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2.3 Les statuts de documents archivés et d’archives historiques

2.3.4 Le statut de document archivé

La notion de statut de documents archivés peut être définie par ce qui est décrit en filigrane dans plusieurs textes de référence :

 la norme ISO 15489, qui s’applique aussi bien aux documents papier, microforme ou électronique, composée de deux parties : ISO 15489-1 porte sur les « Principes directeurs », elle précise les composantes du records management et les résultats à atteindre ; ISO 15489-2 est un « Guide pratique » fournissant une méthodologie pour la mise en œuvre de la norme, élaboré par un comité technique [2 et 3, Afnor] ;

 le modèle de référence MoReq (Model Requirements for the Management of Electronic Records), publié par la Commission européenne en 200224, qui décrit les spécifications d’un système d’archivage électronique ; on peut lire en complément le document Apprivoiser MoReq, paru en octobre 2007, guide pratique pour mettre en œuvre un projet d’archivage électronique dans les organisations françaises [6, IDA ; 5, IALTA] ;

 la méthode Dirks, méthode australienne de mise en œuvre d’un projet de records management pour gérer la conservation des documents de façon conforme à la norme australienne AS 4390-1996 et à la norme ISO 15489 (la première ayant servi de point de départ à la seconde) [7, NAA].

Ces textes de référence visent à aider les organismes, publics ou privés, à créer, archiver et organiser leurs documents de manière pertinente, en apportant procédures et recommandations à tous les niveaux de mise en œuvre du système d’archivage. Outre les explications relatives à la méthodologie pour mettre en place un projet d’archivage, sur lesquelles nous ne nous arrêterons pas, ces textes donnent des indications qui nous intéressent au premier plan sur deux choses qu’il importe de distinguer :

Le rôle du statut du document dans la gestion de l’information – Katell Gueguen – INTD 2008 40 - ce que sont les documents archivés d’une part, au sens où ils se différencient des

simples documents et des archives historiques

- ce qu’ils doivent être formellement d’autre part, afin d’apporter la garantie d’être ce qu’ils prétendent être.

Le premier aspect considère les documents dans leur dimension de preuve ou d’utilité dans le cadre de la conduite des activités de l’organisme émetteur, soit s’intéresse à ce que sont les documents intrinsèquement indépendamment de tout système, au sens où nous le définissions dans le point précédant : c’est bien à proprement parler cet aspect qui correspond à ce qu’on appelle le statut de document archivé ; le second aspect s’attache lui aux caractéristiques formelles des documents que doivent précisément garantir le système d’archivage dans lequel ils sont gérés. Selon la norme ISO 15489-1, ces caractéristiques des documents archivés, définis par ailleurs comme « documents créés, reçus et préservés à titre de preuve et d’information par une personne physique ou morale dans l’exercice de ses obligations légales ou la conduite de ses activités », sont l’authenticité, la fiabilité, l’intégrité et l’exploitabilité [2, Afnor] : ces caractéristiques ne concernent pas directement le statut, même si elles sont nécessaires à la sélection des documents qui deviendront des documents archivés, nous aborderons donc cet aspect dans notre seconde partie.

Voyons ci-dessous ce qui touche au statut de document archivé, autrement dit à son périmètre par rapport à d’autres ressources.

Le point 9.1 de la norme ISO 15489, intitulé « Sélection des documents à intégrer dans un système d’archivage », apporte les précisions suivantes : cette sélection « repose sur une analyse des exigences issues de l’environnement réglementaire, des obligations de rendre compte, des nécessités de la gestion et du risque que représente la non-disponibilité des documents. Les exigences sont susceptibles de varier selon le type d’organisme et suivant le contexte législatif ou social dans lequel il fonctionne. » La question est bien de mesurer l’incidence des documents en termes d’évaluation du risque pour l’entreprise, chacune d’elle devant analyser les exigences qui lui sont propres, objectivement mentionnées dans la loi ou induite par le contexte.

Le texte de la norme poursuit : « Les documents sont produits ou reçus sur des supports variés utilisant des technologies en permanente évolution. La première caractéristique de ces documents est leur nature dynamique. Ils peuvent être produits par des producteurs multiples, exister en plusieurs versions ou exister à des stades d’exécution successifs ». Les deux derniers points correspondent à l’appréhension du statut du document en terme

24 Texte traduit en français par Marie-Anne Chabin en 2004 sous le titre Modèle d’exigences pour l’organisation de l’archivage électronique. Une révision de MoReq (MoReq2) est prévue pour 2008.

d’« état du développement dans une séquence logique », que nous reprendrons lors de l’analyse du statut sous l’axe de la valeur.

Deux passages de Apprivoiser MoReq s’attardent plus particulièrement sur le périmètre documentaire pour l’archivage, afin de cerner plus précisément les caractéristiques de ces documents « ayant valeur de preuve, de témoignage ou de traçabilité, ou valeur documentaire dans le temps » : le point 2.1.7, intitulé « Quel périmètre documentaire, ou quel champ d’application pour l’archivage ? », et le point 2.3, « Recensement de l’information à archiver/conserver », qui passe en revue en trois points les documents concernés par l’archivage à différents titres (avec un point sur les documents non concernés). En reprenant ces deux passages, on pourrait résumer les choses ainsi ; les documents à archiver sont :

 « les documents utilisés dans un contexte légal, réglementaire ou juridique à titre de preuve (ad probationem) ou pour validité d’un acte (ad validitem) » soit ceux « dont la non disponibilité présente un risque significatif pour l’entreprise » (par exemple les marchés publics, les dossiers médicaux ou dossier de patient, les factures) ;

 les documents dépourvus de valeur légale mais pouvant être utiles : comme trace d’une explication ou aide à la décision, comme moyen de défense en cas de contentieux (une commande par mail), comme preuve de savoir et de savoir faire (par exemple pour prouver l’antériorité d’un brevet), ou pour la reprise de l’activité après un sinistre (un fichier client sous forme de base de données) (ces documents présentent eux aussi des risques potentiels à évaluer pour l’entreprise) ;

 les documents dépourvus de valeur juridique mais ayant un intérêt de traçabilité ou de mémoire, tels que des documents à contenu réexploitable (des résultats de recherche ou des négociations commerciales non aboutis) ou bien des éléments de construction et de maintenance d’une mémoire historique.

Les documents ou données non concernés par l’archivage sont ceux « non fixés (non figés), non validés et donc dépourvus de valeur de preuve » (documents préparatoires non traçables ou copies de travail, coupures de presse recueillies pour information), et tous les documents jugés par l’organisme « non essentiels à sa protection ou la conduite de ses activités ».

Une fois les documents identifiés, il faudra définir pour chacun des durées de conservation, en fonction « des exigences de l’environnement réglementaire, des obligations de rendre des comptes, des nécessités de la gestion et des risques encourus » (ISO 15489, point 9.2). A noter qu’il importe autant de préserver les documents durant la durée définie, prescrite par la loi ou décidée par l’entreprise, que de détruire les documents qui n’ont plus d’utilité ou qui

Le rôle du statut du document dans la gestion de l’information – Katell Gueguen – INTD 2008 42 arrivent à échéance légale (afin entre autres de ne pas conserver des documents qui pourraient se retourner contre l’entreprise, parce que la non destruction de certains documents, tels ceux touchant aux données personnelles, est passible de sanctions (sous l’autorité de la CNIL, Commission nationale informatique et liberté)).

Ces durées et les types de documents sont consignés dans un outil primordial du record manager : le référentiel de conservation, que nous présenterons dans notre seconde partie.