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Chapitre II : La technique du stuc

II- 2 Les stucs des Marca : matériaux, recettes et mise en œuvre

II-2.1 Les matériaux

Les analyses des restaurateurs ont montré que « l’œuvre stuquée des Marca constitue un ensemble matériel composite […] »558. Différents éléments ont été observés

par les restaurateurs dont de la pierre, des morceaux de céramique, - tuiles, briques –, du sable, de la chaux et/ou du carbonate de calcium et du plâtre559. Cette analyse correspond à un ensemble en particulier celui de l’église de Recologne que nous devons à Jacques François Marca qui signe le marché en 1747. Nous sommes donc limités dans notre

555 Les quantités et les dosages des différents ingrédients n’étaient pas toujours évoqués dans les traités et

lorsqu’ils l’étaient, ils n’étaient pas toujours fiables. Ces dosages étaient maîtrisés par les plasticiens après des années d’expérience et la pratique leur permettait de juger des quantités nécessaires. D’après C. Natali et G. Lorenzini, op. cit., pp. 12-13.

556 C. Sapin (dir), op. cit., p. 231. 557 S. Barton, G. Mantoux, op. cit., p. 27. 558Ib., pp. 23-25.

171 démarche par le fait que nous ne possédons qu’un seul exemple. Cependant, n’oublions pas que les Marca se transmettent de génération en génération un savoir familial. Nous pouvons donc considérer que la recette des stucs est la même entre la fin du XVIIe siècle et le début du XIXe siècle. Cette hypothèse est confortée par plusieurs indications. Par exemple, Charles Huot-Marchant évoquait « le travail de l’italien Marca, exécuté au sable et à la chaux, recouvert d’un mastic de pierre blanche pilée »560. Ce témoignage montre

l’emploi de matériaux similaires à ceux évoqués plus haut. Mais, plus intéressant encore, dans certains marchés ou comptes de chantier nous avons pu relever la liste des matériaux dont avaient besoin les Italiens. En effet, que « […] Marqua s’oblige de fournir tous matériaux nécessaires […] », comme à Beaujeu-Saint-Vallier-Pierrejux-et-Quitteur en 1742 ou que cette tâche incombe à la communauté, la liste des « ingrédients » nécessaires apparaissait parfois. Il s’agit là de renseignements précieux pour nous et que nous avons pu mettre en relation avec l’étude de Recologne.

Nous allons donc évoquer maintenant l’ensemble de ces composants, qui nous le verrons sont toujours les mêmes, dont nous connaissons dans quelques cas très rares la provenance. Tout était amené à pied d’œuvre et les Marca travaillaient sur place. Ce point est évoqué dans un autre passage de cette seconde partie.

Parmi les matériaux cités, nous retrouvons sans surprises le « gis »561 ou « gy »562

ou dans quelques rares cas comme à Orgelet563 du plâtre, un des éléments de base564.

D’Aviler dans son Explication des termes d’architectures… de 1691 en donne la définition suivante : « GIP ou GYPSE, du Latin Gypsum, du plâtre. On appelle ainsi une espece de pierre transparente, qui se trouve parmi celles de plâtres, & se delite par feüilles, comme le talc : & dont on fait un plâtre très fin, qui mêlé avec de la chaux & du blanc d’œuf sert à contre-faire les marbres simples ou mêlés en y ajoutant des couleurs […] »565.

Si l’on se réfère au Lexique pour l’étude de la Franche-Comté566, le terme

« gisserie », signifie « en gypse » ou « en plâtre » et le métier de « gisseur » y figure et est synonyme de « plâtrier ». Le « gy » est également défini comme étant « utilisé pour

560 C. Huot-Marchand, op. cit., pp. 45-46. 561 A.D.D. 7 F1, fond Lavernette. 562 A.D.H.S, 2e 5087.

563 L. Laurent, op.cit. , pp. 111-112.

564 « […] en général, le terme stucco indique, qans qu’il soit besoin d’autres précisions, un matériau

plastique adhésif qui peut provenir de deux composés bien distincts. Dans le premier cas, il a pour base le gypse […]. » Extrait de A. Zamperini, op. cit., pp. 13-14.

565 A.-C. d’Aviler, op. cit., 1691, volume 2, p. 606.

566 P. Delsalle, Lexique pour l’étude de la Franche-Comté à l’époque des Hasbourg (1493-1674), Besançon,

172 la confection du plâtre ». Nous devons également mentionner le fait que cet ouvrage ne comporte pas de terme de « stuc » et nous avons vu qu’il n’était pas toujours employé lorsque l’art des Marca était désigné dans les transactions. Signalons que les comptes du prieuré de Rosey nous indiquent que le gypse qui est « […] pris à Besançon […] »567 .

Dans la composition du stuc il faut ajouter également la chaux, souvent mentionnée dans les différents traités, que l’on retrouve à Orgelet568, à Beaujeu-Saint- Vallier-Pierrejux-et-Quitteur 569 ou dans les comptes des travaux de l’hôtel de Lavernette, comme l’indiquent les nombreuses mentions « fourni douze seilles de chaux », « fourni trois seilles de chaux570».

On retrouve également le sable qui permet notamment de donner à la composition une très forte solidité571. En plein cœur du XVIIIe siècle, Jacques François qui réalise le retable du prieuré de Rosey fait venir du sable de « Busey »572. Il s’agit peut-être de Bucey-les-Traves située à treize kilomètres ou de Bucey-les-Gy localisée à vingt-six kilomètres. Dans le cas du chantier de Lavernette, nous savons qu’il provient de Haute- Saône et plus précisément de Voray-sur-l’Ognon. Le 16 juin 1791, il est demandé à « Monsieur De Lavernette […] [d’] avoire la bonté de faire payer au présent porteur La Some de Carante Livre pour prix de Cinques voitures de sable qu’il a conduit pour son compte depuis Voray […] »573 .

On retrouve dans plusieurs pièces d’archives l’utilisation de la pierre. Jean Antoine l’utilise à Orgelet en 1717574, dans le marché de Beaujeu-Saint-Vallier-Pierrejux-

et-Quitteur les « pierres bruttes » et les « les pierres blanches » apparaissent parmi les matériaux nécessaires et rappelons que l’abbé Huot-Marchant évoquait un « […] mastic de pierre blanche piléé »575 à propos du retable d’Evillers. On retrouve dans les comptes de l’hôtel de Lavernette des mentions à des livraisons de pierre pilée. Nous ignorons malheureusement qu’elle était leur nature. À quoi correspondait la pierre blanche au sujet

567 A.D.D. fond de l’hôpital de Besançon, GG 90 et 53 J, informations communiquées par P.Boisnard. 568 L. Laurent, op.cit. , pp. 111-112.

569 A.D.H.S. 2e 5087.

570 A.D.D. 7 F1, fonds Lavernette.

571 H.V. Regnault, Cours élémentaire de chimie. À l'usage des facultés, des établissements d'enseignement

secondaire, des écoles normales et des écoles industrielles, Paris, 1853, pp. 622-624.

572 A.D.D. fond de l’hôpital de Besançon, GG 90 et 53 J 573 A.D.D. 7 F1, fond Lavernette

574 L. Laurent, op.cit. , pp. 111-112. 575 C. Huot-Marchand, op. cit., pp. 45-46.

173 de laquelle nous n’avons pas d’indications particulières ? Qu’entendait-on par « pierre brutte » ? Les Marca en faisaient-ils un usage différent ? Nous l’ignorons encore.

À Orgelet le tuf avait été utilisé par Jean Antoine Marca576 et en 1750, Jacques François Marca est désigné dans le marché de l’autel de Scey-sur-Saône comme « […] sculpteur en gy et en tuffe […] »577. Ce matériau était peut-être sculpté et ensuite recouvert de stuc selon une tradition antique578 et certains traités dont celui d’Aviler évoque cette pratique579.

Signalons également que si la plupart de leurs autels étaient en stuc, il arrivait parfois que sur une base de ce matériau soit posée une table en pierre. C’est le cas à Recologne où la table du maître-autel est en pierre de Chailluz.

D’autres matériaux dont la tuile ont été retrouvés à Recologne où l’on remarque que certains retables endommagés possèdent une substructure dans laquelle sont emprisonnées des tuiles.

Si l’on arrive à recomposer la liste des éléments fréquemment utilisés par les Marca, - sable, chaux, gypse ou plâtre, pierre pilée, brique –, nous ignorons où les Marca se fournissent en matière première. Nous avons quelques indications qui semblent indiquer un approvisionnement souvent proche afin de minimiser les coûts. En outre, il est plus que probable que les pierres et les briques employées afin de construire la structure interne du retable aient été trouvées sur place. La récupération de matériaux locaux permet de pratiquer des prix bas et simplifie la tâche des stucateurs. Ce n’était pas incongru si l’on pense qu’au XVIe siècle le Vénitien Cornaro annonçait qu’il ne

préciserait pas « quelle sorte de sable […] ni quelle sorte de chaux […]580 » sont les meilleures, car il estime que cela dépend du lieu dans lequel on se trouve.

Ajoutons que plusieurs pièces d’archives mentionnent des livraisons de fer ou de bois. Ces éléments étaient employés afin de consolider les stucs ou pouvaient servir de

576 L. Laurent, op.cit. , pp. 111-112. 577 A.D.H.S. G 179.

578 Citons par exemple Arthur Young qui décrit Rome et évoque les colonnes du temple de Fortuna virilis

et ses « […] onze colonnes de profondeur, et quatre sur la façade, toutes faites de tufo couvert de stuc […] ». D’après Voyage en Italie pendant l’année 1789, par Arthur Young ; traduit de l’Anglais par François

Soulés, Traducteur des Voyages en France du même auteur, Paris, J.-J. Fuchs, 1796, p. 326.

579 « La plûpart des Corniches des Palais de Rome sont taillées de Sculpture ; elles se travaillent avec

d’autant plus de facilité, qu’elles se font de stuc dur sur un noyau de brique ou de tuf. », in A.-C. d’Aviler,

op. cit., 1691, volume 2, p. 331.

580 « […] E non dirò quale sorte di sabion sia migliore per impiastrar la calcina, ne’ quale sorte di calcina

sia migliore, perché bisogna che si adopri e sabia e calcina che ti truova nel paese dove si fabrica […] » D’après Alvise Cornaro, cité in C. Natali, G. Lorenzini, op. cit., p. 4.

174 forme ensuite recouvertes, comme le cadre d’un tableau au centre d’un retable. Nous reviendrons sur ce point lorsque nous parlerons de la mise en œuvre des matériaux.

Finalement, nous devons aussi signaler que nous ne connaissons pas les secrets ou les « trucs581 » des Marca. De nombreuses questions se posent encore à nous. Quels additifs étaient utilisés ? Cela reste des secrets jalousement gardés et nous savons que les artisans ont des astuces bien précises pour élaborer leur pâte ce qui fait la singularité d’un atelier comparé à un autre. Par exemple pour éviter que le stuc ne prenne trop vite et donc pour gagner du temps pour le travailler différents additifs sont utilisés tel que le vin (en Autriche), le jus de raisin, le lait ou encore la bière. Et que pour augmenter la flexibilité du stuc, des glus, de l’huile d’amande ou encore du lait caillé étaient utilisés. Pour durcir le mélange on ajoutait de l’aluminium par exemple. À côté de ces astuces, des techniques liées à la maîtrise de l’art du stuc entraient en compte comme le choix d’une eau la plus pure possible, la température des ingrédients ajoutés, le taux d’humidité sur les lieux de fabrication582.

Les marchés n’apportent aucune précision quant à ces additifs. À Beaujeu-Saint- Vallier-Pierrejux-et-Quitteur, par exemple, à la suite des matériaux nous voyons simplement apparaître les termes « […] compositions et mastiques […] »583. La liste des

fournitures inventoriées chez Joseph Marie Marca lors de l’inventaire après décès indique « […] cinq pots à colle […] », mais nous n’avons malheureusement pas plus d’informations.

Une des spécificités des Marca semble être le fait qu’ils n’utilisent pas un stuc à base de marbre en poudre mélangé dans la composition. Leur technique serait donc à rapprocher de celle dite du « stuc pierre » caractérisée par « un mélange plastique à base de plâtre gâché avec de la colle de poisson et de pierre réduite en poudre »584 et la pierre pilée semble ici remplacer la poudre de marbre. En effet, si l’on se réfère toujours aux contrats, nous ne voyons jamais apparaître la notion de « marbre ». Gilles Mantoux et Sophie Barton après leur intervention à Recologne affirmaient que le stuc des Marca était à rapprocher malgré quelques différences « […] d’un stuc à base de plâtre et de chaux et

581 C. Sapin (dir.), op. cit., 2004, p. 231. 582 G. Beard, op. cit., pp. 9-26.

583 A.D.H.S. 2e 5087.

584 M. T. Baudry, D. Bozo, Sculpture, méthode et vocabulaire, inventaire général des monuments et des

175 de colle protéique. Dans ce dernier, la chaux évite que le collagène ne se fige avant la prise du plâtre et assure la conservation de la colle protéique […] »585.

Il est très intéressant de noter que la recette utilisée par les Marca pour fabriquer le stuc partage les mêmes ingrédients que ceux utilisés par certains stucateurs lombards originaires de la région de Côme. Nous savons par exemple qu’au début du XIXe siècle Domenico et Giuseppe Pagani sont chargés de la réalisation d’un retable en stuc pour l’église d’Etroubles dans la Vallée d’Aoste. Ils demandaient pour ce faire que leur soit fourni le matériel nécessaire à la construction du retable et les archives mentionnent la chaux, le fer, le sable, le gis cru et tuf586. Autant d’éléments que nous avons croisés lorsque nous avons évoqué les ingrédients employés par les Marca.

Il est possible que l’emploi de poudre de marbre dans la préparation des stucs soit plus fréquent lors de chantiers importants et financés par des commanditaires fortunés. Ainsi, il n’est pas surprenant qu’en 1730, l’architecte de la cour royale de Turin indique dans ses Istruzioni que de la poudre de marbre doit être utilisée par les stucateurs587.

Malheureusement, l'absence d'informations quant aux autres familles de stucateurs de la Valsesia ne permet pas de comparer les stucs des différents ateliers. Il aurait été intéressant de confronter les recettes et les mises en œuvre. Nous aurions ainsi peut-être pu affirmer l'existence d'une technique locale ou au contraire mettre en avant la diffusion de savoir-faire familiaux indépendants.

Nous avons évoqué les différents « ingrédients » employés par les Marca. Nous pouvons affirmer que leur stuc est un matériau pauvre dans la composition duquel n’entre pas le marbre. Ils emploient de la pierre, du sable, de la chaux et du gypse trouvés localement. Il est aussi intéressant d’avoir pu démontrer qu’entre les stucs de Jean Antoine Marca et ceux de Joseph Marie en passant par ceux Jacques François, c’est-à- dire que de génération en génération, la recette comprend les mêmes matériaux.

Nous allons maintenant expliquer comment les stucateurs élaboraient techniquement leurs œuvres et aborder les différentes couches qui composent leurs ouvrages.

585 S. Barton, G. Mantoux, op. cit., pp. 23-25. 586 B. Orlandini, op. cit., p. 244.

176 II-2.2 Mise en place des stucs

L’étude de Recologne a donné lieu à la publication d’un rapport rédigé en 2011 par Sophie Barton et Gilles Mantoux, restaurateurs au Centre Régional de Restauration & de Conservation des Œuvres d’Art (CRRCOA) de Vesoul, qui détaille avec exactitude la composition des stucs. À partir de ces informations, nous allons donc évoquer les différents éléments qui forment les œuvres des Marca, de la couche la plus profonde à celle en surface.

« [...] L’œuvre stuquée des Marca constitue un ensemble matériel composite […]. Elle allie la réalisation d’un support maçonné complexe à la conception d’un épiderme au fini très poussé, imitant à la perfection le marbre »588. À Recologne, les éléments stuqués sont constitués de plusieurs « [...] couches différenciées et superposées » 589. Cela correspond de façon générale à la technique du stuc qui nécessite la superposition de plusieurs couches dont le nombre pouvait varier dressées les unes sur les autres de la couche la plus profonde, autour du noyau ou de l’âme, jusqu’à l’épiderme. Là encore les solutions varient et le nombre de strates diffère. Natali Carmen et Lorenzini Giuseppe expliquent d’ailleurs que dans les traités qui évoquent le stuc les auteurs mettent tous en valeur ce phénomène et citent notamment un passage d’Alberti qui explique l’utilité des différents niveaux590.

Dans le cas précis des Marca, le stuc utilisé lors de la confection du mobilier, essentiellement des retables, des autels et des chaires à prêcher, est constitué de trois niveaux distincts de mortier et d’une couche colorée. Le retable du prieuré de Rosey très endommagé ou les clichés de celui de Champlitte avant sa destruction permettent d’avoir un bon aperçu de la structure interne des constructions. Les restaurateurs ont également montré que dans le cas des bas-reliefs la composition est plus simple puisqu’elle est formée de deux couches constituées des mêmes éléments que celles des retables591.

588 S. Barton, G. Mantoux, op. cit., pp. 23-25. 589 Id., p. 21.

590 C. Natali, G. Lorenzini, op. cit., p. 4. 591 Id., p. 27.

177 Premièrement, le niveau le plus profond est formé d’une maçonnerie faite d’un agglomérat de pierres et de morceaux de céramique (tuiles, briques…) liés par un mortier grossier (ill.18, 19, 20 et 21). Ce dernier est constitué de sable, d’aluminosilicate, d’une partie carbonatée (carbonate de calcium, chaux) et de plâtre, qui permet de figer le mortier. Selon les restaurateurs, la solution présente ici s’apparente plus à un mortier « chaux/plâtre » qu’à un mortier de type romain. En outre, aucune trace de Pouzzolane n’a été détectée592. Ces éléments sont disposés horizontalement à la manière d’un appareil

de mur traditionnel. Ils participent à l’élaboration d’une structure porteuse favorisant la solidité de l’ouvrage. Cette structure est renforcée par l’utilisation de ponts d’attaches en bois ou en métal, placés entre les éléments composant les retables et le mur, ainsi que des tenons de plus petites sections renforçant les anges ou les statues593.

Le second niveau, ou niveau intermédiaire, d’une couleur plus claire et dont l’épaisseur varie entre un et deux centimètres, est composé de plâtre et de chaux dans des proportions plus élevées, d’où sa couleur, ainsi que de sable et d’aluminosilicate. Il présente une meilleure cohésion que le mortier qu’il recouvre et que nous avons décrit juste au-dessus.

Les analyses ont montré que pour ce niveau les proportions ne répondaient pas à des règles strictes et fluctuaient et que les teintes pouvaient être inversées. S’agit-il d’une erreur dans la mise en œuvre594 ?

Le troisième niveau, qui correspond au mortier superficiel, apparaît comme une couche blanche très fine de seulement quelques millimètres, composée de chaux ainsi que de plâtre presque purs (sans adjonctions de charges colorées) et souvent un peu d’aluminosilicate. Cette couche était très probablement polie ou poncée afin de constituer une surface extrêmement lisse qui servait de support aux couleurs et permettait ainsi d’imiter parfaitement la brillance du marbre (ill. 22 et 23)

In fine, cette surface pouvait ensuite être recouverte de couleurs appliquées grâce

à différentes techniques comme la fresque à buon fresco, la peinture « à l’huile ensuite passée au vernis » ou « la détrempe ». Nous pensons que les couleurs étaient préparées

592 S. Barton, G. Mantoux, op. cit., p. 23. 593 Id., p. 24.

178 sur place comme l’indique les comptés de l’église de Casapinta, où Carlo Marca en 1756 est chargé par son père de broyer les couleurs achetées à Milan destinées au retable595. À

l’extrême fin du XVIIIe siècle, le devis pour le décor du théâtre de Besançon accepté par

Joseph Marie et Charles Marca nous apprend que :

Le grand plafond en demi cercle plan devant etre peint à fresque dans toute son entendue sera fait en lattes de chêne de cinq à six lignes d’épaisseur sur dix-huit lignes de largeur espacées également et clouées de deux cloux au moins sur chaque poutrelle pour etre ensuite enduit en S gris bien gaché à la truelle et ensuite d’une autre couche d’un bon mortier fin et uni pour recevoir la peinture à fresque, cette dernière couche ne sera mise par l’entrepreneur qu’après en etre convenu de concert avec le peintre qui sera chargé de l’exécution de cette peinture de manière que rien ne puisse contrarier cette exécution qu’au contraire l’entrepreneur gypsseur sera tenu et obligé de suivre exactement tous les détails et ordres qui lui seront donnés à ce sujet soit par le peintre ou par l’architecte soussigné596.

Ceci implique que les Marca n’utilisaient donc pas un stuc coloré à la base, mais qu’ils peignaient la surface de l’ouvrage ou dans des cas plus rares comme celui du Théâtre préparaient la surface pour un intervenant extérieur. Il est intéressant de noter que