L’achèvement de la chapelle de la Trinité s’accompagnait non seulement de travaux de parure, de dorure et de peinture aux endroits prévus à cet effet, mais également d’un certain nombre de projets. Ils confirment le programme complet, imaginé par Jean-Baptiste Lepère. En effet, il souhaite poursuivre la restauration au-delà d’une simple remise en état des lieux afin de
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Cf. annexe X
400
AN, fond des architectes Lepère, Hittorf et Bélanger, 469 AP 1, Rapport de l’architecte Lepère, septembre 1829
401
Service de l’architecture du palais de Fontainebleau, liasse 1824-1830 chapelle de la Trinité, mémoire de marbrerie, 1829
402
Cf. annexe X
403
AN, fond des architectes Lepère, Hittorf et Bélanger, 469 AP 1, Rapport de l’architecte Lepère, septembre 1829
404
121 restituer la splendeur d’un édifice « digne et très admiré »405
. L’ambitieux projet porté par Lepère rencontre l’assentiment de l’Intendance car il s’accorde avec celui de l’Etat. La notion de restauration s’entremêle ainsi avec la volonté de créer une œuvre nouvelle. En revanche, si l’architecte détaille explicitement dans son rapport le type de décoration qui doit être mis en place pour compléter les travaux exécutés, il n’évoque pas d’autres projets. Pourtant, certains dessins et croquis de Lepère indiquent un programme plus abouti et complet.
Tandis que certains éléments anciens de la chapelle sont restaurés, comme par exemple les pilastres de la nef, d’autres sont destinés à être entièrement remplacés. Cette distinction soulève une interrogation. En effet, sur quels critères s’est fondé Jean-Baptiste Lepère pour déterminer ses choix d’une restauration ou au contraire de la suppression d’un élément ancien ? Ainsi, les portes à balustres qui ferment les quatorze arcades des chapelles latérales sont déposées « pour être supprimées »406. Quelles raisons ont justifié cette décision ? Il est certain que l’état des portes devait être assez critique. Leur mauvais état devait en partie être dû au fait que les fleurs de lys et les couronnes avaient été systématiquement supprimées sous la Révolution, comme dans le reste de la chapelle.
L’architecte projette d’installer une nouvelle porte inspirée du modèle existant407
. Une esquisse montre une succession d’arcades dans lesquelles sont dessinées trois ébauches plus ou
moins développées d’une porte à balustre408
. La plus aboutie se compose de trois parties divisées en deux niveaux. Le panneau supérieur du vantail central est ajouré et entrecoupé de trois balustres en double poire qui évoquent celles du modèle ancien. La partie inférieure reçoit trois panneaux ornés à l’identique d’une croix difficilement identifiable mais qui se rapproche d’une croix pattée ou fleuronnée. L’une comme l’autre rappelle les origines de la chapelle et s’inscrit dans le discours attaché à la restauration de la chapelle royale de Fontainebleau. À la différence des portes à balustres déposées, celles-ci ne possèdent pas de fronton d’après l’esquisse.
Le document ne renseigne pas davantage sur les intentions de l’architecte. S’agit-il d’une réutilisation ? Dans ce cas, certains éléments des anciennes portes, comme les balustres en double poire, auraient été réemployés et insérés sur un nouveau support. La restauration de la chapelle a parfois été réalisée grâce au réemploi d’éléments anciens adaptés dans une nouvelle structure, notamment lors de la reconstruction de la façade orientale. Ces portes pourraient également avoir été copiées. Une autre esquisse montre en effet le motif d’un cartel rocaille et
405
AN, fond des architectes Lepère, Hittorf et Bélanger, 469 AP 1, Rapport de l’architecte Lepère, septembre 1829
406
Service de l’architecture du palais de Fontainebleau, liasse 1824-1830 chapelle de la Trinité, mémoire de menuiserie, 1826
407
Service de l’architecture du palais de Fontainebleau, Carton n°5, dossier n°1, liasse n°1, feuille n°1
408
d’un balustre409
vraisemblablement reproduits par Lepère. Ces détails révèlent le goût de l’architecte pour le dessin et la copie d’éléments anciens, qu’il reproduit avec précision comme le prouve l’élévation de la chapelle de la Trinité410
. Lors de ses voyages, notamment pendant l’expédition d’Egypte, il avait eu la charge de représenter de nombreux monuments de l’Egypte
pharaonique comme le temple d’Edfou ou d’Eletyia411.
Le croquis de Jean-Baptiste Lepère semble n’avoir donné aucune suite. Les portes, une fois disparues de la chapelle de la Trinité ont probablement été sauvegardées dans un magasin du château, avant d’être restaurées puis réinstallées à leur emplacement d’origine sous le Second
Empire412. Denecourt publie dans son recueil d’estampes en 1848, une vue de la chapelle de la
Trinité413 telle qu’elle se présentait sous la Monarchie de Juillet. Cette représentation illustre la nef dépourvue portes latérales. Vers 1863, Rodolphe Pfnor représente la chapelle de la Trinité, dotée des anciennes portes à balustres414. Les gravures les illustrent dans leur état restauré, complété des symboles royaux. Ainsi, dans la seconde moitié du XIXe siècle, elles sont remontées à l’identique dans la chapelle.
Outre le projet de portes à balustres, Jean-Baptiste Lepère semble avoir également imaginé le décor des petites tribunes. Il s’agit d’un garde-corps avancé qui protège l’avancée des tribunes devant chaque baie415. Il se compose dans la partie longitudinale de quatre dés, séparés par trois parties ajourées ornées d’une croix grecque doublée d’une étoile à quatre branches. Ainsi, ce croquis démontre encore que l’architecte avait pensé la restauration de la chapelle comme un vaste projet incluant des reconstructions, des aménagements, et une ornementation adaptée au lieu. Cependant, son dessein ne s’est pas achevé pour des raisons incertaines et ses suggestions quant au mobilier demeurèrent lettres mortes. La peinture sur porcelaine, représentant le mariage princier du duc d’Orléans et de la princesse Hélène de Mecklembourg-Schwerin en 1837416
, signale une protection installée devant les gradins de spectateurs logés dans les embrasements de tribune. Néanmoins, il semble qu’il s’agisse plutôt d’une installation éphémère pour l’événement. En effet, les représentations de la chapelle et notamment les vues de cartes postales417 indiquent que les tribunes ne reçurent pas d’avant-corps définitif, hormis un parapet
409
Service de l’architecture du palais de Fontainebleau, Carton n°14, dossier n°3, liasse n°3, feuille n°6, verso
410
Idem, Carton n°II, dossier n°2, liasse n°6, feuille n°7
411
AN, fond des architectes Lepère, Hittorf et Bélanger, 469 AP 1, Extrait du rapport fait à l’Assemblée générale des coopérateurs de l’ouvrage sur l’Egypte, 1er Messidor, An XI
412
VERLET, H., op. cit., p. 14
413
BEYELER, C., Souvenir de Fontainebleau, Album d’estampes éditées à l’époque romantique par Claude-François
Denecourt, créateur des sentiers de la forêt, 2006, p. 30
414
PFNOR, R., Monographie du palais de Fontainebleau dessinée et gravée, 1863, Pl. LXII
415
Service de l’architecture du palais de Fontainebleau, Carton n°14, dossier n°3, liasse n°3, feuille n°6
416
Meuble commémoratif du mariage du duc d’Orléans, Develly Jean-Charles, 1838, conservé au palais de Fontainebleau
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123 en bois contreplaqué418 avant les années 1980 durant lesquelles un vaste chantier de restauration fut entrepris. Des garde-corps furent installés à cette occasion devant les baies du premier étage. Enfin, dans le programme envisagé par Lepère la chapelle aurait été meublée. Un autre croquis porte quelques indications manuscrites « Stales ou banquettes »419, sans indiquer l’emplacement prévu. Peut-être étaient-elles destinées à compléter le chœur devant le maître- autel ou dans la chapelle de la Vierge, pour accueillir des clercs ?
Ainsi, la restauration de la chapelle de la Trinité n’a pas été menée à terme, comme le confirme la confrontation entre les projets décrits par Lepère dans son rapport de 1829, les esquisses et le constat des travaux réalisés.