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4.2.1 Les grands types de systèmes d’information

Voici tracés à grands traits les grands types de système d’information :

 les systèmes de gestion de contenu, qui n’ont pas de procédures d’archivage au sens strict : GED (Gestion électronique de documents), applications bureautiques (dont systèmes existant avant l’arrivée de l’informatique), logiciels de travail collaboratif (tels que workflow ou groupware) ;

 les systèmes d’archivage qui mettent en œuvre les procédures du records management : SAE (Systèmes d’archivage électronique), qui peuvent gérer aussi bien les documents électroniques que des documents physiques, et autres systèmes de gestion des documents papiers garantissant l’authenticité des documents ;

 les systèmes de gestion des archives historiques.

Quelle est la spécificité des systèmes d’archivage par rapport aux deux autres situés en amont et en aval ? Ces systèmes engagent le plus fortement la responsabilité et l’existence même d’une organisation (même si les deux autres ne sont pas exempts de risque pour l’entreprise et si les systèmes de gestion de contenu sont porteurs de son bon fonctionnement) ; ils ont pour fin de garantir la conservation de documents probants, au sens large de laisser une trace fiable d’une activité, d’un fait ou action, ou des responsabilités des différents acteurs.

Pour être reçu à titre de preuve, le document archivé doit être validé et figé, sa capture dans un système d’archivage devant garantir son caractère non modifiable et la possibilité de tracer tout mouvement au cours de son cycle de vie – fixation qui le distingue essentiellement du document de production, géré par des systèmes de GED ou de workflow par exemple.

Ce document figé doit être accompagné de son contexte de production qui lui donne sens (ses métadonnées), et il n’y a de restriction ni sur sa forme et son niveau de granularité (message électronique, SMS, base de données, etc.), ni sur le support (papier, vidéo microfilm, etc.) [5, IALTA (2.1.8)].

Nous avons évoqué dans notre première partie le fait que le système de gestion des archives historiques prend en charge des documents qui a priori ne présentent plus de valeur de preuve ou d’utilité pour la conduite des activités pour l’entreprise. L’enjeu est donc surtout de comprendre les distinctions essentielles entre les deux autres systèmes, par exemple à travers la comparaison d’un système de GED et d’un SAE. Reprenons le tableau proposé par

Le rôle du statut du document dans la gestion de l’information – Katell Gueguen – INTD 2008 68 MoReq [6, IDA (10.3)], qui explicite par ailleurs longuement la spécificité du second par rapport au premier.

Tableau 4 – Système de GED versus SAE (MoReq)

Un système de GED… Un SAE…

• permet la modification des documents et

la production de plusieurs versions ; • interdit la modification des documents ;

• peut permettre la destruction des

documents par leurs auteurs ; • interdit la destruction de documents en dehors d’un contrôle strict ;

• peut comporter la gestion de durées de

conservation ; • comprend obligatoirement un contrôle

rigoureux des durées de conservation ;

• peut comprendre une structure

• peut faciliter les tâches quotidiennes mais est aussi destiné à la constitution d’un fonds sécurisé des documents probants de

l’entreprise.

MoReq précise que les systèmes de GED et de SAE peuvent se chevaucher, certains SAE fournissant des solutions de GED, et certains systèmes de GED ayant incorporé des fonctions de records management. [6, IDA]

Ce qui est distingué comme deux systèmes peut donc être conçu à partir d’un même outil.

Au-delà de l’outil, ce sont toujours les procédures qui seront le point névralgique garant du bon fonctionnement de ces systèmes.

4.2.2 Caractéristiques des documents archivés

Comme nous l’avons évoqué dans notre première partie, la norme ISO 15489 définit quatre caractéristiques essentielles du document archivé : l’authenticité, la fiabilité, l’intégrité et l’exploitabilité. [2, Afnor (point 7.2)]

L’authenticité : « Un document authentique est un document dont on peut prouver a) qu’il est bien ce qu’il prétend être, b) qu’il a été effectivement produit ou reçu par la personne qui prétend l’avoir produit ou reçu, et c) qu’il a été produit ou reçu au moment où il prétend l’avoir été. » Il s’agit, par des procédures de contrôle, de protéger les documents contre les ajouts, les suppressions, les altérations, une exploitation ou une dissimulation abusifs.

La fiabilité : « Un document fiable est un document dont le contenu peut être considéré comme la représentation complète et exacte des opérations, des activités ou des faits qu’il

atteste, et sur lesquels on peut s’appuyer lors d’opérations, d’activités ou de faits ultérieurs. »

L’intégrité : « L’intégrité d’un document renvoie au caractère complet et non altéré de son état », du point de vue de l’information comme du support, les procédures devant préciser quels ajouts ou annotations peuvent être portés sur le document après son enregistrement dans le système.

L’exploitabilité : « Un document utilisable est un document qui peut être localisé, récupéré, communiqué et interprété. » Le document doit être relié à l’activité et contextualisé de manière à le rendre intelligible.

Le système d’archivage devra garantir l’ensemble de ces qualités. En plus des contraintes techniques, qui doivent assurer la conservation des données sur le long terme, la sécurisation du système est donc un point essentiel afin de garantir la pérennité des documents archivés – la pérennité étant l’« aptitude que doit avoir l’information à traverser le temps durant son cycle de vie en préservant son intégrité ». [4, Afnor]

Pour que les documents archivés répondent à ces caractéristiques, le système d’archivage gérant ces documents devra lui répondre aux caractéristiques décrites par la norme ISO 15489 point 8.2, à savoir celles de fiabilité, intégrité, conformité (avec les diverses exigences), étendue (prise en compte de l’ensemble des documents de l’organisme ou au moins de l’entité) et caractère systématique (de la production, conservation et gestion des documents, grâce à des méthodes et responsabilités formalisées). [2, Afnor]

4.2.3 Mettre en place des stratégies de documents pérennes

La hiérarchisation de l’importance des statuts liés à la valeur en termes de responsabilité, importance relative à la raison de l’archivage comme nous l’avons vu, va permettre aux responsables de l’archivage de mettre en place des stratégies de conservation différentes en fonction des types de documents rapportés aux risques encourus par l’entreprise, à ses besoins, et aux coûts engendrés par les différents modes de stockage.

L’expression de stratégies de documents pérennes est directement empruntée aux Archives nationales du Royaume Uni, dans un document essentiel intitulé Conditions génériques de pérennisation de l’information électronique [22, Archives nationales du Royaume Uni], sur lequel nous nous appuierons dans nos analyses. Ce document, rédigé en direction des services publics mais qui mérite un auditoire bien plus large, propose dans le volume 4 des conseils pour classer les documents selon des catégories, afin de garantir l’authenticité des documents (telle que définie dans la norme ISO 15489) en fonction de la nature de ces

Le rôle du statut du document dans la gestion de l’information – Katell Gueguen – INTD 2008 70 derniers, et ce tout au long de la période de conservation. A quoi correspondent ces catégories selon l’acception retenue ici ?

Une lecture intéressante des caractéristiques des documents archivés est donnée au préalable : « La fiabilité, l’intégrité et l’exploitabilité constituent ensemble un document authentique et tout document non authentique est considéré comme compromis et non adapté à son usage. » Le texte poursuit :

« La définition de ce qui constitue un document authentique ne sera pas la même pour toutes les catégories de documents, chaque catégorie ayant un besoin différent et une interprétation différente de la fiabilité, de l’intégrité et de l’exploitabilité. Les différences de niveau d’authenticité entre les catégories de documents peuvent servir à orienter l’élaboration de stratégies de documents pérennes adaptées à chaque catégorie de documents.» [22, Archives nationales du Royaume Uni]

Une catégorie regroupe donc un ensemble de documents répondant aux mêmes exigences d’authenticité, c’est-à-dire aux mêmes conditions pérennes.

Le document pérenne est dans cet ouvrage défini (dans un cadre électronique que nous pourrions transposer aux documents papier) comme « l’objet électronique et les métadonnées concomitantes qui le définissent en tant que document, que l’organisation productrice ou propriétaire doit conserver jusqu’à la destruction du document ou, lorsque le cas le justifie, son transfert vers des archives spécialisées à des fins d’archivage permanent.

La pérennisation des documents exige l’assurance que les documents conservés regroupent des qualités d’authenticité, de fiabilité, d’intégrité et d’exploitabilité. » [22, Archives nationales du Royaume Uni]

Il est encore précisé : « La rigueur avec laquelle les conditions pérennes devront s’appliquer ne sera pas la même pour tous les documents, puisque la durée et le type d’usage professionnel et opérationnel ne seront pas les mêmes » (point 3.1.2). L’idée est qu’on doit arriver à un « mode de classement par catégories de haut niveau de manière à ce que leurs caractéristiques reflètent des conditions pérennes semblables » (point 3.1.3) (une approche par type de document serait inutile car onéreuse et problématique, il s’agit bien de définir des catégories de conditions pérennes suffisamment générales).

Il est bien évident que les statuts des documents ne peuvent suffire à définir les catégories en question et donc les stratégies de documents pérennes. Le document des Archives nationales du Royaume Uni explore de manière systématique toute une série de questions à se poser relativement aux caractéristiques des documents archivés que sont la fiabilité, l’intégrité et l’exploitabilité afin de mettre en place ces stratégies ; notre idée est simplement

que les statuts de documents pourraient apporter leur contribution en permettant de faire une sorte de « pré-catégorisation » dans la mise en place de ces stratégies. C’est ce que nous essayons d’illustrer dans notre chapitre 7.

4.2.4 Le référentiel de conservation

Le référentiel de conservation est un document de référence destiné aux responsables de l’archivage afin de piloter ce dernier, qui doit leur permettre de savoir ce qu’il faut conserver, la durée de conservation réglementaire ou d’utilité des documents et leur sort final (ce qui est périmé devant être détruit).

Le référentiel de conservation se distingue sur plusieurs plans du tableau de gestion utilisé traditionnellement par les archivistes, notamment parce qu’il classe les documents par activités et sous-activités de l’entreprise et non par services (un organigramme se périme nécessairement, pas les activités). Marie-Anne Chabin en donne la définition suivante :

« outil méthodologique qui organise et codifie l’ensemble de l’information archivable de l’entreprise en fonction de la valeur des documents et de leurs durées réglementaires ou internes de conservation. Ce classement peut être complété par des règles ou modalités de mise en œuvre (accès, support, responsabilités). » [11, Chabin] Le Référentiel organise les documents et les données à archiver dans l’entreprise, en fonction des risques de non disponibilité et des besoins d’accès à l’information, « en attribuant à chaque ensemble de documents identifié comme une catégorie documentaire homogène une durée de conservation motivée (basée sur les textes réglementaires et le risque d’indisponibilité de l’information) (…) avec l’indication du sort final (destruction ou transfert aux archives historiques). » [11, Chabin]

Les durées de conservation sont donc plus ou moins objectivement définies : elles le sont lorsque la loi soit impose clairement, soit émet des prescriptions de durées de conservation.

Mais pour de nombreux documents, la durée est fixée en fonction de décisions des organismes, qui parfois doivent interpréter ou adapter ce que dit la loi, et qui doivent fixer les durées d’utilité prévisibles de l’information pour des actions à plus ou moins long terme.

Nous décrivons plus loin, en présentant les systèmes d’information de PSA Peugeot Citroën, la façon dont ce référentiel peut être élaboré.

Le rôle du statut du document dans la gestion de l’information – Katell Gueguen – INTD 2008 72

4.3 A quoi servent les statuts ?