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CHAPITRE 5 MESURES EXPÉRIMENTALES

5.4 Conception et dimensionnement du prototype de rSFCL

5.4.1 Structure du rSFCL

La construction d’un prototype de rSFCL doit répondre à certaines exigences. En effet, la conception mécanique du limiteur doit :

— Permettre la circulation d’azote liquide pour améliorer l’efficacité du refroidissement et réduire le temps de récupération de l’état supraconducteur après une phase de limi-tation, tout en offrant un support mécanique pour le bobinage du fil supraconducteur. — Limiter les faibles rayons de courbure pour ne pas dégrader localement le courant

critique du ruban supraconducteur.

— Limiter l’inductance du montage, et par la même occasion le champ magnétique ap-pliqué sur le supraconducteur, en ayant recours à un montage dit “anti-inductif”. — Protéger le conducteur et assurer une certaine mobilité pour les phases de contraction

et de dilatation thermique, même si cela ne représente pas une contrainte majeure du fait qu’ici le rSFCL n’est fabriqué qu’à partir d’une petite longueur de fil (tout au plus quelques mètres de ruban). Dans le cas présent, le ruban supraconducteur est entouré d’une enveloppe souple dans laquelle il peut glisser.

— Assurer l’isolation électrique entre les deux rubans du montage anti-inductif grâce à une fine couche diélectrique.

— Offrir la possibilité de mesurer le potentiel électrique en plusieurs points répartis le long du ruban.

Diverses solutions et structures ont déjà été proposées dans la littérature. La première réali-sation, qui se base sur un prototype de rSFCL proposé dans la thèse de C. Gandioli [8], est illustrée à la figure 5.6. La conception du prototype s’articule alors autour d’une succession de tiges cylindriques en fibre de verre, formant un support en forme de spirale pour les fils supraconducteurs. Le montage anti-inductif est assuré par une “enveloppe” de papier Kraft qui contient les fils supraconducteurs “aller” et “retour” séparés par une mince couche de papier isolant. La boucle du montage anti-inductif est assurée par l’ensemble des plots en forme de cercle au centre du montage.

Cette première solution n’a pas été conservée du fait de contraintes importantes lors de sa construction. En effet, cet assemblage nécessitait de manipuler le ruban supraconducteur un grand nombre de fois, et le risque de l’endommager ou de le fragiliser à chaque mani-pulation était trop important. De plus, ce prototype ne présentait pas d’évolution possible et n’était valable que pour des longueurs fixes d’approximativement 5 ou 10 mètres (avec la présence d’un deuxième étage). Aussi, avec une telle structure, le volume du limiteur était

Figure 5.7 Structure du second prototype de rSFCL construit au laboratoire. Les détails de sa construction sont données dans le texte.

trop grand par rapport à la longueur de fil utilisée. Cela n’en facilite pas l’utilisation avec la nécessité de recourir à un gros cryostat. Enfin, il y a aussi le coût, qui est important avec l’utilisation de matériau tel que la fibre de verre, qui nécessite des outils de coupe spécifiques et également coûteux.

La seconde solution, celle qui a été retenue, se base sur les rSFCL conçus dans le cadre des projets ECCOFLOW et ENSYSTROB [104, 105, 115, 116]. En ce qui concerne la concep-tion de notre prototype, bien que le G10 ou le G11, qui sont des matériaux à base de fibres

de verre dans une matrice d’epoxy, soient une des meilleures solutions pour la fabrication de dispositifs à usage cryogénique de qualité “professionnelle”, le coût et la difficulté d’usiner ces matériaux très durs et particulièrement abrasifs a orienté la construction du rSFCL vers un support en bois dur. Ce dernier, tel que l’on peut le voir sur la figure 5.7, est fabriqué en acajou, un bois très stable avec peu de gauchissement avec la température et une bonne résistance à l’humidité. Le support est parsemé d’ouvertures qui permettent à l’azote liquide de circuler librement et autorise une plus grande souplesse pour la longueur du prototype que la version précédente, avec des longueurs variant de 1 à 25 m.

En ce qui concerne la structure anti-inductive, elle est construite de la façon suivante (cf. figure 5.8) :

— Les deux rubans supraconducteurs sont séparés par une fine couche de papier Kraft de manière à les isoler électriquement.

— Deux autres bandes de papier Kraft viennent couvrir les deux rubans de façon à ce qu’ils soient indépendants et puissent glisser à l’intérieur de l’enveloppe.

— Enfin, deux rubans de KaptonR viennent fermer et sceller le tout avant que l’ensemble

Kapton Ruban supra "aller"

Ruban supra "retour" Papier Kraft

(a)

(b)

Figure 5.8 Vue détaillée de la structure anti-inductive : (a) Schéma de principe ; (b) Résultat après fabrication. On distingue également la présence d’un fil de prise de potentiel.

ne soit enroulé sur son support de bobinage.

Le montage anti-inductif est assuré par deux pièces de bois en érable qui sont usinées de manière à former une géométrie proche du symbole du Yin et du Yang (cf. parties claires, au centre de lq figure 5.9). De cette manière, on peut obtenir une rainure en forme de S, ce qui permet au ruban supraconducteur de réaliser une petite boucle. Cette géométrie particulière permet donc d’assurer la base du montage anti-inductif et le support de bobinage circulaire du rSFCL (voir figure 5.9). Cela permet également de ne pas ajouter de résistance au milieu du limiteur, ce qui aurait par exemple été le cas avec un rebouclage via une pièce en cuivre ou en aluminium.

Chaque tour est ensuite séparé à l’aide d’un papier Kraft qui a été préalablement on-dulé à l’aide d’un dispositif artisanal conçu au laboratoire. La photographie 5.10 montre un agrandissement de la structure de bobinage du limiteur. On peut également y distinguer un petit fil qui sert de prise de potentiel. Le dispositif d’assemblage conçu au laboratoire permet

Figure 5.9 Illustration du chemin emprunter par le ruban supraconducteur pour réaliser la boucle nécessaire au montage anti-inductif pour le second prototype de rSFCL construit au laboratoire.

Figure 5.10 Agrandissement sur la structure du limiteur avec le papier Kraft ondulé qui permet à l’azote liquide de circuler entre les différents tours. On peut également distinguer une des prises de potentiel.

d’automatiser une partie de ces tâches, ce qui facilite l’assemblage et l’alignement des rubans supraconducteurs juste avant de passer à la phase de bobinage du rSFCL (cf. figure 5.12).

Les prises de potentiel ont été ajoutées en évitant les soudures sur le ruban supracon-ducteur, qui sont délicates à réaliser, et qui peuvent être source de problème si le ruban est surchauffé. La solution adoptée consiste alors à “coller” un fil de très faible section sur le ruban supraconducteur à l’aide d’une peinture contenant de fines particules d’argent (voir figure 5.11).

Malgré l’importance et le soin apporté à leur réalisation, certaines prises de potentiel n’ont pas toujours fonctionné correctement après refroidissement dans l’azote liquide, même si cela semblait être correct à température ambiante. Cela reste donc un point à améliorer lors de la réalisation des futurs prototypes.

(a) (b)

Figure 5.11 Photographies illustrant la mise en place des prises de mesure du potentiel élec-trique à l’aide d’un fin fil de cuivre et de peinture d’argent.

de l’enveloppe en appliquant une pression suffisante sur l’ensemble des couches à l’aide de roues en caoutchouc (cf. figure 5.12). En effet, l’emprisonnement de bulles d’air nuit à l’éva-cuation locale de la chaleur, et cela favorise la formation de condensation dont l’élimination (séchage ou écoulement) est compliquée. De plus, la présence de poches de gaz peut contri-buer à la formation de points chauds et à la formation locale de glace suite aux enchainements de mesures et de plusieurs phases de réchauffement et de refroidissement.

Enfin, on termine avec les amenées de courant, qui assurent la jonction entre le réseau et les bornes du rSFCL. Elles doivent permettre de réaliser une connexion avec le ruban supraconducteur, quel que soit l’endroit où les extrémités de celui-ci arrivent. En effet, il est difficile de prédire où devront se situer les amenées de courant par rapport au dernier tour de la “bobine” en forme de pancake. Pour pallier à toutes les éventualités, des pièces ont été conçues et imprimées en 3D. Ces dernières supportent les amenées de courant et permettent un déplacement tout autour du support de bobinage du rSFCL, comme on peut le voir sur la figure 5.7.

Les amenées de courant ont été conçues de manière à ce que le ruban supraconducteur soit pris entre deux plaques dont la surface a été préalablement recouverte d’une fine couche d’indium, un matériau reconnu pour sa grande ductilité. Cela permet alors d’améliorer la qualité de la surface de contact entre l’amenée de courant et la couche stabilisatrice en ar-gent du ruban supraconducteur. Notons que l’indium est aussi supraconducteur en-dessous

(a) (b)

(c)

Figure 5.12 (a,b) Vues détaillées de l’assemblage de la structure anti-inductive. (c) Bobinage du limiteur en forme de “pancake” en intégrant les prises de mesure de potentiel.

(a) (b) (c)

Figure 5.13 Vues détaillées de la conception des amenées de courant.

de 3.4 K, mais ce n’est pas cette propriété qui nous intéresse ici. La forme des amenées de courant permet aussi de réduire les contraintes mécaniques sur le ruban. Ainsi, un congé avec un rayon élevé a été réalisé pour que le ruban se déroule “en douceur” (cf. figure 5.13).

Les amenées de courant ont été réalisées en laiton du fait de la disponibilité de ce matériau au laboratoire et de sa facilité d’usinage. D’un point de vue pratique, il n’y a pas grand intérêt à utiliser du laiton par rapport au cuivre. En effet, malgré une conductivité thermique 20 fois plus faible que le cuivre à 77 K, et donc une potentielle réduction de la charge thermique et une diminution des apports de chaleur du milieu extérieur, la résistivité électrique plus faible du cuivre (à nouveau un facteur 20 par rapport au laiton), fait que les amenées de courant en cuivre seraient à privilégier pour un futur prototype. Notons que, dans le cadre de cette thèse, aucune optimisation n’a été effectuée pour le dimensionnement des amenées de courant.

5.5 Introduction à la méthode de simulation de type Power