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Des structures vivent sous le couperet de probables ou cycliques appropriations

territoriales par des groupes masculins, opérant

des oppressions sur les jeunes, les équipes.

Face ces situations, le repli sur soi est parfois une

solution qui semble – à tort – sécurisante.

PRATIQUES/ANALYSES

Pour les personnes ayant répondu au questionnaire, les enfants et/ou jeunes représentent un quart des instigateurs d’activités (26,8 %), derrière les équipes d’animation (29,2 %) et devan- çant de peu les équipes de direction (25,4 %). Les familles, aux dires des questionnés, peuvent aussi proposer et voir se réaliser certaines activités, la proportion est faible mais néanmoins notable. Quant à la catégorie « autres » elle rassemble sept occurrences dont les « partenaires », les« financeurs », la « mairie », le « responsable de structure », le « conseil d’administration » ou les « opportunités locales et partenariales ». Si l’on isole de l’échantillon total les structures accueillant des enfants de plus de 12 ans, les résultats changent peu. Les équipes d’animation arrivent toujours en première ligne (29,4 %) devant les jeunes (28,4 %). Les équipes de direction ont une proportion qui baisse un peu (23,2 %) ainsi que les « autres » instigateurs (2,6 %) tandis que les familles sont dans des pourcentages similaires (16,5 %). Pour affiner et interpréter ces résultats, il nous faut nous tourner vers les entretiens.

Fabrice C. , point CYB, Lormont : « Notre problématique c’est qu’on n’insère pas

assez les jeunes dans les décisions – dans un conseil consultatif ou par rapport au fonc- tionnement du point CYB ; ça fait plusieurs années qu’on dit qu’il faut les impliquer mais on ne le fait pas. »

La quasi-totalité des structures fonctionne en proposant une palette d’activités au sein des- quelles les enfants et les jeunes peuvent opérer leurs choix. Les structures de proximité fonc- tionnent beaucoup autour de la « co-construction » des projets d’animation et de leur cofinancement. Rendre les jeunes « acteurs de leurs loisirs » est une injonction à laquelle les structures tentent de se plier mais qu’ils dénoncent aussi du fait des problèmes sociaux lourds auxquels doivent faire face les jeunes qui, ayant déjà des difficultés à « être acteurs de leur vie », ne peuvent être que réticents face à ces impératifs citoyens. Certains responsables de structures annoncent, sans détour et sans fausse pudibonderie, proposer des activités dites de consommation. Ces activités ont cependant dans ces structures une place déterminée : elles peuvent être « rétributives » et font suite à un investissement conséquent de jeunes dans un projet ; incitatives car « le problème est qu’il faut privilégier beaucoup d’activités sportives pour répondre à la demande avant de mettre en place d’autres choses plus culturelles (sorties pour voir d’autres villes ; découverte du patrimoine) et pour construire la relation éducative qui est le plus important » ou éducatives :

« Et on ne se pose pas 15 000 questions pour savoir si nos actions sont dites de consom- mation ou autre. Cette tendance à ne pas vouloir faire des activités de consommation, où les jeunes doivent monter leurs projets eux-mêmes ; on est en prise de bec là-dessus avec la CAF. C’est un déni complet de la sociologie de consommation dans laquelle on est et qui pourtant s’impose à tous. La réalité est que pour vivre aujourd’hui il faut consommer, alors apprenons à mieux consommer. Nous, on propose des activités de consommation, on le dit. Sur le quartier, et vous pouvez vérifier, les activités les plus recherchées et les plus consommées sont les activités de consommation les plus chères : le karting, Aqualand, la moto… Et ils préfèrent payer 8 euros que de monter un projet qu’ils ne monteront jamais et que les animateurs devront eux, au final, monter. La mise en place d’un séjour, il faut s’y prendre un an à l’avance. Si on doit monter des dossiers de subvention, les jeunes vont s’essouffler ; un an avant, c’est pas le temps des jeunes, c’est pas la réalité du temps des jeunes. Mais pendant le séjour, on va pouvoir vraiment participer au quotidien des jeunes ; et il est beaucoup plus fondamental de faire partir des jeunes en séjour quitte à ce que ce soit clé en main. Bien sûr, si 3, 4 jeunes viennent avec un projet pour un séjour en Allemagne pour la Coupe du monde de football, on va les soutenir, mais la plupart du temps ces histoires de projets de jeunes c’est de la manipulation. Et pourquoi dans les

quartiers les jeunes devraient monter leurs séjours alors qu’ailleurs ils n’ont pas à le faire ? On rentre dans un discours de la paupérisation. »

Les arguments avancés sont tout à fait pertinents au vu des travers que certains « projets » peuvent prendre. Nous avons en effet pu retrouver les exemples cités ci-dessus : soit des « projets » qui étant établis et réalisés depuis des années sont institués et n’ont de « projet jeune novateur » que le terme (ciné kebab ou ciné McDo) ; soit des projets en cofinancement dont la recherche de financement est assurée par les animateurs, les jeunes s’y étant essouf- flés. Autre point de crispation, le sentiment que ces injonctions provenant des partenaires financiers n’ont de réalité que pour les « jeunes des quartiers ». L’extrait d’entretien ci-dessous est exemplaire à divers niveaux : usure professionnelle, lourdeur des tâches administratives, remise en cause du sens profond de la profession, sentiment de délaissement, de non-com- préhension, voire de méfiance et de défiance des partenaires, déchirure de l’identité profes- sionnelle, méconnaissance profonde des publics et des actions menées vis-à-vis de ces publics de la part des partenaires financiers ou institutionnels (élus compris).

« Organiser un camp, même avec peu d’activités de consommation c’est cher, et on ne peut pas les faire marcher toute la semaine, ils veulent des activités de consommation comme tout le monde et ces activités sont extrêmement chères. Et quand on tire les man- nes des financeurs, y compris Jeunesse et Sports, il n’y a rien… On est tiraillé, c’est épui- sant, et l’autofinancement c’est compliqué. Les familles ne peuvent pas donner de trop. Et les minicamps de deux ou trois jours ne sont plus possi- bles puisqu’il faut sept nui- tées pour avoir des bons CAF. Avant on faisait des mini- camps de deux, trois jours, c’était parfait pour ce public ; c’était pas trop cher donc idéal pour les familles. Finalement on est à la croisée des chemins et ça finit par être très compliqué. On doit faire des dossiers qui res- semblent à des thèses ! Ça demande du temps et c’est du temps où l’on n’est pas avec le public ; on va finir par passer plus de temps à faire et gratter des papiers qu’à être avec les gens ! On a fait une demande à Jeunesse et Sports pour le camp Quad mais ça a été refusé, alors il faut faire mais avec quoi ?? Bien sûr on a le petit personnel, mais c’est pas toujours gagné… Les animateurs ne veulent plus venir travailler en ZUS, ils sortent de l’IUT, ils ne veulent pas venir travailler là, et les rares qui veulent bien, on les épuise ! Il faut vraiment être militant, c’est de l’ordre du militantisme… Et quant au public, aux jeunes, on leur dit quoi ?? “Ah c’est pas bien d’avoir brûlé” mais au fond je suis d’accord avec eux, même si je ne leur dis pas. »

« Nous on est au milieu, on sait qu’on est là pour maintenir la paix sociale, mais je pense et j’espère qu’on est aussi là pour autre chose, on est là pour plus, on est aussi là pour les gens. C’est à ceux des quartiers qu’on demande le plus, toujours ! On leur demande l’au- tofinancement “il faut aller travailler !!” Elle est où l’égalité là ??!! Et je ne suis pas pour la

Les jeunes ne représentent qu’un quart