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1 2Structure de base

1.2 Substantifs appropriés en position N b

Nam Jee-Sun (1994) analyse indirectement (c’est-à-dire d’un autre point de départ) des constructions adjectivales similaires aux constructions traitées dans cette étude. Pour elle, le substantif approprié est une information supplémentaire, souvent redondante, due à son effacement fréquent (réduction métonymique). L’étude de Yu Hyôn-Gyông (1996) a le même point de départ bien qu’elle extraite une classe indépendante dite d’adjectifs sôngsang comme dans notre étude. De ce fait, Nam et Yu concentrent leurs analyses sur des phrases dont le sujet est un substantif unique et non un groupe nominal (GN). Selon Nam (1994), le substantif approprié étant nécessairement de type non humain4, elle propose alors un ensemble de critères permettant de classer tous les adjectifs coréens.

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Pour d’autres constructions qui n’ont rien à voir avec notre sujet, ces sustantifs fonctionnent comme substantif humain : par exemple ils se combinent avec la postposition dative -ege (traduite par à), réservée au substantif humain.

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Il existe tout de même des cas où la notion "animal" doit être traitée indépendamment de la notion "humain" : cette notion est surtout nécessaire dans la classe AVET (voir le chapitre IX.9.1.3).

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"Tous les adjectifs à sujet humain peuvent être associés à des substantifs appropriés, c’est-à-dire à des substantifs non humains" (p.75).

Une analyse plus pertinente de ces substantifs appropriés nous est apparue nécessaire. En effet, plutôt que de les englober dans une seule et unique notion de non humain, la complexe relation lexicale entre les trois entités (adjectif, Na, Nb) nous a permis de les analyser suivant de nouveaux critères plus adéquats. A titre d’exemple, le cas des phrases supportant la réduction métonymique (due au statut strictement approprié) devient alors un cas parmi d’autres et, de ce fait, fait partie d’un critère formel justifiant la classification de ces constructions adjectivales.

Ainsi la notion de substantif humain ou non humain est un critère trop simple pour analyser les substantifs appropriés car ceux-ci montrent des comportements syntaxiques trop particuliers. Les quatre comportements suivants rendent explicites ces particularités des substantifs appropriés.

1. Dans une certaine mesure le remplacement des substantifs non humains par le pronom gûgôt (ceci) ou le pronom interrogatif muôt (que) permet de définir formellement cette notion de non humain. Or à partir de la phrase (4.1) déjà présentée :

(4.1)     

chäksang-i mosôli-ga donggûlha-da bureau-ntf angle-ntf rond-StDéc « Le bureau est rond d’angle »

le remplacement du substantif approprié Nbn’est admis ni par le pronom interrogatif muôt (que) ni par le pronom gûgôt (ceci/cela) :

(4.3) * ( +  )  ( ? + )

*chäksang-i muôt-i gûgôt-i donggûlha-(ni + da) *bureau-ntf que-ntf ceci/cela-ntf rond-(StInt + StDéc) « (Le bureau, qu’est rond ? + Le bureau est rond de ceci/cela) »

Ce premier contre-exemple montre que les substantifs appropriés en position Nb ont un statut nécessairement autre que celui de la notion de non humain.

2. Une autre propriété transformationnelle est en mesure d’accentuer notre analyse. Les substantifs humain ou non humain peuvent normalement être extraits dans une phrase clivée, c’est-à-dire entre gôt-ûn et i-da (c’est et que/qui). Dans les constructions qui nous intéressent, les substantifs humain et non humain en position Na peuvent être extraits dans cette phrase dont l’exemple est :

(5.4)     

hyôngse-ga mindungha-n gôt-ûn san-i-da

aspect-ntf déboisé-sfd Comp-top.ntf montagne-être-StDéc « C’est la montagne qui est déboisée d’aspect»

Contrairement à cela, le substantif approprié hyôngse (aspect) ne peut pas être extrait de cette manière :

(5.5) *     

*san-i mindungha-n gôt-ûn hyôngse-i-da

* montagne-ntf déboisé-sfd Comp-top.ntf aspect-être-StDéc « C’est l’aspect que la montagne est déboisé »

Ce second contre-exemple prouve que considérer les substantifs appropriés comme des substantifs non humain n’est pas satisfaisant.

3. Une autre propriété particulière des substantifs appropriés est le fait qu’ils peuvent se comporter différemment selon les adjectifs associés. Dans la majorité des études qui traitent du phénomène de restructuration, la notion d’appropriation s’emploie de manière quasi identique avec la capacité d’effacement, celui-ci n’introduisant presque pas de changement de sens. Néanmoins nous avons constaté que tous les substantifs appropriés ne sont pas automatiquement effaçables. Par exemple les trois substantifs appropriés suivants :

(9.1)   

ina-ûi yongmo-ga mähokjôki-da Ina-gén apparence-ntf charmant-StDéc « L’apparence de Ina est charmante »

(9.2)   

ina-ûi moksoli-ga gôlgôlha-da Ina-gén voix-ntf rauque-StDéc « La voix de Ina est rauque »

(9.3)   

ina-ûi mok-i gilc’ukha-da Ina-gén cou-ntf long-StDéc « Le cou de Ina est long »

se comportent de façon différente à l’égard de leur effacement :

(9.4)  ( + * +  )

ina-nûn (mähokjôki + *gpolgôlha + gilc’ukha)-da Ina-top.ntf (charmant + *rauque + long-StDéc) « Ina est (charmante + rauque + longue) »

Le substantif approprié yongmo (apparence) peut être effacé tout en gardant une parenté de sens. Par contre l’effacement des deux autres substantifs gibun (humeur) et mok (cou) conduit respectivement à l’agrammaticalité et à un léger changement de sens. Les trois substantifs appropriés ne doivent donc pas être traités de manière identique (ils sont analysés de manière détaillée dans le paragraphe 2).

4. Enfin une dernière propriété particulière des substantifs appropriés mérite aussi d’être citée. C’est une interdépendance lexicale entre les trois éléments mis en jeu. En effet les notions humain et non humain dans les constructions adjectivales qui nous intéressent sont inséparables des

notions des substantifs appropriés, ceux-ci étant aussi inséparables du sens de l’adjectif. Prenons les trois phrases suivantes :

(10)   

minu-ûi moksoli-ga gôchil-da Minu-gén voix-ntf rude-StDéc « La voix de Minu est rude »

(11)   

minu-ûi sônggyôk-i gôchil-da Minu-gén caractère-ntf rude-StDéc « La voix de Minu est rude »

(12)   

minu-ûi phibu-ga gôchil-da Minu-gén peau-ntf rugueux-StDéc « La peau de Minu est rugueuse»

L’adjectif et le substantif en position Nasont les mêmes : seul le substantif approprié en position Nb change. Chaque interprétation est entièrement dépendante de celui-ci. Chaque suite d’éléments est donc nécessaire afin d’attribuer une description adéquate. Tous les éléments du groupe nominal doivent donc être utilisés comme notion fondamentale pour analyser les propriétés distributionnelles de ces constructions. C’est une "expansion maximale" au niveau du groupe nominal qui est donc prise en compte dans l’analyse des constructions du type [Rest.A]. Par le terme "expansion maximale" nous entendons le principe d’emploi qui comporte le plus grand nombre d’actants5.