiment de ce côté-ci de la chapelle. Après la dépose des dalles de la terrasse, au- dessus des voûtes des chapelles, il s’agit de casser la surface de ciment. Cette tâche a probablement demandé un long travail car les blocs ont été enlevés au fur et à mesure à la masse et au poinçon en prenant garde de conserver les contreforts. Les gravats accumulés sont ensuite transportés et rassemblés dans un endroit situé à quatre-vingts mètres de la chapelle par des bardeurs.

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Service de l’architecture du Palais de Fontainebleau, liasse 1824-1830 chapelle de la Trinité, mémoire de charpente, 1824

52

Idem, mémoire de menuiserie, 1824

53

Id., mémoire de serrurerie, 1824

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Id., mémoire de menuiserie, 1824

55

Id., mémoire de menuiserie, 1825

56

Id., attachement de maçonnerie, 4 juin 1824

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Après cette première étape, le maître-maçon procède à la démolition des chapelles. Les voûtes « très dures de moellon » sont détruites. Le mur-gouttereau de la façade et son parement en grès sont également démontés. Les murs de refend sont détruits aux trois-quarts tandis que la partie intérieure formant pilier du côté de la nef est maintenue58. L’architecte affirme en effet avoir préservé l’aspect de la nef59

. Les arcades séparant le vaisseau principal des bas-côtés ont pu ainsi être sauvegardées. Au contraire, les chapelles latérales sont entièrement détruites. Enfin, le travail s’achève par la démolition de l’ancienne fondation construite en mortier de chaux et sable.

Ces travaux indiquent la méthode de construction des maîtres-maçons sous François Ier. En effet, la partie apparente du mur est en pierre de taille et l’intérieur est en blocage de moellons.

Ainsi, dès le mois d’août 1824, il ne reste rien du côté est de la construction de François Ier

, à l’exception des pilastres et de leurs chapiteaux en grès dans la partie haute de la façade, et des piliers situés à l’intérieur, au rez-de-chaussée, du côté de la nef. En quelques mois, les chapelles ont été vidées de leur décor de menuiserie, lequel est conservé en vue d’une réutilisation ; leurs murs ont été abattus et le chantier nettoyé des gravats. Les plus belles pierres de grès ont été extraites des décombres et conservées pour être réemployées. Le réemploi parait d’ores et déjà caractériser la restauration de la chapelle de la Trinité.