3.2 – La structure de gouvernance de la CG
2- La structure de la chaîne : en changeant leurs structures d’approvisionnement basées sur des relations de marché pour des chaînes plus hiérarchisées, les supermarchés ont
bousculé toute la structure de la CGV non seulement en ce qui concerne le type et le nombre de firmes impliquées, mais aussi la distribution des fonctions entre ces firmes; 3- Les systèmes de surveillance et de contrôle : en établissant des systèmes de qualité et
des procédures de contrôle des performances pour leurs fournisseurs, les supermarchés ont également influencé les décisions concernant l’exclusion et l’inclusion de producteurs et/ou exportateurs tout au long de la chaîne.
Kaplinsky (2000) présente un cadre d’analyse de la gouvernance dans les CGV qui est résumé dans le tableau 34. Ce cadre est basé sur le concept de complémentarité des éléments de la gouvernance, avec des composantes internes et externes à la chaîne.
Tableau 34 – Catégorisation des modes de gouvernance dans les CGV Exercée par les parties internes de la
chaîne
Exercée par les parties externes de la chaîne
Gouvernance Législative
Cadre de standards imposés aux fournisseurs concernant le délai et la fréquence et la qualité des livraisons
Standards sociaux et environnementaux
Gouvernance Judiciaire
Contrôle de la performance des
fournisseurs par rapport aux standards de qualité
- Contrôle des standards sociaux et environnementaux par des ONGs
- Contrôle des standards ISO par des firmes spécialisées
Gouvernance Exécutive
- Appui offert par les contrôleurs de la chaîne d’approvisionnement afin d’aider les fournisseurs à atteindre les standards - Organisations de producteurs aidant leurs
membres à atteindre ces standards
- Prestataires de services spécialisés - Politique gouvernementale d’appui
industriel
Source : Kaplinsky (2000).
La théorie de Gereffi portant sur la gouvernance, se rapproche de celle sur les coûts de transaction de la théorie économique industrielle (Douma et Schreuder, 1992 par exemple). En fait, les concepts de gouvernance de la CGV ont leurs origines dans les théories de l’économie institutionnelle, notamment les travaux fondateurs de Coase (1937) et surtout de Williamson (1975, 1979, 1987). L’économie institutionnelle est basée sur une notion centrale qui affirme que toutes les transactions présentent un coût pour les agents (personnes, firmes et organisations) : les coûts de transaction. Ceux-ci sont des coûts de contact, de contrat ou de contrôle comme les coûts associés à la recherche d’un marché ou d’un partenaire commercial; à une négociation ou à l’application d’un contrat par exemple. Les coûts de transaction
dépendent des caractéristiques spécifiques de chaque type de transaction. Certains facteurs affectant ces coûts étant la spécificité des actifs, l'incertitude, la fréquence et les problèmes de mesure (Bijman, 2006).
3.2.2 – Les différents modes de gouvernance
Entre les modes de gouvernance de type marché et de type hiérarchique, il existe des structures de gouvernance « hybrides » définies par Ménard (2004 p.19) comme « …des
arrangements institutionnels reposant sur des accords de long terme (ou de court terme automatiquement renouvelables), entre partenaires qui maintiennent leur autonomie de décision et des droits de propriété distincts, tout en acceptant une coordination partielle sur un segment de leur activité et/ou de leur domaine de décision ».
À partir des concepts de contrôle et de barrières à l’entrée, Gereffi et al (1994) a établi une différenciation basique dans la structure de gouvernance : les chaînes pilotées par les producteurs (Producer driven value chains) et les chaînes pilotées par les acheteurs (Buyer
driven value chains) :
Les chaînes pilotées par les producteurs (Producer driven value chains): où ces derniers possèdent des compétences technologiques ou des avantages naturels qui coordonnent et structurent la chaîne globale. Cette structure est typique des industries à haut niveau de capital et de technologie, telles que l’automobile, l’aviation, l’informatique et les équipements industriels. Selon Gibbon (2001), le pouvoir du producteur réside dans la combinaison de facteurs, notamment la production à large échelle et l'innovation technologique et organisationnelle (par exemple, l'adoption du Just In Time (JIT), Total
Quality Control, etc.)
Les chaînes pilotées par les acheteurs (Buyer driven value chains) : qui comprennent les grandes firmes contrôlant la distribution (aux niveaux commerce de gros et de détail), le design et le marketing. Ce modèle est caractéristique des industries de biens de consommation (à intense utilisation de main-d`oeuvre), comme l’habillement, la chaussure, l’eletroménager ou les produits agricoles et alimentaires. Gibbon (2001), Ramaswamy et Gereffi (1998) affirment que dans ces chaînes, les barrières à l'entrée sont représentées par les coûts d'investissement propres à l'information sur le marché, la
conception des produits, la publicité et la technologie d’information utilisées dans la gestion de la supply chain.
Raikes et al (2000) soulignent que les chaînes Buyer driven différent des chaînes Producer
driven, du fait des plus faibles barrières à l’entrée dans la production. Néanmoins, les
producteurs sont subordonnés aux firmes leader qui contrôlent les activités d’aval comme la conception, la distribution ou le marketing des produits et où les barrières à l`entrée sont élevées et les profits concentrés. Ce cadre de figure est représentatif de la CGV fleurs coupées qui est contrôlée par les importateurs en maîtrisant des activités stratégiques comme la création variétale ou la distribution.
Tableau 35 – Principales caractéristiques des CGV contrôlées par les producteurs et par les acheteurs Chaînes contrôlées par les
producteurs
Chaînes contrôlées par les acheteurs
Contrôleurs de la chaîne Capital industriel Capital commercial Compétences-clé Recherche&Développement ;
Production Design ; Marketing
Barrières à l’entrée Economies d’échelle Economies d’envergure Secteurs économiques Biens durables ; Biens
intermédiaires Biens non durables Industries typiques Automobile ; Informatique ;
Aviation
Habillement ; Chaussure ; Fleurs et végétaux
Propriété des firmes
productrices Firmes multinationales
Firmes locales ; majoritairement dans les pays en développement Source : Adaptée de Gereffi (1999)
Cette argumentation est à la base du développement d’une typologie des formes de gouvernance par Gereffi et al (2005), avec explication de leurs déterminants. Au-delà de la complexité de l'information et du niveau de compétence des fournisseurs, le potentiel de codification de l’information est présenté comme une troisième variable. Ainsi, en plus des modes de gouvernance de type « marché » et « hiérarchique » qui représentent respectivement le plus bas et le plus haut degré de coordination, Gereffi et al. (op. cit.) ajoutent trois autres modes de gouvernance, appelés modulaire, relationnel et captif :
1. Gouvernance par le marché : contrairement au marché spot, on y trouve une continuité