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Méthanogénèse

développement, notamment à partir des mêmes substrats, tend en général à inhiber rapidement les bactéries méthanogènes [Hiligsmann and Thonart, 1997].

La plupart des composés intermédiaires étant solubles, ils constituent donc la charge majoritaire des lixiviats durant les 5 à 10 premières années de "la vie" de la décharge. A ceux-là viennent progressivement s'ajouter les acides humiques et fulviques dans leurs processus de condensation des matières carbonées et azotées complexes. Leur poids moléculaire augmentant progressivement, ils finissent par précipiter et ainsi ne plus apparaître dans les lixiviats. Finalement, la stabilisation de la matière organique et la chute de la production de gaz correspondent à la phase terminale d'évolution de la décharge. Entre-temps, les propriétés physico-chimiques des lixiviats et des gaz peuvent subir de profondes variations (Tableau 1) dont certaines peuvent être modélisées sur une partie ou la totalité de la vie de la décharge [Steyer et al., 1999].

Tableau 1 : Domaines de variation de diverses propriétés physico-chimiques des lixiviats de décharge (phase d'activité biologique majoritairement acidogène ou méthanogène) et normes de rejet des lixiviats et de potabilité en vigueur en Belgique. (Gendebien, 92; Ehrig, 83; D.P.E., 98 ; DGRNE, 98(1), 98(2))

Germes Totaux UFC/ml (37°C) Plusieurs millions

Coliformes fécaux UFC/100 ml Plusieurs centaines Absence dans 100 mL

Un paramètre conditionne cependant de manière importante la cinétique de biodégradation et donc la dynamique des variations sus-mentionnées. Il s'agit de la teneur en humidité au sein du massif de déchets dont l'incidence sur la production de gaz, par exemple, suit une loi exponentielle (Figure 3) [Farquhar and Rovers, 1973; Rees, 1980; Thonart et al., 1997]. En fait, cette figure traduit l'influence de la teneur en eau sur le facteur limitant de l'activité biologique de la décharge, à savoir la dégradation de la cellulose, et plus particulièrement son hydrolyse, dont la cinétique est dépendante de la teneur en eau de la matière cellulosique [Rodriguez et al., 2001]. En effet, ce polymère carbohydraté, présent dans les déchets ménagers à près de 40 % en poids, est le substrat organique le plus important mais aussi le plus difficilement biodégradable. Sa dégradation, incomplète (de l'ordre de 71 à 77%), est considérée comme linéaire en fonction du temps avec une période de demi-vie estimée à 15 ans. Elle contribuerait à 90% du méthane total produit dans la décharge [Gendebien et al, 1992]. En d'autres termes, la cellulose serait quasi la seule source carbonée utilisée par les microorganismes durant la phase de méthanogénèse stable et généralisée, c'est-à-dire la phase la plus longue de la vie de la décharge, soit de 25 à 50 ans ou davantage lorsque les conditions sont défavorables : humidité au sein des déchets inférieure aux 30 à 50 % communément enregistrés dans les décharges des pays tempérés.

Figure 3 : Effet de la teneur en eau sur la productivité de biogaz

La mise en décharge dans les pays en développement

Globalement, il est bien compréhensible que les précautions à prendre pour mettre en œuvre les techniques de traitement des déchets ménagers, y compris la mise en décharge, dans les pays à climat humide sont semblables aux précautions prévalant dans les pays fortement industrialisés, et généralement à climat tempéré. Il en va avant tout de la protection des eaux de surface et souterraines qui pourraient être contaminées par les molécules solubles issues des déchets. Par

1 10 100 1000

20 30 40 50 60 70 80

% en eau dans les déchets Production de biogaz (cm3/kg de déchets/jour)

conséquent, en raison des coûts de mise en œuvre (plusieurs dizaines de millions d'Euros), la mise en décharge est une technique qui n'est pas à conseiller pour le traitement, avec valorisation des gaz ou non, de la matière organique dans les pays à revenus faibles. D'autres techniques telles que la biométhanisation sont préférables à plusieurs égards. Par contre, dans les régions à climat aride (dont le bilan hydrique est déficitaire tout au long de l'année), la mise en décharge pourrait se réaliser à moindres frais en permettant la fossilisation rapide des déchets, par perte de l'eau constitutive, et en les isolant de toute source d'eau ultérieure.

Pour les régions intermédiaires, à climat sec mais dont le bilan hydrique n'est pas constamment déficitaire, une approche au cas par cas s'impose. La teneur en eau du massif de déchets étant un paramètre essentiel influençant l'activité biologique de la décharge; les données, les modèles d'évolution et les technologies de mise en œuvre relatifs à la gestion des décharges dans les pays du Nord ne pourront bien souvent pas être appliqués directement sous les climats secs. C'est pourquoi, il semble intéressant de rechercher, dans les décharges de ces pays, des paramètres correcteurs (des modèles existants) et de nouveaux paramètres relatifs à l'activité biologique et à l'impact environnemental du massif de déchets. Ces paramètres doivent renseigner sur l'état physiologique de la décharge. De plus, Ils permettent de caractériser l'évolution de la décharge par des lois décrivant leur évolution en fonction du temps, c'est-à-dire de réaliser une modélisation. L'intérêt de cette modélisation réside principalement dans l'évaluation de la durée de vie de la décharge sur base d'un échantillonnage restreint.

Une évaluation du temps de vie de la décharge est indispensable :

 au contrôle de la toxicité des effluents gazeux et liquides

 à la mise en place des unités de traitement des lixiviats

 aux projets de récupération et de valorisation du biogaz

 à l'aménagement et à la réhabilitation du site.

Etude de l'activité biologique des décharges dans les pays à climat sec

Quatre décharges de Haïti et de Tunisie, de grand volume, sous des climats relativement secs mais différents l'un de l'autre ou ayant fait l'objet de modes de gestion différents ont été étudiées de façon approfondie sur une période de plus de deux ans en appliquant la méthodologie développée par le CWBI. La décharge de Haïti (P) est localisée au Nord de Port-au-Prince; deux des trois décharges de Tunisie sont localisées dans la banlieue de Tunis, l'une au Nord (N) et l'autre au Sud (S) et la troisième à Kairouan (K), à 160 km au sud de Tunis (Tableau 2) [Hiligsmann et al., 2001; 2002]. Les résultats importants de l'étude (Tableau 3) montrent que l'activité biologique mise en évidence sur les quatre décharges étudiées est faible pour la plupart des décharges mais non négligeable. Elle est davantage significative dans la décharge S. L'impact environnemental des lixiviats (Tableau 4) est quant à lui à considérer avec la plus grande attention, au niveau composition mais également de débit, ce qui n'a pu être évalué dans le cadre de l'étude.